Zoelie
Mais, soudain, alors même que la jeune évêque songeait qu'elle était en train de célébrer ici la messe la plus longue et la plus solitaire de l'histoire de la ville, un paysan, chapeau à la main, arriva au pas de course, tout en sueur dans le saint édifice :
M'sieur l'curé, m'sieur l'curé....apercevant la baronne
Euh, Vot'dame ! Messire, Monseigneur... Il faut vite venir ! Faut voir ca ! Ca s'peut point ! C'est blasphème !!!
Il se jeta à genoux aux pieds de la jeune femme et fit plusieurs fois tourner vers elle des yeux effarés avant que de lui embrasser le bas de la robe.
Zoélie le regardait, interloquée et se demandait si l'homme ne souffrait point de la rage. Elle se recula vivement, puis cherchant à l'apaiser, sans plus s'occuper de l'interruption de l'office :
Mais, parle brave homme . Que se passe-t-il ? Tu peux me parler. Je suis Monseigneur Zoélie de Guérande, évêque de ta paroisse. Qu'est-ce donc qui te met dans cet état ?
Il se leva, reprit son souffle. Elle l'entraina, après avoir vérifié que ses yeux n'étaient point jaunes, ce qui aurait indubitablement confirmé un signe de maladie ou possession de la créature sans nom, vers la table où se trouvait le vin destiné à la messe. Elle lui servit généreuse rasade, s'en prit pour elle également face à cette grande émotion.
Puis il raconta :
Voila ! J'tais comme tous les dimanches matins....Euh... Prenez pas offense, ma sire, d'habitude les gens sont à la messe et moi ca m'arrange ben ! Donc, en train de poser mes collets derrière le p'tit bois de la mare. Savez bien ? cui qui regorge de lap'rots qui sont si faciles à prendre et si bons à manger. Faut nous comprend' aussi ! On n'a point toujours la vie facile nous aut' !
Elle s'impatientait de connaitre la suite :
Oui, bien, bien ! Passons là dessus, je ne suis pas préposée à la garde des champs ! et alors ?
Toujours tenant son chapeau d'une main et son verre de l'autre , il poursuivit
Et bien, monseigneur! Je vous dis pas ! Y'a comme une cérémonie en cours, derrière p'ti bois ! Les yeux m'en sont sortis des trous./ D'abord, j'ai cru à un de ces racontars de vieilles sur les rassemb'ments de sorcières. Pis non, hein ? Ca s'peut pas ! D'une c'est pas la nuit, pis j'ai pas vu de cercle de rochers par terre. Donc c'est un mariage que j'me suis dit, vu que j'ai vu deux personnes toutes bien mises devant un autre avec une capuche sur la tête. Me suis approché tout près et tout caché derrière un buisson ! Parole du Martin d'la belle roche ! C'est moi ! Vu qu'j'habite près du rocher des dames ! Que parte sur la lune mon fils ainé si tout c'qu'j'vous dis la est point vrai !
Plein de monde sont la ! Pour sur que j'en ai reconnu des qui d'habitude sont dans vot' église, dame. Je les ai vus comme j'vous vois là d'vant moi !
Sont-y donc possédés ?
Pour moi, j'ai eu la peur d'ma vie ! Sur'ment des envoyés de... qui vous savez...des qui font une messe noire ou un office impie. J'ai lâché ma besace et j'ai couru prévenir le curé.
Faut envoyer les gens d'armes ! Faut prév'nir la maréchaussée ! Faut vite venir déverser l'eau bénite sur ces terres !
Il se lamentait :
Pour sur qu'a présent, j'pourras pus jamais manger une bestiole de c'terrain-la ! Misère ! Misère !
L'évêque en était restée bouche bée. Une cérémonie ? Dans un parc ? et les habitants connus de la ville et fidèles de l'église ? Qui y assistaient ? Un mariage, disait l'homme...
Mais non, voyons, ca n'a pas de sens ! Aucun paroissien ne se livrerait à des offices hérétiques en dehors de l'église. Et tout le monde respecte fort le curé d'Albi. Il aurait été prévenu, voyons !
Elle décida de conclure la messe pour les quelques personnes qui étaient là. Elle fit asseoir le paysan et reprit à la va-vite, forcément, l'office du jour.
M'sieur l'curé, m'sieur l'curé....apercevant la baronne
Euh, Vot'dame ! Messire, Monseigneur... Il faut vite venir ! Faut voir ca ! Ca s'peut point ! C'est blasphème !!!
Il se jeta à genoux aux pieds de la jeune femme et fit plusieurs fois tourner vers elle des yeux effarés avant que de lui embrasser le bas de la robe.
Zoélie le regardait, interloquée et se demandait si l'homme ne souffrait point de la rage. Elle se recula vivement, puis cherchant à l'apaiser, sans plus s'occuper de l'interruption de l'office :
Mais, parle brave homme . Que se passe-t-il ? Tu peux me parler. Je suis Monseigneur Zoélie de Guérande, évêque de ta paroisse. Qu'est-ce donc qui te met dans cet état ?
Il se leva, reprit son souffle. Elle l'entraina, après avoir vérifié que ses yeux n'étaient point jaunes, ce qui aurait indubitablement confirmé un signe de maladie ou possession de la créature sans nom, vers la table où se trouvait le vin destiné à la messe. Elle lui servit généreuse rasade, s'en prit pour elle également face à cette grande émotion.
Puis il raconta :
Voila ! J'tais comme tous les dimanches matins....Euh... Prenez pas offense, ma sire, d'habitude les gens sont à la messe et moi ca m'arrange ben ! Donc, en train de poser mes collets derrière le p'tit bois de la mare. Savez bien ? cui qui regorge de lap'rots qui sont si faciles à prendre et si bons à manger. Faut nous comprend' aussi ! On n'a point toujours la vie facile nous aut' !
Elle s'impatientait de connaitre la suite :
Oui, bien, bien ! Passons là dessus, je ne suis pas préposée à la garde des champs ! et alors ?
Toujours tenant son chapeau d'une main et son verre de l'autre , il poursuivit
Et bien, monseigneur! Je vous dis pas ! Y'a comme une cérémonie en cours, derrière p'ti bois ! Les yeux m'en sont sortis des trous./ D'abord, j'ai cru à un de ces racontars de vieilles sur les rassemb'ments de sorcières. Pis non, hein ? Ca s'peut pas ! D'une c'est pas la nuit, pis j'ai pas vu de cercle de rochers par terre. Donc c'est un mariage que j'me suis dit, vu que j'ai vu deux personnes toutes bien mises devant un autre avec une capuche sur la tête. Me suis approché tout près et tout caché derrière un buisson ! Parole du Martin d'la belle roche ! C'est moi ! Vu qu'j'habite près du rocher des dames ! Que parte sur la lune mon fils ainé si tout c'qu'j'vous dis la est point vrai !
Plein de monde sont la ! Pour sur que j'en ai reconnu des qui d'habitude sont dans vot' église, dame. Je les ai vus comme j'vous vois là d'vant moi !
Sont-y donc possédés ?
Pour moi, j'ai eu la peur d'ma vie ! Sur'ment des envoyés de... qui vous savez...des qui font une messe noire ou un office impie. J'ai lâché ma besace et j'ai couru prévenir le curé.
Faut envoyer les gens d'armes ! Faut prév'nir la maréchaussée ! Faut vite venir déverser l'eau bénite sur ces terres !
Il se lamentait :
Pour sur qu'a présent, j'pourras pus jamais manger une bestiole de c'terrain-la ! Misère ! Misère !
L'évêque en était restée bouche bée. Une cérémonie ? Dans un parc ? et les habitants connus de la ville et fidèles de l'église ? Qui y assistaient ? Un mariage, disait l'homme...
Mais non, voyons, ca n'a pas de sens ! Aucun paroissien ne se livrerait à des offices hérétiques en dehors de l'église. Et tout le monde respecte fort le curé d'Albi. Il aurait été prévenu, voyons !
Elle décida de conclure la messe pour les quelques personnes qui étaient là. Elle fit asseoir le paysan et reprit à la va-vite, forcément, l'office du jour.