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[RP] - Grand Oeuvre pour Petit Homme

Fernal
Fernal en fit une moue d'indignation.

- Comment ? Aucun récit officiel de la guerre ?
Allons, en bon officier, vous devriez savoir qu'il convient de présenter aux femmes et aux enfants un récit qui justifie, et dans l'honneur, une si longue absence. Une version officielle autant que concertée.
Que diantre : de l'éclat, de la poudre, du brio ! C'est d'une guerre, qu'il s'agit. Il lui faut un récit qui ait de l'ergot, de la corne et du sabot. Une prose virile sans parement aucun.
Et si vous ne savez rien, alors inventez ! De grands menteurs, souvent, réussissent là où le chroniqueur échoue. On croit toujours un fabuliste, mais rarement un historien. Voyez-vous lieutenante, les hommes aiment à écouter l'air plutôt que la chanson.


Une idée lui traversa l'esprit, et un sourire malin le visage.

- Si vous voulez, je vous le fais, moi, le récit de l'expédition savoyarde. Dites moi juste qui étaient les ennemis, et les noms des valeureux savoyards, et d'ici deux jours vous aurez un récit qui redorera le blason de l'ost du duché.
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Minipouce42
Cela fit sourire Mini de voir Fernal décrier avec autant de ferveur...

Hum...Vous voulez que j'invente?Eh bien,Soit!Euh...Mais par pitié,ne me servez plus de "lieutenante",s'il vous plait!"Mini" suffira amplement...

Elle sourit,réfléchit quelques instants puis commença le récit de la "Mission Languedoc"...

Je m'y jette mon cher mais ne venez point vous plaindre que ce n'était pas l'histoire que vous souhaitiez entendre,hein!Bon alors...l'Armée Savoyarde vole à la rescousse du Languedoc...Celle-ci met quelques jours a arrivé sur place!Hum...Puisque vous êtes inventeur,peut être devriez vous songer mon cher à créer une machine qui pourrait téléporter les personnes,cela nous serait utile,savez-vous?
Bon,bon,je continue...Bien!Notre Armée arrive donc sur place et aide le Languedoc à défendre ses terres contre je ne sais quel ennemi,mais c'en était un,c'est sûr!


Mini rit...puis reprit son sérieux et poursuivit...

Le travail consistait à défendre la Mairie afin qu'elle ne tombe pas entre les mains de gens mal intentionnés,voyez vous!Nos hommes y ont mis tant d'ardeur qu'ils en sont sortis vainqueurs et la tête haute!Une fois la "Mission" finie,ils ont écumé les tavernes de la ville et sont rentrés à quatre pattes en Savoie...

Mini sourit amusée...

Euh,dites-moi que j'ai été crédible siou plait,Fernal!

Puis Mini rit de bon coeur et enfin se tut pour attendre le verdict du petit homme...
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Hospital Savoyard...Suivez le guide!
Fernal
Fernal suivit le récit de Mini avec attention, tordant la bouche dans tous les sens. Il n'intervint qu'une fois, lors de l'histoire de la machine à téléporter, disant avec horreur qu'il était impossible d'inventer une telle machine, car cela prouverait que le Très-Haut n'existait pas. Et ça, ce serait terrible...

A la fin du récit, il dit:


- Mouais... cela me semble trop... réaliste. Ça a surement dû se passer comme ça, remarquez, vous avez raison. Mais si l'on raconte au peuple que l'on a débauché son armée pour aller se dorer la pilule dans une lointaine mairie ensoleillée, ça risque de mal passer. Nous pourrions...

Il passa son doigt sur ses lèvres. Son œil normal se mit à briller alors que l'autre se mettait à battre tout seul un tempo endiablé.

- Nous pourrions nous en servir comme base, et y rajouter du sang et des tripes, du suspens, des charges héroïques, des grandes douleurs et des joies pures, de la trahison, des sacrifices... et quelques ruses aussi. Et un hérisson. Pas d'épopée digne de ce nom sans hérisson. Ça aurait quand même plus de gueule, non ?
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Minipouce42
Grrrr...Je vous avais bien dit de ne pas vous plaindre si l'histoire ne convenait pas!Vous auriez au moins pu dire que j'étais crédible juste pour me faire plaisir!

Mini n'était pas une râleuse,elle taquinait plus "l'Infernal" qu'elle ne ralait en vérité...

Bon!Reprenons...Vous voulez du sang?J'vais vous en donner moi du sang!Alors...Euh...Les soldats sont arrivés sur place en quelques jours et de suite,ils se sont jeté dans une guerre sans pitié pour défendre le Languedoc...C'est mieux là?Je continue...Ils se sont battus durant des jours et des jours,tantôt blessant l'adversaire ou le tuant même carrément avec tout plein de sang qui giclait de partout,vous voyez ce que j'veux dire mon cher?Tantôt se faisant blesser euh...mais pas tuer puisqu'ils sont tous rentrés!La Mairie baignait dans le sang...Y en a assez peut être du sang là,non?

Mini sourit amusée puis poursuivit...

Comme nos Soldats ont été touchés par endroit,ils avaient très très mal donc quelques infirmières leur ont donné les premiers soins,sutures,bandages et compagnie...Puis lorsqu'ils sont allés écumés les tavernes,les languedociens pour les remercier avaient mis du somnifère dans leurs bières...Et c'est là que le fameux hérisson entre en scène,en poussant la porte de ladite taverne et en commandant une bonne bière bien fraîche...

Mini prit un fou rire et en fixant son interlocuteur lui demanda...

Euh...Et là?C'était plus crédible ou pas encore assez?Je me demande si je ne vais pas me recycler dans la comédie moi...
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Hospital Savoyard...Suivez le guide!
Fernal
Fernal s'illuminait de joie comme un arbre de noël (quand on aura découvert l'électricité). Visiblement, la seconde version lui plaisait bien plus.

- Excellent !!! Vous voyez Mini, quand vous voulez... C'est beaucoup beaucoup plus plaisant à écouter ! Quel courage, quand même, ces soldats savoyards ! On pourrait aussi rajouter, tenez, par exemple:

Il se leva et commença à tourner autour de la table en racontant:

- Le duc, vêtu de sa pelisse rousse et de son baudrier de cuir serti de huit saphirs étincelants, se tenait à la proue de son équipée. Il était flanqué du capitaine Machin et du connétable Truc, un ancien montagnard que sa longue carrière de forgeron avait assourdi comme une huître. Il cognait de son poing métallurgique sur quiconque courait, et dut bien de cent ennemis en deux minutes débiter un milliasse de biscuits.

Les Annéciens prirent à revers et tenaillèrent un demi-bataillon de rouergiens, tandis que les Belleyans à la fière encolure piétinèrent l'autre moitié, acculée aux gâtines des Pompemerdes.

Le brigadier Bidule moulinait des massues, et le jeune Tartanpion catapultait des glands aux oreilles des ennemis. Ripolin le menuisier déboulait des sapins, la mine goguelue, le pinceau plein de glu : "qui veut donc de ma colle, que je la lui rafistole ?"

Ce grand nigaud de chevalier Chose, trois ans d'âge mental, se croyait à la fête, tant est qu'il causa une frayeur bleue à l'ennemi car il soufflait aussi fort dans sa langue de belle-mère qu'un troupeau d'éléphants. Des boyaux de l'ennemi il faisait des spaghetti, des tuniques qui boursoufflaient les hirsutes poitrails de menus confettis.

L'infirmier X, qu'on avait affecté au ravitaillement, distribuait des galettes au sarrasin, des tartines et du pain pour les savoyards, outre plus quelques baffes. Avec sa chemise quadrillée, ses culottes courtes de velours côtelé, son havresac vert et son chapeau tyrolien, vous l'eussiez pris pour un boy scout.

Quelle tripotée ! Quelle cohue ! La baronne en fureur mugissait dans les bois ; le flûtiste, là-haut, s'en donnait à cœur joie. Même le père Machinchose prenait part au conflit. Certes, cela ne l'empêchait pas, de son arbre perché d'où il lâchait ses pastèques de cinq heures sur le crâne des ennemis, de rédiger son catalogue de vente d'osties par correspondance, mais enfin quoi, il servait le duché à sa façon.

L'avant-garde ennemie fut prestement mise en pièces par les artilleurs de Bourg. La poudre à canon avait noirci la gueule des gascons ébouriffés comme pétards à mèche : vous eussiez dit des émules du ramoneur Crassenoiraud. Leur hargne et sournoiserie, néanmoins, décuplaient leurs forces naturelles, si bien que pour un ennemi laissé sur le carreau deux autres surgissaient.

D'autant plus que l'arrière-garde où se terrait le fourbe comte de Petsec, l'élite des ennemis, quoi, la petite poignée de ceux, qui, sur leurs dix doigts savaient compter jusqu'à trois, l'élite disais-je, s'était repliée à sept enjambées de la Fontaine d'Astralée, là où se baignait jadis la Vouïvre à la rouge escarboucle. Or nul ne pouvait s'en approcher sans auparavant franchir un étroit défilé que la brume tombante opacifiait de seconde en seconde. Une belle poche de résistance en perspective...

Hummm... je vais m'arrêter là. Bien sûr, il faudra y mettre les vrais noms de nos héros victorieux.

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Minipouce42
On s'y croirait presque dites donc mon cher...Vous devriez être écrivain plutôt qu'inventeur!

Mini sourit...

M'enfin,vous en avez oublié tout de même!Vous avez parlé des Anneciens,des Belleysans,des Burgiens et les Chambériens alors,ils comptent pour du beurre???Nous avions un soldat la bas,figurez- vous mon cher!


Mini rit...

Continuez à me raconter,Fernal!Ne m'avez vous point dit que dans toute épopée,il y avait un hérisson?Eh bien à quel moment intervient il dans votre récit?Je n'en ai point entendu parler...
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Hospital Savoyard...Suivez le guide!
Fernal
- Ah ! Ah ! J'y arrive, Mini, j'y arrive.

Alors le duc demanda au seul Chambérien présent de prendre la tête d'une escouade et de se rendre sur l'heure à la Fontaine. Il lui manda de s'infiltrer et de prendre ce dernier bastion, afin qu'on en finisse.

Et ce fut chose étrange que de voir s'enfoncer dans le blanc laiteux du sylvestre décor, cette procession savoyarde, qui chapelet, qui tortillard, comptait parmi ses composants plus d'un élément qui n'aimait guère son voisin dans la vie, mais s'en accommodait fort bien à la guerre.

Fi donc de la dague, du cordeau félon, ou de la flèche au curare ; sagaies au dard pointu, frondes, piques, gourdins, casse-têtes et arquebuses, projectiles pleuvez ! Fi ! Frappez à satiété. Rien n'arrêtera l'ost de Savoie. Ayant, tous ces braves, glané les écus des languedociens tombés au champ d'honneur, parés de tels boucliers hérités de héros si fameux, que craindraient donc nos savoyards sinon la foudre et le tonnerre ?

Soudain une lueur blafarde apparut. C'était le feu du campement des ennemis qui se grillaient des escalopes de hérisson et s'enivraient de vin. Ils s'étaient tous réunis au centre du cercle des tentes pour faire ribote. Une occasion unique de leur tendre embuscade : l'opportunité fait le larron.

- Doucement, un homme derrière chaque tente, murmura le valeureux Chambérien. Shhhht ! Silence ! À mon signal, tous sur les vilains.

Il se trouva bien deux ou trois dégourdis pour se prendre les pieds aux ficelles des tentes, mais très vite chacun fut posté.

- Aouhhh ! À l'attaque, mes gens ! Foncez, sus aux ennemis !

La bataille ne dura qu'un éclair.

Ainsi les Savoyards l'emportèrent haut la main sur ceux du Rouergue. Saint-Maurice, le porte-Égide du duché, leur avait été plus que clément, et l'ivresse des adversaires leur avait mâché la tâche. Aucune perte côté vainqueur. Ah, si : le vaillant chambérien réchappa du combat, mais avec l'œil crevé. Sacré veinard, on lui verserait une pension ! Le duc bailla de l'olifant toute la nuit pour clamer la victoire.

Et ainsi fut finie la guerre du Languedoc.

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Minipouce42
Mini applaudit...

Votre imagination est plus que débordante mon cher Fernal,savez-vous?Je suis restée suspendue à vos lèvres...

Mini sourit...

Par contre,vous vous êtes quelque peu trompé...Hum,le soldat Chambérien n'est pas revenu avec un oeil crevé!Donc,la pension,il peut s'y asseoir dessus comme on dit!Hum...Aussi,j'aimerais beaucoup goûter une escalope de hérisson,savez-vous?Auriez-vous une table à me recommander,que je puisse en manger une quand l'envie m'en prendra?

Mini rit aux éclats...

Mais je préfère tout de même mon hérisson entrant en taverne pour commander une bonne bière bien fraîche!Bon,je vous le concède c'est fort peu réaliste mais tant qu'à inventer autant se faire plaisir,hein!Bon,assez parler de la Mission Languedoc...Dites moi mon cher Fernal,votre machine à prédictions a-t-elle grand succès?Prévoyez-vous de vous déplacer pour la faire connaitre?Est ce que cela ne vous fatigue pas trop?

Mini se tut pour laisser le petit homme répondre à ses questionnements...Elle se dit toutefois que peut être le savant avait-il d'autres choses plus intéressantes à faire que de bavasser ainsi avec elle...
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Hospital Savoyard...Suivez le guide!
Fernal
-Ahhh, la Machine à Fernal... je ne sais si son succès est grand, Mini, mais il est, c'est indéniable. Je pense pas la déplacer, non, car comme vous l'avez remarqué, son utilisation est très fatigante pour ma faible constitution. Si je devais ajouter à cela la fatigue d'un voyage, je ne pourrais même plus prédire l'arrivée de la nuit à la fin du jour !

Il regarda Minipouce, hésita, puis lui dit sur le ton de la confidence:

- A vous je peux bien le dire, cette machine ne sert à rien, c'est un vulgaire fourneau de cuivre. Non, les visions me viennent directement à moi, comme des rêves éveillé. La machine n'est en quelque sorte qu'une assurance. Si mon activité venait à courroucer certains individus à l'esprit obtus et au bûcher facile, ils brûleraient alors la machine et épargneraient ma vie... du moins, je l'espère...
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Minipouce42
Mini fit des yeux ronds un peu comme ceci... lorsque Fernal lui confia que sa machine ne servait à rien!

Vous êtes surprenant mon cher Fernal,savez-vous?Des visions...

Cela laissa Mini pensive durant quelques secondes...

Des visions,dites vous?Mais sur tout et n'importe quoi ou sur des choses bien précises...Parce que vous demandez tout de même au gens de poser une question!Alors je m'interroge...Les visions vous viennent dès lors que la question est posée?Comment cela se peut il?

Mini était décidément très curieuse...

Veuillez excuser ma curiosité mon cher...Je dois vous ennuyer avec toute mes questions!Ceci dit,vous avez raison de vous préserver du bûcher!Il serait dommage de perdre notre seul savant Chambérien!

Mini sourit puis attendit d'avoir les explications du petit homme concernant ses fameuses visions...
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Fernal
- Et bien... c'est difficile à expliquer, voyez-vous. Je ferme les yeux, je me répète la question... Et puis c'est d''abord une angoisse indéfinissable qui me noue la gorge et l'estomac. C'est comme un frisson, un gouffre noir et froid, un fluide glacial qui me paralyse de peur, car j'ai toujours l'inquiétude de ne pas pouvoir un jour en ressortir. Puis, peu à peu, le nœud se défait quelque part dans les profondeurs inconnues de mon âme inquiète, livrant passage dans mon cœur à toute une imagerie débridée qui défile en trombe, avec la même précipitation qu'une armée de moinillons torturés de colique. Ainsi font les premiers relents d'eau claire au curetage d'un puits. Enfin assainies, les visions s'éclaircirent, et des vers m'apparaissent, que je ne peux que répéter sans toujours les comprendre.

Ne voulant pas effrayer sa visiteuse, il se força à sourire et lui tapota le dos de la main.

- C'est comme ça, c'est un don... Je crois que le Très-Haut m'en a fait cadeau pour s'excuser de m'avoir refusé force et beauté. Car tout dans Sa nature tend vers l'équilibre: il y a toujours un mal pour un bien, un défaut pour une qualité, un don pour une tare.
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Minipouce42
Le Très Haut vous a peut être refusé force et beauté mais il vous a doté de bien d'autres qualités beaucoup plus importantes,mon cher,croyez moi!

Mini sourit...Ils avaient discuté des heures durant,elle n'avait pas vu le temps passé et ne se souvenait même plus la raison de sa visite mais ce n'était pas là l'essentiel...

Mon cher Fernal,vous avez égayé ma journée,savez vous?Je vous remercie de m'avoir reçu alors que je vous sais fort occupé!Ce fut un réel plaisir pour moi de discuter avec vous mais il est tard maintenant et je dois retourner prendre soin de ma famille,vous comprenez...Mais...Si vous n'y voyez pas d'inconvénients,je reviendrais vous voir avec plaisir!

Mini sourit et déposa un baiser sur la joue du savant Chambérien avant de se lever,s'apprêtant à le laisser à ses tubes à essai et autres ustensiles de chercheur...

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Hospital Savoyard...Suivez le guide!
Fernal
Fernal raccompagna sa visiteuse jusqu'à la petite grille, au bout de l'allée des statues.

- Je vous en prie, Mini, vostre visite fût un agréable intermède dans ma journée de rat de cave. Revenez quand vous en aurez l'envie.

Il lui ouvrit la grille, et la regarda un instant s'éloigner.
Le nain redescendit ensuite dans les profondeurs de son antre pour faire avancer un peu son Grand Œuvre.

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Fernal


La table de travail était encombrée d’appareils compliqués : des alambics, des masques, des récipients divers, des cornues, des entonnoirs, des mortiers, des cucurbites, des tubes serpentiformes, d’énormes bouteilles et de minuscules flacons. Une odeur violente se dégageait des sels vénéneux, des alcalis et des acides. Tout un monde mystérieux était enfermé dans les métaux – les sept dieux de l’Olympe, les sept planètes : dans l’or, le Soleil ; dans l’argent, la Lune ; dans le cuivre, Vénus ; dans le fer, Mars ; dans le plomb, Saturne ; dans l’étain, Jupiter ; dans le vif-argent, Mercure. Il y avait aussi des substances à noms barbares, qui effaraient les profanes, tels le cinabre lunaire, le lait de loup, l’airain d’Achille, l’astérie, l’androdame, l’anagallis, le rhaponticum, l’aristoloche, obtenues au prix de mille peines. Une précieuse goutte de sang de lion, qui guérit de tous les maux et donne l’éternelle jeunesse, brillait comme un rubis.

L’alchimiste nain était assis à sa table. Maigre, petit, ridé ainsi qu’un vieux champignon, mais toujours vif, alerte, messer Fernal, la tête appuyée dans ses mains, observait avec attention une cornue qui doucement vibrait sur la flamme bleue de l’alcool. C’était de l’huile de Vénus, Oleum Veneris, d’un vert transparent comme la smaragdite. La bougie qui brûlait à côté projetait un reflet émeraude sur le parchemin d’un manuscrit ouvert sur la table, une étude de l’alchimiste arabe Djabira Abdallah.

Entendant des pas dans l’allée du jardin, Fernal se leva, enveloppa d’un coup d’œil son laboratoire, fit un signe au jeune Pierre pour lui ordonner d’ajouter du charbon dans le four et alla au-devant de ses mystérieux invités.

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Fernal


Les invités étaient gais, ils sortaient d’un souper arrosé de malvoisie. Il y avait deux hommes et deux femmes, tous vêtus de satin noir, et masqués à la mode de Venise afin que nul ne les reconnut.

Les dames entrèrent, et la bicoque calme du savant s’emplit de parfums, de bruissements soyeux, de léger bavardage féminin, de rires pareils à des cris d’oiseaux. L’une d’elles accrocha avec sa manche le col d’une cornue qui tomba et se brisa.

- Ne vous inquiétez pas, signora, dit galamment Fernal, je vais ramasser les débris de peur que votre joli pied ne se blesse.

L'autre femme, en voulant prendre dans ses mains un morceau de scorie, salit son gant clair parfumé à la violette, et un des hommes, tout en serrant doucement les doigts abandonnés, essaya longuement, avec son mouchoir, d’enlever la tache.

La blonde inconnue, palpitant d’une peur joyeuse, secoua la tasse pleine de mercure, quelques gouttes se renversèrent sur la table, et lorsqu’elles roulèrent, brillantes, elle se prit à crier, ravie :

- Regardez, un miracle, l’argent liquide court sans qu’on puisse l’arrêter !

Et la blonde frappa dans ses mains.

L’alchimiste nain s’approcha du plus grand des deux hommes et murmura à son intention :

- Monsignor, croyez que je sais apprécier la visite d’un homme tel que vous…

Il lui baisa la main. L'homme voulut répliquer, mais le nain ne lui en laissa pas le temps :

- Oh ! je comprends ! C’est un secret pour la foule ! mais pour nous autres…

Puis avec un sourire aimable il s’adressa aux invités :

- Avec l’autorisation de mon bienfaiteur, sa sérénissime seigneurie, ainsi qu’avec celle de ces nobles dames, mes ravissantes souveraines, je commence l’expérience de la divine métamorphose. Attention !

Afin qu’il ne pût surgir aucun doute sur l’authenticité de l’essai, il montra le creuset en terre réfractaire, priant chacun des assistants de le bien regarder, de le faire sonner, et en un mot de se convaincre qu’il n’existait aucune fraude, aucun subterfuge, aucun double fond comme chez la plupart des alchimistes. Les morceaux d’étain, les charbons, le soufflet, les baguettes servant à remuer le métal en fusion, tout fut examiné. Puis, on coupa l’étain par petits carrés, on le jeta dans le creuset que l’on plaça à l’entrée du four sur des charbons ardents. Le jeune Pierre, au visage si livide de peur qu’une des dames avait failli tomber en syncope en l’apercevant dans l’ombre et le prenant pour un démon, mit en action un gigantesque soufflet. Les charbons flambaient sous le bruyant courant d’air...

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