Maeve.
[Là ou ailleurs
]
A Moulins et un peu paumée. Voilà où elle en est la rouquine Alterac. Et pour elle, cest sacrément inhabituel. La demoiselle sait depuis ses quatre ans ce quelle veut faire, où elle veut aller, ce quelle vivra, comment et avec qui. Elle la toujours su. Quels que soient les évènements qui ont marqué sa route, elle na pas dévié de son but. Jamais.
Maeve est fille de noble. Maeve sera chevalier. Maeve sera lépouse aimante de Gaspard. Maeve est sérieuse, Maeve est responsable, Maeve est la bonne cadette, sage, parfaite, Maeve arbore sa balafre comme une victoire, Maeve est licorneuse, Maeve est dame de St Sornin, Maeve est perdue.
La Flamme vacille et scintille dune faible lueur. Pilier de comptoir, elle ne va plus que rarement fréquenter les bancs usés des tavernes. Après des semaines dagitation et de découverte, le retour à la réalité est difficile pour la jeune rousse. Quinze ans, et elle découvre à peine quon peut aussi samuser Fille de devoir, elle avait fait son deuil de la liberté si chère au cur des autres. Elle croyait lêtre, libre. Elle croyait avoir choisi, avoir décidé, et courir vers son but en pleine conscience.
Aucun doute nétait venu souiller sa décision, aucune question navait entaché ses convictions inébranlables.
Et pourtant Une secousse ou deux sur son tambourin de fortune avaient suffi à faire vibrer son coeur de jouvencelle. Elle avait ri, chanté, dansé, bu à en avoir mal aux cheveux. Et puis Et puis dun coup, le vide. Les missives qui se suivent, linvitant à quitter le duché. Etrangère, elle qui na pas de véritable foyer
Dailleurs, cest peut être ça qui la bouscule le plus ces derniers temps. Que des inconnus se permettent de remettre en cause tout ce quelle est. Exclusivement. La Flamme na rien dautre dans sa jeune vie que la probité, lhonnêteté et la vocation daider son prochain, conseils en bouche ou armes à la main. Chevalier, quelle veut être. Et on laccuse dêtre pilleuse. Peut-être quà vingt ou trente ans on sait qui on est et que ce genre de remarque se prend avec diplomatie.
Mais quand on na que quinze ans, quon a toujours tout fondé sur cette image, et quon sentend demander de prouver qui on est et pourquoi on est là, et bien on le prend mal.
Elle n'accepte pas les différents courriers et le ton condescendant voire inquisiteur des douaniers, la mémoire branlante de la duchesse, lattitude méfiante des autorités. Oh elle savait quil existait des cons partout. Elle savait aussi que tout le monde ne peut pas connaitre le nom de ses parents, que seuls ses amis savent combien Maeve place ses valeurs au dessus de tout, mais pour la jeune fille, la remarque a un arrière gout amer.
Le tout mélangé donne une belle étincelle dans la cervelle embrasée de la Flamme. Elle cogite et soupire plus souvent quà son tour. Même la présence dArthur, les taquineries affectueuses de Grid, lapparente gentillesse de quelques uns des moulinois ne parviennent pas à lui faire retrouver son allant. Pire que lacné juvénile, Maeve découvre les affres des crises existentielles des gens de son âge. Lenvie de tout envoyer balader comme de tout poursuivre, les envies de rire qui arrachent les larmes, les bonjour urticaires comme le plissement de nez à des remarques hier anodines aujourdhui vexantes, et inversement.
Toujours est-il quelle se retrouve aux portes de la ville Seule, arpentant les chemins les pensées en ébullition, elle cogite sans y réfléchir. Maeve ne réalise pas bien ce quil se passe en elle en ce moment, concentrée sur ses entrainements, ce quelle croit savoir de sa vie. Elle nimagine pas le changement et les contradictions qui la tiraillent. La Flamme sait juste quelle a du mal à discuter, à voir des gens, à programmer son départ, à se réjouir de retrouver les autres.
Lachant un soupir, elle sen va rejoindre son campement. Une tente de toile et cuir, bien dressée. Un foyer encore fumant du matin, quelques affaires disséminées au gré des envies, Fernand qui broute pas loin, Gilles attaché à sa corde qui grignote des brins dherbe avec lair ahuri qui le caractérise. La jeune fille sapproche, et dépose hache et arc près de lentrée de la tente, avant de se poser en tailleur devant le foyer et de ranimer le feu avec quelques brindilles arrachées au tas non loin.
Léger soupir qui séchappe des lèvres juvéniles, azur qui sen va se perdre dans les flammèches orangées qui dansent devant elle. Le soleil nest pas loin de quitter lhorizon, et quelques étoiles déjà viennent parsemer un ciel qui sobscurcit. La Flamme met un quelconque morceau de viande à cuire, perdant ses réflexions dans les lueurs changeantes du feu quelle vient dallumer.
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A Moulins et un peu paumée. Voilà où elle en est la rouquine Alterac. Et pour elle, cest sacrément inhabituel. La demoiselle sait depuis ses quatre ans ce quelle veut faire, où elle veut aller, ce quelle vivra, comment et avec qui. Elle la toujours su. Quels que soient les évènements qui ont marqué sa route, elle na pas dévié de son but. Jamais.
Maeve est fille de noble. Maeve sera chevalier. Maeve sera lépouse aimante de Gaspard. Maeve est sérieuse, Maeve est responsable, Maeve est la bonne cadette, sage, parfaite, Maeve arbore sa balafre comme une victoire, Maeve est licorneuse, Maeve est dame de St Sornin, Maeve est perdue.
La Flamme vacille et scintille dune faible lueur. Pilier de comptoir, elle ne va plus que rarement fréquenter les bancs usés des tavernes. Après des semaines dagitation et de découverte, le retour à la réalité est difficile pour la jeune rousse. Quinze ans, et elle découvre à peine quon peut aussi samuser Fille de devoir, elle avait fait son deuil de la liberté si chère au cur des autres. Elle croyait lêtre, libre. Elle croyait avoir choisi, avoir décidé, et courir vers son but en pleine conscience.
Aucun doute nétait venu souiller sa décision, aucune question navait entaché ses convictions inébranlables.
Et pourtant Une secousse ou deux sur son tambourin de fortune avaient suffi à faire vibrer son coeur de jouvencelle. Elle avait ri, chanté, dansé, bu à en avoir mal aux cheveux. Et puis Et puis dun coup, le vide. Les missives qui se suivent, linvitant à quitter le duché. Etrangère, elle qui na pas de véritable foyer
Dailleurs, cest peut être ça qui la bouscule le plus ces derniers temps. Que des inconnus se permettent de remettre en cause tout ce quelle est. Exclusivement. La Flamme na rien dautre dans sa jeune vie que la probité, lhonnêteté et la vocation daider son prochain, conseils en bouche ou armes à la main. Chevalier, quelle veut être. Et on laccuse dêtre pilleuse. Peut-être quà vingt ou trente ans on sait qui on est et que ce genre de remarque se prend avec diplomatie.
Mais quand on na que quinze ans, quon a toujours tout fondé sur cette image, et quon sentend demander de prouver qui on est et pourquoi on est là, et bien on le prend mal.
Elle n'accepte pas les différents courriers et le ton condescendant voire inquisiteur des douaniers, la mémoire branlante de la duchesse, lattitude méfiante des autorités. Oh elle savait quil existait des cons partout. Elle savait aussi que tout le monde ne peut pas connaitre le nom de ses parents, que seuls ses amis savent combien Maeve place ses valeurs au dessus de tout, mais pour la jeune fille, la remarque a un arrière gout amer.
Le tout mélangé donne une belle étincelle dans la cervelle embrasée de la Flamme. Elle cogite et soupire plus souvent quà son tour. Même la présence dArthur, les taquineries affectueuses de Grid, lapparente gentillesse de quelques uns des moulinois ne parviennent pas à lui faire retrouver son allant. Pire que lacné juvénile, Maeve découvre les affres des crises existentielles des gens de son âge. Lenvie de tout envoyer balader comme de tout poursuivre, les envies de rire qui arrachent les larmes, les bonjour urticaires comme le plissement de nez à des remarques hier anodines aujourdhui vexantes, et inversement.
Toujours est-il quelle se retrouve aux portes de la ville Seule, arpentant les chemins les pensées en ébullition, elle cogite sans y réfléchir. Maeve ne réalise pas bien ce quil se passe en elle en ce moment, concentrée sur ses entrainements, ce quelle croit savoir de sa vie. Elle nimagine pas le changement et les contradictions qui la tiraillent. La Flamme sait juste quelle a du mal à discuter, à voir des gens, à programmer son départ, à se réjouir de retrouver les autres.
Lachant un soupir, elle sen va rejoindre son campement. Une tente de toile et cuir, bien dressée. Un foyer encore fumant du matin, quelques affaires disséminées au gré des envies, Fernand qui broute pas loin, Gilles attaché à sa corde qui grignote des brins dherbe avec lair ahuri qui le caractérise. La jeune fille sapproche, et dépose hache et arc près de lentrée de la tente, avant de se poser en tailleur devant le foyer et de ranimer le feu avec quelques brindilles arrachées au tas non loin.
Léger soupir qui séchappe des lèvres juvéniles, azur qui sen va se perdre dans les flammèches orangées qui dansent devant elle. Le soleil nest pas loin de quitter lhorizon, et quelques étoiles déjà viennent parsemer un ciel qui sobscurcit. La Flamme met un quelconque morceau de viande à cuire, perdant ses réflexions dans les lueurs changeantes du feu quelle vient dallumer.
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