Ecarlate
Dis voir l'écarlate !
Bon sang! Il ne faisait pas qu'écrire, il parlait aussi, elle avait vu juste la petite. Si elle s'était fiée à toutes les histoires qui couraient sur les ambuleurs- on dit que certains dansent la valse et comptent fleurette aux mortes qu'ils emportent, et d'autres choses encore à leur sujet-, elle se serait liquéfiée sur place. Mais sa mémoire en était encore à l'âge de pierre. Elle ne craignait pas le bonhomme, elle le trouvait seulement, différent.
D'un signe de main elle avait commandé à boire, et avant qu'elle eut le temps de compter le nombre de toussotements qu'avait émis son interlocuteur, le vin lui faisait face. Tandis que le glabre s'inquiétait à propos de son âge, elle plongeait un doigt dans le liquide et le portait à sa bouche. Légère grimace, elle lui trouvait un goût aigre.
T'as quel âge ? douze, quatorze ans ? Coupe ton vin, tu vas t'étouffer. Et parle pas en même temps. Et pis tu reprends calmement. Que je puisse te répondre. Tu cherches ton géniteur ?
On m'en donne quatorze, mais vous vous doutez que je n'ai aucune idée de quel âge je puis réellement avoir. Je ne me rappelle de rien. Elle tentait encore une fois d'accéder à sa mémoire, mais comme à chaque fois, un nuage épais comme un rideau l'empêchait de se souvenir, ou lui révélait des morceaux trop épars pour être cohérents.
Oh... le couper vous avez dit...alors c'est pour ça qu'il est si mauvais. J'ai vu faire quelqu'un dans l'auberge où je dormais, le type a demandé de l'eau pour couper sa boisson, je n'ai pas compris pourquoi il faisait ça. Ca n'a pas eu l'air de déranger le patron, à croire qu'ils ont l'habitude de servir du vin trop fort.
Elle répondait comme un cheval qu'on lançait au galop, l'âge des ardeurs, des premières découvertes, l'âge où l'on vous casait avec un bougre à la dote pas trop maigre. Et elle répondait aussi comme une gamine amnésique, à qui il manquait un pan entier de sa vie.
J'ai oublié qui j'étais, et qui sont mes parents. Ne me demandez pas comment c'est arrivé, je n'en sais rien. Je me suis réveillée au coin d'une ruelle, le visage enfariné, un mal de tête pas commun, et une bosse de la taille d'un oeuf sur le crâne. Elle se massait la tête en racontant le premier souvenir vibrant de son existence.
Je sais lire, je sais écrire...on a du bien du m'apprendre. Mes parents sans doute. Mais qui sont-ils, et surtout où peuvent-ils être...Personne ne me connaît à Montmirail, on m'a prise pour une nouvelle habitante, une étrangère.
Vous ne m'avez jamais vu vous non plus n'est-ce pas? Mais mes parents peut-être, où des gens de ma famille, si j'en avais une...
Bon sang! Il ne faisait pas qu'écrire, il parlait aussi, elle avait vu juste la petite. Si elle s'était fiée à toutes les histoires qui couraient sur les ambuleurs- on dit que certains dansent la valse et comptent fleurette aux mortes qu'ils emportent, et d'autres choses encore à leur sujet-, elle se serait liquéfiée sur place. Mais sa mémoire en était encore à l'âge de pierre. Elle ne craignait pas le bonhomme, elle le trouvait seulement, différent.
D'un signe de main elle avait commandé à boire, et avant qu'elle eut le temps de compter le nombre de toussotements qu'avait émis son interlocuteur, le vin lui faisait face. Tandis que le glabre s'inquiétait à propos de son âge, elle plongeait un doigt dans le liquide et le portait à sa bouche. Légère grimace, elle lui trouvait un goût aigre.
T'as quel âge ? douze, quatorze ans ? Coupe ton vin, tu vas t'étouffer. Et parle pas en même temps. Et pis tu reprends calmement. Que je puisse te répondre. Tu cherches ton géniteur ?
On m'en donne quatorze, mais vous vous doutez que je n'ai aucune idée de quel âge je puis réellement avoir. Je ne me rappelle de rien. Elle tentait encore une fois d'accéder à sa mémoire, mais comme à chaque fois, un nuage épais comme un rideau l'empêchait de se souvenir, ou lui révélait des morceaux trop épars pour être cohérents.
Oh... le couper vous avez dit...alors c'est pour ça qu'il est si mauvais. J'ai vu faire quelqu'un dans l'auberge où je dormais, le type a demandé de l'eau pour couper sa boisson, je n'ai pas compris pourquoi il faisait ça. Ca n'a pas eu l'air de déranger le patron, à croire qu'ils ont l'habitude de servir du vin trop fort.
Elle répondait comme un cheval qu'on lançait au galop, l'âge des ardeurs, des premières découvertes, l'âge où l'on vous casait avec un bougre à la dote pas trop maigre. Et elle répondait aussi comme une gamine amnésique, à qui il manquait un pan entier de sa vie.
J'ai oublié qui j'étais, et qui sont mes parents. Ne me demandez pas comment c'est arrivé, je n'en sais rien. Je me suis réveillée au coin d'une ruelle, le visage enfariné, un mal de tête pas commun, et une bosse de la taille d'un oeuf sur le crâne. Elle se massait la tête en racontant le premier souvenir vibrant de son existence.
Je sais lire, je sais écrire...on a du bien du m'apprendre. Mes parents sans doute. Mais qui sont-ils, et surtout où peuvent-ils être...Personne ne me connaît à Montmirail, on m'a prise pour une nouvelle habitante, une étrangère.
Vous ne m'avez jamais vu vous non plus n'est-ce pas? Mais mes parents peut-être, où des gens de ma famille, si j'en avais une...