Chaos
La nuit, lorsque tous les paisibles paysans dorment après leur journée de labeur, les rats prennent possession de la ville, raflant les miettes éparpillées sur le sol après que le marché se soit peu à peu vidé. C'est aussi l'heure pour les âmes troublées dans leur sommeil de sortir, de marcher sur les pavés humides et froids sans être dérangés dans leurs songes par une présence humaine ; mais il y avait aussi les coupes-gorges, les voleurs de bourses, les contrebandiers, et Chaos, les joues rouges de colère. Des emmerdes, il n'avait eu que ça ces temps-ci. Le procès intenté par cette gueuse, et Aurore qu'il ne voyait plus, qui le traitait de Gaspard les rares fois où ils avaient un contact. Jamais, plus jamais, il ne s'attachera à une femme. Ce sont toutes des manipulatrices dans l'âme, et l'idée que le brun ténébreux soit leur jouet l'agaçait tant qu'il frappait dans tout ce qui était à sa portée : bouteille, tonneau, vitre, porte, caillou, légume, rongeur. Il avait une furieuse envie de prendre une torche et de la lancer sur un toit, de voir le village entier s'embraser, par sa seule faute.
Voilà comment se changer les idées. Il trouverait bien un milicien isolé à défier en duel, ou un simple gueux à martyriser, à faire hurler, tandis que les volets s'entrouveront, avant de se refermer précipitamment sur son passage. La chasse était ouverte. Ponots, gare à vous, le Loup arrive.
Main sur la garde de son épée pour ne pas perdre de temps, le jeune brigand arpente les rues, épiant les moindres zones d'ombre où pourrait se cacher un gamin essayant de survivre parmi la vermine. Dans l'état où il était, il aurait même agressé un grand-père, tant la colère en lui était lourde à porter, pressante à évacuer. Rien que l'idée qu'il ne soit pas parti de ce comté plus tôt suffisait à faire couiner ses gants de cuir recouvrant ses poings serrés aux extrêmes. Ce soir, l'astre blanc allait être rouge du sang versé.
Et elle, elle doit être dans les bras d'son nouvel amant, marmonna Chaos entre ses dents serrées, pris d'une vague de jalousie en repensant à Aurore qui le délaissait presque. Je haïs les femmes. Je haïs les gens, ces rats.
Pris par ce sentiment de haine envers tout ce qui l'oppressait ces temps-ci, il donna un coup de poing dans une porte en bois, celle de La Poutre. Sans s'en rendre compte, il avait pris le chemin de la taverne, la seule qu'il connaissait vraiment. Le hasard joua encore une fois lorsqu'il aperçut une silhouette dans la nuit, qui disparut aussitôt au détour d'une ruelle. Les muscles sourciliers se contractèrent, et le brigand avança d'un pas décidé, se mettant presque à courir pour ne pas laisser échapper sa proie. Qui que ce soit, il était perdu d'avance.
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Voilà comment se changer les idées. Il trouverait bien un milicien isolé à défier en duel, ou un simple gueux à martyriser, à faire hurler, tandis que les volets s'entrouveront, avant de se refermer précipitamment sur son passage. La chasse était ouverte. Ponots, gare à vous, le Loup arrive.
Main sur la garde de son épée pour ne pas perdre de temps, le jeune brigand arpente les rues, épiant les moindres zones d'ombre où pourrait se cacher un gamin essayant de survivre parmi la vermine. Dans l'état où il était, il aurait même agressé un grand-père, tant la colère en lui était lourde à porter, pressante à évacuer. Rien que l'idée qu'il ne soit pas parti de ce comté plus tôt suffisait à faire couiner ses gants de cuir recouvrant ses poings serrés aux extrêmes. Ce soir, l'astre blanc allait être rouge du sang versé.
Et elle, elle doit être dans les bras d'son nouvel amant, marmonna Chaos entre ses dents serrées, pris d'une vague de jalousie en repensant à Aurore qui le délaissait presque. Je haïs les femmes. Je haïs les gens, ces rats.
Pris par ce sentiment de haine envers tout ce qui l'oppressait ces temps-ci, il donna un coup de poing dans une porte en bois, celle de La Poutre. Sans s'en rendre compte, il avait pris le chemin de la taverne, la seule qu'il connaissait vraiment. Le hasard joua encore une fois lorsqu'il aperçut une silhouette dans la nuit, qui disparut aussitôt au détour d'une ruelle. Les muscles sourciliers se contractèrent, et le brigand avança d'un pas décidé, se mettant presque à courir pour ne pas laisser échapper sa proie. Qui que ce soit, il était perdu d'avance.
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