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[RP] Du crépuscule jusqu'à l'aurore

K200scom1
L'abbesse jugea qu'ores, il lui était temps de se présenter.

Je suis Mère Cappa de Sens-Caumun, soeur de l'Ordre de Sainct-Lescure, et, pour l'heure, en charge des âmes de la paroisse de Saincte-Menehould.

Son regard avait fait un bref tour de l'assemblée, habitué à jauger rapidement les êtres : deux domestiques, l'air triste des chiens que le maître délaisse, le médicastre, géné d'être désormais inutile, une femme de compagnie de moindre noblesse, et une jeune femme, l'allure altière de ceux à qui l'on obéit, mais la mine ruinée par la fatigue, la peur et le chagrin. La fille, sans aucun doute ... C'est elle qui lui avait parlé.

Votre confession ? Bien sûr, Ma Fille.

Elle sembla hésiter un instant, se retourna légèrement vers le lit, puis ajouta à mi-voix, comme pour elle-même.

Oui, je pense que nous avons le temps.

Puis, s'adressant à Clémence.

Pouvons-nous nous retirer en un endroit isolé, qui puisse nous tenir lieu de confessional ? Si celà vous agrée, bien entendu ...
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Croyez en Dieu, car hors de Dieu, point de vérité n’existe. En revanche, son existence est gratuite, donc, croyez en lui et arrêtez de me les casser menu. Chr. Log. XIV
Clemence.de.lepine
Un endroit isolé ? Le lieu le plus approprié lui semblait être la chapelle castrale, mais il leur faudrait dans ce cas redescendre, et elle devrait alors s'éloigner de sa mère. Cela ne lui convenait pas, cela l'effrayait, même. Elle voyait déjà la scène : un domestique à la mine livide, ouvrant précipitamment les portes de la chapelle, indiquant par ce geste impétueux que quelque chose de grave, très grave, venait d'advenir. Pas question. Elle préférait rester non loin de la Marquise, prête à toute éventualité. Aussi sinistre soit-elle.

Nous pourrions nous installer dans l'antichambre. Nous serions à l'abri des oreilles et tout à fait au calme.

A vrai dire, ça n'était pas comme si ici, le silence n'imposait pas aussi sa marque. Mais c'était différent : l'agitation régnait dans les cœurs, et cela se ressentait dans l'atmosphère pesante de la chambre.

Je vous en prie... fit-elle, indiquant d'un mouvement las de la main la direction à prendre -bien qu'en fait, l'abbesse connaissait le chemin puisqu'elle l'avait emprunté peu de temps avant.

Avant de fermer la porte derrière elles, Clémence prit le temps de demander à Beulbeul de ne pas hésiter à les interrompre si jamais... quelque chose se produisait. Mais sous aucun autre prétexte.

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---Bannière en reconstruction---
--Raphael.de.lepine
Raphaël, le jeune Lionceau, pur et fier, pour n'avoir jamais vraiment fréquenté la Création où rôdent la Bête sans Nom et toutes les tentations, tremblait dans la lumière mourante. Mais bientôt, de lui, naquit une nouvelle lueur, un nouvel espoir. Il n'abandonnerait pas sa soeur, au moment où il était le plus présent à son esprit, où, plus que jamais, elle prenait conscience de lui, de ce qu'il aurait pu être... De ce qu'elle avait tué en lui.

Et lui, petit enfant mort au berceau, errait dans les limbes, ni tout à fait au Paradis, ni vraiment sur cette terre. L'attente, ce monde où vivent les petits nourrissons avant qu'on leur pardonne de n'avoir pu recevoir à temps le baptême. Ce monde, si proche... Nébuleuse dont le jeune et beau Lionceau s'extrayait, en cette nuit funèbre, pour épauler sa soeur et chuchoter à l'oreille de sa mère.

Oui, Clémence... Je lui dirai. Je lui dis. Mais tu sais, elle me manque, aussi ! Tu es restée, je suis parti, et tant d'années loin de ce ventre chaud, loin d'elle et loin de toi... Toi tu dois vivre et être fière, dernière héritière de Saint-Marc ! Mais elle, tout l'amour qu'elle n'a pu me donner, laisse-moi maintenant le recevoir... Alors, ce ne sera pas toi qui l'auras laissée mourir... Ce sera moi qui l'aurai prise, qui aurai pris mon dû d'amour, d'affection blessée, qui aurait enfin comblé ce grand vide dans lequel tu m'as plongé.

Clémence, Clémence ! Nous nous sommes trop manqués. Je le sais. Je sais tout, je sens tout, n'est-ce pas ? Je n'ai jamais eu de plaisir. Je ne suis pas Sylphaël, souviens-toi, Clémence... Raphaël, c'est la conviction. Et je sais, et je sens tout, ne crois-tu pas ? Accroche un sourire à tes lèvres, et inscris en ton coeur ta foi en l'avenir. Tu n'as rien à expier, Clémence ! En fin de compte, tout va rentrer dans l'ordre : tu auras eu notre mère pendant toute la période de l'enfance, quand on en a besoin. Je l'aurai désormais qu'elle en est lasse et que le Très Haut appelle son âme vers les nues. C'est un partage équitable, tu ne crois pas ? Tu as eu le meilleur, tandis que j'errais seul, si longtemps, loin de toi, loin de tout... Juge seule si tu as profité de ce miel maternel.

Et raffermis ton cœur : je serai toujours là, et si sur ta route tu ne vois que deux traces, au moment où tu aurais le plus besoin de soutien... ce sera parce que je te porte, ma sœur. Ce seront mes traces, et tu sentiras mon cœur battre au rythme du tien. Car telle est la voie de Raphaël, le petit fils du Lion, qui vit en toi pour l'éternité.

Hauts les cœurs, Clémence ! Tu es la petite fille du Lion. Tu es désormais la Lionne. Tu ne peux laisser mourir ton nom, tu ne peux laisser s'éteindre ce sang de Venise. Les Ordres sont pour d'autres ! Tu dois vivre, tu dois aimer, et tu enfanteras un nouveau Lion. Notre âme est éternelle, Clémence, et tu la portes tout entière.

Le regard bleu profond appuyait sur Clémence ses éclats résolus.

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K200scom1
L'abbesse hocha la tête en signe d'assentiment. Peu importait l'endroit, et le choix d'une pièce jouxtant la chambre était des plus judicieux.

Les deux femmes étant passées dans l'antichambre, Cappa tira au centre de la pièce un large basset recouvert d'un coussin de velours cramoisi. Elle s'agenouilla d'un côté du meuble, à même le pavement, et invita sa compagne à en faire de même en face d'elle, de l'autre coté de l'escabeau.

Elle s'accouda au coussin, joignit ses mains sous son menton, et plongea son regard dans l'âme égarée de la femme agenouillée vis-à-vis d'elle.


Je vous écoute, Ma Fille, lui dit-elle simplement.
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Croyez en Dieu, car hors de Dieu, point de vérité n’existe. En revanche, son existence est gratuite, donc, croyez en lui et arrêtez de me les casser menu. Chr. Log. XIV
Clemence.de.lepine
Clémence avait passé la porte et avait été assommée par la différence d’ambiance. Malgré tout ce qu’elle aurait pu penser, malgré l’éloignement approximatif de sa mère, elle se sentait ici bien plus reposée. Peut-être était-ce la seule présence de Mère Cappa, qui la ragaillardissait quelque peu. Elle laissait un instant son trouble dans la pièce d’à côté. Non pas qu’ici, ce fut un sanctuaire dans lequel aucune mauvaise émotion ne pouvait transparaître. Mais il régnait dans la chambre une sorte de tension qu’on ne pouvait explicitement interpréter et cela était sans aucun doute dû à sa mère, dans cet état transitoire –entre la Vie et la Mort, mais également à elle-même dont l’agitation manifeste pouvait fort bien être contagieuse.

Assommée, donc, la jeune fille le fut autant par cette soudaine accalmie que par l’omniprésence brutale de Raphaël, qui lui assaillit l’esprit comme s’il tentait de la convaincre de toutes ses forces de ce que soudain, il lui révélait. De ce qu’elle aurait pu par elle-même percevoir parce qu’inconsciemment, toutes les réponses étaient là. Mais il lui fallait Raphaël, c’était lui qui possédait naturellement toutes ces réponses parce qu’il avait cette compréhension des choses qu’elle ne possèderait jamais. Elle vivait sa vie, mais il avait gardé pour lui sa sagesse. Ici, l’endroit était plus étroit. Les flammèches des chandelles illuminaient presque entièrement la pièce, si bien qu’il fallut du temps à Clémence pour parvenir à distinguer l’ombre de Raphaël dans un angle opposé. Et tandis qu’elle s’installait face à l’abbesse, elle le surveillait du coin de l’œil, réfléchissant à ce qu’il venait de lui apprendre, de lui faire comprendre.

Le Lion de Venise n’était plus et ses enfants s’en allaient. Alessandro l’avait déjà rejoint et Matthilde s’y préparait. Qu’allait-il rester, alors, de son héritage ? Dans quelles veines pourrait encore couler le sang léonin ? Raphaël, tu aurais dû être son héritier. Tu as raison, il ne restera plus que moi, je l’ai toujours su au fond et peut-être est-ce la cause de tout.
« Memento Finis », disait-il. Et cela n’a pas changé et ne changera jamais. La Fin est partout, inéluctable, et il faut vivre avec cette idée pour mieux la supporter. Ce n’est pas ma Fin, qui me fait peur. Tu l’auras compris, c’est celle des autres. Ce qu’il me manque, Raphaël, c’est une fin après cette Fin. Que serai-je, une fois seule, sans elle ? Quel sera l’objectif ? Suis-je donc vouée à perpétuer son sang ? Est-ce cela, ma fin ? Est-ce mon unique but ?

Et tandis que le Lionceau dardait sur elle son regard sans âge, Clémence ferma le sien. Il était plus que temps. S’il pensait qu’elle n’avait rien à expier, il en serait toujours autrement pour elle. Nous aurons toujours quelque chose à nous faire pardonner. Qui pouvait se targuer d’avoir atteint la perfection qui n’appartenait qu’à notre Créateur ? Alors ses paupières se fermèrent et elle s’abandonna au Jugement.



"Au nom de Dieu, ma Mère, pardonnez-moi, car j’ai pêché". Une inspiration et puis cela suffit à libérer les mots.

"J’ai abandonné le faible quand il aurait dû avoir besoin de moi qui suis plus forte. J’ai abandonné ma mère, j’ai tourné le dos à celle qui m’a donné la vie. Je n’avais pas de bonne raison. Rien ne m’appelait ailleurs et de toute façon, il ne pouvait exister de raison suffisamment importante pour me faire quitter le domaine familial.

Quand j’étais petite, l’on m’a éduquée et veillé à ce que je ne manque de rien. L’on attendait la même chose de ma part lorsqu’à leur tour, mes parents auraient besoin d’attention. Au lieu de ça, et comme remerciement de tout son amour et son affection, j’ai préféré fuir ma mère parce que, de façon égoïste, je me suis dit que je vivrais mieux sans la voir dépérir de jour en jour. Car cette mère, qui m’avait tant donné, cette mère ne me reconnaissait plus et que cette simple idée d’être une étrangère à ses yeux me remplissait d’effroi et d’incompréhension.

Elle est ma vie et je n’ai prêté attention à ses plaintes et à sa douleur. Elle ne parlait jamais plus de moi, comme si jamais je n’avais existé, et cela m’a blessée, autant dans ma sensibilité de fille que dans mon orgueil que je ne devrais avoir. Ses mots n’avaient plus grand sens, ou du moins n’en avaient-ils plus pour moi. Et au lieu de mêler mes larmes aux siennes et mes prières aux autres, j’ai simplement tourné les talons. Je me rends compte, maintenant, de la lâcheté dont j’ai fait preuve, et de la facilité dans laquelle j’ai si aisément plongé. Pas un instant je n’ai pu penser que cette mère, à qui je devais tant, pouvait avoir besoin de ma présence. J’ai juste pensé… à moi et au soulagement que je pourrais ressentir lorsque je quitterai l’enceinte oppressante du castel.

Mais je ne ressens désormais plus aucun soulagement. Je me retrouve face à mes erreurs et à une mère de qui je ne pourrai peut-être jamais plus recevoir un mot d’amour ou un sourire. Elle s’endormira à jamais avant qu’elle n’ait pu me revoir et comprendre que je m’en veux, de l’avoir laissée. J’ai toujours essayé d’être aussi vertueuse que possible. J’ai toujours été exigeante, concernant mon statut de fille héritière et des devoirs que cela incombait. Et je me rends compte qu’il était tellement facile de les satisfaire, alors que tout allait bien. Parce que tout allait bien, quoique j’en pensais. Et voilà qu’un obstacle arrive, et je ne suis même pas capable d’y faire face, alors que je le devrais, pour elle, pour ma mère, pour ma famille. Je contourne l’obstacle et je m’en vais, folle de tristesse et de colère. J’ai succombé à Bélial et au Léviathan, moi qui ne jurais que par Gabriel. Je ne suis pas celle que je croyais être, et je l’apprends aux dépens de celle qui m’est le plus cher. Existe-t-il une souffrance plus dure, encore ? Elle devait… mourir. Je le sais bien, mais il est difficile de laisser partir ceux qu’on aime. Et alors que j’aurais pu partager ses souffrances, les atténuer en restant auprès d’elle… Lui montrer mon amour, mon soutien. J’ai été égoïste. Comme avec Raphaël, mon propre frère. Au lieu de célébrer son souvenir, de l’ajouter à mes prières, de penser à lui souvent pour le faire exister, d’en parler à mes proches et de sourire alors que j’entendais d’autres personnes porter son nom… J’ai voulu l’oublier, tuer son souvenir, parce que c’était plus facile que de penser que j’avais vécu et que lui était mort. Est-il possible de pouvoir faire autant de mal à ceux que l’on aime quand on ne souhaiterait que leur bien ?"


Elle laissa un instant le silence reprendre ses droits. Qu’avait-elle d’autre à ajouter ? Elle avait l’âme vide d’en avoir tant dit et ses yeux étaient secs d’avoir trop pleuré.



"Pardonnez-moi, ma Mère."
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K200scom1
Dans l’exercice ordinaire de son sacerdoce, l’abbesse confessait des paysans abêtis par le labeur, des bourgeois nourris de leur suffisance, de frustes nobliaux assurés de leur force. Elle recueillait des aveux d’adultères consommés à la sauvette, de petites ou grosses rapines à l’encontre de quelque voisin, de brutalité envers plus faible que soi. Le confessé s'en venait marchander, dans le confessional, un semblant de repentance contre l'espoir du pardon divin, et partait l’âme plus ou moins vierge retomber dans ses errements, jusqu’à la fois suivante.

Aujourd’hui, elle voyait devant elle une femme dont le rang et les privilèges auraient dû faire un être différent de ceux qu’elle avait coutume de côtoyer. Et cependant, elle s’apercevait avec tristesse qu’elle était, elle aussi, un monstre d’égoïsme, vivant à cent lieues de ce que les clercs s'évertuaient à inculquer, contre vents et marées, à leurs ouailles, l’Amour de Dieu et l'Amitié entre les êtres.


Ma Fille, en tout ce que vous me dites, je crains fort de distinguer un grave pêché. Vous avez sacrifié au culte de Belzébuth, vous l’avez fait en suivant votre inclination pour Bélial, et vous l’avez fait en toute conscience, ce qui vous a conduit dans les bras de Léviathan. Vous avez négligé ce pour quoi nous vivons tous, ce pour quoi Dieu nous a élu, et, dans votre folie, vous vous êtes crue plus forte que le Très-Haut Lui-même.

Dieu nous demande de L’aimer. Il nous demande aussi de nous aimer, parce que nous sommes tous d’infimes parties de Lui. De quelle manière pouvons nous aimer Dieu, concrètement ? Nous pouvons L’aimer en aimant notre semblable, de façon désintéressée, sans attendre rien en retour. Et ceci, Ma Fille, vous l’avez oublié, si jamais vous l’avez su. Vous avez voulu conclure une sorte de marchandage tacite avec votre mère, vous avez voulu recevoir d’elle exactement la même quantité d’amour en échange du vôtre, très parcimonieusement comptée sur un trébuchet d’usurier. Mais les choses ne doivent pas se faire ainsy, en ce monde …

Aujourd’hui, vous êtes à un passage, vous devez faire un choix. Je vous conjure, vous qui n’aviez jamais les yeux tournés que vers vous-même, de les ouvrir maintenant sur les autres. Cessez donc de vous apitoyer sur vous-même, cessez d’être l’instrument de votre propre malheur. Dois-je vous choquer ? Aujourd’hui devrait être un jour de grande joie pour vous, car votre mère va cesser de souffrir dans son corps terrestre, et son âme va comparaître enfin devant le Très-Haut. Vous rendez-vous bien compte de ce que cela signifie, Ma Fille ?


L’abbesse avait les yeux brillants à cette évocation ...

Réjouissez-vous, car la mort n’est point une punition, mais une récompense pour les âmes vertueuses, et je ne doute point que votre mère l’ait été, plaise à Dieu. Oubliez votre tristesse et votre colère, ces sentiments n’ont jamais été tournés sur vous-même. Levez maintenant les yeux aux Cieux, et vous y verrez votre mère, assise à la droite du Très-Haut, vous couvant de son regard aimant, vous pardonnant, et vous encourageant à vivre pour les autres.

Je n’exige de vous point de repentir, je ne vous donnerai point de pardon, ni de pénitence, car je juge que votre souffrance est suffisante. Ores je vous conjure seulement d’ouvrir les yeux au monde, et d’aimer. Aimez votre mère sans restrictions, aimez votre prochain sans calcul, aimez Dieu absolument, et aimez vous vous-même, au bout du compte. Et en fin, cessez de ne consacrer votre vie qu'à vous-même, et consacrez-là à autrui.

Disons maintenant le confiteor.

Je confesse à Dieu tout puissant,
A tous les Saints,
Et à vous aussi, mes amis,
Parce que j'ai beaucoup péché,
En pensée, en parole, en action.
Je supplie tous les Saints,
Et vous, mes amis,
De prier le Créateur pour moi.
Que le Seigneur nous accorde le pardon,
L'absolution et la rémission de tous nos péchés.
Ainsy Soit-Il


Puis l’abbesse se leva, et ayant derechef humecté son pouce d’eau bénite, l’apposa sur le front de la jeune femme, pour lui donner sa bénédiction.
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Croyez en Dieu, car hors de Dieu, point de vérité n’existe. En revanche, son existence est gratuite, donc, croyez en lui et arrêtez de me les casser menu. Chr. Log. XIV
--Raphael.de.lepine
Il l'avait suivie dans cette nouvelle pièce, comme il la suivrait partout désormais ; car il était au fond d'elle. Assis dans l'angle, il la regardait. Il ne lui soufflait aucun mot, mais ses yeux intenses, et pour Clémence, les sentir la transpercer - il lisait en elle, puisqu'il y était ! - fut peut-être une raison suffisante de sentir les mots à dire.

Ils n'étaient pas d'accord, les jumeaux. Elle souffrait, lui non. Il n'y avait pas de raison de souffrir de la mort, c'était bien égoïste : on regrette de n'avoir pas toujours ceux que l'on aime près de soi, alors qu'eux sont bien mieux dans l'éternelle félicité du firmament.

Il resta silencieux, Raphaël, durant toute la confession, et toute la réponse de l'abbesse.
Quand celle-ci gronda Clémence de vouloir retenir sa mère... De son regard intense, il fit un clin d'œil à sa sœur, comme pour dire : « Tu vois ? J'avais raison ! C'est mon tour, maintenant, laisse-la moi sans t'en faire aucun reproche... »

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Dragonet


Dragonet avait apprit par sa fille Beulbeul que Matthilde vivaient ses derniéres heures, et qu'un medecin s'occupait d'elle. Il avait eu un geste d'agaccement, il ne faisait en la matiére confiance qu'en lui même pour les gens qu'il aimait.

Et Matthilde de beaugency avec Dege , avaient constitué ses deux plus grand amis. Il y avait eu entre eux une complicité ,une affection qui allait bien au de là des mots, un amour aussi qui n'avait jamais pu être totalement vécus.

Il s'etait donc invité au Manoir de l'epine, passant par le jardin dont elle lui avais un jour donné les clefs. Puis il etait monté jusqu'a sa chambre où il supposait trouver le corps.

Il entra. Auprés du corps, sa fille, 2 autres domestiques, et un medicastre.. le medicastre.

Les domestiques le connaissaient, sa fille avaient été la Dame de compagnie de la marquise et la preceptrice de leur fille durant plus de 10 ans. Le medicastre surement de renom, mais il n'avaispas envie de justifier sa présence.

Il s'adressa au 3..

Je suis un proche de la famille, si vous voulez bien nous laisser seul avec elle, je resterais qu'avec ma fille.

Beulbeul confirma d'un geste son identitée, puis une fois les 3 sortis, il s'approcha de Matthilde. Son regard etait autant celui du medecin que de l'ami, observant signe de repiration, couleur de carnation, oeil, odeur de la peau.

Il se demanda si il serait nécessaire de l'embaumer, il poserait la question à clemence. L'examen finis, il se pencha prêt d'elle et commença à murmurer dans son oreille, en lui prenant la main. Cela ressemblait plus à des incantations qu'a une priére, sans s'arreter, longuement il marmona ainsi.

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Clemence.de.lepine
Oui, tu avais raison. Vous avez raison. Mais l’intemporel vous est tellement plus accessible que moi… Comment ai-je pu être aussi aveugle et insensible au reste ? A tout ? Il n’y avait que moi. Ma souffrance, ma solitude, mon malheur. A trop me refermer sur moi-même j’en ai oublié les autres.

Je confesse à Dieu tout puissant,
A tous les Saints,
Et à vous aussi, mes amis,
Parce que j'ai beaucoup péché,
En pensée, en parole, en action.
Je supplie tous les Saints,
Et vous, mes amis,
De prier le Créateur pour moi.
Que le Seigneur nous accorde le pardon,
L'absolution et la rémission de tous nos péchés.
Ainsi Soit-Il

C’était dit.

Le Jugement l’avait plus d’une fois fait frémir. De honte, cette fois. Elle en avait rougi, elle l’avait senti, et c’était bien une grande première. Elle avait tout le long gardé les yeux baissés sur ses mains jointes. Les mots tombaient comme autant de grêlons sur une tête nue. Durs. Blessants. Mais c’était nécessaire, et Clémence s’y était attendue, au fond. Elle l’avait voulu.

Ses yeux se relevèrent, et on pouvait désormais y lire toute la détermination à laquelle venait de conduire cette épreuve. Elle en sortirait différente, de cette situation que jusqu’à maintenant elle avait exécrée. Elle n’en sortirait pas anéantie. Elle n’en avait pas le droit. Matthilde allait mourir, soit : mais elle serait alors en paix, et Raphaël récupérerait avec elle le temps perdu. C’était dans l’ordre des choses. Et elle… elle allait trouver sa force dans son deuil. Elle se releva, la vision claire, invitant d’un petit sourire l’abbesse à rejoindre la chambre.


Merci, ma Mère. Chuchota-t-elle à son adresse avant que leur intimité ne soit réduite lorsqu’elles auraient franchi le seuil. Un remerciement superflu, peut-être, mais Clémence n’aurait pu s’en aller sans avoir concrétisé d’un mot sa gratitude. C’était ainsi.

A son retour, elle trouva un homme au chevet de sa mère. Son cœur, un instant, ralentit sa cadence. Qui était-ce ? Qui l’avait laissé entrer ? … Et puis, elle le reconnut. Ça n’était pas forcément pour lui plaire, elle gardait à la mémoire une accusation portée à l’encontre du visiteur de la part d’une ancienne Duchesse de Champagne. Une accusation qui avait ébranlé sa confiance pour cet homme et qui avait fait naître quantité de questions auxquelles elle n’avait pas encore pu trouver de réponse. Aussi, la vision de cet homme auprès de sa mère lui glaça-t-elle d’abord le sang. Et puis… Qu’importait. L’heure n’était pas aux reproches et aux questionnements. Il était là parce que lui aussi, à sa façon, avait aimé et aimait encore Matthilde. Elle allait mettre en pratique dès maintenant les conseils de l’abbesse et penser aux autres avant de penser à elle. Prendre sur soi, malgré cette intrusion sauvage, non annoncée, et le renvoi manifeste du médecin. Penser à
Georges, avant tout.

Vicomte… appela-t-elle doucement. Sa voix tremblante trahissait son trouble. Vicomte, merci d’être là. Pour elle. Son ton s’était alors fait plus assuré.

Lentement, elle vint s’agenouiller à ses côtés, posant ses coudes sur la courtepointe et son menton sur ses doigts entrelacés.


Prions ensemble. Annonça-t-elle pour ceux qui restaient. Prions pour le repos de son âme. C’est la seule chose que nous puissions faire pour elle.

Depuis longtemps, les cloches annonçant les prières de Matines avaient retenti. Bientôt, elles réveilleraient l’Epine pour l’office des Laudes, amenant avec leur tintement clair les premières lueurs du jour. Déjà, la chambre était teintée d’un halo opalin. A cette constatation, une phrase revint à la mémoire de Clémence. A voix haute, elle se permit de la dire.

"La lumière du soleil dissipera alors nos craintes, nos doutes, nos angoisses, nos interrogations, nos haines et nos chagrins. Sa chaleur nous ôtera de l’inconfort et du froid."
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---Bannière en reconstruction---
K200scom1
L'abbesse fit répons à cette citation qui sonnait si juste en cet instant.

Oui, Ma Fille, celà est fort judicieusement exprimé. Ainsy que le bonheur réside dans les choses simples, et non dans les raisonnements compliqués qui rendent les gens malheureux.

Puis elle prononça une courte prière, comme pour soutenir la portée du Logion énoncé par Clémence.

Dieu Créateur de toutes choses, nous te remettons cette journée !
Guide-nous dans nos actes, nos pensées les plus intimes,
Toi qui sais tout, purifies-les afin qu'ils soient conformes à Ta volonté.
Toi le Très Haut, qui a tout prévu, mais nous laisse libre de notre destin,
Inspire ceux qui s’écartent de ta parole Divine,
Pour qu’ils nous aident à préserver le monde.
Ainsy Soit-Il


Puis l'abbesse retira une autre fiole d'un petit réticule qu'elle portait caché sous sa bure, et qui contenait, celle-ci, un peu de la sainte huile bénie par Monseigneur Son Frère l'Archevêque de Reims, Primat de France. Elle s'approcha de la mourante, lui oint le front et les mains, et prononça l'ultime Sacrement.

Par cette onction sainte, que le Très-Haut, en sa grande bonté, te réconforte par la grâce de l’Esprit Saint.
Ainsy, t'ayant libéré de tous péchés, qu’il te sauve et te relève.
Amen

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Croyez en Dieu, car hors de Dieu, point de vérité n’existe. En revanche, son existence est gratuite, donc, croyez en lui et arrêtez de me les casser menu. Chr. Log. XIV
Dragonet


Citation:
Vicomte… appela-t-elle doucement. Sa voix tremblante trahissait son trouble. Vicomte, merci d’être là. Pour elle. Son ton s’était alors fait plus assuré.


Clemence etait rentré en compagnie de l'abbesse. Il cessa sa litanie sentant son âme désormais loin de son corps. Plus aucun souffle l'habitaient maintenant.Du moins selon les critéres de la science. Il sentait encore en elle des traces de ce que les spinozistes appelaient le conatus, et ce lien pysique la reliant encore à ce qu'elle avait été et que les pookhaistes savaient parfois rappeler.

Il lui ferma les yeux, signifiant son décés.. Il aurait aimé une derniére fois embrasser sa peau dans un geste de tendresse et d'affection mais il n'etait pas sur que les gens presents en comprennent la signification. Plus tard sans doute, il le ferais.

Puis il s'ecarta laissant l'abbesse pratiquer l'extreme onction. Comme tout les rites sacrés, celui ci n'etais pas anodin et son pouvoir était fort. Elle ne pourrait plus jamais renaitre dans cette chair. Un vide se forma en lui, et il imaginait qu'il fut bien plus profond encore chez Clemence. Il fit un signe à sa fille pour qu'elle soit prêt à la reconforter, même si lui estimait qu'il aurais pu lui apporter cela, l'etiquette le permettais pas et l'abbesse n'etais pas de la famille, il se devait d'une certaine réserve.

Il pria egalement, sans un mot, ses priéres se faisant de moins en moins ordinaire.

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Clemence.de.lepine
Toute à ses prières, à son émerveillement devant ce jour qui se levait et qui réellement, dissipait bien des peurs, Clémence ne s'était pas rendu compte que... dans la chambre également la vie avait suivi son cours. Car la mort faisait partie de la vie, non ? La fin, le début, le recommencement, la résurrection de l'âme, ailleurs...

Ce n'est que lorsqu'elle surprit le Vicomte de Saint-Germain passer une main sur le visage de sa mère, qu'elle sentit l'abbesse se rapprocher du lit, qu'elle la vit pratiquer l'extrême onction... qu'elle comprit.

Une douleur vint lui vriller les tempes, cogner dans sa poitrine, et c'est tremblante qu'elle fixa son regard sur la gorge immobile de la Marquise. On avait beau lui avoir dit qu'il fallait la laisser partir, qu'elle serait mieux Là-Bas, elle avait beau s'en être persuadée... Cela ne l'empêchait pas de se sentir incroyablement orpheline, désorientée. Cette peur de l'inconnu, à nouveau.

Se reprendre. Se montrer digne. De ce qu'on attend d'elle. De ce que sa mère aurait voulu qu'elle soit, à cet instant précis.


Ce n'est pas une fin. C'est un commencement. murmura-t-elle pour elle-même, parce qu'il fallait s'en souvenir. C'était mieux pour elle, elle n'avait que trop souffert. Se lamenter ne changerait rien. On pouvait ressentir de la peine, parce qu'il faudrait être cruel pour ne rien éprouver face à la perte d'un être cher. Mais on ne pouvait pas rester prostré dans son chagrin. La Vie n'était qu'une étape.

Alors oui, les larmes coulaient. Oui, on pouvait lire une tristesse infinie briller au fond des iris bleus de Clémence. Oui, le poids de la solitude se faisait plus présent désormais. Mais non, cela ne le l'achèverai pas. Elle irai plus loin, jusqu'à ce que son heure vienne à son tour. Et elle avait encore bien des choses à faire avant de rejoindre sa mère et... Raphaël.

A travers ses larmes, elle lui sourit. Elle se résigna. Elle lui confia leur mère.

A ton tour. Accueille la auprès de toi.

Moi, je ne peux plus rien. Il ne me restera bientôt plus que des souvenirs, pour penser à elle avec tendresse. Elle est à toi. Je te la rends. Et ici, sa mémoire vivra tant que je serai là pour la perpétuer.

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---Bannière en reconstruction---
--Raphael.de.lepine
Quelle mère remercies-tu, en vérité, Clémence ? Les mots sont trompeurs, n'est-ce pas ? Oui, merci mère abbesse, d'être cette présence constante et rassurante, cette instance qui fait passer la mort pour plus douce qu'on ne la vit. Merci, mère, marquise, merci Matthilde, de nous avoir donné la vie.

Raphael, pendant un moment, ne dit plus rien. Il était là, sa main sur l'épaule de Clémence. L'autre main cherchant celle de sa jumelle. Les sens-tu, ces mains toutes proches ? La sens-tu, cette force que je veux te donner ?

Il savait qu'il n'y avait pas besoin de mots, qu'il en avait beaucoup dit pour cette nuit. Il avait désormais toute l'éternité pour parler avec Clémence, car ils ne se quitteraient plus.

Dans cet autre monde que nous connaîtrons tous tôt ou tard, le jeune garçon aux blonds cheveux, le jeune Lion, accueillit sa mère, la Sicilienne, la Vénitienne, la Champenoise. L'Epouse, la Mère, la Fille. La Lionne. La Beaugency. L'Epine.

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Beulbeul


Beulbeul était perdue dans ses pensées, dans ses souvenirs....tout un flot de souvenir venait bousculer son esprit..Sa première rencontre avece la marquise, son intimidation, puis une confiance peu à peu qui s'installait pour finir avec une complicité entre les deux femmes.
Souvenirs lointains, et douloureux lorsqu'elle voyait Matthilde si frêle, si étrangére à ce qu'elle avait été.
Elle avait à peine vue son père entrer. Elle savait qu'il était là, avait fait signe de le laisser entrer...Mais ne put rien lui dire.

Clémence s'était éloignée avec l'abesse, elle semblait différente comme perdue, elle semblait chercher quelqu'un..

A son retour, elle paraissait apaisée, enfin uste un instant.
Les gestes que fit son père, à cet instant, lui fit prendre conscience de la réalité, de la gravité des choses.

L'heure était arrivée...Cette heure qu'on souhaiterait reculer à tout jamais, cette heure que personne ne souhaiterait vivre, que personne ne devrait vivre.

Heure terrible ....

Beulbeul se reprit, elle pleurerait plus tard. IL fallait juste qu'elle soit là présente, et assez forte pour Clémence.
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