Finam
[Aux abords du Mans.]
Un homme a toujours le droit de s'venger, si peu que ce soit. La vengeance est bonne pour le caractère, d'elle naît le pardon. Oui, cette vengeance sera son pardon, le Grand Pardon.
Finam.
Quelques mois tantôt, au lendemain de l'Été, la justice mainoise le cueille comme une feuille d'automne un peu trop sèche, alors qu'il s'apprête à traverser le plat Comté. Lui, et son associée, bien qu'il se retrouve seul finalement à ingurgiter les prunes estivales. Et on s'esclaffe alors, on parle, on crie sa joie, dans les instances du Comté. Comme si l'acharnement qu'il eut subit des mois durant trouvait son apogée, côté mainois, en cette sentencieuse injustice.
S'ensuivent bien évidemment des jours de rixes, de troubles, et de déstabilisation dans le Domaine Royal, du fielleux binôme, prélude d'une vendetta future qui sonnera le glas, l'espèrent-ils, de leurs opposants.
Sept mois. Voilà sept mois qu'il n'avait pas posé sa patte incontinente sur le sol mainois. Une durée salvatrice, entre babillages et politique. A farfouiller à droite à gauche, à gauche à droite, à la recherche de compagnons. A fomenter doucettement mais sûrement son coup.
Parce que l'est pas seul le gredin, à dresser les yeux sur les remparts mainois, là.
Une petite troupe l'accompagne, formée à l'emporte-pièce, entre amis, familles, connaissances, connaissances de connaissances. Et la Zoko, bien sûr.
-J'veux du rouge, du bordélique de rouge. Faut repeindre cette ville, c'trop terne. Je trouve.
Il se remet un paquet en place, pas celui auquel vous pensez. Son moutard, qu'il tient d'un bras contre son buste. Puis se tourne vers Laudanum, à ses côtés.
T'as pas la fibre artistique, l'Poison?
-J'grave à la dague, si on peut appeler ça de l'art. Jj'peux t'tapisser les remparts de carmin après avoir sculpté les visages du coin, ce sera assez rouge pour toi?
Elle jette un il au Melchiore, jamais vu son associé faisant preuve d'autant de paternalisme. Pourtant, à première vue, ça ressemble pas à un paquet de blé, mais plutôt à un pavé d'emmerdes.
-Écarlate. Au poil. Sculpture, peinture. Pendaison. D'l'art la pendaison, non?
-Un ravissement les balancements, et le double nud coulant, ça vous coupe le souffle quand c'est bien fait, pour sûr que c'est de l'art.
-M'ont prit quatre-vingt piécettes ces charlatans, l'Poison. Quatre-vingt piécettes, et j'me suis sacrément fait chier. Putain d'voleurs! V'là le procès, un procureur redondant et une juge demeuré. J'en veux pour mon argent.
Elle hausse un sourcil pour accentuer la surprise.
-Tu leur as filé quatre-vingt piécettes, toi? T'avais bu combien, la veille? J'ai jamais pu t'arracher un centime, et me parle pas de ton aile, à entretenir c'est un foutu gouffre!
-C'est qu'j'ai pas eu l'choix, rappelle-toi. Le piquet d'la frontière passée qu'un corbeau m'déposait une lettre du tribunal.
-Quatre vingt têtes à pendre alors, toutes alignées en rangées de coquelicots.
-Un écu, une tête: pas qu'le faciès de mainois vaut un denier, mais ça reste jouissif. Je marche.
-Mouais, j'sais ce que c'est, valent autant qu'un cul d'artésien ces mainois.
Pis j'ai besoin de me dégourdir, l'hiver a été froid dans le Nord. Le rab est offert bien sûr, serviront à décorer leurs piquets.
Le Montmorency, non sans un dernier sourire adressé à son associée, se retourne vers les autres.
-Bon, on fait quoi?
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"Aristote aurait pu devenir un saint, le patron de tous ces Romains qui ne cessent de trahir.."
Un homme a toujours le droit de s'venger, si peu que ce soit. La vengeance est bonne pour le caractère, d'elle naît le pardon. Oui, cette vengeance sera son pardon, le Grand Pardon.
Finam.
Quelques mois tantôt, au lendemain de l'Été, la justice mainoise le cueille comme une feuille d'automne un peu trop sèche, alors qu'il s'apprête à traverser le plat Comté. Lui, et son associée, bien qu'il se retrouve seul finalement à ingurgiter les prunes estivales. Et on s'esclaffe alors, on parle, on crie sa joie, dans les instances du Comté. Comme si l'acharnement qu'il eut subit des mois durant trouvait son apogée, côté mainois, en cette sentencieuse injustice.
S'ensuivent bien évidemment des jours de rixes, de troubles, et de déstabilisation dans le Domaine Royal, du fielleux binôme, prélude d'une vendetta future qui sonnera le glas, l'espèrent-ils, de leurs opposants.
Sept mois. Voilà sept mois qu'il n'avait pas posé sa patte incontinente sur le sol mainois. Une durée salvatrice, entre babillages et politique. A farfouiller à droite à gauche, à gauche à droite, à la recherche de compagnons. A fomenter doucettement mais sûrement son coup.
Parce que l'est pas seul le gredin, à dresser les yeux sur les remparts mainois, là.
Une petite troupe l'accompagne, formée à l'emporte-pièce, entre amis, familles, connaissances, connaissances de connaissances. Et la Zoko, bien sûr.
-J'veux du rouge, du bordélique de rouge. Faut repeindre cette ville, c'trop terne. Je trouve.
Il se remet un paquet en place, pas celui auquel vous pensez. Son moutard, qu'il tient d'un bras contre son buste. Puis se tourne vers Laudanum, à ses côtés.
T'as pas la fibre artistique, l'Poison?
-J'grave à la dague, si on peut appeler ça de l'art. Jj'peux t'tapisser les remparts de carmin après avoir sculpté les visages du coin, ce sera assez rouge pour toi?
Elle jette un il au Melchiore, jamais vu son associé faisant preuve d'autant de paternalisme. Pourtant, à première vue, ça ressemble pas à un paquet de blé, mais plutôt à un pavé d'emmerdes.
-Écarlate. Au poil. Sculpture, peinture. Pendaison. D'l'art la pendaison, non?
-Un ravissement les balancements, et le double nud coulant, ça vous coupe le souffle quand c'est bien fait, pour sûr que c'est de l'art.
-M'ont prit quatre-vingt piécettes ces charlatans, l'Poison. Quatre-vingt piécettes, et j'me suis sacrément fait chier. Putain d'voleurs! V'là le procès, un procureur redondant et une juge demeuré. J'en veux pour mon argent.
Elle hausse un sourcil pour accentuer la surprise.
-Tu leur as filé quatre-vingt piécettes, toi? T'avais bu combien, la veille? J'ai jamais pu t'arracher un centime, et me parle pas de ton aile, à entretenir c'est un foutu gouffre!
-C'est qu'j'ai pas eu l'choix, rappelle-toi. Le piquet d'la frontière passée qu'un corbeau m'déposait une lettre du tribunal.
-Quatre vingt têtes à pendre alors, toutes alignées en rangées de coquelicots.
-Un écu, une tête: pas qu'le faciès de mainois vaut un denier, mais ça reste jouissif. Je marche.
-Mouais, j'sais ce que c'est, valent autant qu'un cul d'artésien ces mainois.
Pis j'ai besoin de me dégourdir, l'hiver a été froid dans le Nord. Le rab est offert bien sûr, serviront à décorer leurs piquets.
Le Montmorency, non sans un dernier sourire adressé à son associée, se retourne vers les autres.
-Bon, on fait quoi?
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"Aristote aurait pu devenir un saint, le patron de tous ces Romains qui ne cessent de trahir.."