Maman, ma douce maman, ma tendre maman,
Il fallait que je técrive. Il fait bien longtemps, maintenant, que nous ne nous sommes vues, ou même écrit. Rassure-toi, tout va bien, Federico et moi nous portons au mieux. Javais besoin de técrire, de tavoir un peu auprès de moi par la pensée, aujourdhui.
Tu te souviens, lorsque quand jétais petite, nous sommes allés, au détour dun voyage commercial de Papa, voir la mer, regarder les bateaux, et jouer tous ensemble au bord de leau ?
Moi, petite, javais un peu peur de lécume, et je ne comprenais pas que leau devienne blanche en touchant mes chevilles ; toi, tu me disais que cétait parce que jétais un ange, mais Cedro et Andréo ont ri, et se sont moqués de moi. Pour eux, je nétais quune petite écervelée, et jétais bête de te croire. Je me souviens avoir pleuré, et que tu aies pris mon menton au creux de ta main, pour me poser un baiser sur la joue, et que tu mas dit à loreille « No los escuches, eres mi angél »* et que tu mas souri. Oh maman, tu me manques, tu sais ? Tu ignores simplement quen vérité, cétait toi, lange. Je me trouve près de l'eau, et je repense à ce jour-là, c'est ce qui m'a fait prendre la plume.
Je voulais t'écrire depuis longtemps... Vois-tu, je sais que tu nas pas pu retenir Papa, et que tu as eu le cur brisé lorsque jai dû quitter la maison, et méloigner de toi, de mes deux frères, de ma petite sur Lucia
et de Papa, bien sûr. Je sais aussi que tu nas pas compris, que tu nas pas cru que mon goût pour les femmes était vrai, que tu as cru que cela me passerait, et que je te ferais des petits-enfants. Tu tes toujours émerveillée de me voir avec les enfants, et souvent, comme je moccupais de Lucia, tu me disais ta hâte de me voir devenir mère à mon tour. Moi, je souriais, pour te faire plaisir, mais cela me brisait à chaque fois ; je savais que cette vie-là ne serait pas la mienne.
Mais maman, si tu la voyais, je suis certaine que tu comprendrais. Oui, maman, si tu voyais ma Femme, mon Soleil, mon Epouse, tu comprendrais, et je suis certaine que tu accepterais.
Si dautres que toi me le demandaient, je crois que je répondrais :
« Je ne vous parlerai pas delle »**.
Mais à toi, oui, à toi, maman, je peux te parler de
la fille qui maccompagne***, à toi je peux la décrire, cette autre pareille qui dort à côté de moi, face à la mer, comme je técris :
Elle parle comme l'eau des fontaines
Comme les matins sur la montagne
Elle a les yeux presque aussi clairs
Que les murs blancs du fond de l'Espagne
Le bleu nuit de ses rêves m'attire
Même si elle connaît les mots qui déchirent
J'ai promis de ne jamais mentir
A la fille qui m'accompagne
Au fond de son jeu de miroirs
Elle a emprisonné mon image
Et même quand je suis loin le soir
Elle pose ses mains sur mon visage
J'ai brûlé tous mes vieux souvenirs
Depuis qu'elle a mon coeur en point de mire
Et je garde mes nouvelles images
Pour la fille avec qui je voyage
On s'est juré les mots des enfants modèles
On se tiendra toujours loin des tourbillons géants
Elle prendra jamais mon coeur pour un hôtel
Je dirai les mots qu'elle attend
Elle sait des îles auxquelles je pense
El l'autre moitié de mes secrets
Je sais qu'une autre nuit s'avance
Lorsque j'entends glisser ses colliers
Un jour je bâtirai un empire
Avec tous nos instants de plaisirs
Pour que plus jamais rien ne m'éloigne
De la fille qui m'accompagne
On s'est juré les mots des enfants modèles
On se viendra toujours loin des tourbillons géants
Je prendrai jamais son coeur pour un hôtel
Elle dira les mots que j'attends
Elle sait les îles auxquelles je pense
Et l'autre moitié de mes délires
Elle sait déjà qu'entre elle et moi
Plus y a d'espace et moins je respire***
Tu vois, maman, elle est tout ça pour moi, et tellement plus. Réjouis-toi, Maman, jai à demi la vie que tu me souhaitais, je suis épouse, je suis comblée, et rien ne pourrait memplir plus de bonheur que la vie que moffre ma belle Aléa. Jhabite à Poitiers, maintenant, mais nous sommes actuellement en voyage de noces. Federico tembrasserait sûrement, il est resté à la propriété. Embrasse les garçons pour moi, ainsi que Lucia, et reçois mes plus tendres pensées.
Avec tout mon amour,
Thalie Carmen Angél de la Sierra
Volkova.