Jacquot
Plus il avançait, plus il se disait quil allait à lencontre de problèmes Lodeur commençait à lui piquer les yeux, et des larmes commençaient à couler le long de sa joue. Il ny avait pas tant de marches que ça pour descendre à la cave, mais chacune dentre elle coutait à Jacquot un grand effort.
Parvenu au bas de lescalier, il chercha à tâtons la torche que la vieille déposait toujours sur la petite table directement à droite.
Rien.
Jacquot continua davancer dans le noir, les bras devant lui, et nayant pour repère que ses souvenirs. Il était venu en effet, plusieurs fois, pour aider la vieille à transbahuter les futs jusquen haut.
Lorsquil trouva enfin la porte de la cave, il la poussa doucement, son autre main sur son nez, cherchant à couvrir de sa propre odeur la puanteur des lieux. Il avait lesprit vide, ne voulant quun peu de clarté. Ses premiers pas dans la cave effectués, il chercha du regard un brin de lumière. La vieille avait laissé une bougie allumée sur lun des coffres emplit de victuailles. Jacquot se gratta la tête et la pris entre ses doigts.
Une nouvelle fois, rien nétait anormal, si ce nest cette puanteur.
Jacquot fit le tour de la cave, cherchant réponse à sa question. Elle était constituée de plusieurs pièces. Jacquot navait jamais eu lenvie ou lintérêt de demander à la vieille ce quil y avait dans les autres parties du sous-sol. Il se contentait de laider, et cétait tout aussi bien comme ça.
Il plissa les yeux, pinça les lèvres, se retournant, cherchant doù pouvait venir lodeur. A linstinct, il se dirigea vers la porte à sa gauche, une porte massive grande et austère.
Du bout du pied, il la poussa, et dans un léger grincement elle souvrit sur un petit couloir. Des lueurs de torches, dessinaient des contours dombre sur les murs.
Jacquot savança sans prudence, sans un regard derrière lui
Lorsquil parvint tout à fait dans la pièce, le spectacle qui sy déroulait lui fit oublier la puanteur et le gout de vomi quil avait dans la bouche. Ses yeux sagrandir et sa bouche souvrit
Jacquot
Il contemplait la table, une moue de surprise, détonnement. Il leva la tête vers la vieille Babette. Enfin, vieille, non elle navait plus lair âgée, elle était comme neuve, transfigurée. Comme si une brise de fraiche jeunesse lui était passée sur son cur.
Le regard des Jacquot fit le tour de la pièce, et il se rendit compte quil se trouvait dans un chaos organisé. Chaque pièce, chaque chose avait dune certaine façon avait sa place. Ses yeux se posèrent enfin de nouveau sur la table. Le choc qui avait été son premier sentiment fut place à la gêne, celle dêtre au mauvais endroit au mauvais moment.
Il ne détacha pas les yeux de la table. Il ne pouvait pas, même lodeur ne lui faisait plus rien. Il venait den prendre un coup, une sorte de vieillesse accélérée.
Et puis vint le moment des questions, de la curiosité. Ne pouvant se résoudre à ce que la vieille soit ce que le premier venu aurait pensé, il sapprocha de la table, laissant le dégout de côté.
Il planta ses yeux dans ceux de Babette
Puis ils tombèrent lentement sur
.
Jacquot
Il leva les yeux du cadavre avec difficulté, déglutit et observa la main tendu de la vieille. Juste la main. La regarder dans les yeux, ceci fut été trop dur en linstant présent. Ces doigts si frêle il y a quelques jours, avaient acquis lexpérience, lharmonie dune fraicheur expérimentée. Rien ne laissait transparaitre de la récente veuve quil avait connue. Non rien.
Lentement sa main se leva, puis son bras se raidit vers la vieille. Dun coup sec, il attrapa le poignet de la vieille avec violence. Ce nétait pas lui, son esprit qui agissait, mais la mécanique des choses, le plus profond de ses entrailles. La fin du radius émit un léger son, créant une onde qui vint se propager dans le bras du Jacquot, qui remonta le long de ses nerfs pour finalement atteindre le cordon médullaire.
Ses paupières se refermèrent le temps de sentir lémotion travaillée par ses synapses. Une chaleur sengouffra à travers ses poumons qui se ramifia en de multiple point. La réalité lavait quitté, une sorte de bien être et de fusion avec ce quil lentourait, le laissa ainsi plusieurs minutes sans que le temps et le mouvement nest datteinte sur cette harmonie.
Lorsque ses iris puissent enfin capter de nouveau la somme des photons de la pièce, il vit la vieille lui sourire, étrangement, un sourire de bienveillance, de réconfort. La table avait une toute autre allure que lorsque cette émotion lavait envahit.
Une voix se fit entendre, une voix douce et onctueuse.
Jacquot
Il se força à écouter. Il en avait envie mais la chaleur lempêchait de se concentrer. La voix de la vieille était plus une mélodie quun flot de parole. Certains mots se répercutèrent dans sa tête, comme un écho.
Ils ont besoin de nous
Sa respiration saccéléra et peu à peu la réalité lui revint en pleine figure. Lodeur lui emplit le nez, le dégouta avec une force inouïe. Il se retourna et se plia en deux pour sortir le reste de son repas. Il hoqueta, vidé, se sentant léger. Il avait besoin de se remplir, maintenant.
Remplit moi de connaissances. Je me doute de ce qui se trame ici, de ce que tu veux moffrir. Je ne peux pas te donner grand-chose en retour. Juste de me laisser faire comme une brindille que la fourmi transporte. Je serais pierre et tu pourras construire dessus.
Il ferma les yeux, se passa délicatement la langue sur ses lèvres, inspira par à-coups comme pour percer chaque phéromones présentes. Il distingua peu à peu différentes odeurs, comme différents sons, les unes saccordant aux autres. La putréfaction, le sang séché, les viscères en décomposition, lestomac et ses restes, tout saccordait à merveille pour finalement donner une unicité à chaque membres.
En rouvrant les yeux, ce fut autour du toucher de se satisfaire. Prenant de sa main lun des poumons, ne le soulevant que délicatement et quà moitié pour ne pas frustrer lharmonie, il le serra doucement. Chaque terminaisons nerveuse des ses doigt trouvèrent une sensations différentes, tantôt visqueux, tantôt rugueux. Il passa ensuite aux côtes qui lui donnèrent la dureté, la force, la structure de lharmonie,, lélément stable, protégeant la partie plus douce, la plus fragile.
Il effleura lun des bras et le faible son qui en sortit se répandit jusquà son tympan où lun cavalier frappa de son marteau lenclume avant de mettre pied à létrier. Descendant le long du canal carpien, il saisit avec force lun des doigts qui émit un léger craquement. La tonalité émit lorsque la fissure se produisit, lui parvint comme le claquement dun coup de tonnerre un soir dété, comme la rupture dune tension bienfaitrice mais difficile à orchestrer.
Sa pupille se dirigea vers le plus profond des entrailles, entre les abats. Certains manquaient, déposés avec soin sur lun des cotés libres de la table. Pourtant larrangement, lordre établi lui apparaissait limpide . Chaque composante avait sa place, son emplacement. Les couleur nétaient pas en reste , non plus. Les degrés de dégradés entraient en communion pour un mariage des plus savoureux, pour qui avaient lil.
Il regarda de nouveau vers la vieille
Il lui restait une seule note à ajouter à la partition. Il lui sourit et inclina légèrement la tête de coté. Dun geste assez ample, il posa adroitement et gracieusement son index entre la vésicule et le foie, le porta à a bouche et laissa ses papilles se stimuler. Un gout étrangement amer suivit dune touche dacidité, un note salée retinrent son attention. Il fit une légère moue, non pas de mécontentement, mais plutôt comme si quelque chose lui échappait. Goutant de nouveau, il émit un claquement de langue traduisant une certaine satisfaction.
Lharmonie, lordre et la précision dit-il en jetant un il pétillant mi-amusé, mi-admiratif à la vieille
Jacquot
Il prit dans ses mains le précieux carnet. Les dessins quil voyait était précis et fin. Aucun tremblement ne trahissait le doute que lon pouvait avoir à décrire ce genre de chose. IL était étonné, de la magnificence de ce quil avait sous les yeux. Une uvre, simplement une uvre.
Son visage séclaira peu à peu pour se muer en une sorte débahissement. Il suivait avec curiosité les indications de la vieille, ce quil pouvait regarder. Il jeta de temps en temps un coup dil à ce quil pouvait voir en réalité, à titre de comparaison.
Il posa délicatement le carnet sur un coin de la table et se pencha sur le corps. Il regarda brièvement la vieille et lui demanda dune voix assurée :
Je peux ?
Elle acquiesça dun mouvement de tête, le sourie toujours aux lèvres. Il prit lun des poumons
dans sa main, le souleva, passa un regard précis sur toute sa surface. Il le reposa avec dinfimes précautions à son emplacement initial. Prenant un couteau, il pratiqua une incision de manière à le scinder en deux. Libérant ainsi lun de moitié, il observa la coupe quil venait dopérer.
Il prit le soin de poser le poumon sur le rebord de la table, de se laver les mains dans une des bassines et dessina du mieux quil pouvait sa première section. Il sentait le regard de la vieille sur lui. Stimuler par cette présence , il sappliqua davantage, remettant une mèche de cheveux à sa place.
Lorsquil eut fini, il observa de nouveau le cadavre. Sur le coté droit, une plaie qui navait pas cicatrisée attira son attention. Il croisa les yeux de la vieille. Ils étaient dune insistance remarquable, comme pour lui dire, « tu y es presque » !
Sans une hésitation, il plongea son index et son majeur à travers le trou béant. Il sentit peu à peu que ses doigts rencontraient des masses gluantes, visqueuses. Se dirigeant de travers, vers la colonne vertébrale, il passe le long du Grand Oblique, puis du Grand Droit. Sa main se trouvait à présent presque entièrement à lintérieur du corps. Plus il avançait, plus il pouvait voir à travers le ventre sectionné, les intestins bougés aux rythmes de sa main.
Il rencontra enfin les lombaires et avec un sourire de contentement, retira sa main et dit annonça.
Quelquun à donc brisé lharmonie du malheureux.
Dans le creux de sa main reposait une boule surmontée dune sorte de triangle.
Jacquot
Retenant la vieille par son autre bras, il ne comprit pas directement ce quil se passait. Lendroit lui paru étrange, latmosphère précise et concentré qui était présente avait fui comme une feuille lors dun coup de vent soudain.
Il regarda de nouveau sa main ouverte en grand. Elle lui parut toute petite et lourde. Lobjet quil avait sortit, était le coupable du changement dambiance dans la vieille cave. Même les pierres semblait sêtre soudainement refroidies.
Il avala difficilement, tout en observant la vieille et sa soudaine réaction. Il referma ses doigts sur létrange objet, puis lattira vers une chaise. Il prit une profonde inspiration et dit :
Je ne sais quel mystère envahit ton âme, la vieille, mais maintenant tu vas devoir le partager avec moi.
Il passa une main délicate et protectrice sur son épaule.
Jacquot
Nom de Dieu
Oubliant le tout poli quil avait essayer de sapproprier les derniers jours, Jacquot laissa échapper le seul juron qui lui vint. Et puis le flot, lui monta aux lèvres comme pour se décharger, de la mauvaise surprise quil venait dentendre :
Putain de bordel de gueux de bord détang.
Bon Dieu de bon Dieu de bon Dieu.
Il prit une grande inspiration :
Tu veux dire que le Jeannot, tu las,, tu as, tu lavais et puis
.
Joignant le geste à la parole, il fit mine de découper.
Nattendant pas de réponses car il se savait dans le vrai, il continua :
Et
et
et
ça ?
Il montra le triangle
Finalement, lharmonie était facile à briser, celle de lesprit en première.