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Une funeste demande

Eloin
Blanche, de coupe simple, sans aucun ornement ni broderie, la robe portée par la visiteuse. Blanche, la guimpe couvrant le col et la teste de celle qui estoit oblate cistercienne et chapelaine du domaine baronial de sa filleule. Blancs, les gants de laine recouvrant ses mains, de mesme que la longue cape de laine qu'elle avoit jeté sur ses épaules pour supporter le voyage dans la fraische litière marquée aux armes des De Vergy, et dont elle avoit reçu l'aimable autorisation d'Elianor pour l'emprunter.

Et son visage estoit si blesme que le garde qui la reçut à l'entrée crut un instant voir un fantosme. Le léger bégaiement qui fut le sien lorsqu'il luy manda son nom et ses desseins ne la dérida point, et il se contenta donc de luy expliquer le chemin jusqu'au bureau de l'évesque du Mans. L'immaculée silhouette hocha la teste et fila le long du corridor, ne prenant point la peine d'expliquer qu'elle avoit longtemps servi en ces lieux et que les couloirs de la partie réservée à l'évesché du Maine estoient loing de luy estre inconnus.

Un moment plus tard, elle estoit devant la porte du bureau de Monseigneur de Sainct-Cyr, la main hésitante, le coeur palpitant. La veuve prit une grande inspiration et toqua deux coups, attendant response avant que de pénestrer dans la pièce.
Honoré.Saint_Cyr
Depuis quelques jours, Honoré restait souvent allongé dans son bureau, tant il avait des difficultés à se mouvoir depuis son tour du rein en la cathédrale, malgré tout, il se devait de continuer à assumer son travail, tant bien que mal, il s'intallait à son pupitre et tandis qu'il cachetait une denière missive, il entendit frapper..il leva le nez et dit tout simplement..

- Oui entrez!

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LE DOGME
Eloin
A l'invitation proférée par la voix épiscopale, la main gantée se posa sur le loquet de la porte, tourna doulcement et poussa. La dame de Chérancé entra dans la pièce, prenant soin de refermer derrière elle.

Son regard embrassa la pièce du regard, constatant que rien ne sembloit vraiment avoir changé depuys le départ de Monseigneur Marc l'Ancien, à part, peut estre, quelques piles de documents supplémentaires sur les étagères, surement les registres du diocèse mis à jour en fin d'année.

Puys, remarquant sur un lit l'homme qui l'avoit autorisée à entrer, elle se retint de hausser un sourcil en le voyant allongé, et soupçonna quelque mal assez virulent pour empescher un homme de foy de rester assis. Avant que de se présenter au clerc, elle plongea en une profonde révérence, marquant ainsi son respect pour le représentant de l'Eglise Aristotélicienne.


Monseigneur, mes hommages. Je suys Eloin Bellecour, j'aurais une demande de cérémonie à vous présenter...

Elle laissa passer un instant de silence, son visage impassible observant l'éclopé.

Pardonnez mon audace, mais... Je suys médecin, si vous avez besoin de soins, je puys vous apporter mon ayde...
Honoré.Saint_Cyr
Honoré, le sceau en main, vit entrer une jeune femme dont l'apparence ne laissait aucun doute planer, il s'agissait d'une religieuse, il était tout de blanc vêtue, son teint était plutôt pâle...le prélat remarqua qu'elle balaya la pièce du regard, lui-même, jeta discrètement un oeil alentour, tout semblait rangé, l'évêque était un homme organisé, il veillait au bon ordre...

Alors, la religieuse se présenta et fit une requête au prélat, Eloin..Eloin..Honoré fit appel à sa mémoire afin de faire résurgir ses souvenirs...ah oui...se dit-il...


La jeune religieuse observait l'évêque, quand tout à coup, elle lui proposa de lui prodiguer des soins, Honoré plissa le front, ensuite, il attrapa sa canne et se leva...enfin il s'exprima..

- Bonjour Soeur Eloin, Vous êtes donc médecin en plus d'être religieuse? Je suis heureux de vous rencontrer, au moins pour vous remercier de tout ce que vous avez fait pour le Maine, vous avez officié de nombreuses cérémonies, du temps où vous étiez diaconesse à Montmirail!

- Prenez place ma soeur, je vais m'asseoir sur le siège en face de vous et vous allez m'expliquer ce que vous attendez de moi!


L'évêque essaya de rester digne en boitant le moins possible depuis son "lit à la grecque".

-

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LE DOGME
Eloin
La bordelaise se demanda si elle n'avoit point froissé l'évesque, lorsqu'elle le vict se lever en s'aidant d'une canne pour rejoindre son bureau. La ride apparue sur le front de l'homme d'Eglise ne luy échappa point, pourtant elle ne décela nulle moquerie ni colère dans les paroles qu'il luy adressa.
Elle se sentit cependant obligée d'émettre quelques précisions la concernant, de façon à ce qu'il n'y ai point de malentendu.


En effet, Monseigneur, je suys médecin. J'ai suivi le séminaire de médecine dispensé par l'ordre lescurien, et je pratiques depuys que j'ai obtenu mon diplosme.
Je suys également oblate cistercienne...


Elle ne put se retenir de rougir en oyant les remerciements de l'évesque.

Je ne fis que mon devoir, Monseigneur, tout comme me l'enseigna feu Monseigneur Zaguier de Bouviers, lorsqu'il estoit curé de Montmirail.

Elle hocha la teste et s'installa sur une chaise, avant que de se concentrer. Jà elle sentoit l'émotion s'emparer d'elle, et il estoit hors de questions qu'elle ne fonde en larmes ou ne tombe en pamoison devant l'homme de foy.

J'ai besoin que des funérailles soient organisées à Montmirail. Mon mary a rendu son dernier soupir voici quelques jours, et mesme s'il n'estoit guère croyant, je croys qu'il aurait apprécié qu'une messe soit dicte à sa mémoire.

Eloin se tut, le temps pour elle de reprendre une contenance, quelques larmes ayant finalement coulé sur son visage maugré sa volonté.

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Honoré.Saint_Cyr
Eloin précisa à l'évêque quels étaient ses talents suite aux formations qu'elle avait suivies, tandis qu'Honoré se déplaçait vers le siège où il se laissa choir, il dit:

- Ah vous êtes oblate à l'abbaye de Noirlac? je savais que j'avais déjà lu votre nom ailleurs que dans les archives du Mans, je connais Dame_oisèle, là-bas, nous sommes amis et ne rougissez pas, même si c'était votre devoir, le compliment n'est pas superflu, vous êtes un clerc de qualité, c'est appréciable et apprécié!

Soudain, la voix de la jeune femme fut hésitante, chevrotante même, l'évêque comprit ce qui était à l'origine de son changement de comportement quand elle parla des funérailles de son époux, il était décédé quelques jours auparavant, toutefois, la requête d'officier l'enterrement à Montmirail laissa l'évêque perplexe, il allait devoir s'enquérir de cette curieuse demande puisqu'il n'habitait plus Montmirail, semblait-il à Honoré... l'évêque ne voulait pas brusquer la jeune femme, d'autant plus qu'elle s'était mise à verser quelques larmes...après quelques instants, Honoré reprit la parole, doucement sans empressement...

- Dame Eloin, je suis sincèrement désolé pour votre époux...

Un silence s'ensuivit à nouveau...puis pesant ses mots...

- Dame Eloin, Avez-vous ramené le corps de votre défunt époux afin qu'il soit enterré en Maine? Où résidez-vous actuellement?

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LE DOGME
Eloin
La jeune femme, trop occupée à retrouver son calme, ne répondit rien lorsque l'évesque luy avoua connoistre la Grande Prieuse de Noirlac. Un comble pour elle, qui avoit jusque là toujours réussi à se maistriser, quelque soit sa peine. Mais, depuys l'annonce de la funeste nouvelle en sa chambrée de Lesparre, elle n'avoit plus la force de dissimuler sa douleur en évoquant son défunt mary.

Ramené son corps ?! Mais... Oh ! Vous ne savez point ! S'exclama-t-elle en le fixant de son regard sinople.

Elle auroit pourtant cru que les mauvaises langues se seraient déliées dès son départ, informant le nouvel évesque des ragots de son diocèse. Et particulièrement celle de son archidiaconesse et de son hérault d'espoux !

Prenant une profonde inspiration, Eloin releva la teste, preste à affronter la réaction de Monseigneur de Sainct Cyr.


Il est vray que je résides désormais à Bordeaux, en duché de Guyenne, auprès de ma filleule et de mon jeune frère qui m'a rejoint voici quelques semaines.

Mais Lorenzo est toujours resté habitant de Montmirail, jamais il n'a quitté ce village depuys qu'il y arriva un beau jour, après avoir vécu toute son enfance par delà les Alpes.

Je says que beaucoup pensent que je suys la seule fautive si nostre mariage s'est soldé par un échec ; puisque c'est moy qui pris la décision d'aller vivre si loin en emportant nostre fils avec moy... Mais aujourd'huy qu'il n'est plus là... Je voudrais qu'il ait des funérailles dignes de ce nom. Et... Et que ce soit vous qui soyez l'officiant de ceste cérémonie, Monseigneur...

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Honoré.Saint_Cyr
La femme qui était devant Honoré fut soudain submergée par le chagrin, sa résistance ayant certainement eu raison d’elle et la question d’Honoré sembla particulièrement l’étonner, c’était un fait, il ne savait rien la concernant, sauf qu’elle avait quitté le Maine, l’évêque était déconcerté, il leva les sourcils pendant qu’Eloin le dévisageait plutôt surprise.... il s’écoula un petit moment avant que la jeune femme ne se reprît, elle sembla même sur la défensive puis elle donna des explications au prélat, voilà qui avait le mérite de lui éclaircir la lanterne, pensa-t-il…l’évêque joignit ses mains et colla le bout de ses doigts sous son menton…il réfléchissait…puis poursuivit..

- Sœur Eloin, je dois vous avouer que je me suis demandé pourquoi vous aviez quitté le Maine, je savais que vous étiez mariée, les registres des mariages en témoignent, mais votre départ restait une énigme, d’autant plus que vous étiez appréciée, à présent, je comprends un peu mieux, quant à ce que les-uns et les autres pensent de votre situation, ça les regarde, je ne suis pas là pour juger vos actes, vous aviez vos raisons, je ne peux qu’espérer qu’elles étaient légitimes et même si elles ne l’étaient pas, vous êtes face à votre conscience, vous êtes ecclésiastique, donc plus que quiconque, vous connaissez vos engagements.

- Quoi qu’il en soit, vous me dites que feu votre époux n’était pas croyant, bien qu’il ait été baptisé, j’aurai juste une question, qui vous paraîtra sans doute implacable, pourquoi désirez-vous lui organiser des funérailles, alors qu’il ne croyait pas en la religion aristotélicienne et que vous l’avez quitté depuis un certain temps déjà ?


Le prélat était suspendu aux lèvres de la jeune femme, avant de prendre sa décision, il était impératif qu’il reçût une réponse transparente de son interlocutrice !

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LE DOGME
Eloin
Face à sa conscience... Et comment ! Depuys le courrier de Lysesl, elle n'avoit cessé de penser à son abandon du domicile conjugal, à sa fuite devant l'adversité, à sa volonté farouche de quitter le Maine couste que couste.

Pourtant, mesme si le sentiment de culpabilité estoit fort en elle, l'oblate gardoit à l'esprit que Lorenzo avoit également ses torts, luy qui n'estoit guère enthousiasmé à l'idée de quitter Montmirail, luy qui avoit souventes fois préféré sa bouteille de chouchen à une bonne discussion avec son espouse, luy qui ne s'estoit guère préoccupé des premières semaines de vie de ses deux fils, n'émettant aucune response au courrier qu'elle luy envoya pour l'avertir du trépas de Luca.

Mais elle s'interdisoit de songer aux faultes de son mary, se refusant à rejeter les tords sur un défunt.

La dernière question fict naistre un triste sourire sur ses lèvres, le souvenir de leurs tous premiers jours de bonheur luy revenant en mémoire. Et sa response fut simple, et évidente, du moins pour elle.


Parce que, maugré nos différents, maugré l'éloignement et ma décision d'aller voir d'aultres horizons, maugré tout ce qui a pu nous séparer...

Mon coeur a toujours continué à battre pour luy, mesme aussi loing, mesme sans aucune nouvelle de sa part. Et, encore maintenant, il y a toujours en moy un grand amour pour luy, c'est ce qui est, je pense, la raison de ma si grande douleur face à sa perte...

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Honoré.Saint_Cyr
La jeune femme resta silencieuse l'espace de quelques instants, était-elle tourmentée par les dernières paroles du prélat? Puis ses yeux se remirent à briller, elle était à nouveau au bord des larmes, elle expliqua la raison de sa requêtre à Honoré; elle semblait sincère, l'homme ne put s'empêcher d'avoir de la compassion, au fond, cette cérémonie l'aiderait à faire son deuil, sans doute était-ce nécessaire si elle voulait poursuive son chemin en toute sérénité, l'évêque voulait croire en son honnêteté...il lui dit:

- Très bien ma soeur, finalement, c'est tout à votre honneur de vouloir lui organiser des funérailles décentes, nous ne savons pas ce qu'il adviendra de son âme mais au moins elle pourra faire l'ascension, est-ce un ecclésiastique qui a constaté sa mort?

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LE DOGME
Eloin
Eloin secoua la teste en signe de dénégation.

Non, Monseigneur. C'est la vicomtesse de La Ferté Bernard, dame Lysesl Monty de Sainct Pierre, qui a trouvé le corps de Lorenzo en sa demeure.

Elle a pris de suite la plume pour m'avertir, puisque mon mary n'avoit point confié ses dernières volontés à qui que ce soit. Et pour ma part, je me suis mise en route pour rejoindre la cité mancelle le matin suivant la réception du courrier de Lys, et je n'ai point eu le temps de faire un quelconque détour par Montmirail avant que de vous mander entretien.

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Honoré.Saint_Cyr
Honoré étira sa nuque, ensuite, il empoigna sa canne, se leva et fit quelques pas pour se détendre le dos, il y avait trop longtemps qu'il était assis...la fatigue commençait à sa faire sentir, il soupira puis poursuivit..

- Ma soeur, il se fait que je vais me rendre à Montmirail, j'y serai dimanche, quel est le nom exact de votre époux? celui que tout le monde connaissait?

- Dés mon arrivée, je constaterai son décès et je demanderai à la diaconesse de Montmirail d'en faire autant, c'est à dire que nous vérifierons si l'éradication du lien entre son âme et son corps terrestre est définitive, vous connaissez la procédure, j'imagine. je supose que feu votre époux n'est pas soumis au moindre interdit?


L'évêque se dirigea vers une amrmoire, il en sortit une bouteille de mirabelle et deux godets...

- j'ai besoin d'un remontant, une mirabelle vous ferait-elle plaisir?

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LE DOGME
Eloin
Montmirail... Dimanche... La jeune veuve eut un long silence, les souvenirs s'imposant à elle, réminiscences de moments de bonheur et de joie révolus depuys plusieurs années maintenant.

Il se nommait Lorenzo Donatello, mais tous ses amys le surnommaient "Doby"*

Non, point d'interdit pesant sur sa personne.


Elle faillit sourire lorsqu'il luy proposa à boire, et hocha la teste.

Volontiers, Monseigneur, merci à vous.

Elle attendit d'estre servie pour reprendre la parole.

Pensez-vous célébrer les funérailles en comité privé, ou en public **?


[HRP]*Doby : nom IG
** comité privé : sur ce forum ; en public : sur la halle. J'ai besoin de savoir car Eloin étant IG à Bordeaux, elle ne pourra pas être à Montmirail avant au moins 10 jours, le temps de faire le chemin. [/HRP]

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Honoré.Saint_Cyr
Et de servir deux godets de mirabelle...pendant qu'il revenait afin de donner le breuvage à Eloin, elle poursuvit sur la lancée et fit les précisions d'usage au prélat, une dernière question intriguait la jeune veuve...Honoré ne pouvait que répondre:

- Il va de soi que ça se passera en public ma soeur, je pense plutôt officier une messe en sa mémoire, que des funérailles à proprement parler, ça me semble plus approprié, en ces circonstances, il n'était pas croyant et vous étiez séparés depuis longtemps...je suppose que vous me comprenez?

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LE DOGME
Eloin
Nouvel hochement de teste de la veuve.

Je comprends, Monseigneur.

Et, ne trouvant rien à ajouter, elle attendit en silence la suite de l'entretien.

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