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[RP] Les cailloux-glaires, mort de la bête.

Saens
Il semait avec ferveur, le trimardeur, en crachant le long de la route. Il semait les petits glaviots frais qui lui encombraient la luette, les expédiant sur le bas-côté des herbes cassantes dans une expectoration grand luxe - précise, habile, gluante. Le mulet, pourtant taiseux de nature, en était coi d'admiration. Ses longues oreilles grises en frémissaient. Puis Saens toussait, mollardait encore, à n'en plus finir. Si les corneilles avait été friandes de mucus un nuage d'ailes vrombissantes l'aurait suivi de près. Mais même les fourmis ne s'y risquaient pas. Au reste, c'était une mauvaise toux. Sa gorge, comme emmurée par la chape de neige juste tombée, croyait vivre ses dernières heures. Elle agonisait de partout, suintait et s'adonnait à la déliquescence du cadavre : elle se vidait. Pendant qu'il l'aidait mal gré au grand nettoyage Saens lui parlait avec ce qui lui restait de voix :

"Mais non crevarde, tu vas vivre. Il faudra bien que tu vives, je ne puis grailler si tu t'en vas. Et de quoi aurais-je l'air lors, si plus n'ai de gorge...

Il s'arrêta.
"Je parlerais... avec mes mains ? Et tiendrais ma pipe avec mes pieds?, non... Je parlerais avec mes pieds, mais ils n'ont jamais voulu dire grand chose. Et mes orteils sont peu disserts. Ou je parlerais seul comme ici, et ma voix dans ma tête me rendrait peu à peu fou." Telle la malade drapée de soie saumon qui se réveille à l'aube et pressent qu'elle a été souffrante bien trop longtemps pour être encore digne d'attention, la gorge se réveilla, revint sur ses pas, car après tout, cela n'était peut-être pas si grave. Ils firent concession, elle lui prêta un peu de voix, et Saens ne devint pas fou. C'est le mulet qui le devint. Le vénérable au poil gris galopa, de douleur peut-être, trop de nœuds dans les intestins de ce bardot, et alla s'échouer dix toises plus loin. Et il était mort, avec ses cassolettes sur le dos et un tas de lainages ligoté aux reins.

Derrière lui se dépliaient les angles lugubres de La Rochelle, avec son clocher de papier gris noyé dans les nuages d'une fin de jour. Autour s'éparpillaient un troupeau de petits toits enrhumés par une neige sans pitié, et tant mieux. Le ciel n'avait guère plus de pitié et dardait ses yeux vitreux sur une scène qu'il ne comprenait pas. Saens, la gueule marmoréenne, avait cessé de tousser et contemplait le mulet mort, et sa promesse avec. Les mouches elles, commençaient leur long labeur nécrophage. Le vagabond se posa sur une pierre qui gisait elle-même sur une terre adamantine, cuirassée de froid à se casser les molaires dessus, et il réfléchit.

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Saens
Que ne calanchait-il ailleurs ? En été ? Dans les maigres biens de Saens ne comptait pas une pelle, pour creuser la terre il n'avait que ses mains. Autant dire rien, car le gel aurait cassé ses ongles aux premières attaques, puis le reste, jusqu'à ce qu'il finisse le trou funéraire avec une paire de moignons noirs. Mais alors, comment aurait-il traîné le mort mulâtre jusqu'à sa tombe de fortune ? Avec ses dents ? Elles aussi se seraient décrochées. La perspective d'être un mi-manchot de dextre et de gauche à l'élocution compromise ne l'enchantant que très modérément, il renonça à enterrer la bête. Il se gratta le menton, fronça légèrement les sourcils. Se leva.

Ce qui parait le dos du mulet il en fit un second ballot plus encombrant que lourd. Il enroula autour de sa main la vieille corde qui les reliait tous les deux quand ils marchaient ensemble ; seul véritable lien peut-être entre Saens et feu mulet. Un bout de corde grisâtre. Il attrapa les deux pattes arrières de la bête déjà devenue pâture pour diptères et leurs larvaires si safres qu'ils attaquaient la chair des flancs, jadis tendue de peau flasque et presque chauve, carnée comme celle d'un nourrisson. Il la traîna comme il le pût, jusqu'au bord du chemin, près des herbes blanches. Il ne ferait pas mieux. Sous ce vent de décembre, ses couches de laine en oignon et sous sa chainse claire, il suait franchement.

Avant de repartir il posa ses fesses près du mulet. Il lui expliqua qu'il ne pouvait pas creuser la terre et tourna encore un peu autour du pot avant d'en venir au fait. Planté sur la route il fit, un peu godichon en face du tranquille mulet, des excuses pour ne pas l'avoir baptisé avant son trépas au galop. Et le baptisa brièvement. Il continua sa route, besace à l'épaule et ballot au dos, n'espérant plus atteindre la Rochelle avant la nuit. En effet elle s'amena, madame la Nuit, et il n'y vit plus rien. Il fit son nid au bas de la souche d'un tremble gâleux, attendit le petit jour en soufflant sur ses mains.

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Merveille.du.mounet
Ses pas, dans sa recherche effreinée d"airelles, l'avait décidément emportée bien loin de son domicile. Au détour d'un fourré, Merveille débouche sur un sentier et découvre un étrange ballet... un équipage peu brillant dans lequel l'homme semblait être la bête de somme ...Et cet homme de causer à son mulet en parlant de baptême....
Réalisant que la bête était morte, Merveille pensa en son fort intérieur, que la carcasse risquait de se conserver tout l'hiver, compte tenu du froid qui s'installait progressivement...pas d'asticots à redouter... en revanche, cela ferait sans doute un joli déjeuné pour les loups...
Rebroussant chemin, elle repartie , le dos chargé d'une hotte emplie d'airelles, impatiente de retrouver un âtre chaud et accueillant...
Dans un instant de clairvoyance, son image lui apparue très semblable à celle de l'homme chargé de ballots..

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Merveille.du.mounet
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