Béatritz
Toute ressemblance avec une certaine héritière d'un empire hôtelier est parfaitement assumée.
La plus richissime héritière des Royaumes était arrivée en Artois quelques jours plus tôt ; elle avait des raisons d'y être, on avait acheté sa présence par une jolie émeraude. Car oui, il fallait qu'on la payât, pour qu'elle daignât honorer de son illustrissime présence quelque cérémonie que ce fût. Il fallait bien faire des choix.
En contrepartie, elle garantissait le service après-vente : stimulation de l'économie locale, parce qu'elle pensait qu'il était important d'aider, vous savez, l'économie, ici comme partout dans le royaume. Et qu'y avait-t-il de mal à faire quelques emplettes ? C'était une belle invitation et la jeune fille avait besoin d'une robe pour la fête.
Une belle robe...
Elle avait décidé qu'il serait, stratégiquement, diplomatiquement, et esthétiquement, très sympathique, qu'elle s'accordât avec les couleurs de ses hôtes. Et les couleurs de ses lèvres purpurines et sa peau d'albâtre.
Elle craqua dans l'échoppe de Sidi Ahmed pour un henin blanc comme neige tendu de dentelles de Flandres, une belle robe damassée rouge d'Andrinople qu'elle porta sur une chemise de faille, une ceinture de satin blanc brodée de perles de nacre - on est richissime ou on ne l'est pas - et s'offrit même le luxe, pour l'occasion, d'une cotte tissée d'or, qu'elle porterait sous la robe, de sorte qu'un petit morceau seul de l'étoffe jailliraient d'en dessous, laissant suggérer mille trésors cachés.
Des poulaines teintes d'un rouge plus sombre surgissaient sous la longue et lourde onde de la robe, et pour rehausser à la fois son teint pâle et sa gorge généreuse - peut-être déjà trop, pour son âge - la jeune fille acheta au complaisant damasquin une étole de soie orientale semée d'éclats de verre rouge, qui avaient comme une semblance de pierreries.
Ainsi parée, cape blanche fourrée de petit gris sur les épaules, elle remonta en coche et d'Arras, prit la direction de Saint-Omer. Les étendards de sa maison claquaient au vent, et son escorte était lourde.
Et lorsqu'ils entrèrent dans la Cour de Saint-Omer, ce fut au son des "Place, place à la voiture de la très précieuse Béatrice de Castelmaure, héritière des Duché de Nevers, Comté de Lauragais, Vicomté de Chastellux, Baronnie de Chablis et de Laignes ! Place, place !"
Et bondit du coche un laquais qui en déplia un grossier marchepied. C'était un coche grande classe, à la mode Mahaut d'Artois, version 2005, et la bientôt Duchesse de Nevers en descendit avec une dignité affectée. La suivait un laquais, portant un paquet qui semblait précieux, comme une grande boîte à chapeau de la fin du deuxième millénaire. Si Béatrice de Tapiolie n'y avait pas touché durant tout le voyage, malgré son caractère enclin à céder à ce genre de tentations, c'est qu'elle savait trop que le contenu ne serait pas de son goût.
Relevant la tête pour détailler les lieux dans lesquels elle était apparue, elle attendit qu'on vînt l'accueillir avec tout le respect qui se devait.
Elle espérait bien qu'on lui réserverait des appartements pour elle, où elle pourrait se changer, et revêtir une tenue aux couleurs d'Ailhaud et de Cassel, car l'on est jamais trop zélé à la flatterie.
[Tenue visible ici. Elle n'est hélas pas brune IG, ni n'a les yeux bleus. On fait avec.]
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[Humour inside ~~ Béatrice n'est pas blonde et ne s'appelle pas Paris]
La plus richissime héritière des Royaumes était arrivée en Artois quelques jours plus tôt ; elle avait des raisons d'y être, on avait acheté sa présence par une jolie émeraude. Car oui, il fallait qu'on la payât, pour qu'elle daignât honorer de son illustrissime présence quelque cérémonie que ce fût. Il fallait bien faire des choix.
En contrepartie, elle garantissait le service après-vente : stimulation de l'économie locale, parce qu'elle pensait qu'il était important d'aider, vous savez, l'économie, ici comme partout dans le royaume. Et qu'y avait-t-il de mal à faire quelques emplettes ? C'était une belle invitation et la jeune fille avait besoin d'une robe pour la fête.
Une belle robe...
Elle avait décidé qu'il serait, stratégiquement, diplomatiquement, et esthétiquement, très sympathique, qu'elle s'accordât avec les couleurs de ses hôtes. Et les couleurs de ses lèvres purpurines et sa peau d'albâtre.
Elle craqua dans l'échoppe de Sidi Ahmed pour un henin blanc comme neige tendu de dentelles de Flandres, une belle robe damassée rouge d'Andrinople qu'elle porta sur une chemise de faille, une ceinture de satin blanc brodée de perles de nacre - on est richissime ou on ne l'est pas - et s'offrit même le luxe, pour l'occasion, d'une cotte tissée d'or, qu'elle porterait sous la robe, de sorte qu'un petit morceau seul de l'étoffe jailliraient d'en dessous, laissant suggérer mille trésors cachés.
Des poulaines teintes d'un rouge plus sombre surgissaient sous la longue et lourde onde de la robe, et pour rehausser à la fois son teint pâle et sa gorge généreuse - peut-être déjà trop, pour son âge - la jeune fille acheta au complaisant damasquin une étole de soie orientale semée d'éclats de verre rouge, qui avaient comme une semblance de pierreries.
Ainsi parée, cape blanche fourrée de petit gris sur les épaules, elle remonta en coche et d'Arras, prit la direction de Saint-Omer. Les étendards de sa maison claquaient au vent, et son escorte était lourde.
Et lorsqu'ils entrèrent dans la Cour de Saint-Omer, ce fut au son des "Place, place à la voiture de la très précieuse Béatrice de Castelmaure, héritière des Duché de Nevers, Comté de Lauragais, Vicomté de Chastellux, Baronnie de Chablis et de Laignes ! Place, place !"
Et bondit du coche un laquais qui en déplia un grossier marchepied. C'était un coche grande classe, à la mode Mahaut d'Artois, version 2005, et la bientôt Duchesse de Nevers en descendit avec une dignité affectée. La suivait un laquais, portant un paquet qui semblait précieux, comme une grande boîte à chapeau de la fin du deuxième millénaire. Si Béatrice de Tapiolie n'y avait pas touché durant tout le voyage, malgré son caractère enclin à céder à ce genre de tentations, c'est qu'elle savait trop que le contenu ne serait pas de son goût.
Relevant la tête pour détailler les lieux dans lesquels elle était apparue, elle attendit qu'on vînt l'accueillir avec tout le respect qui se devait.
Elle espérait bien qu'on lui réserverait des appartements pour elle, où elle pourrait se changer, et revêtir une tenue aux couleurs d'Ailhaud et de Cassel, car l'on est jamais trop zélé à la flatterie.
[Tenue visible ici. Elle n'est hélas pas brune IG, ni n'a les yeux bleus. On fait avec.]
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[Humour inside ~~ Béatrice n'est pas blonde et ne s'appelle pas Paris]