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Lescar et Odéa... une histoire commencée voici 20 ans. Un amour qui avait sombré et dont l'épave émerge de l'écume. Peut-on s'aimer à nouveau après que la vie vous ait broyé de ses terrifiantes mâchoires ? L'histoire d'une passion qui renait... ou qui implose

Les démons d'Odéa

Lescar



Voici mon coeur qui n'a battu qu'en vain.
(Paul Verlaine)


Lescar… tel était son nom. Durant toutes ces années, il ne s’en connut pas d’autres. Depuis ce jour d’hiver glacial, où on l’extirpa d’un fossé, agonisant, exsangue… Du fond de sa couche putride où il dériva des jours entiers, dans un éclair de conscience, un nom s’imposa… Il crut d’abord que c’était le sien et de sa bouche tordue de fièvre, balbutia « Lescar » à l’ombre bienveillante et paisible qui le surplombait. On ne chercha pas plus loin et dans ce village provençal, il fut connu comme Lescar le tisserand. Sous ce nom, il prit racine, construit sa vie, fonda famille…

Mais en lui vibraient d’autres sensations…terres de contradiction… remugles d’une vie antérieure… scories d’un passé obscur… Elles l’agitaient, le trouvaient en sueur, bouche sèche, yeux béants au cœur de la nuit. Il les chassait d’un revers de pensée, les noyaient parfois dans le mauvais vin de la pire taverne, se cassait le dos à la tâche pour oublier qu’il avait tout oublié.

Le destin prit la forme d’une vieille femme se réclamant de Koala, sa douce filleule… son bel amour… celle à qui il devait tant et qu’il avait si mal traitée. Koala de Névé dont on lui avait dit que le corps martyrisé reposait en terre gasconne après une vie d’errance hachurée de trop rares bonheurs. La vieille femme avait pour nom Huberthe… elle rendit à Lescar son histoire, son nom, sa mémoire. Né une deuxième fois de la même femme, Jérôme d’Ariste n’eut plus qu’à ensevelir sa mère, venue à Toulon mourir épuisée dans ses bras.

Lescar n’était que le village du Béarn où il apprit à survivre, à se défendre, à haïr… Fruit de la colère et de la douceur, de la cruauté et de la tendresse, d’Ariste était un être complexe oscillant toujours entre une incommensurable envie de vivre et un incompréhensible penchant pour l’autodestruction. Curieux esquif ballotant sur les brisants d’une vie amère dont il était le seul coupable…

A l’heure du bilan, son corps grinçait comme la lourde armure qu’un écuyer étourdi aurait négligé d’entretenir. Trop de batailles, trop de combats, trop de morts sur sa conscience… Son âme était percée de regrets, percluse de mauvais souvenirs, douloureuse de tant de péchés.

Le matin même la rumeur lui avait rapporté que celle qui avait partagé sa vie durant ces dernières années, était tombée sous les coups de l’armée du Roy. Curieuse ironie du sort… tuée par ceux-là même dont ils avaient tant voulu la protection. Lescar avait bifurqué à temps au sortir de l’Italie… comme s’il avait senti le danger d’un retour en Provence. Comme s’il avait senti que la page se tournait…

La Bourgogne… un nouvel exil. Pourquoi Chalon ? Pourquoi pas Chalon… Il avait fait halte, posant la lourde besace de son existence dans cette bourgade maussade, sans grâce, quelconque… Au fond de sa poche… un parchemin. Sur ce parchemin… un nom. Viendrait-elle ? Aurait-il le courage de regarder son passé dans les yeux ?

Odéa… dans sa poitrine un battement. Puis deux. Un autre encore… Etait-il en vie ?



Sujet balisé .
Bon amusement et bienvenue!
[La Clef]
Odea



Partons, dans un baiser, pour un monde inconnu.
(Alfred De Musset)



Il lui avait donné rendez-vous à Chalon. Elle avait été ébranlée de sa demande, mais surtout de cet espoir soudain qui s'était réveillé en elle. La mort n'était peut-être pas aussi proche qu'elle ne le croyait. Rien n'était jamais sûr, décidément.

Il y avait eu beaucoup de pas à franchir avant d'arriver en Bourgogne, mais elle ne les comptait plus. Ils étaient aussi nombreux que les lettres qu'elle s'amusait à aligner; à lier et délier; à aimer et haïr; à embrasser et mettre au feu. Lettres qui curieusement ressemblaient à ce lien qui la retenait à l'homme qu'elle allait rejoindre. Allongeant le pas vers lui, pour les bonnes et les mauvaises raisons, elle avait vite fait de remettre cette carapace qui la faisait paraître si solide.
Combien de temps celle-ci allait tenir ?

Un soir, elle fut à Chalon. Elle y prit une chambre dans la première auberge encore ouverte et s'imbiba généreusement les sens d'un alcool imbuvable. La chambre était jolie, mais la ville n'avait pas de paysage. Tout y était banal; les habitants, les couleurs, les odeurs jusqu'au ciel qui restait blanc de peur. Aussi apeuré qu'elle ne l'était de le revoir et d'affronter les émotions latentes au fond de son âme tourmentée.

Il fut une silhouette au fond d'une auberge, une voix, un regard et un grand frisson. Jérôme d'Ariste dict Lescar, était devant elle. Quels gestes devaient-elle poser et quelles paroles devaient-elle dire pour masquer son trouble ? Leurs routes se recroisaient enfin... Pourtant, Odea resta presque imperturbable ne laissant pointer qu'une infime partie de cet océan d'émotion qui la submergeait. Jérôme. Jérôme...

Un tremblement, une main sur sa joue rugueuse, quelques paroles qui disent si peu... Pourtant, tant de choses la prit et la fit chavirer en ce soir de janvier. Il était là ! Il n'avait pas beaucoup changé, le temps s'était amusé à jeter sur son visage quelques chemins égarés, sans plus. Il était là. N'était-elle pas sur le point de se noyer dans ses yeux ? Ils avaient une vie à se raconter, plus de vingt ans à reprendre. Était-ce possible ? Était-ce nécessaire ? Il y avait tant de questions, d'amertume, de colère... Il y avait tant de silence, d'amour, d'espoir...

La main de Jérôme était chaude et Odea l'attira à l'extérieur de la taverne. Il leur fallait un lieu clos pour retrouver leurs sens. Un endroit sûr où elle pourrait se permettre de chavirer complètement. Sa chambre était le seul lieu possible. Elle le guida vers ce coffre-fort aux combinaisons perdues, dans un silence criant. Une clé tourna dans la serrure, la porte s'ouvrit et se referma. Un temps passa sans ange ni démon.

Le silence s’installa sans lourdeur, pour sauver leurs vies et faire renaître ce qui n'a jamais été mort. Tristesse et amour dans l'étreinte qu'elle recherche en s'approchant de lui. L'armure se fracasse et Odea redevient Béatrice dans un sanglot qu'elle étouffe dans le creux de l'épaule de Jérôme. Elle se fond dans son odeur en se moquant des démons qui font une ronde autour de leurs âmes. Elle n'aspire qu'à la damnation éternelle pour brûler avec cet homme.


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Odea de Fleuré
La sagesse est d'être fou... au bon moment.
Lescar


J'étais un enfant et elle était un enfant mais nous nous aimions d'un amour qui était plus que de l'amour.
(Edgar Allan Poe)


Odéa… tel était son nom. Mais il ne l’avait pas toujours connu sous celui-là. Dans sa mémoire en reconstruction, d’aussi loin que lui revenaient les sons et images de sa jeunesse, il revoyait les traits d’une petite fille répondant au doux nom de Béatrice. Des cheveux un peu fous, une tignasse pour tout dire… un sourire espiègle… des joues promptes à rosir… une voix pleine d’enfance… perchée dans les aigus comme une de ces petits pommes juteuses dont la verdeur acide n’a pas encore laissé place à la rondeur acidulée.

Béatrice… la fille du tisserand où il apprenait péniblement son métier. Chaque jour, il transpirait sang et eau dans l’atelier du maître, plongeant dans des bains à l’odeur âcre, écoeurante, des peaux fraîchement prélevées sur l’échine de jeunes ovins. Les teintures brûlaient ses doigts, les lames entamaient ses chairs, les vapeurs irritaient ses yeux pâles. Mais pour rien au monde, il n’aurait failli à sa tâche. Parce qu’elle le regardait avec tant de ferveur que son devoir quotidien était d’abord de ne point la décevoir. Il s’y employait avec détermination.

Béatrice devenue Odéa au fil des jours… La fillette réfléchie avait peu à peu laissé place à une jeune femme dont il découvrait au hasard de regards furtifs, les rondeurs prometteuses. Il se souvenait avec émoi de leur premier baiser… ce premier élan qui allait les conduire au bord du gouffre. Il revoyait les lèvres douces et ardentes de Béatrice se poser délicatement sur les siennes. Pur moment de grâce où le temps fut comme suspendu. En lui, la bête sourde donnait de violents coups dans sa poitrine, cage dérisoire devenue soudain trop exiguë. Ses mains maladroites avaient étreint sa taille. Il se sentait stupide… et béat.

Par ce baiser volé un soir d’été derrière l’atelier puant du vieux maître tisserand, Béatrice avait révélé en lui le mystère qui le faisait se lever sans peur, sans peine, chaque matin de sa jeune vie. L’amour…

Jérôme aimait Béatrice. Il se souvenait l’avoir conduite au sommet de la petite colline dominant le village, cette hauteur que l’on appelait ici l’Oppidum. Face à la chaîne enneigée des montagnes Pyrénées, il avait saisi sa main et avait formulé le serment. Celui d’unir leurs vies. De s’aimer à jamais. D’emmener ici leurs enfants pour leur apprendre la beauté, la pureté, la fidélité. Un bonheur simple. La promesse d’une vie heureuse au cœur de ce Béarn exigeant et généreux.

Leur bonheur aurait pu être celui-là. Il aurait sans doute du l’être. Mais sous Jérôme perçait déjà Lescar… et le serment fut rompu. Par lui seul.

Lescar avait fui. Comme souvent. Comme toujours. Sans un mot, une nuit d’orage, un pauvre baluchon pendu à son épaule, une hachette battant ses flancs, les doigts crispés sur le bâton de marche. Sa destination ? Ce point qu’il apercevait là-bas à l’horizon et qui, sitôt atteint, devenait le point de départ vers un autre horizon… Certains partent avec l’espoir de revenir fortune faite, riches d’expériences, couverts de gloire… Son ambition était plus modeste : Survivre un jour de plus. Jusqu’au jour où sa vie bascula dans l’oubli.

Entre chien et loup, il entra dans l’auberge. Elle était là. Belle, rayonnante… et il mesura en une pensée toute l’étendue de ses erreurs et de ses fautes. La bête fauve qui donnait de violents coups dans l’illusoire cage qui la contenait avec peine, lui confirma ce qu’il avait toujours su.

On ne fuit pas l’amour…

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Jérôme d'Ariste
Lo que a de ser no puede faltar
Odea


"Quand les démons veulent produire les forfaits les plus noirs, ils les présentent d'abord sous des dehors célestes. "
(William Shakespeare, Othello )



Les démons dansaient en silence soulevant dans la chambre la poussière des souvenirs. Seul un esprit malin pouvait s’amuser à réunir ainsi les âmes perdues. Seul un être assoiffé du sang de l’amertume et du regret pouvait rassembler ainsi les esprits noueux. Odea le ressentait aisément, cette confusion malsaine, cette bataille absolu entre la haine et l’amour. Elle tremblait d’avance en sachant que le moment était sans doute venu d’y mettre un terme. Il devait y avoir un gagnant.

Ses larmes coulaient comme une rivière sur ses joues pâles, elle qui ne savait plus pleurer. Elles prenaient leurs sources dans les labyrinthes douloureux de sa mémoire. Quelques larmes ruisselaient doucement sur sa gorge, venant mouiller l’étoffe fine de la chemise de l’homme qui la tenait étroitement contre lui.

Jérôme…elle l’avait aimé d’une force démesurée.
Du premier instant où ses yeux s’étaient posés sur elle, dans l’atelier de son père, elle avait su. Cette prémonition qu’un impensable lien entrelacerait leurs vies lui avait été révélé soudainement sans qu’elle ne puisse se l’expliquer. Elle était pourtant sérieuse et pragmatique la Béatrice ! Le mystère était complet. Elle aimait Jérôme de toutes ses forces et son esprit défaillait complètement sous les frôlements de la main du jeune homme… Elle était à ses premiers émois, et son cœur était en perpétuel état de commotion. Cela ne pouvait qu’être l’amour. Cela ne pouvait qu’avoir ce doux nom et naturellement grandir et vivre éternellement… Mais pourtant, un jour la tempête fit trembler Béatrice.

Jérôme…elle l’avait détesté d’une force démesurée.
Lorsque les mains de son amant quittèrent les siennes, lorsque ses lèvres n’eurent plus les mêmes mots; la tempête se leva. Que s’était-il passé cette nuit-là pour qu’elle ne le retrouve plus au matin ? Elle avait cherché un mot, quelques lettres entrelacées qui lui auraient expliqué son départ. Elle avait questionné le ciel et les enfers mais la tempête était trop forte pour qu’elle entende l’écho de ses requêtes. Se réveillait-elle d’un rêve si beau qui ne pouvait être réel ? Bientôt, elle su que l’amour avait sévit en elle comme un voleur cruel, lui dérobant son cœur, certes, mais lui laissant au creux de son ventre un don inespéré...


Odea laissa échapper un sanglot déchirant sa gorge, lui laissant un étrange bien-être. Elle leva les yeux vers Lescar pour y retrouver ce qui ne s’était jamais éteint. Les démons avaient beau danser le quadrille infernal de la haine, seul l’amour perdurait.

Inexplicablement. Comme le vainqueur de tout mal.

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Odea de Fleuré
La sagesse est d'être fou... au bon moment.
Lescar


Je vous aime, voici pourquoi : vous ressemblez à ma jeunesse
(Sully Prudhomme)


Lescar prie délicatement le visage d’Odéa entre ses mains. Le temps avait parfait son œuvre. Odéa était belle. En scrutant ses yeux, au plus profond, sans détour, il s’interrogeait sur les raisons de sa pitoyable lâcheté. Quel mal, quel renoncement, quelle angoisse avait pu le saisir pour se punir ainsi. Se punir de ne plus se noyer chaque jour dans ses prunelles, de s’extraire à jamais de la douceur de ses bras, de ne plus voguer en elle et se répandre dans le plus doux des écrins ? Un châtiment qu’il lui avait elle aussi imposé…

Ne lisait-il pas pourtant dans ses yeux que la haine n’avait pu tuer l’essentiel ? N’était-ce pas un peu de cette passion vécue dans leur jeunesse, qui luisait encore en elle d’un feu qu’il sentait ardent ? Etait-ce ce même feu qu’il avait fui ?

A quoi cela avait-il servi d’ailleurs de fuir puisqu’il n’avait pu oublier celle qui lui avait donné ses premiers émois ? Peut-on détourner indéfiniment son esprit de l’évidence ? Faut-il être si médiocre pour refuser ainsi le bonheur… La réflexion le frappa de plein fouet… la réponse n’était-elle pas là en fin de compte ? Oui Lescar n’était pas fait pour le bonheur. Il en est des destins comme des êtres, certains prospèrent du don ou du talent qu’ils ont reçu… d’autres ne charrient que leur propre malédiction. Mais l’amour est-il une malédiction ?

Adossé au tronc d’un arbre noueux, Lescar regardait le soleil rougeoyant s’effondrer avec une infinie lenteur derrière les cimes lorsque le pigeon se posa près de sa main. Détournant avec peine le regard du spectacle fascinant de sa mort prochaine, il aperçut le fin ruban que le messager portait au cou. Harassé, il chassa l’oiseau d’un revers de gant. Et le bonheur avec. Mais c’était sans compter sur l’insistance du volatile qui ne cessa de le harceler au point que Lescar finit par comprendre que les desseins prennent souvent des chemins tortueux pour s’accomplir. Le bonheur insistait comme un oiseau entêté.

Les mots qu’il lit sur le mince parchemin ravivèrent en son cœur un tison sur lequel souffla bientôt une bourrasque de souvenirs. Cette bourrasque, certains l’auraient appelée nostalgie. Lui la dénomma remord. Béatrice… la douce enfant, la belle adolescente, la femme accomplie. Ces mots étaient les siens. Des mots qui parlèrent au cœur du bellâtre, du sournois, de l’arrogant soudard qu’il était devenu. Au fur et à mesure de sa lecture, Lescar fondait bloc par bloc, fissure après fissure, pour laisser à Jérôme la place qu’il lui avait usurpée.

Lescar troqua son épée ébréchée contre une penne immaculée. L’échange épistolaire qui s’ensuivit, confirma que la douloureuse armure dont il s’était caparaçonnée, s’était amollie, fendue, délitée. Béatrice lui avait rendu sa chair. Et dans sa chair offerte, Odéa planta le poignard.

Emelyne… tel était son nom.

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Jérôme d'Ariste
Lo que a de ser no puede faltar
Odea




Nous avons tous trop souffert, anges et hommes, De ce conflit entre le Pire et le Mieux.
(Paul Verlaine)




C’était l’hiver et le paysage Béarnais s’était recouvert d’un fin frimas qui brillait sous le soleil. Cette blancheur camouflait de sa magnificence la laideur grisâtre de la saison morte. Bientôt, on entendit dans le calme du matin, les cris et les pleurs d’un nouveau-né. C’était la petite-fille du tisserand qui appelait la vie, et visitait sa première douleur. On l’appela Émelyne.

Elle était belle et délicate. Ses yeux brillaient, tels des saphirs dans un écrin rose et tendre. C’était le trésor de Béatrice, sa plus belle poésie; son œuvre suprême. Les douleurs de la délivrance n’avaient eu plus aucunes importances à l’instant précis que son enfant s’était tenu serré contre son sein. Une vague puissante l’avait alors prise, l’entraînant dans un tourbillon d’émotions qu’elle ne savait nommer. Il y a avait, certes, une charge importante d’amour dans ce flot instinctif qui reliait la mère à l’enfant, mais quelque chose de plus, inqualifiable et unique qui berçait les générations dans un mystère irrésolu.

C’est les yeux perdus dans ceux de Jérôme qu’Odea se souvenait de ces instants. Comment faire autrement lorsque l’azuré du regard qui l’inondait s’apparentait avec exactitude à celui des gemmes d’Émelyne ? Elle lisait en lui ce désir de connaître la suite de cet amour qu’il lui avait laissé sans le savoir. Pouvait-il seulement comprendre qu’il lui avait fait le plus grand des cadeaux ? Saurait-il lui pardonner de n’avoir pu garder cet inestimable trésor en vie ? Le lien qui la reliait à sa fille perdurait pourtant...malgré la mort.

Il lui fallait parler, tuer le silence empoussiéré de doutes et de douleurs. Il fallait mettre des mots sur les larmes qui n’avaient cessées de couler en torrents pendant toutes ces années. Il était nécessaire de mettre un nom sur ce mal, sur ce fossé qui étrangement les rapprochait à chaque pas dans cette chambre d’auberge.

Il fallait tuer les démons.

La gorge nouée, Odea murmura à Jérôme :
Tu m’as demandé de te parler d’elle…

Une larme se faufila entre les cils d’Odea et glissa jusqu’à un coin de ses lèvres. Elle ne pouvait quitter le regard de l'homme qui la remuait tellement... même qu'elle voulait s'y noyer dans une longue asphyxie.

Elle avait le prénom de ma mère… et tes yeux… et je l’aimais… Elle aimait rire, les chatons gris et les pâquerettes… et je l’aimais… et je l'aimerais toujours...

La femme baissa la tête soudainement submergé de honte et poursuivit la voix étouffée d’un sanglot.

Je n’ai pas su la garder… comme je n’ai pas su te retenir.


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Odea de Fleuré
La sagesse est d'être fou... au bon moment.
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