Djenesa
[La journée avait pourtant bien commencé...]
Il y avait des jours où franchement il valait mieux rester enroulée dans son duvet. Bon, pas faute de ne pas avoir été avertie du risque. Mais elle était du genre têtu. Et elle ne voulait pas s'éloigner de son "élève" si vite. Alors elle avait forcé la porte. "Allez laissez-moi partir avec elles ! S'il vous plaiiiit !"
Trop sentimental tout ça.
La journée était belle, ensoleillée. Trop. Premier nuage, le barde ne s'était pas fait bouffé pendant la nuit. Diole.
On avait bien marché et vaqué à ses occupations journalières. Elle avait cueilli quelques plantes, histoire de... Et elles avaient repris la route.
Du moins les autres. Elle, s'était bêtement fait prendre en arrachant de l'écorce de bouleau. Trop perdue dans ses pensées et dans les buissons, elle ne les avait pas tout de suite entendus venir. Et quand ce fut le cas, il était trop tard. Ils l'avaient repérée et venaient droit sur elle.
"Mais je vous le dis, Chef ! J'y étais, à Orléans ! Et celle-là, ma main à couper qu'elle aussi !
Arrête de brailler comme un goret, imbécile ! On va vite s'en assurer... Encerclez-là !"
Elle regarda son épée, son arc et sa Miséricorde. Pas le choix. A une contre sept... Et si elle se faisait arrêter, peu de chances de les retrouver. Pas beaucoup de solutions... Courir.
Courir loin des autres. Courir sans espoir.
"Hééé ! Reviens ici, chienne !"
Ce qui devait arriver arriva. Ils connaissaient le secteur mieux qu'elle. Ils ne tardèrent pas à lui mettre la main au collet. Mais dans la poursuite, il ne lui avait fallu que quelques secondes pour se planquer dans un buisson et y balancer ses trois Fidèles avant de repartir.
"J'ai horreur qu'on me fasse courir... Vous deux, fouillez-la !"
Avec plaisir, chef ! "
Encerclée, elle vit d'un mauvais il les deux grognards s'approcher et le leur fit comprendre à sa façon... Une droite bien placée suivie d'un bon coup de pied dans le service de famille signala courtoisement au plus assuré qu'elle n'était pas prête à coopérer. Mais elle paya son audace quand elle sentit une dague caresser sa carotide.
"Ne joue pas à la plus maligne, catin..."
Elle serra les dents sous l'insulte mais le fil de la lame lui rappela la fragilité de sa position.
"Pas d'armes, chef... Mais une bourse bien garnie ! "
Quand on la poussa dans la salle d'interrogatoire, elle ne put s'empêcher de frémir devant les outils de travail du bourreau. Elle les avait connus de trop près et elle n'était pas prête à recommencer l'expérience.
On la força à s'asseoir sur un tabouret bancal et on attendit. Pas longtemps. Le procureur ne tarda pas à entrer.
"Je suppose Demoiselle, que vous savez pourquoi l'on s'est saisi de votre personne...
Aucunement Messire... "
Le procureur soupira. Évidemment, elle n'avait pas l'intention de lui rendre la tâche facile.
"Répondez-vous au nom de Djenesa ?
Non, je me nomme Scholastique, fille de Jehan Meunier. Je partais rejoindre les miens quand vos gardes m'ont arrêtée."
Nouveau soupir.
"Evitez de me faire perdre mon temps ! L'un des soldats qui ont procédé à votre arrestation, vous a formellement reconnue. Vous êtes accusée de haute trahison dans le duché orléanais pour l'avoir attaqué. Vous avez fui mais votre procès a continué sans vous et la condamnation est tombée. Vous vous en tirez plutôt bien. Moi je vous aurai bien pendue haut et court ! "
A ces mots, Djenesa se détendit ouvertement. Elle s'affala contre le mur derrière elle et d'une nonchalance exaspérante étira ses longues jambes en souriant, narquoise.
"Si tout est si clair, Messire, pourquoi cette conversation ennuyeuse ? Votre rôle n'est que celui de piètre exécutant de la sentence. Alors exécutez donc qu'on en finisse..."
Devant une attitude aussi désinvolte, le procureur sentit la Sainte Moutarde lui monter au nez. Il fit signe aux gardes qui attrapèrent la belle par les épaules pour la plaquer rudement contre la table. La Flamande se débattit, sans grand effet évidemment.
"Si tu es là et non encore dans ton cul-de-basse-fosse, c'est parce que tu vas me dire où sont les autres !
Les autres ? Mais je ne sais pas où ils sont, les autres. Je me suis séparée de cette bande de fracassés à Verneuil. Les pots de chambre, c'est pratique mais quand on cherche de l'or, ça constipe. Alors... Et puis, leur conversation était un peu limitée..."
Troisième soupir. Il fallait rester calme. Ne pas la casser trop tôt. Montrer où était son intérêt à la prisonnière. On la redressa aussi brutalement qu'on lui avait fait voir les détails de la table.
"Inutile de tenter de me faire avaler des couleuvres. Répondez à mes questions et vous pourrez peut-être sortir d'ici sans trop de souffrances..."
On ne pouvait pas être plus clair. La Silencieuse n'avait à présent plus rien de sa nonchalance coutumière. Elle n'était plus que mépris et son regard d'émeraude, glacial, ne cachait rien de ses sentiments.
"Compte dessus et bois de l'eau..."
Le bourreau qui s'était approché sur ordre ne tarda pas à donner la réponse de l'homme de loi. Le coup que la Flamande reçut lui fit voir trente et quelques chandelles.
"J'en ai fait parler des plus récalcitrantes !
Et bien donnez moi leurs adresses qu'on s'organise une petite sauterie.
Vous allez m'obliger à utiliser une méthode plus brutale, dommage...
Vous ne serez pas le premier..."
La Silencieuse ne savait pas combien de temps elle resterait en compagnie si joyeuse, mais elle allait trouver le temps long, assurément...
Elle espérait simplement que ses compagnes de voyage n'auraient, elles, pas d'embrouilles et continueraient droit devant elles. Elle ne se doutait pas de la catastrophe qui allait advenir.
Les jours qui suivirent furent désagréables à tous points de vue. Elle en regretta presque les petits plats de Sad'. Et les activités laissaient franchement à désirer. Finalement au bout de trois jours, mais elle ignorait ce détail, dans l'obscurité qu'elle était, on la tira une dernière fois de son cachot, pour aller retrouver le Gentil Organisateur de ces vacances tout frais payés.
"Vous êtes libre...
Tiens donc ! Ne croyez pas que je sois ingrate mais vous m'en voyez ravie.
Ne me remerciez pas... Vous aviez été condamnée à trois jours de prison et et cent écus d'amende. "
Ainsi, tout cela n'avait duré que trois jours. Elle pouvait donc espérer retrouver les Fauchards rapidement. Elle allait se faire passer un savon. Bah elle ne l'aurait pas volé... En attendant, elle n'était pas encore dehors.
"Quand vous ai-je remercié ? J'ose espérer qu'après le passage de vos soudards, il soit rester suffisamment d'or pour payer la note..."
Pour seule réponse, le procureur lui lança son bien. Devenu fort léger. Diole... Elle récupéra aussi sa besace et fut surprise de voir que rien n'avait disparu. Le procureur remarqua aisément son état d'esprit devant sa découverte et ne tarda pas à manifester son mécontentement.
"Mes... "soudards"... sont des gens honnêtes. Nous ne sommes pas tous de votre monde !
Chantez vos messes à d'autres que moi... " répliqua la Flamande aussi sec en grimaçant de douleur quand sa sacoche retrouva sa place sur son flanc. Le procureur haussa les épaules en levant les yeux au ciel.
"J'avais tous les droits de vous faire pendre en découvrant votre flétrissure..."
La brune ne répondit rien mais décocha à l'homme un regard venimeux. Elle savait qu'il avait raison. Qu'importe. La morsure de ses plaies l'empêchait d'être conciliante et encore moins reconnaissante.
Quand enfin, elle put sentir le soleil... ou plutôt l'averse... sur sa peau devenue bien pâle, elle soupira profondément pour se libérer de la pression qui compressait sa poitrine. Cela n'avait pas été une partie de plaisir mais c'était au moins un problème de réglé. A présent, il ne lui restait plus qu'à envoyer un piaf pour savoir où retrouver les autres. Se soigner et se reposer un peu aussi. Et pour concilier les deux, il n'y avait qu'un endroit : la taverne la plus proche.
Elle devait aussi récupérer ses armes. En priant les vents pour qu'elles n'aient pas bougé. Elle préféra aller les chercher sur le champ, profitant encore de la lumière diurne. Là encore retrouver l'endroit exact où elle avait dissimulé ses Fidèles fut un sacerdoce mais avec une bonne dose de volonté et de patience, on arrivait à tout. Et après de longues heures de battue, ce fut couverte de boue et avec sous le bras un paquet enveloppé de son manteau qu'elle entra dans la taverne et demanda le gîte, le couvert et de quoi écrire.
Deux courriers partirent. L'un à une certaine brunette pour donner et avoir des nouvelles. L'autre à un chef bourru et surement furieux pour avoir des instructions. Et attendant les réponses, on allait jouer au petit apothicaire...
Il y avait des jours où franchement il valait mieux rester enroulée dans son duvet. Bon, pas faute de ne pas avoir été avertie du risque. Mais elle était du genre têtu. Et elle ne voulait pas s'éloigner de son "élève" si vite. Alors elle avait forcé la porte. "Allez laissez-moi partir avec elles ! S'il vous plaiiiit !"
Trop sentimental tout ça.
La journée était belle, ensoleillée. Trop. Premier nuage, le barde ne s'était pas fait bouffé pendant la nuit. Diole.
On avait bien marché et vaqué à ses occupations journalières. Elle avait cueilli quelques plantes, histoire de... Et elles avaient repris la route.
Du moins les autres. Elle, s'était bêtement fait prendre en arrachant de l'écorce de bouleau. Trop perdue dans ses pensées et dans les buissons, elle ne les avait pas tout de suite entendus venir. Et quand ce fut le cas, il était trop tard. Ils l'avaient repérée et venaient droit sur elle.
"Mais je vous le dis, Chef ! J'y étais, à Orléans ! Et celle-là, ma main à couper qu'elle aussi !
Arrête de brailler comme un goret, imbécile ! On va vite s'en assurer... Encerclez-là !"
Elle regarda son épée, son arc et sa Miséricorde. Pas le choix. A une contre sept... Et si elle se faisait arrêter, peu de chances de les retrouver. Pas beaucoup de solutions... Courir.
Courir loin des autres. Courir sans espoir.
"Hééé ! Reviens ici, chienne !"
Ce qui devait arriver arriva. Ils connaissaient le secteur mieux qu'elle. Ils ne tardèrent pas à lui mettre la main au collet. Mais dans la poursuite, il ne lui avait fallu que quelques secondes pour se planquer dans un buisson et y balancer ses trois Fidèles avant de repartir.
"J'ai horreur qu'on me fasse courir... Vous deux, fouillez-la !"
Avec plaisir, chef ! "
Encerclée, elle vit d'un mauvais il les deux grognards s'approcher et le leur fit comprendre à sa façon... Une droite bien placée suivie d'un bon coup de pied dans le service de famille signala courtoisement au plus assuré qu'elle n'était pas prête à coopérer. Mais elle paya son audace quand elle sentit une dague caresser sa carotide.
"Ne joue pas à la plus maligne, catin..."
Elle serra les dents sous l'insulte mais le fil de la lame lui rappela la fragilité de sa position.
"Pas d'armes, chef... Mais une bourse bien garnie ! "
Quand on la poussa dans la salle d'interrogatoire, elle ne put s'empêcher de frémir devant les outils de travail du bourreau. Elle les avait connus de trop près et elle n'était pas prête à recommencer l'expérience.
On la força à s'asseoir sur un tabouret bancal et on attendit. Pas longtemps. Le procureur ne tarda pas à entrer.
"Je suppose Demoiselle, que vous savez pourquoi l'on s'est saisi de votre personne...
Aucunement Messire... "
Le procureur soupira. Évidemment, elle n'avait pas l'intention de lui rendre la tâche facile.
"Répondez-vous au nom de Djenesa ?
Non, je me nomme Scholastique, fille de Jehan Meunier. Je partais rejoindre les miens quand vos gardes m'ont arrêtée."
Nouveau soupir.
"Evitez de me faire perdre mon temps ! L'un des soldats qui ont procédé à votre arrestation, vous a formellement reconnue. Vous êtes accusée de haute trahison dans le duché orléanais pour l'avoir attaqué. Vous avez fui mais votre procès a continué sans vous et la condamnation est tombée. Vous vous en tirez plutôt bien. Moi je vous aurai bien pendue haut et court ! "
A ces mots, Djenesa se détendit ouvertement. Elle s'affala contre le mur derrière elle et d'une nonchalance exaspérante étira ses longues jambes en souriant, narquoise.
"Si tout est si clair, Messire, pourquoi cette conversation ennuyeuse ? Votre rôle n'est que celui de piètre exécutant de la sentence. Alors exécutez donc qu'on en finisse..."
Devant une attitude aussi désinvolte, le procureur sentit la Sainte Moutarde lui monter au nez. Il fit signe aux gardes qui attrapèrent la belle par les épaules pour la plaquer rudement contre la table. La Flamande se débattit, sans grand effet évidemment.
"Si tu es là et non encore dans ton cul-de-basse-fosse, c'est parce que tu vas me dire où sont les autres !
Les autres ? Mais je ne sais pas où ils sont, les autres. Je me suis séparée de cette bande de fracassés à Verneuil. Les pots de chambre, c'est pratique mais quand on cherche de l'or, ça constipe. Alors... Et puis, leur conversation était un peu limitée..."
Troisième soupir. Il fallait rester calme. Ne pas la casser trop tôt. Montrer où était son intérêt à la prisonnière. On la redressa aussi brutalement qu'on lui avait fait voir les détails de la table.
"Inutile de tenter de me faire avaler des couleuvres. Répondez à mes questions et vous pourrez peut-être sortir d'ici sans trop de souffrances..."
On ne pouvait pas être plus clair. La Silencieuse n'avait à présent plus rien de sa nonchalance coutumière. Elle n'était plus que mépris et son regard d'émeraude, glacial, ne cachait rien de ses sentiments.
"Compte dessus et bois de l'eau..."
Le bourreau qui s'était approché sur ordre ne tarda pas à donner la réponse de l'homme de loi. Le coup que la Flamande reçut lui fit voir trente et quelques chandelles.
"J'en ai fait parler des plus récalcitrantes !
Et bien donnez moi leurs adresses qu'on s'organise une petite sauterie.
Vous allez m'obliger à utiliser une méthode plus brutale, dommage...
Vous ne serez pas le premier..."
La Silencieuse ne savait pas combien de temps elle resterait en compagnie si joyeuse, mais elle allait trouver le temps long, assurément...
Elle espérait simplement que ses compagnes de voyage n'auraient, elles, pas d'embrouilles et continueraient droit devant elles. Elle ne se doutait pas de la catastrophe qui allait advenir.
Les jours qui suivirent furent désagréables à tous points de vue. Elle en regretta presque les petits plats de Sad'. Et les activités laissaient franchement à désirer. Finalement au bout de trois jours, mais elle ignorait ce détail, dans l'obscurité qu'elle était, on la tira une dernière fois de son cachot, pour aller retrouver le Gentil Organisateur de ces vacances tout frais payés.
"Vous êtes libre...
Tiens donc ! Ne croyez pas que je sois ingrate mais vous m'en voyez ravie.
Ne me remerciez pas... Vous aviez été condamnée à trois jours de prison et et cent écus d'amende. "
Ainsi, tout cela n'avait duré que trois jours. Elle pouvait donc espérer retrouver les Fauchards rapidement. Elle allait se faire passer un savon. Bah elle ne l'aurait pas volé... En attendant, elle n'était pas encore dehors.
"Quand vous ai-je remercié ? J'ose espérer qu'après le passage de vos soudards, il soit rester suffisamment d'or pour payer la note..."
Pour seule réponse, le procureur lui lança son bien. Devenu fort léger. Diole... Elle récupéra aussi sa besace et fut surprise de voir que rien n'avait disparu. Le procureur remarqua aisément son état d'esprit devant sa découverte et ne tarda pas à manifester son mécontentement.
"Mes... "soudards"... sont des gens honnêtes. Nous ne sommes pas tous de votre monde !
Chantez vos messes à d'autres que moi... " répliqua la Flamande aussi sec en grimaçant de douleur quand sa sacoche retrouva sa place sur son flanc. Le procureur haussa les épaules en levant les yeux au ciel.
"J'avais tous les droits de vous faire pendre en découvrant votre flétrissure..."
La brune ne répondit rien mais décocha à l'homme un regard venimeux. Elle savait qu'il avait raison. Qu'importe. La morsure de ses plaies l'empêchait d'être conciliante et encore moins reconnaissante.
Quand enfin, elle put sentir le soleil... ou plutôt l'averse... sur sa peau devenue bien pâle, elle soupira profondément pour se libérer de la pression qui compressait sa poitrine. Cela n'avait pas été une partie de plaisir mais c'était au moins un problème de réglé. A présent, il ne lui restait plus qu'à envoyer un piaf pour savoir où retrouver les autres. Se soigner et se reposer un peu aussi. Et pour concilier les deux, il n'y avait qu'un endroit : la taverne la plus proche.
Elle devait aussi récupérer ses armes. En priant les vents pour qu'elles n'aient pas bougé. Elle préféra aller les chercher sur le champ, profitant encore de la lumière diurne. Là encore retrouver l'endroit exact où elle avait dissimulé ses Fidèles fut un sacerdoce mais avec une bonne dose de volonté et de patience, on arrivait à tout. Et après de longues heures de battue, ce fut couverte de boue et avec sous le bras un paquet enveloppé de son manteau qu'elle entra dans la taverne et demanda le gîte, le couvert et de quoi écrire.
Deux courriers partirent. L'un à une certaine brunette pour donner et avoir des nouvelles. L'autre à un chef bourru et surement furieux pour avoir des instructions. Et attendant les réponses, on allait jouer au petit apothicaire...