Semias
[De Montaigut...]
Fichus Conseillers Ducaux qui ne parlent que de chiffres, de calculs et d'estimations ! Comment pouvait-on s'exalter devant une feuille remplie d'équations aussi parlantes d'une meute de carpes ? Non, franchement ! Il faudrait songer à les enfermer, des gens pareils. Plus qu'un danger pour eux-même, ils l'étaient avant tout pour les autres. Parce que le Balsac était solide mentalement, mais pour le coup avait grand mal à résister. Et puis... Les relations diplomatiques avec on ne sait quel Duché du fin fond de la France étaient sans nul doute intéressantes. Les premiers jours du moins. Aussi, il fallait l'avouer, il commençait à trouver le temps long.
Blanche...
Oui, la pièce de vélin devant lui était toujours blanche. C'était d'ailleurs bien la seule, en réalité, puisque de toute part, la table qui servait de bureau était envahie de rouleaux en tout genre. Les traités, voilà sans doute ce qu'il y avait de plus ennuyeux, en somme.
Réflexe acquis depuis qu'il savait coucher les mots sur le papier, quoiqu'à ses débuts, il s'agissait sans doute plus de caractères difformes que de mots, le fils Balsac porta l'extrémité de la plume en sa bouche, adoptant alors un regard pleinement inexpressif pendant un instant. Puis, lentement, la plume quitta la bouche, s'approcha du vélin jusqu'à l'effleurer. Et de nouveau un arrêt. La main, hésitante, recula. De toute évidence, la composition qu'il avait devant lui n'avancerait guère. Le cousin-Duc lui avait donné une tâche ardue cette fois-ci.
Blanche...
Oui, la pièce de vélin l'était définitivement. Tout comme le rebord de la fenêtre. Alentour, il semblait encore faire bien froid d'ailleurs, et Montaigut avait lui aussi revêtu cette inlassable teinte blanche, du moins était-ce ce qui transparaissait au travers des carreaux embués du bureau. Fallait-il y voir un signe ?
Blanche !
La main s'approcha une nouvelle fois du vélin, et cette fois, s'avéra bien plus productive que durant l'heure précédente. L'inspiration n'était finalement qu'une affaire de temps, il lui faudrait s'en souvenir. A moins que ce ne soit le sujet qui lui était soudainement venu à l'esprit ? Quoiqu'il en soit, l'extrémité de la plume glissait désormais à une vitesse folle, s'arrêtant de temps à autre pour plonger dans le pot à encre, faisant par moment crisser discrètement la matière.
Fichus Conseillers Ducaux qui ne parlent que de chiffres, de calculs et d'estimations ! Comment pouvait-on s'exalter devant une feuille remplie d'équations aussi parlantes d'une meute de carpes ? Non, franchement ! Il faudrait songer à les enfermer, des gens pareils. Plus qu'un danger pour eux-même, ils l'étaient avant tout pour les autres. Parce que le Balsac était solide mentalement, mais pour le coup avait grand mal à résister. Et puis... Les relations diplomatiques avec on ne sait quel Duché du fin fond de la France étaient sans nul doute intéressantes. Les premiers jours du moins. Aussi, il fallait l'avouer, il commençait à trouver le temps long.
Blanche...
Oui, la pièce de vélin devant lui était toujours blanche. C'était d'ailleurs bien la seule, en réalité, puisque de toute part, la table qui servait de bureau était envahie de rouleaux en tout genre. Les traités, voilà sans doute ce qu'il y avait de plus ennuyeux, en somme.
Réflexe acquis depuis qu'il savait coucher les mots sur le papier, quoiqu'à ses débuts, il s'agissait sans doute plus de caractères difformes que de mots, le fils Balsac porta l'extrémité de la plume en sa bouche, adoptant alors un regard pleinement inexpressif pendant un instant. Puis, lentement, la plume quitta la bouche, s'approcha du vélin jusqu'à l'effleurer. Et de nouveau un arrêt. La main, hésitante, recula. De toute évidence, la composition qu'il avait devant lui n'avancerait guère. Le cousin-Duc lui avait donné une tâche ardue cette fois-ci.
Blanche...
Oui, la pièce de vélin l'était définitivement. Tout comme le rebord de la fenêtre. Alentour, il semblait encore faire bien froid d'ailleurs, et Montaigut avait lui aussi revêtu cette inlassable teinte blanche, du moins était-ce ce qui transparaissait au travers des carreaux embués du bureau. Fallait-il y voir un signe ?
Blanche !
La main s'approcha une nouvelle fois du vélin, et cette fois, s'avéra bien plus productive que durant l'heure précédente. L'inspiration n'était finalement qu'une affaire de temps, il lui faudrait s'en souvenir. A moins que ce ne soit le sujet qui lui était soudainement venu à l'esprit ? Quoiqu'il en soit, l'extrémité de la plume glissait désormais à une vitesse folle, s'arrêtant de temps à autre pour plonger dans le pot à encre, faisant par moment crisser discrètement la matière.
Citation:
A Montaigut en Combraille, le vingt-deuxième de février mil quatre cent cinquante-huit.
A l'indéchiffrable cousine qui, fatalement, intrigue,
Salutations.
Vous ayant deviné plus joueuse que ne le laissait présager votre éducation, permettez-moi de vous convier en mon bureau de la chancellerie clermontoise. Il est certain qu'ici l'ennui s'avère édifiant et qu'alors qu'il me faut rédiger quelque texte diplomatique, me voilà à coucher plus d'un mot à votre attention.
Et d'ailleurs, cela ne m'étonne guère, vous êtes bien meilleure source d'inspiration.
N'ayez crainte cependant, devant le forfait que vous avez déclaré face à ma précédente lettre, j'ai renoncé pour cette fois à y glisser une quelconque énigme. A moins que je ne me laisse tenter, finalement ?
Ensuite il n'appartient qu'à vous de creuser vos méninges. Vous êtes bien plus maligne que vous ne me le laissez entendre. J'espère qu'il ne s'agit pas d'une de vos ruses pour m'inviter à abuser de vos présupposées faiblesses. Prenez garde d'ailleurs, je cède aisément à ce genre de tentation, au grand dam de mon confesseur...
Zeste de ce qui vous attendra en ces lieux, vous trouverez, jointe à cette missive, ce qui fera également office de droit d'entrée. Pardonnez-moi de ne plus en raconter, il vous faudra trancher avec si peu. Tâchez de ne pas la perdre, auquel cas nous nous verrions bien embêtés pour poursuivre l'activité que je vous propose.
Cordialement,
S. de Balsac Penthièvre.
A l'indéchiffrable cousine qui, fatalement, intrigue,
Salutations.
Vous ayant deviné plus joueuse que ne le laissait présager votre éducation, permettez-moi de vous convier en mon bureau de la chancellerie clermontoise. Il est certain qu'ici l'ennui s'avère édifiant et qu'alors qu'il me faut rédiger quelque texte diplomatique, me voilà à coucher plus d'un mot à votre attention.
Et d'ailleurs, cela ne m'étonne guère, vous êtes bien meilleure source d'inspiration.
N'ayez crainte cependant, devant le forfait que vous avez déclaré face à ma précédente lettre, j'ai renoncé pour cette fois à y glisser une quelconque énigme. A moins que je ne me laisse tenter, finalement ?
Ensuite il n'appartient qu'à vous de creuser vos méninges. Vous êtes bien plus maligne que vous ne me le laissez entendre. J'espère qu'il ne s'agit pas d'une de vos ruses pour m'inviter à abuser de vos présupposées faiblesses. Prenez garde d'ailleurs, je cède aisément à ce genre de tentation, au grand dam de mon confesseur...
Zeste de ce qui vous attendra en ces lieux, vous trouverez, jointe à cette missive, ce qui fera également office de droit d'entrée. Pardonnez-moi de ne plus en raconter, il vous faudra trancher avec si peu. Tâchez de ne pas la perdre, auquel cas nous nous verrions bien embêtés pour poursuivre l'activité que je vous propose.
Cordialement,
S. de Balsac Penthièvre.
Le jeune homme releva la tête, parcourant déjà du regard la lettre fraîchement rédigée. Oui, cela semblait bien. Il replia le vélin et se leva. Fouillant dans la besace qu'il avait ramené avec lui de Clermont, il en ressortit un tas de cartes. Décidément, les bohémiens pouvaient s'avérer utiles, en plus d'être divertissants. Il tourna la première du tas, puis la seconde, et glissa la troisième dans le pli. La jeune femme couronnée qui y était dessinée se prêtait parfaitement à l''occasion. Il scella alors le tout.
[... A Clermont]
Quelques jours plus tard, affalé dans son fauteuil de Chancelier, les talons de ses bottes reposant sur le bureau, il tenait en main un exemplaire d'un texte qu'il tentait d'assimiler. Hélas, une nouvelle fois ses pensées furent absorbées par un sujet tout autre. Quelle drôle d'idée avait-il pu avoir là, en fait ? L'impression que quelque part, à des centaines de lieues, la demoiselle trouverait ça intéressant, sans doute, ou bien ludique, peut-être ? Quoiqu'il en soit, les quelques échanges avaient fini par lui manquer bien trop rapidement. Et il ne regrettait pas cet envoi.
Mais bon dieu, qu'il était parfois difficile de se mettre à la tâche.
_________________