Finam
Il n'faut pas dire qu'un acte froisse la conscience commune parce qu'il est criminel, mais qu'il est criminel parce qu'il froisse la conscience commune.
Il se dit qu'au Pletzl, la notion de conscience n'existe pas.
Bienvenue chez les spinozistes d'Saumur, bienvenue chez les truands.
Un homme d'armes sortit de la demeure, vêtu d'un long manteau de fourrure et portant sous son bras cinq ou six assiettes d'argent. Finam le lorgna, interdit.
-Il doit être foutrement riche le con, lui dit le rustre, goguenard.
Deux autres hommes surgirent de la maison de pierre à sa suite, en tirant par les jambes un homme coiffé d'une calotte. Le Vicomte observait la scène, totalement impavide. Le reitre qui lui avait adressé la parole se courba pour saisir l'encolure du pauvre homme, la pressant avec force de ses quatre doigts.
L'argent?
Le visage, à présent orienté vers le barbu, laissait entrevoir l'âge du bonhomme au compte de ses rides: plus une goutte d'huile dans sa lampe visiblement, c'est tout juste s'il allait pas y rester dans les bras de son agresseur; restait plus qu'à ouvrir les paris tiens, ça ferait de l'argent à coup sûr.
Le vieil homme baissa le regard et ne pipa mot, pensant se tirer du pétrin en misant sur une pitié non dissimulée. Ce qui n'fit au contraire qu'attiser la colère du reitre, lequel lui savata l'oignon illico-presto. Un autre garnement apparut, trainant une femme par les cheveux. Elle avait à vue de nez une quarantaine d'années, sans doute la femme du vieil homme: trop vieille pour être sa fille. Celui qui menait la troupe, le "parleur", se désintéressa du vieillard pour s'en prendre à la nouvelle arrivée. Il souleva sa jupe, dévoilant sa toison grisonnante, sur laquelle il pointa une longue dague. Un petit cri arraché, et voilà le vieux qui cède dans la foulée:
-N'lui faites pas de mal!
-Dis-nous où est l'argent en ce cas.
-Derrière.. derrière, dans l'potager. J'vous en prie.. Je.. je n'aurai plus rien!
Au Vicomte de s'avancer alors, calmement, sombre toutefois.
-Tu n'avais rien de base, abruti. Tout c'qui est à toi, est à nous.
Et au vieux de rouler-bouler plus loin, le nez pissant de sang, après un violent chassé de Finam dans la trogne.
"Je verrai quand j'aurais le loisir" , "je verrai quand j'aurais le loisir", "je verrai quand j'aurais le loisir". Mais pour qui tu t'es prit, l'crevé? Qui a dit qu'on t'autorisais à en avoir, du loisir? Hein!? Il avait fait de chaque mot, un pas, et l'exclamation finale avait été ponctuée d'un nouveau coup.
Le vieil homme trempait salement dans son sang désormais, le buste encore maintenu seulement par les bras des reitres sous chacune de ses aisselles. Le barbu se plia des cannes pour lui parler.
Il me semble que les règles sont claires, les limites définies. On prête l'argent, on laisse une liberté assez nette quant à ses usages dans l'quartier, mais on aime bien quand il revient dans les délais impartis. Tu piges?
-[...].
-Tu piges!?
-Oui.
-Non. Non, tu piges pas, pas clairement en tout cas. Mais ça va de suite chauffer dans ton bulbe.
Finam se relève alors, et s'adressant au premier reitre:
C'est bon pour le fils?
-Oui Messire.
-Bien. Qu'ils le sortent. Qu'ils l'exhibent, le montrent trois jours durant. Que ça serve d'exemple pour tout le voisinage. Les escrocs, c'est pas eux. Les escrocs, c'est nous.
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"Aristote aurait pu devenir un saint, le patron de tous ces Romains qui ne cessent de trahir.."
Il se dit qu'au Pletzl, la notion de conscience n'existe pas.
Bienvenue chez les spinozistes d'Saumur, bienvenue chez les truands.
Un homme d'armes sortit de la demeure, vêtu d'un long manteau de fourrure et portant sous son bras cinq ou six assiettes d'argent. Finam le lorgna, interdit.
-Il doit être foutrement riche le con, lui dit le rustre, goguenard.
Deux autres hommes surgirent de la maison de pierre à sa suite, en tirant par les jambes un homme coiffé d'une calotte. Le Vicomte observait la scène, totalement impavide. Le reitre qui lui avait adressé la parole se courba pour saisir l'encolure du pauvre homme, la pressant avec force de ses quatre doigts.
L'argent?
Le visage, à présent orienté vers le barbu, laissait entrevoir l'âge du bonhomme au compte de ses rides: plus une goutte d'huile dans sa lampe visiblement, c'est tout juste s'il allait pas y rester dans les bras de son agresseur; restait plus qu'à ouvrir les paris tiens, ça ferait de l'argent à coup sûr.
Le vieil homme baissa le regard et ne pipa mot, pensant se tirer du pétrin en misant sur une pitié non dissimulée. Ce qui n'fit au contraire qu'attiser la colère du reitre, lequel lui savata l'oignon illico-presto. Un autre garnement apparut, trainant une femme par les cheveux. Elle avait à vue de nez une quarantaine d'années, sans doute la femme du vieil homme: trop vieille pour être sa fille. Celui qui menait la troupe, le "parleur", se désintéressa du vieillard pour s'en prendre à la nouvelle arrivée. Il souleva sa jupe, dévoilant sa toison grisonnante, sur laquelle il pointa une longue dague. Un petit cri arraché, et voilà le vieux qui cède dans la foulée:
-N'lui faites pas de mal!
-Dis-nous où est l'argent en ce cas.
-Derrière.. derrière, dans l'potager. J'vous en prie.. Je.. je n'aurai plus rien!
Au Vicomte de s'avancer alors, calmement, sombre toutefois.
-Tu n'avais rien de base, abruti. Tout c'qui est à toi, est à nous.
Et au vieux de rouler-bouler plus loin, le nez pissant de sang, après un violent chassé de Finam dans la trogne.
"Je verrai quand j'aurais le loisir" , "je verrai quand j'aurais le loisir", "je verrai quand j'aurais le loisir". Mais pour qui tu t'es prit, l'crevé? Qui a dit qu'on t'autorisais à en avoir, du loisir? Hein!? Il avait fait de chaque mot, un pas, et l'exclamation finale avait été ponctuée d'un nouveau coup.
Le vieil homme trempait salement dans son sang désormais, le buste encore maintenu seulement par les bras des reitres sous chacune de ses aisselles. Le barbu se plia des cannes pour lui parler.
Il me semble que les règles sont claires, les limites définies. On prête l'argent, on laisse une liberté assez nette quant à ses usages dans l'quartier, mais on aime bien quand il revient dans les délais impartis. Tu piges?
-[...].
-Tu piges!?
-Oui.
-Non. Non, tu piges pas, pas clairement en tout cas. Mais ça va de suite chauffer dans ton bulbe.
Finam se relève alors, et s'adressant au premier reitre:
C'est bon pour le fils?
-Oui Messire.
-Bien. Qu'ils le sortent. Qu'ils l'exhibent, le montrent trois jours durant. Que ça serve d'exemple pour tout le voisinage. Les escrocs, c'est pas eux. Les escrocs, c'est nous.
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"Aristote aurait pu devenir un saint, le patron de tous ces Romains qui ne cessent de trahir.."