Lorca
En début de semaine, les ouvriers avaient enfin achevé le port de Bordeaux, qui était en chantier depuis des mois, après avoir mobilisé beaucoup d'argent, de temps, de matériaux et de bonne volonté. Les quais étaient achevés, les bittes d'amarrage attendaient les cordages, les cales de radoub prêtes à radouber, la capitainerie prêt à administrer, bref tout était fin prêt. On avait même trouvé un administrateur pour le port en la personne du jeune Faran - frère d'Elianor de Vergy - après la retraite forcée de Lorca pour raisons médicales. Cependant, si déjà les navires aflluaient de toute la Hanse ou la méditerranée pour échanger leurs marchandises au port girondin, il n'avait toujours pas été inauguré officiellement ni béni. C'est ce que Lorca s'apprêtait à faire aujourd'hui.
Les charpentiers et forgerons n'avaient été finalement pas renvoyés tout de suite, il avait fallu avant ériger quelques gradins, des installations provisoires pour accueillir la foule et les invités. Lorca, malgré sa maldie qui le clouait bien trop souvent à son goût dans son hamac, avait été invité pour la diriger en tant que nouveau président de la fédération des pêcheurs et marins, et donc, d'une certaine manière, responsable des ports de toute la France, et donc de celui de Bordeaux, qu'il avait particulièrement contribué à construire à plus d'un titre.
En ce dimanche de la fin de décembre, une fine couche de givre recouvrait les installations portuaires, et les manoeuvres s'employaient - en vain - à gratter le verglas qui rendait dangereuse la circulation alentour. Il était hors de question de poursuivre les chantiers en cours, les ouvriers risquant de voir leurs outils se souder à leurs mians à cause du froid extrême qui régnait alors. Par chance, le temps était quand même dégagé et le soleil, éclatant, faisait de son mieux pour lutter contre la froidure ambiante. Aussi, la foule se pressa t-elle quand même sur le port pour assister à la première cérémonie d'inauguration d'un port de Guyenne, et pas n'importe lequel puisque c'est celui de la capitale, le port le plus important puisqu'outre son rôle commercial, il devra empêcher les invasions venues de l'océan. Des tribunes avaient été aménagées pour les officielles, face à la forteresse de pierre qui faisait office en même temps de locaux administratif, de caserne pour les gardes du port et de phare. C'est depuis la tour qui remplissait cet office que Lorca allait diriger la cérémonie. Pour l'heure, il n'était encore qu'au rez de chaussée, se prenant un petit remontant à base de sa légendaire huile de foie de morue pour se préparer à cette pénible mais nécessaire ascension.
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[Signature retirée par Bottée Féline.]