E_newton
Il en avait les trippes qui se nouaient, lestomac qui semblait vouloir se rétrécir, la tête était prise dans un étau qui se resserrait indéfiniment. Il nétait plus quun mal total, une plaie béante et suppurante. Il souffrait sans savoir pourquoi, de ces maux quon ne savait expliquer, qui vous ravageaient de lintérieur telle une gangrène quon ne savait réfréner. Il avait peur le Licorneux. Oh pas pour lui, car il était de ceux qui nétaient nullement effrayés de leur propre sort. Non, il avait peur pour elle, sa ptite sur, cette femme Chevalier qui lavait mené, guidé, tiré, poussé sur cette voie quétait celle de la noblesse dâme et de cur. Mais en ces instants, son âme était des plus sombres, franchissant un nouveau pas dans labime sans fond des ténèbres qui lhabitaient déjà. Chaque seconde qui ségrenait lui faisait redouter les pires issues de la quête qui était devenue sienne sur une simple prémonition. Car il ne sagissait que de cela, un inexplicable pressentiment à la lecture de la missive quelle lui avait envoyé. Pourquoi sen était-il fait autant pour ces quelques lignes à lépoque ? Il nen savait fichtrement rien. À contrario, sa rencontre avec une inconnue et le majordome de lancien Grand Maître de la Licorne, en lhôtel de Lazare à Limoges, navait fait quaccroitre ses inquiétudes.
Ils lavaient informé du pourquoi du départ de Cerridween. Elle pourchassait un certain Jules. Celui là même dont il apprit plus tard quil était le meurtrier de Stannis, un de leurs frères assassiné lâchement, dune flèche dans le dos. Sil comprenait lacharnement de la Capitaine à retrouver cet assassin, il ne concevait pas quelle en ait fait une affaire aussi personnelle. Nombreux étaient les Licorneux prêts à traquer les mécréants à travers le Royaume tout entier, mais très peu étaient apparemment ceux qui avaient été mis dans la confidence de ces faits. Pourquoi le leur avoir caché ? Et surtout, pourquoi ne rien lui avoir dit à lui ? Il était vrai quau moment des faits qui avaient conduit à la disparition Hérault de lOrdre, il nétait pas encore membre du Haut Conseil. Cependant, depuis quil y avait accédé, nul ne lavait informé. Ne le jugeait-on point digne de savoir ? Ou bien redoutait-on que limpulsivité qui le caractérisait encore parfois, le ferait partir seul à la recherche du mécréant ?
Il ne savait pas Il ne savait plus Et peu lui importait réellement en ces instants. Seule cette petite voix intérieure lassurait quelle était encore en vie, là, quelque part, et quil se devait de la retrouver. Peu lui importait de savoir comment, ni les moyens quil aurait à employer. Dusse til retourner cette cité, ce Comté, voire même le Royaume tout entier, il naurait de cesse tant quil ne la verrait. Et quand bien même pour cela il lui faudrait recourir à des moyens peu ou pas chevaleresque, il sen contre fichait. La faim justifiait les moyens, et il avait les crocs là, le Licorneux.
Bien que le gamin soit resté endormi à leur départ de Limoges, Ethan avait tout de même décidé de prendre la route. Cétait peut-être mieux ainsi dans limmédiat. Son manque de tempérance aurait peut-être pu leur porter préjudice. Au moins, ils bénéficieraient de vingt-quatre heures davance sur lui, et peut-être serait-ce suffisant pour leur permettre de trouver une piste encore « chaude ». Le trajet fut avalé en trois jours, au cours desquels il naccorda aucun répit à la petite troupe qui laccompagnait. Au matin glacial de leur arrivée en la cité poitevine, il les rassembla sur la grand place, ne leur laissant même pas le temps de se reposer.
Fouillez moi cette cité de fonds en combles, des taudis aux hôtels particuliers, sans oublier les auberges ou tout autre lieu où elle aurait pu séjourner.
Interrogez tous les passants, résidants, nobles ou roturiers, la maréchaussée, le Maire, la douane, qui vous voudrez.
Glanez toutes les informations susceptibles de nous donner une piste.
Et pensez aussi à rechercher ce Jules si on retrouve sa trace, ya de grandes chances quelle nen soit pas loin.
Voilà, ses ordres étaient donnés, sans vocifération, mais sans fioriture. Tout devait être mis en place pour se donner une chance, si infime soit elle, de lui mettre la main dessus. Pas de repos désormais tant quils ne sauraient pas ce quil était advenu delle. La machine Licorneuse était en branle, et le Capitaine était bien décidé à couper nette lenvie de toute personne osant entraver sa marche.
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