Ceci est juste une copie de la bio de Tchantchès qui était publiée sur la halle de Fribourg. Afin de mieux connaître le parcours du Chevalier
Limplacable Force du Destin. (Autobiographie de Tchantchès)
Chapitre premier : Les Origines
[HRP] Remarque de lauteur : Le tout début est un texte malheureusement un peu technique afin de replacer le personnage dans son contexte historique. Ce texte technique fera progressivement place à une histoire plus romancée dans un cadre toutefois historique. Je demande qu'aucun joueur n'intervienne dans ce RP sans m'en avoir parlé au préalable, ceci n'est qu'un récit quei ne demande pas de réponse. [/HRP]
1. Liège
Je suis né un frais matin dhiver de 1416 en la bonne ville de Liège.
Liège est une principauté Episcopale indépendante mais qui fait partie de larchevêché de Cologne en terre dEmpire. Lors de ma naissance, les 32 métiers ont gagné le droit davoir « voix au chapitre ». Ce sont donc des ouvriers qui ont constitué un tiers Etat face aux nobles et au clergé dans le gouvernement de la principauté.
Cependant, les abus répétés des officiers du prince et l'empiétement de plus en plus important de la juridiction de ses tribunaux, l'Anneau du Palais (chargé de réprimer les délits à la"hauteur" du prince) et l'Officialité (tribunal ecclésiastique) ont rallié l'immense majorité des bourgeois à la faction révolutionnaire : les "hédrois" (braillards, frondeurs) pour certains, les "haydroits" ou "haïdroits" (haïsseur de droit), pour d'autres; en tout cas, appellation dont l'origine reste obscure.
Ainsi, au moment où Jean de Bavière s'apprête à monter sur le siège de saint Lambert, la situation était devenue très critique.
A ma naissance lEvêque est Jean de Bavière dit Jean sans pitié. Fils du duc Albert Ier de Bavière, comte souverain de Hainaut, de Hollande et de Zélande et seigneur de Frise (1358-1404), et de Marguerite de Liegnitz (illustre famille polonaise). Son frère aîné, le futur comte de Hainaut, de Hollande et de Zélande, Guillaume, est l'époux (1385) de Marguerite de Bourgogne, fille de Philippe le Hardi.
- Beau-frère du duc de Bourgogne Jean sans Peur (1404-1419), qui a épousé (1385) sa sur Marguerite de Bavière.
- Beau-frère de Guillaume Ier de Juliers, duc de Gueldre, qui a.épousé sa sur Catherine.
- Beau-frère du duc Albert IVd'Autriche, qui a épousé sa sur Yolande
- Beau-frère également de l'empereur, le roi de Bohème et duc de Luxembourg Wenceslas, (1378-1400), qui a épousé sa sur Jeanne.
- Cousin de la reine de France Isabeau de Bavière, épouse du roi Charles VI (1380-1422).
Elu le 14 novembre 1389, à l'âge de 17 ans. Confirmé par le pape de Rome Boniface IX (1389-1404). Il refusa toujours de se faire sacrer Evêque et ne fut jamais qu'Elu.
Prince très autoritaire, tendant à l'absolutisme.
Ce lien puissant entre certains Princes et/ou Princes Evêques de Liège avec la puissante famille de Bourgogne aura souvent des répercussions désastreuses sur le devenir des bouillants Liégeois qui nacceptèrent que très difficilement toute forme dautorité.
Lempereur Sigismond séjourne à Liège au moment de ma venue sur Terre. Je suis le fils dun ouvrier qui est le meilleur ami de Guillaume Datin.
Javais à peine 17 ans lorsque nous suivîmes Guillaume Datin pour venger le bannissement de Watier Datin . Jean sans pitié avait en effet banni notre mayeur à vie tant aimé du bon peuple. Cette goutte de trop face à nos libertés ne pouvait rester impunie. Le métier des mineurs conduisit linsurrection et tenta le coup de force. Mais nous nétions que des ouvriers face à des troupes armées et de chevalier en armures. Ce prince qui nétait même pas Evêque nous brisa comme on brise des fétus de pailles.
2. Namur
Pendant que Lempereur est couronné à Rome les Datins sont bannis et leurs biens confisqués, mon père, ma mère et moi-même devons nous réfugier dans le Comté de Namur en Terre de France.
Pendant Trois ans, nous essaierons la voie juridique, jusquà ce que le concile de Bâle rejette les suppliques et le bon droit des Datins en 1435.
Je rencontre à Namur une femme resplendissante et doté dune âme pure et savante. Voilà le premier jour de ma vraie vie. Jusque là je navais vécu quen fidèle fils et en fidèle ami, mais à partir de ce jour de lan 1436 au doux moi de mai, jépouse Marguerite de Ruremonde.
Nous apprenons quà Liège, nos biens confisqués ont servi à la reconstruction du pont des Arches et plus grave, le Chanoine Lambert fils de Watier Datin est tué dans une embuscade.
Loppression du Prince se fait plus dure, les 32 métiers restent fidèles mais sont muselés.
Pendant cette période, je connus les rares moments de bonheur de ma vie. Les problèmes politiques ne mintéressaient plus et je laissai ma tendre et douce minstruire de son érudition. Elle me réconcilia avec la foi, car lobscurantisme de certains prêtres ou ecclésiastiques nétait rien face à la lumière de sa foi. Cette lumière méclaire et me chauffa.
Nous nous promenions sur les bords de la Meuse, à pied ou en barque, dans un été exceptionnellement chaud. Nos mains ne se lâchaient jamais, nos sourires ne cessaient jamais déclairer nos visages. Oui je lavoue, jai connu linsouciance, oui je lavoue je nai point vu le danger se précipiter vers nous. Mais si vous aviez vu Marguerite, mais si vous aviez entendu le son de sa voix, si vous aviez pu sentir son doux parfum, aucun de vos sens nauraient pu être en alerte. Marguerite nétait pas une femme au côté de qui lon vivait, Marguerite était une femme pour qui et en qui lon vivait. Tout son être était amour et volupté, elle aimait avec tendresse et savait pardonner les fautes de votre cur ou de votre âme. Margueritte était une incarnation de lamour. Si lon donnait une fête et que tout le monde samusait, il suffisait quelle apparaisse et automatiquement les regards se tournaient vers elle. Les autres femmes nétaient pas jalouses, car toutes laimaient et ladmiraient. Elle ny voyait point une concurrente mais un modèle.
Son sourire. Un seul sourire de Marguerite et lêtre le plus vil, le Pio_du_95 lui-même se serait mis à genoux en remerciant le ciel davoir pu croiser la route dun être si pur et si merveilleux.
Deux ans de Bonheur, deux ans dinsouciance, mais, même à Namur, même en terre de France, Jean sans pitié nen avait pas fini avec Guillaume Datin. Les hommes qui sont dépourvu damour, ceux qui sont guidés par la haine, ne reconnaissent pas le sacré. Fallait-il que nous soyons sur leur route ?
Le lendemain du jour de lan, le 1er Janvier 1438, tout était endormi. La fête avait été si merveilleuse. Mon insouciance, je le sais maintenant, cette impardonnable insouciance, me coûta un prix que je naurais voulu payer autrement que par ma vie.
3. Lassassinat de Guillaume Datin
Pour la Saint-Sylvestre de 1437, tous les corps de métier Liégeois avaient envoyés un représentant. Certains nobles modérés étaient également présents. La famille les amis étaient tous là. Ve fut une fête comme on nen avait jamais vu. Malgré lhiver et les privations, tout le monde pu manger gras. La fin de fête venue, tout le monde se sépara. Ma chère Marguerite était venue me susurrer à loreille quelle acceptait de devenir ma femme. Javais tellement du mal à le croire. Elle sui était dune famille noble et bourgeoise. Comment pourrait elle obtenir une telle alliance de son père ? Elle mexpliqua que son père laimait tellement quelle ne pourrait rien lui refuser. Jétais tout à ma joie. Je lui demandai de surtout ne point se fâcher avec son père, que cétait un homme admirable que je respectais beaucoup. Le Père de Marguerite était Charles de Ruremonde. Il était Liégeois mais il avait beaucoup daffaires dans le Namurois et le Brabant. Cétait un commerçant avisé. Il avait investi dans la métallurgie et la fabrique darmes. Cétaient bien là les forces qui allaient faire de Liège une grande place du commerce européen grâce à lavènement des armes à feu. Liège est une plateforme idéale en tant que territoire neutre aux frontières de la France et de lEmpire.
Guillaume Datin, pris congé aux petites heures de la journée. Il pris la direction du quartier du grognon près de la prote de Liège. Pour laccompagner et lui faire escorte, il y avait mon père, Charles de Ruremonde ainsi que moi-même. Les femmes étaient avec nous car nous rentrions confiant à notre résidence. Je reçu un choc inattendu et violent sur la tête. Une bûche de taille impressionnante avait été lancée dun bas étage et mavait défoncé à moitié le crâne, me laissant inanimé sur le sol. Mon père et Charles de Ruremonde avaient subis le même traitement, mais mon père navais été que légèrement blessé. Quatre mercenaires masqués surgirent alors de devant notre position, cachés quil avaient été par le coin de la rue. Derrière notre petit groupe quatre autres bandits surgirent également. Ils étaient porteurs de dagues. Deux dentre eux fondirent sur Guillaume Datier, qui neut même pas le temps de dégainer son arme, car il était penché sur Charles de Ruremonde qui gisait inanimé sur le sol. Mon père, lui qui était encore penché sur moi, neut pas non plus le temps de réagir, deux bandits venu de derrière nous lui avaient déjà enfoncé leur dague, lun dans les reins lautre dans la gorge. Les femmes crièrent. Ma mère et Marguerite reçurent un bien mauvais coup de dague dans les flancs et sécroulèrent. Madame Datier et madame De Ruremonde mère, purent senfuir et ainsi sauver leur vie.
4. De bien sombres noces.
Lorsque je me réveillai à lHospice de Saint-Servais, une religieuse me fit un sourire en me disant que je lavais échappé belle et que jétais resté inconscient pendant trois jours. A ce moment là, je ne savais rien de ce qui sétait passé, je pensais que javais été victime dun accident idiot. Cest deux jours plus tard que je reçu la visite de Monsieur de Ruremonde. Il me raconta tout ce quil sétait passé. Je ne pu réprimer un cri dhorreur quand il en vint à lépisode de la blessure mortelle de sa fille ma tendre aimée. Marguerite, non criais-je en perdant à nouveau connaissance. Cest le lendemain que je revis à nouveau Charles de Ruremonde. Et il me dit ceci. Mon fils, ma fille se meurt dans ce même hôpital. Je vois bien que votre coeur bat pour elle. Elle me fit hier une requête que je ne saurai lui refuser. Mais par égard pour vous, il me faut vous dire quelque chose. Elle a reçu une vilaine blessure que nous narrivons pas à bien soigner, elle a perdu beaucoup de sang et nous pensons quelle ne survivra guère. Elle na lair de tenir que pour vous revoir. Elle a bien insisté pour que je vous laisse faire une demande importante que vous devez, semble til me faire. Mais si cela est ce que je pense, mon fils, pensez à vous car ce que vous projeter ne sera quéphémère.
Mon Père, lui dis-je, à ce que vous mavez dit, je nai plus de père, plus de mère et la seule femme que jai jamais aimé devra bientôt les accompagner dans lautre monde. Si elle respire encore si elle est consciente pourquoi ne suis-je pas déjà auprès delle. Peut-être notre amour lui rendra til la santé ? Quoi quil en soit, mon père, je vous demande avec la dernière énergie de bien vouloir maccorder sa main. Car, si même notre vie dépoux sera éphémère, elle sera placée sous larbitrage de notre divin seigneur. Et je sais que cest cela quelle désire. Je vous en prie demander à lévêque de Namur dautoriser un mariage rapide dans la chapelle de lhospice et sans publier de bans. Et surtout, mon, Père conduisez-moi à elle céans.
Je fus amené devant ma divine fiancée. Nos regards mouillés se croisèrent. Nous ne dîmes rien tout dabord. Je pris simplement ses doigts dans ma main. Mon Dieu, quils étaient froids. Je ne pu mempêcher de pleurer. Alors elle fit un effort surhumain pour sasseoir et elle sécha mes larmes. Elle me sourit et me dit ceci :
- « Mon bel et preux ami. Nous avons plusieurs choses à nous dire. Je vous connais assez pour savoir que vous avez déjà dû faire votre demande à mon père. Alors souffrez, puisque nos bans ne seront certainement pas publiés, que je vous fasse promettre, pour mon amour certaines choses qui auront lheure de sauver votre âme. »
- « Ma mie, tous vos désirs ont été des ordres, je sens ce que vous allez me demander ? Comment pouvez vous me relier à dieu, quand un Prince félon vient de commanditer le plus odieux des assassinats ? »
- « Mais mon ami, ne comprenez-vous pas quun prince odieux, même sil était évêque, ce quil nest pas, est indépendant de la volonté de Dieu. Croyez-vous que notre Dieu aime la guerre et la folie des hommes ? Croyez-vous quil laisse cela arriver sans être mortifié ? Mais mon ami, que lon arrête de croire que les hommes puissent justifier leurs actes au nom de Dieu. Ils font ce quils veulent car Dieu les laisse choisir entre le bien et le mal, car Dieu nous aime. Alors je vous demande sil vous plaît, de choisir si vous préférer aimer la vengeance sordide ou lamour de Dieu ? »
- « Ma tendre et douce amie, la bonté de votre âme méclaire une fois de plus, et quopposer à votre douce résolution. Si vous me demander de vous promettre certaines choses, cest que votre cur à ses raisons, qua ma raison ignore. Alors, ces promesses je vous les ferai sans retenue, car ma confiance pour votre foi est totale. Je crois en vous comme vous croyez en Dieu. »
- Cessez ce blasphème, mon tendre ami, je ne puis le tolérer, votre amour pour moi est noble, je le sais. Le mien pour vous lest tout autant et cest pourquoi je veux un jour partager avec vous léternité. Laissez moi vous reprendre votre âme et la déposer aux pieds de notre seigneur.
Ma dernière réponse fut un sourire approbateur, et je sentis sa main serrer mes doigts avec une force incroyable vu son état de faiblesse. Trois jours durant nous eûmes nos discussions. Cest le terme le plus rapide quavait pu obtenir mon beau-père. Durant ces trois jours, ma promise et moi nous ne nous quittâmes plus. Elle me fit le détail de ce quelle attendait de moi. Elle exigeait que ma vie soit dévouée à une seule cause, celle de Dieu. Je vous dirai un jour tout de ces détails et de ce quelle ma fait promettre.
Cest donc le 7 janvier 1438 que nous fûmes réunis devant Dieu. Moi à genoux devant le prêtre et elle encore couchée dans sa litière. Lévêque lui-même officiait, et quand il lui demanda si elle me voulait pour époux, elle tourna son regard bleu de la couleur du ciel, elle me sourit et murmura un oui, qui avec le souffle sui suivi fut la dernière chose qui sortit de sa bouche. Cest alors que je lembrassai, ce fut le seul et unique baisé que la vie nous avait permis. Ce baisé ne fut pas partagé et ma peine fut si immense, quaucune larme ne pu sortir de mes yeux à ce moment. Un cri de douleur et de rage fit toutefois tellement retentir la chapelle de lhospice, que le vitrail principal vola en éclat.
Voilà chers amis. La fin des origines de Tchantchès. Car après cela, il ne me resta plus quune seule ambition dans ma vie, celle de vivre pour la promesse que javais fait à celle que mon cur ne pouvait plus oublier. Jétais marié et chaste. Le candidat idéal pour une vie de sacrifice. Mon corp et mon cur nétaient plus quune offrande à Dieu.
Chapitre second : le poids de la promesse.
1. La passion de Tchantchès.
A la suite de ce drame personnel, je perdis toute joie, je disparus dans les enfers pendants 15 jours. Personne ne peut dire ce que je fis durent ces 15 jours, pas même moi. Je du faire dhorribles choses cependant. A mon réveil je ne reconnus pas lendroit où jétais. Je me trouvais dans une masure insalubre ouverte à tous les vents. En ouvrant les yeux je fus tout de suite incommodés par ma propre odeur. Jétais sale, pouilleux, maculé de sueur et
de sang. Mais que métait il arrivé ? Etait-ce du sang humain ou animal ? Je regardai autour de moi et fut un peu rassuré en voyant quelques carcasses doiseaux désossés. Ma masure était en bord de Meuse, je me défis de mes hardes et me jetai à leau, en ce mois de janvier. La brûlure du froid me fit un électrochoc conséquent et je sentis mon corps se purifier en même temps que mes muscles sankylosaient à cause du choc thermique.
Transi, épuisé, je me dirigeai vers le seul endroit où je savais que jaurais de laide. Ma vie navait plus aucun sens, je désirais plus que tout en finir avec ces souffrances. Pourtant du fond de ma mémoire une douce voix tentait de remonter à mon souvenir. Ma douleur occultait toute autre forme que la haine et le dépit. Je me morfondais dan mon chagrin. Arrivé auprès des halles de mon beau-père, je voulu entrer à lintérieur quand un garde hissurte me barra la passage avec une grossière hallebarde.
- « Fou le camps manant » me dit-il.
- « Je suis le beau fils de Charles de Ruremonde, laisse-moi passer » lui dis-je dun air mauvais
-« Imbécile, et moi je suis le Prince de Liège », ricana til,
-« Alors dégage, le baron a perdu sa fille et il ne peut avoir de beau fils, et même sil en avait eu le temps, ils serait autrement fagoté que toi. » Sur ces mots il me repoussa avec le manche de sa Hallebarde. Je vis un deuxième idiot de même acabit sapprocher de moi et résolu de faire retraite pour le moment.
Je voulu entrer dans une taverne afin de my réchauffer et de mieux my sécher. Mais là aussi je fus mis à la porte sans ménagement. Il me fallait pourtant bien attendre la sortie de Charles afin de lui parler. Il me restait la maison de mes parents, mais je ne savais même pas quel jour on était. Je ne voyais quune seule image. Celle de Marguerite lâchant son dernier souffle dans mes bras, alors que je déposais un baiser stérile sur ses lèvres. Cest au moment où jeus cette pensée que je croisai une patrouille menée par un sergent de ville. Mon regard de détresse et de haine, chargé de violence, mon aspect mouillé et sanguinolent, je le sais et le comprends maintenant, ont provoqué chez ce sergent un réflexe de défense.
-« Holà manant, que fais-tu céans. Doù te vient cet aspect repoussant ? Je ne veux point de vagabond dans ma ville, répond-moi où il ten coûtera. »
- « Passe ton chemin petit sergent, tu ne comprendrais pas »
- « Garde saisissez-vous de lui. » Cria til.
- « A ta guise, tu auras tout le temps de mexpliquer aux cachots de la ville »
Bien sûr je voulu résister, mais javais déjà la tête fragile et le coup de masse que je reçu derrière la nuque ne me permit même pas de dire un seul mot. Quand je me réveillai à nouveau, jétais encore dans de la paille souillée par un tas dexcréments infâmes, humains et non humains. Il faisait noir, je sentais dautres présences humaines et non humaines. Il y avait là des rats jen suis sûr. Mais jappris vite à mes dépens que ce qualificatif ne sappliquait pas quaux rongeurs. Je vivais des moments que je subissais, qui senchaînaient sans que je ny comprenne rien et sans que même lenvie dy échapper ou même de me battre pour me défendre ne me prenne.
-« Qui es tu et pourquoi es tu là ? » fit une voix cassée qui semblait venir doutre tombe.
Je ne répondis rien, je me tassai sur moi-même et je laissai mon esprit semplir dun vide absolu. Lidée même de penser à quelque chose fut-ce quelque chose de simple, était une souffrance. Je sais maintenant que je ne pouvais pas accepter ma douleur ou même la nommer. Je sais maintenant que mon esprit refusait une réalité qui simposait à lui. Une seule image permanente, comme gravée dans de la pierre soffrait à moi. Le doux sourire de ma belle marguerite emplissait mon vide spirituel, il me réchauffait et freinait mon délire.
Un bruit sec, suivi de bruits de clés dans des portes précédèrent larrivée dune lumière feutrée dans le cachot. Cest alors que je devinai plus que de voir lendroit où je me trouvais.
Il y avait là une vingtaine de personnes, toutes serrées les unes contre les autres, hommes, femmes et je dirais même enfants parfois difficilement reconnaissables. Tous étaient sales et puants et tous me regardèrent avant de regarder le sergent de ville qui apparaissant dans lencadrement de la porte.
-« Je crois quen te capturant, jai fais une bonne prise, tu es certainement lassassin des bords de Meuse que nous recherchons depuis quelques jours. Ton compte est bon lami et afin de bien te préparer à la visite de la police du comté, nous allons te soumettre à la question. »
Mes deux voisins séloignèrent de moi du plus de place quils pouvaient, en fait quelques centimètres et je vis une peur sans nom dans leur regard.
-« Gardes ! Dis le sergent, saisissez-vous de lui et emmenez-le dans la salle dinquisition. »
Deux hommes défirent mes chaînes et me saisirent par les épaules et me firent sortir manu militari en laissant mes pieds traîner au sol. Je ne comprenais toujours pas ce quil se passait, mais je murmurai quand même.
- « Charles, Charles de Ruremonde ! »
- « Que dis-tu ? »
- « Appelez Charles de Ruremonde, il vous dira qui je suis ».
Le sergent hésita puis cria aux gardes.
- « Attendez ! » Il se passa la main sur le menton puis me dit :
-« Soit, je ne suis pas pressé. Mais je te préviens, si tu me fais perdre mon temps, nous te poserons bien plus de questions, que tu ais ou non des réponses à nous fournir. Remettez-le dans son jus vous autres. »
Les gardes me jetèrent au sol et me remirent les chaînes aux pieds. Les trois hommes sortirent et fermèrent la porte.
« - Aurait ton affaire à un petit bourgeois ? » Fit la mâchoire édentée de mon voisin.
A ces mots il se jeta sur moi pendant que mon autre voisin me ceinturait les bras, et je sentis ses mains fouiller le peu de hardes qui me restaient. Il chercha, me prit ce qui me servait de chemise et je me retrouvai presque dans le plus simple appareil.
-« Tas pas grand-chose à donner pour le prix de ta vie. Mest avis que cette nuit tu mourras petit bourgeois »
A ces mots, je me calai contre le mur et sans volonté je me résolu à attendre une mort prochaine et tant souhaitée.
2. Un nouveau fils pour un nouveau père
Toute la nuit, je fus sur mes gardes. Je dus en effet me défendre contre mes voisins, mais les autres enchaînés quils étaient ne pouvaient rien contre moi. Deux fois ils avaient essayés, deux fois je les avais repoussés. Alors je compris que mon salut ne viendrait plus dune vaine défense. Je résolus de mattaquer au plus vieux. Ainsi ils croyaient que jétais faible et peureux ?
Je bondis sur lui en un instant. Il ne sy attendait pas, je le pris par le cou et commençait à serrer. Je ne pouvais lui ôter la vie, car le sergent de Ville sen vengerait contre moi, alors je résolu de lui ôter 50 % de ces moyens visuels avec mon pouce. Tout le monde compris que le vieux bandit avait subi un acte barbare. Son cri rauque fit monter une rumeur craintive des autres occupants de la geôle.
Je revins à ma place. Le vieux sanglotait dans son coin, je jetai ma prise aux rats. Et je me tournai vers le second bandit.
- « Arrête, me dit-il tu ne risque plus rien de moi »
- « Sais-tu ce que je lui ai fait ? » lui répondis-je.
- « Non et je ne veux pas le savoir » Me fit-il.
- « Et quelle garantie aurais-je que je vais pouvoir dormir tranquille ? »
- « il était le chef, tu nas rien sur toi, quel intérêt aurais-je maintenant à mattaquer seul à toi ? »
- « Si tu bouge de ta place, lui rétorquais-je, sache que je tarracherai les deux yeux, et que joffrirai en pâtures aux rats une autre région de corps après lavoir dénudée et blessée. Ensuite je leur laissera finir la besogne ».
Je pense avoir été suffisamment clair, car de toute la nuit, je ne subis plus aucune attaque. Les seuls bruits qui me parvinrent encore, furent des ronflements, des couinements de ces horribles rongeurs, et les sanglots de mon bourreau qui était devenu ma victime.
Au petit jour la soldatesque vint me saisir et mamener dans un cachot beaucoup plus propre et pourvu dune chaise ainsi que dune table. La porte de ce cachot était une grande grille coulissante, donnant vue sur le couloir. Cest alors que je vis apparaître mon beau père : Charles de Ruremonde.
- « Cest toi Tchantchès ? » bredouilla til hésitant.
Entendre mon sobriquet, était comme une claque, comme une renaissance. Toute mon enfance des bords de Meuse me remonta à la figure. Les folles randonnées dans les vergers de Sainte-Walbugre, les promenades au-delà du pont dIsle. Et mon Sobriquet : Tchantchès. Cest à cause dun étudiant flamand que lon mappelait ainsi. Il me disait toujours TJantje ce qui veut dire petit Jean en Flamand. Le dialecte Wallon la transformé en Tchantchès.
- « Oui mon père, cest moi » lui répondis-je.
-« Sergent pourquoi avez-vous enfermer mon fils céans ? »
- « Seigneur nous ne vous connaissions pas de fils, et puis il était plutôt assimilable à un vagabond et il avait du sang sur lui ».
- « Que sest-il passé mon fils ? » Fit Charles.
-« Je ne saurais vous dire mon Père, mais pour le sang, cest celui de moineaux que jai mangé pour calmer ma faim. »
Alors Charles se redressa et pris un air autoritaire pour sadresser au sergent de ville.
- « Sergent, Je vous somme de le relaxer. Jen réponds, et jajouterai cette bourse pour la pension et pour vos frais. »
- « Il en sera faits selon vos désir MonSeigneur. »
Le sergent fit tourner la clé dans la serrure et seffaça pour me laisser sortir. Il me regarda avec mépris, sûr quil laissait séchapper un criminel ou un gibier de potence.
Mon père memmena en ses halles, me fit laver et habiller et je le rejoignis dans son immense bureau. Il se tenait à côté dune table tout aussi immense, qui était encombrée dun grands tas de rouleaux et de coffrets. Il me fit asseoir dun geste autoritaire, et me tint ce discours que je noublierai jamais.
- « Mon fils. Je dis mon fils, parce que vous êtes mon beau-fils, mais je voudrais que vous deveniez à part entière mon fils. Vous aimiez ma fille. Je lai perdue, je nai plus de descendance. Alors, jai besoin de vous, et je vais vous faire une proposition, à laquelle je vous demanderai de réfléchir et de me faire réponse.
Jai lintention de vous adopter. Je veux un fils de confiance et un fils de cur. Je vous observe depuis bien plus longtemps que vous le pensez. Je sais la bravoure de votre père et celle de votre cur. Il me faut de laide dans mes affaires. Mes intentions son claires. Je veux vous apprendre les ficelles du commerce des armes. Je veux vous former à leur maniement. Car pour les vendre, il faut aussi protéger leur convoyage. Il vous faut connaître un peu de lettres et de chiffres, afin de bien défendre mes affaires partout où vous irez. LEurope, grâce à moi, souvrira à vous. Nos armes sont souhaitées, tant en Empire, quen France ou même en Espagne. Il ny a quaux infidèles et aux maures que nous refusions de les vendre. Vous avez, je le sais, promis doffrir votre vie à Dieu et à la justice. Permettez-moi de vous en donner les outils. Nos armes servent à défendre les causes de Dieu mon fils. Et partout où vous irez, vous collaborerez ainsi en sa grande uvre. »
Jétais subjugué. Quun tel grand mouvre ainsi les portes du monde, était chose incroyable. Jétais jeune et naïf et javais avalé son discours sans y voir malice. Je ne réalisais pas encore, ce que les armes de mon père, et surtout les nouvelles armes à poudre pouvaient engendrer comme souffrances. Son commerce était en train de devenir florissant. Toutes les puissances du monde allaient se servir en Principauté de Liège. Cette petite ville deviendra une place européenne de la façon du métal et des armes. Et jallais collaborer ainsi à lenrichissement dune ville qui mavait banni et fait tuer mon père et ma femme, ainsi quà lenrichissement de mon nouveau père, a qui je pensais tout devoir et pour qui jallais en fait souiller mon âme.
Chapitre troisième : Les Habsbourg dAutriche.
1. La vengeance de Tchantchès
Albert II dAutriche avait été sacré roi de Hongrie, il allait aussi devenir Empereur romain germanique. La guerre entre le parti du polonais Casimir Jagellon et le parti habsbourgeois venait denflammer la bohême. Mon Père me convoqua et mexpliqua la mission quil allait me confier.
- « Mon fils, je vous présente le père Stanislas, il est dorigine polonaise. Nous devons avoir un contrat avec Albert II afin déquiper ses armées. Vous partirez avec le père et vous irez à la cours de vienne. Ensuite à Prague afin dévaluer les besoins des troupes autrichiennes. Nous devons aider Albert à vaincre les Jagellon, car seule une armée autrichienne forte pourra vaincre les ottomans. Actuellement cest Jean de Hunnyadi le voïévode de Transylvanie qui prend presque tout le poids de la lutte contre les infidèles. Il vous faudra donc aller le voir une fois votre mission en Autriche terminée. Le Père Stanislas vous ouvrira toues les portes des cours de la foi de Christos. Il est le garant du prince de Liège »
A ses mots mon sang ne fit quun tour. Mon père menvoyait avec un représentant de Liège alors que ceux-ci venaient de faire tuer sa propre fille. Il vit bien ma réaction et mexpliqua les choses à sa manière.
- « Mon fils, jétais ami de votre père car il représentait les métiers à Liège, et ceux-ci doivent travailler dans mes ateliers. Mais sans lappui du pouvoir je ne peux ni fabriquer ni vendre mes armes et tous vos amis ouvriers seraient sans travail. Je dois composer avec les un et les autres. Dieu le veut ainsi mon fils. Quand au Père Stanislas, vous devez savoir quil na pas le prince en grande estime puisque celui-ci refuse de se faire évêque. Ne confondez pas tout, mon fils et allez donc défendre mes intérêts qui maintenant sont aussi les vôtres. »
Jacceptai donc de prendre la route pour lest mais je demandai à mon père la chose suivante.
-« Mon père je vais devoir traverser Liège pour me rendre en Autriche. Je sais de par les amis de mon Père que ses assassins y sont réfugiés, je sais aussi que ma tête y est mise à prix. Pourrais-je y venger la mort de mon amour et ensuite continuer mon voyage sans heurt de la part du Prince ? »
- « Tchantchès, tu y seras sous la protection dune ambassade en mission spéciale, tu porteras le nom de Ruremonde et non celui de ton Père. Pour ta vengeance sache être discret, tu auras avec toi deux hommes dépée qui taccompagnera dans toutes tes missions. »
- « Mon père, bien pour les deux hommes dans toutes mes futures mission, mais à Liège se sera affaire de mineurs et non les vôtres. Ils resteront en dehors. Cest donc ainsi que je devins marchand darmes en Europe. Cest ainsi que je partis pour lAutriche et la Hongrie et la Pologne et la Transylvanie. Mais le plus beau fut sans conteste mon arrivée à Liège.
Je fus rejoins par une délégation des métiers et une dizaine de mineurs à Huy. Nous y passâmes la nuit et nous montions notre plan. Les tueurs étaient danciens brigands qui avaient été pris lors des batailles contre les bandes qui étaient conduites par Tristant de Morialmé et Philippot de Savegny il y avait deux ans. Le prince de Liège avait accepté de pardonner ceux qui voulaient bien le servir pour ses « coups de mains ». Il les avait installé près de sa résidence dété de Seraing dans une tour forte à Flémalle. Il étaient au moins une dizaine dans cette tour. Lavantage cest quils nétaient pas en ville. Cest vrai que si tel avait été le cas les métiers auraient déjà réglé le problème. Mais dun point de vue militaire prendre de force une tour gardée, nétait pas chose aisée. Cest mon père stanislas qui métonna en nous offrant la solution. Une brasserie de Chockier, proche de Flémalle devait livrer tous les mois une charrette de barriques de bière. Or Chockier était entre Huy et Flémalle, juste sur notre route. Il suffisait de demander à Manon la fille dun mineur dassurer la livraison avec trois hommes cachés dans les barriques. Manon saurait gagner le temps nécessaire à ce que nous puissions tenir lentrée et ouvrir la porte de la tour au reste de notre troupe.
Tôt le matin nous partîmes pour la brasserie afin dêtre là avant le départ de la charrette. Pendant tout le voyage, je vis en image le meurtre de ma marguerite, tel quil avait du se passer. Je regrettais encore davoir été si vite inconscient. Javais le goût du sang dans la bouche. Je savais quils étaient brigands, et je résolu ce jour là, de toujours chasser le moindre brigand que je pourrai rencontrer dans ma vie. Je pensais alors, que ces gens navaient pas dâmes et quils étaient des suppôts de la créature sans nom. Nous eûmes la collaboration des brasseurs, qui naimaient pas ces brigands. Ils devaient leur livrer la bière gratuitement sur ordre du Prince de Liège. Ils nous expliquèrent la tour, les chambrées, la grande salle et le corps des gardes.
Nous arrivâmes à la nuit tombée, à la faveur de lobscurité les brigands ne virent que la charrette éclairée de ses torches. Manon avait accentué son décolleté, et nous vîmes bien que le garde ne regardait que cela. La charrette fut prestement emmenée à lintérieur de la tour par la grande porte ouverte. Manon occupait bien les hommes de garde, mais lintendant voulu ouvrir les fûts de Bière pour contrôler la qualité.
- « Holà , lintendant, nous boirons bien une bière ensemble tout à lheure fit Manon, mais pour une fois quon peut samuser, tu ne veux pas en profiter avant ? »
Lintendant la regarda, souri de ses trois dernières dents et emmena Manon dans un pièce adjacente.
Les gardes étaient en train de vouloir refermer la porte. Cest à ce moment que nous sortîmes des barriques. Deux dentre nous occirent proprement et silencieusement les gardes de lentrée pendant que je me dirigeai vers la pièce ou Manon avait été emmenée par lintendant. Je le trouvai a essayé de farfouiller dans ses vêtements, je voyais son regard à elle terrorisée qui me suppliait dintervenir, ce que je fis promptement, je lui assénais un coup destoc et directement de taille si fort, que Manon fut éclaboussée par sa décapitation. Je ne voyais plus que le blanc de ses yeux, elle était rouge sang et annonçait ainsi le début de ma vengeance.
Nous montâmes la tour degré par degré, jétais en tête et les mineurs étaient derrière moi, à chaque rencontre dun brigand dans les escaliers ou les pièces de flanc de la tour, jembrochais, je taillais, je coupais du brigand comme on élague un arbre malade. Pour la plupart ils navaient quune petite dague à la ceinture, le bruit de lépée, les gargouillis sanguinolents des gorges tranchées finirent par donner lalarme au corps de garde, létage au dessus. Jentendis les tables et les chaise se renversées, et les cris de : - « Aux armes, trahison, le Prince nous fait attaquer ».
Alors mes amis mineurs, avec leur fourche et leurs manches se précipitèrent à ma suite dans la salle de garde où quatre bandits armés nous attendaient. Les mineurs ne savent pas manier lépée et ces brigands étaient experts à ce jeu. Moi javais appris théoriquement et pour la première fois je me retrouvai avec en face de moi des hommes résolus à défendre leur vie les armes à la main. La bataille fit rage dans la salle des gardes. Mes amis mineurs tirent en respect deux brigands avec leurs fourchent et leurs manches, mais les gardes avaient déjà coupés deux manches avec leur épée. Manon qui était entré dans la salle se saisit dune arbalète et dun carreau. Elle banda larbalète, et je fus surpris quelle sache y faire. Elle tira et le carreau senfonça dans la gorge du premier garde. A la vue de cela le second mis un genou en terre et demanda la grâce. De mon côté javais deux brigands armés face à moi. Et le premier allait me transpercer de sa lance, quand je me souvins de mes leçons darmes. Je pris ma dague à lenvers dans ma main et la lançai comme à lexercice vers le malandrin, qui reçu le coup dans lil assez pour quil lâche sa lance et porte les mains à son visage. Avant que le second ne prenne sa place le premier avait déjà mon épée qui lui avait ouvert le flanc par une taille bien ajustée. Le second leva son épée avec pour but de me pourfendre. Jétais à découvert et devait ressortir mon épée du premier garde. Je vis son mouvement et ne du mon salut quà la présence desprit de lâcher mon épée et de rouler vers le second garde. En roulant vers lui je pus saisir ses jambes au moment où son épée frappa le sol juste à quelques centimètres de mon côté. Cest alors que je le fis tomber par terre et me précipitai sur lui. A califourchon sur lui, je tenais sa tête entre mes mains, et je martelai le sol de son crâne jusquà ce quil éclate comme un potiron trop mûr.
Cest alors que le chef des brigands entra dans la salle. Il Vit ses trois gardes morts, et le quatrième prisonnier. Il se savait perdu, et son regard croisa le mien.
- « Toi je te connais, je tai vu tomber à Namur. Ce nest donc pas le bavarois de Liège qui nous attaque, mais un petit mineur. Vous pouvez être 10 ou 50, aucun de vous ne mauras, vos fourches et vos bâtons ne peuvent rien contre moi. Et je vais commencer par celui quon appelle Tchantchès. »
Il se précipita vers moi lépée levée. Jétais encore au sol, et je vis ma mort dans son regard. Tout à coup jentendis un sifflement et un choc. Le chef des brigands sarrêta net et son regard devint vitreux. Il voulut dire quelque chose mais un gargouillis de sang et des bulles dair sortirent de sa bouche. Il tomba à genoux, me regarda très surpris et tomba face contre sol. Manon apparu à mes yeux avec larbalète dans ses mains, elle avait rechargé lengin et ainsi obtenu sa deuxième victoire sur les bandits.
Tous nous hurlèrent de joie et la portèrent en triomphe, cest alors que je lui dis.
- « Manon, toi une jeune fille, tu nous as tiré dun bien mauvais pas. Comment as-tu fait, alors que quelques minutes avant je tai vue terrorisée par lintendant. »
- « Tchantchès, le nobliau qui habite la campagne dOreye, où je me rends tous les étés à la ferme de ma tante, memmène à la chasse depuis mes 15 ans. Cela fait donc deux ans, que jutilise larbalète avec cet ami, sans que personne ne le sache étant donné sa condition et la mienne. »
Je conclus sur cette phrase : - « Quil est heureux que la noblesse liégeoise soit galante, ce la nous a valu une prise dassaut sans perte. Mais mettez cela sur le compte de la surprise, nous avons eu beaucoup de chance. »
Puis je me tournai vers mes amis mineurs qui tenaient le prisonnier. Et je criai avec une horrible passion haineuse.
- « Amenez-le moi. »
Ils le poussèrent sans ménagement jusquà moi.
- « Toi, tu auras la vie sauve. Tu devras délivrer un message au Prince. Tu diras que la vengeance de Datin sabattra sur lui, un jour ou lautre. Que sa puissante famille ne le protègera pas toujours. Liège est une ville où les métiers ont voix au chapitre, et il devra bien le rendre un jour. Tu diras que ce sont les amis de Datin de Namur qui ont vengé sa mort. Et tu diras bien tout ça avant de quitter la ville. Sinon, ville créature, tu nauras point dasile dans aucun bâtiment de toute la principauté, fut-ce même la cathédrale nous te retrouverons et te viderons de ton sang au goutte à goutte. Mas tui bien compris.
- « Oui messire, je le ferai. »
Mon allure nétait pas celle dun mineur de Liège, mais celle d »un fils de bonne famille. Je su que le Prince ne penserait pas à se venger sur les mineurs liégeois.
- « Déshabillez cet homme et enfermez le dans le cachot de la tour, puis tous dispersez-vous. Je repasserai un jour à Liège en revenant de ma mission et je verrais alors si vous êtes tous à labri de la vengeance du Prince. Toi Manon, tu retourneras à Namur, te mettre à labri chez mon Père. Tu en as trop dit sur toi-même, et je gage quen te voyant, mon Père te prendra sus son aile afin de remplacer dans son coeur sa fille perdue.
2. Tchantchès adoubé.
Après de telles aventures, Javais repris la route vers Liège. Mes accompagnateurs me quittèrent pour aller chercher les chargements prévus pour lempire. Il y avait là des armes à feu de toutes sortes et du dernier cri. Mais pas uniquement. Le tout avait été chargé sur bateau et descendait la Meuse vers Maëstricht. Je rejoignis mes compagnons à Visé où jembarquai. Par bateau et par route nous arrivâmes en Bohème. Le seigneur chargé de lachat des armes était un petit baronet buté. Il trouvait nos armes trop modernes et ne croyait pas à leur efficacité.
Je métais retrouvé dans une salle obscure du grand palais de Prague. Jessayais en vain de convaincre ce petit baron et que les temps avaient changé et que les armes aussi. Je lui rappelai lefficacité de leur usage en lui rappelant la grande victoire Hussite contre la chevalerie impériale. Lartillerie, bien utilisée est une force concentrée qui défait les charges de cavalerie. Vous verrez que les polonais affectionnent ce genre de charge et que vous pourrez les briser.
Derrière moi une voix se fit entendre. : - « Il a raison baron Guillaume, commandez-lui ce quil vous offre. Et vous dite moi qui vous êtes. »
- « Je ne suis personne que le Fils de Charles de Ruremonde Messire, mais je nai pas lhonneur de vous connaître ? »
- « Je vous comprend les pièces de monnaies ne sont pas encore frappées à mon effigie, Je suis Albert II et votre audace me ravi, jai bien trop de fonctionnaires habitués à leur confort autour de moi. »
- « Sire, je suis honoré davoir lhonneur de vous parler. Au-delà de la transaction, je vous promet avoir pour vous le moyen de favoriser votre victoire. Dailleurs regardez les ottomans, ils excellent dans lart de lusage des armes à feu et bousculent toute la Transylvanie dans le but datteindre Vienne. »
- « Je veux bien vous croire, et nous en utilisons aussi, mais pas encore en suffisance peut-être. Je manque de personnes qui en comprennent la stratégie, pouvez-vous nous être utile à préparer la bataille à venir, avez-vous suffisamment de matériel avec vous ? »
- « Sire, jai avec moi une longue caravane, mais nous avons aussi remplis plusieurs entrepôts de Prague en prévision de la bataille, nous savions que ceci allait jouer un rôle essentiel. »
- « Si cela est vrai messire de Ruremonde, je vous nomme grand intendant des armées Impériales en campagne, et pour votre récompense vos armes vous seront payées sur le butin ennemi si nous avons la victoire. »
La Grande victoire dAlbert II contre les polonais et les Hussites près de Tabor permit aux Habsbourg dasseoir leur pouvoir Impérial de manière éclatante sur la Bohême et la Moravie. La secte Hussite avait pourtant remporté une grande victoire quelques années auparavant, mais cette fois lEmpire faisait dune pierre deux coups. Elle assurait sa dominance sur la Région et faisait triompher la vraie Foie. Je sentais que je réalisais ma promesse faite à ma Margueritte.
Pour me récompenser, lEmpereur me fit adouber Chevalier de Tabor. Jétais rouge de confusion mais fier et heureux de faire ainsi entrer mon humble famille dans la noblesse dépée.
LEmpereur me faisait confiance et mon Père à Namur comptait sa fortune, il faisait fabriquer de grandes quantités darme en vue dune expédition contre les Ottomans que Projetait Albert II.
Mais la Peste mit un terme à son magnifique Règne ; et les Habsbourg avaient trop à faire pour soccuper dun petit liégeois. Il me fallait retourner chez mon Père. Mission en partie accomplie. Constantinople avait reçu le soutien de lEglise, les ottomans avaient été maintenus sans que les armes de mon père y jouent un rôle majeur.
Sur le retour vers le Rhin, nous eûmes des escarmouches avec des fous hussites qui plusieurs fois attaquèrent notre convoi. Tchantchès, comprenait que les religions hérétiques ne vivaient que par le brigandage, encore et toujours. Les hussites attaquaient et disparaissais, quand les chevaliers les poursuivaient, les femmes hussite les attendaient pour les faire tomber avec des filets ou ces chariots couchés sur la route, elles fondaient sur les chevaliers et plantaient leurs dagues dans les interstices des armures de chevaliers. Pour défendre mon convoi jutilisais des mousquets mis en équilibre sur une fourche dans chaque chariot et jinterdisais à lescorte de poursuivre lennemi. Je neu à déplorer quune seule mort. Cétait un brave chevalier teutonique qui trouvait mon attitude lâche, et qui finis par poursuivre les hussites jusque dans un bosquet. Ses cris résonnent encore dans ma mémoire. Il découvrit lincroyable résolution des bohémienne hussite en pleurant Dieu de mourir ainsi plutôt que dans un valeureux assaut.
Que pouvais-je faire, je convoyais les trésors de mon père, et je navais que peu dhommes aguerris. Partir vers ce bosquet aurait signifié la fin de notre voyage. Je neu dautre choix que dabandonner ce brave chevalier à son funeste sort. Mais je fus très troublé par la tenue des ordres chevalier monastique et je sentais là un appel à ma foi que je retrouverai bien plus tard.
Aux alentours de Liège (je nosais toujours pas rentrer dans la cité) je reçu ne récompense de mon père ma valeureuse Nanesse. Cétait une épée lourde à deux mains, qui avait été forgé à mon intention pour honorer mon adoubement. Il y avait gravé dessus le perron de Liège et ma devise, choisie lors de mon adoubement. Tchantchès Fidèle à Marguerite et à la foi. Elle était lourde, mais dune résistance à toute épreuve, elle avait été trempée selon un procédé unique au monde et seulement connu de la métallurgie liégeoise, qui depuis toue son histoire, avait toujours été en avance dans ce domaine.
Notre arrivée à Namur Fut dignement fêtée, mon, père maccueilli à bras ouvert. Et Manon, la douce Manon était là. Elle me regardait avec beaucoup dintensité. Elle me proposait, je le voyais bien, son amour et elle sapprocha de moi pour me dire :
- « Mon Grand Chevalier, Tchantchès, jai beaucoup parlé à ton Père, et il me veut bien comme fille, si jobtiens de toi que nos nous marrions. »
Mon regard sembua, je savais que Manon était douce et belle. Sans hésitation, en le regardant dans ces yeux je lui fit part de ma réponse.
(Suite au prochain numéro)
Chapitre quatrième : La peste, les loups, les noires idées
1. Tchantchès et lEglise
Manon regardait Tchantchès dans les yeux, elle attendait sa réponse.
Tchantchès regardait Manon, il navait pas prévu cela. Il vit comme elle était belle et amoureuse, il pensa un instant à se laisser aller, mais un éclair traversa son esprit. Il vit le dernier soupir de Marguerite comme un présage. Il comprit quil appartenait à Marguerite pour toujours et à jamais.
- « Manon, notre père vous prendra pour fille de toute façon. Sil ne le fait pas maintenant je gage quil le fera sous peu. Je suis flatté de votre amour pour moi, je ne pense pourtant pas le mériter. Soyez heureuse avec un homme à votre hauteur, ma sur. Soyez ma sur plutôt que ma femme, car une femme jen ai déjà une. »
Manon avait un regard changeant. Ses yeux sembuèrent, tristes et en même temps colériques. Elle exprima une foule dexpressions dans son regard et son visage en quelques secondes. Jappris ce jour là quon paye le prix fort de dire non à une femme amoureuse.
- « Tchantchès, tu es un imbécile, me dit elle, tu refuses la vie en glorifiant les restes putrides dune morte. Que va-t-elle tapporter celle là. Moi je tapporte la vie, des enfants à venir, de lespoir. En quoi notre vie commune tempêcherait-elle de tenir ta fameuse promesse de défendre Dieu ? Tu vas foutre ta vie en lair pour un fantôme ? »
-« Manon, pour toi Marguerite est peut-être un fantôme, mais pour moi cest ma femme pour la vie, quelle soit vivante ou morte ne change rien, elle habite mon cur et mon âme. La promesse nest pas liée à ma vie conjugale, cest vrai, mais il y a la promesse que je lui ais faite et celle que je me suis faite. Ma vie sera dédiée à Dieu et ni toi ni aucune femme naura sa place dans cette vie là. Alors, je te demande dabandonner lidée même de me séduire. Cest peine perdue, mais je te respecte Manon et je taime bien. Je ne veux pas me fâcher avec toi, je veux bien contribuer au bonheur et te protéger mais en tant que Frère et non en tant quépoux. »
A ces mots elle tourna les talons et parti en courant et en pleurant afin de se retrouver loin de moi. Je ne revis jamais Manon, je ne sus jamais ce qui lui arriva, car elle disparut ce jour là sans que personne neut plus jamais de ses nouvelles. Pendant des jours jallai voir les corps qui parfois séchouaient sur les bords de la Meuse, mais jamais je ne reconnu le sien.
Lannée 1439 fut une année extraordinairement troublée. LEglise avait été réunifiée entre Orient et Occident lespace de quelques mois. Mais les russes et les byzantins dénoncèrent la réunification.
La peste faisait des ravages, les loups entrèrent dans Paris pour chercher de la nourriture, la seine, la Meuse étaient gelés par lhiver le plus rude que lon vit jamais.
Tchantchès fit de nombreuses affaires pour son père. Il vendit bons nombres darmes aux chrétiens. Il sillustra particulièrement dans les Balkans. La présence des Turcs en Serbie ne laissait personne indifférent. Chaque année ; Tchantchès faisait dire une messe pour Marguerite. Il ne revenait plus guère à Namur. Son père le laissait se battre car en même temps Tchantchès oeuvrait pour ses affaires. Un jour Tchantchès apprit que son « père » était mort à Namur et quil était à la tête dune immense fortune. Amis de grands de ce monde il avait assisté aux défaites des polonais en Moldavie.
Il avait admiré la belle presse améliorée avec les caractères mobiles de Gutenberg. Il savait lire, écrire, il sétait mis aux lectures des nouvelles techniques et avait admiré la transmission du mouvement alternatif en mouvement rotatif grâce à linvention de la bielle.
Il décida daller à Rome, car il nétait pas satisfait de sa condition actuelle. Il obtient grâce à ses amis de rencontrer Nicolas V. Rome est sans dessus dessous à cause dun mouvement de foule qui a provoqué la mort de plus de cent personnes sur le pont Saint-Ange lors du Jubilé. La ville déborde de pèlerins.
Le pape accepte donc de le recevoir en visite privée.
Tchantchès savance et se prosterne, baise la bague du Saint Père et attend que celui-ci lui adresse la parole.
- « Mon fils que souhaitez-vous me demander ? »
- « Très saint-Père, jai fais il y a longtemps une promesse importante à ma défunte épouse. Je souhaite aider lEglise dans sa lute contre les infidèles et les hérétiques. Jen ai maintenant les moye