Cerridween
[A la Rochelle... quand le temps change]
Les pas des bottes cloutées résonnent sur les pavés. L'air est froid et s'échappe en volute de fumée qui vont et viennent comme les vagues qui s'écrasent sur le lointain de la capuche noire. La silhouette avance d'un pas franc. Sans visage. Juste une ombre sombre dans la nuit qui s'installe sous les nuages qui pèsent sur le ciel.
Il l'avait regardé avec un sourcil qui était allé flirter avec le plafond, le tavernier. Il lui rappelait le vieux François qui tenait celle de Ryes, avec sa carrure d'armoire et son air taciturne. Il l'a dévisagée la silhouette qui semble pouvoir être emportée par tous les souffles d'un bon vent de mer avant de grommeler.
J'suis pas sur de savoir d'quoi vous parlez...
Il a la discrétion des loups de mer, de ceux qui jouent entre le naufrage et les bastingages. La Pivoine se penche en avant et pousse d'un index une pièce assez grosse pour attirer son attention. Il a regarde maintenant dans les yeux. A-t-il été impressionné par la détermination des deux émeraudes taillées à vif ? A-t-il senti la force qui s'est échappée du regard qui a soutenu les deux yeux gris et profonds qui lui faisaient face ? S'est -t-il simplement dit que ce ramassis de nouveaux et de mercenaires valait largement le bout de métal qui luisait sur le comptoir à la chandelle ? Il s'est emparé d'un torchon et a commencé à faire reluire le bois qui a bu et s'est noyé depuis des ans, peut-être des siècles de tous les alcools possibles. Puis il a reprit de sa voix grave et cassée à son attention.
Les auberges qui craignent ma p'tite dame ? J'vous recommande pas le quartier ouest... et surtout la taverne qui est près de la tour avec une cour devant... paraît qu'elle est pleine de cafards... après la seule valable c'est la mienne, tout l'monde vous le dira...
Elle a hoché la tête sans répondre et elle avait demandé une chambre. Elle avait posé ses affaires. Peu... pas grand chose. De grandes fontes avec des vivres, des vêtements de rechange et un nécessaire sommaire d'écriture et de soin. Perséphone est aux écuries. Fourbue du chemin parcouru... elle a en main la lettre. Celle qui a permit son départ de Limoges. Quand elle avait su ce qu'il avait fait, malgré la semonce, malgré la sentence, elle avait envoyé des lettres comme on lance des filets. Chercher. Penchée sur la carte, elle l'avait suivi. Dernière ville où Karyaan savait qu'il était passé.... Guéret... deux routes possibles... l'est vers l'Auvergne et la Bourgogne ou le Nord vers le Berry. Elle avait ensuite attendu les retours... la route de l'Auvergne avait été écartée... des semaines de silence avant qu'une nouvelle lettre lui parvienne. Un rouquin correspondant à la description parlait dans une taverne de Loches avec des membres de la Zoko... le lendemain matin, elle s'était évaporée de l'Hôtel de Lazare. Impossible de passer seule en Berry. Les rapports étaient formels. La racaille y avait fait son lit, courant les chemins et les infestant comme des milliers de fourmis. Non qu'elle ait peur, la maitre d'arme et Capitaine, non... mais elle voulait arriver entière et en pleine possession de ses moyens, pour lui trancher la gorge. Alors elle est parti vers l'ouest... traverser le Poitou... passer par l'Anjou en chevauchant jour et nuit pour ne pas se faire attraper par la patrouille ou la douane. Arriver à Loches. Le trouver s'il est encore là. Le traquer s'il était parti. La route avait été sans encombre jusqu'à Poitiers. La capitale avait été instructive... comme toujours... assise dans le fond d'une taverne devant un verre de vin chaud qui fleurait bon les épices et le lointain, elle avait entendu les discutions passionnées de certains habitants. Surtout le marchand ambulant à quelques tables de là. Des mercenaires arrivaient... Oui... et pas des tendres... Forcer le trait ? Non... puis même qu'ils avaient foutu le souk à Thouars déjà notamment l'un des leur. Un rouquin... foutrement désagréable le gars... et dire qu'ils vont à la Rochelle... bien content de pas aller dans leur coin. Quand la conversation avait changé, il n'y avait à la table de la Pivoine qu'un verre et une chaise vide. Une porte se refermait lentement.
Elle n'avait pas bougé de l'auberge. Les yeux vissés sur le lointain et attendant qu'il s'éteigne. Il n'y a qu'un blondin qui l'a sorti de sa rêverie et qui lui a arraché un demi sourire. Elle est remonté dans la petite chambre. Et quand la lumière du jour a fui elle est descendu...
Les pas des bottes cloutées résonnent sur les pavés. L'air est froid et s'échappe en volute de fumée qui vont et viennent comme les vagues qui s'écrasent sur le lointain de la capuche noire. La silhouette avance d'un pas franc. Sans visage. Juste une ombre sombre dans la nuit qui s'installe sous les nuages qui pèsent sur le ciel. Il se fend d'un coup pour libérer une pluie finie et éparse. Elle tourne à un coin de rue. Le vent qui s'engouffre entre les murs lève un pan de la lourde cape de laine pour dévoiler Miséricorde à sa gauche et un bout de dague à droite.
Encore quelques rues...
Encore quelques pas...
La cour est bien là, grouillante d'ombres vacillantes des torchères accrochées aux murs.
Arrivée au centre, la silhouette s'immobilise. La pluie quant à elle, vient de gagner en force. Le chuintement de deux lames vient se répercuter sur les murs. Les gouttes viennent jouer une mélodie discordante sur l'épée longue qui vient de retrouver l'air libre. La lame de la dague vient épouser la ligne de l'avant bras gauche, enserré dans un bracelet de cuir sombre. Les deux pieds viennent se camper dans la terre. Lentement l'air remplit ses poumons... et un cri en sort, étonnamment puissant pour la frêle silhouette qui se tient au milieu des éléments qui commencent à se déchainer.
JULES !
Elle attend un instant... le silence pour l'instant lui répond....
JULES !
Une lueur vient d'apparaître à une fenêtre. La fourmilière se réveille.
IMMONDE RACLURE ! SOUS HOMME !
La voix tonne alors que la pluie redouble et que le vent la découpe en rideaux qui volètent et s'évanouissent dans la nuit qui s'installe.
JULES !
Elle hurle maintenant. Toute sa colère, toute sa hargne. Les émeraudes sous la capuche se sont taillées à vif, les phalanges sur les gardes sont blanchies sous la pression. Le corps se tend, la voix appelle, implacable et sans relâche.
PUISQUE TA PAROLE EST DU VENT, VIENS AFFRONTER TA MORT !
Tu as trop joué le rouquin... tu as trop joué et tu n'as gagné qu'une Pivoine qui n'oublie rien et qui rendra tout... tu as semé la discorde, tu récolteras la vengeance de celle qui n'a rien, plus rien à perdre...
_________________
Les pas des bottes cloutées résonnent sur les pavés. L'air est froid et s'échappe en volute de fumée qui vont et viennent comme les vagues qui s'écrasent sur le lointain de la capuche noire. La silhouette avance d'un pas franc. Sans visage. Juste une ombre sombre dans la nuit qui s'installe sous les nuages qui pèsent sur le ciel.
Il l'avait regardé avec un sourcil qui était allé flirter avec le plafond, le tavernier. Il lui rappelait le vieux François qui tenait celle de Ryes, avec sa carrure d'armoire et son air taciturne. Il l'a dévisagée la silhouette qui semble pouvoir être emportée par tous les souffles d'un bon vent de mer avant de grommeler.
J'suis pas sur de savoir d'quoi vous parlez...
Il a la discrétion des loups de mer, de ceux qui jouent entre le naufrage et les bastingages. La Pivoine se penche en avant et pousse d'un index une pièce assez grosse pour attirer son attention. Il a regarde maintenant dans les yeux. A-t-il été impressionné par la détermination des deux émeraudes taillées à vif ? A-t-il senti la force qui s'est échappée du regard qui a soutenu les deux yeux gris et profonds qui lui faisaient face ? S'est -t-il simplement dit que ce ramassis de nouveaux et de mercenaires valait largement le bout de métal qui luisait sur le comptoir à la chandelle ? Il s'est emparé d'un torchon et a commencé à faire reluire le bois qui a bu et s'est noyé depuis des ans, peut-être des siècles de tous les alcools possibles. Puis il a reprit de sa voix grave et cassée à son attention.
Les auberges qui craignent ma p'tite dame ? J'vous recommande pas le quartier ouest... et surtout la taverne qui est près de la tour avec une cour devant... paraît qu'elle est pleine de cafards... après la seule valable c'est la mienne, tout l'monde vous le dira...
Elle a hoché la tête sans répondre et elle avait demandé une chambre. Elle avait posé ses affaires. Peu... pas grand chose. De grandes fontes avec des vivres, des vêtements de rechange et un nécessaire sommaire d'écriture et de soin. Perséphone est aux écuries. Fourbue du chemin parcouru... elle a en main la lettre. Celle qui a permit son départ de Limoges. Quand elle avait su ce qu'il avait fait, malgré la semonce, malgré la sentence, elle avait envoyé des lettres comme on lance des filets. Chercher. Penchée sur la carte, elle l'avait suivi. Dernière ville où Karyaan savait qu'il était passé.... Guéret... deux routes possibles... l'est vers l'Auvergne et la Bourgogne ou le Nord vers le Berry. Elle avait ensuite attendu les retours... la route de l'Auvergne avait été écartée... des semaines de silence avant qu'une nouvelle lettre lui parvienne. Un rouquin correspondant à la description parlait dans une taverne de Loches avec des membres de la Zoko... le lendemain matin, elle s'était évaporée de l'Hôtel de Lazare. Impossible de passer seule en Berry. Les rapports étaient formels. La racaille y avait fait son lit, courant les chemins et les infestant comme des milliers de fourmis. Non qu'elle ait peur, la maitre d'arme et Capitaine, non... mais elle voulait arriver entière et en pleine possession de ses moyens, pour lui trancher la gorge. Alors elle est parti vers l'ouest... traverser le Poitou... passer par l'Anjou en chevauchant jour et nuit pour ne pas se faire attraper par la patrouille ou la douane. Arriver à Loches. Le trouver s'il est encore là. Le traquer s'il était parti. La route avait été sans encombre jusqu'à Poitiers. La capitale avait été instructive... comme toujours... assise dans le fond d'une taverne devant un verre de vin chaud qui fleurait bon les épices et le lointain, elle avait entendu les discutions passionnées de certains habitants. Surtout le marchand ambulant à quelques tables de là. Des mercenaires arrivaient... Oui... et pas des tendres... Forcer le trait ? Non... puis même qu'ils avaient foutu le souk à Thouars déjà notamment l'un des leur. Un rouquin... foutrement désagréable le gars... et dire qu'ils vont à la Rochelle... bien content de pas aller dans leur coin. Quand la conversation avait changé, il n'y avait à la table de la Pivoine qu'un verre et une chaise vide. Une porte se refermait lentement.
Elle n'avait pas bougé de l'auberge. Les yeux vissés sur le lointain et attendant qu'il s'éteigne. Il n'y a qu'un blondin qui l'a sorti de sa rêverie et qui lui a arraché un demi sourire. Elle est remonté dans la petite chambre. Et quand la lumière du jour a fui elle est descendu...
Les pas des bottes cloutées résonnent sur les pavés. L'air est froid et s'échappe en volute de fumée qui vont et viennent comme les vagues qui s'écrasent sur le lointain de la capuche noire. La silhouette avance d'un pas franc. Sans visage. Juste une ombre sombre dans la nuit qui s'installe sous les nuages qui pèsent sur le ciel. Il se fend d'un coup pour libérer une pluie finie et éparse. Elle tourne à un coin de rue. Le vent qui s'engouffre entre les murs lève un pan de la lourde cape de laine pour dévoiler Miséricorde à sa gauche et un bout de dague à droite.
Encore quelques rues...
Encore quelques pas...
La cour est bien là, grouillante d'ombres vacillantes des torchères accrochées aux murs.
Arrivée au centre, la silhouette s'immobilise. La pluie quant à elle, vient de gagner en force. Le chuintement de deux lames vient se répercuter sur les murs. Les gouttes viennent jouer une mélodie discordante sur l'épée longue qui vient de retrouver l'air libre. La lame de la dague vient épouser la ligne de l'avant bras gauche, enserré dans un bracelet de cuir sombre. Les deux pieds viennent se camper dans la terre. Lentement l'air remplit ses poumons... et un cri en sort, étonnamment puissant pour la frêle silhouette qui se tient au milieu des éléments qui commencent à se déchainer.
JULES !
Elle attend un instant... le silence pour l'instant lui répond....
JULES !
Une lueur vient d'apparaître à une fenêtre. La fourmilière se réveille.
IMMONDE RACLURE ! SOUS HOMME !
La voix tonne alors que la pluie redouble et que le vent la découpe en rideaux qui volètent et s'évanouissent dans la nuit qui s'installe.
JULES !
Elle hurle maintenant. Toute sa colère, toute sa hargne. Les émeraudes sous la capuche se sont taillées à vif, les phalanges sur les gardes sont blanchies sous la pression. Le corps se tend, la voix appelle, implacable et sans relâche.
PUISQUE TA PAROLE EST DU VENT, VIENS AFFRONTER TA MORT !
Tu as trop joué le rouquin... tu as trop joué et tu n'as gagné qu'une Pivoine qui n'oublie rien et qui rendra tout... tu as semé la discorde, tu récolteras la vengeance de celle qui n'a rien, plus rien à perdre...
_________________