--Aengus_osullivan
Un brouillard ouaté, épais mais lumineux... presque éblouissant.
Pas un bruit, pas un son... une silence lourd, oppressant, irréel. J'ai l'impression de flotter au milieu de nulle part sans pouvoir déterminer ni le temps ni le haut ni le bas... Apesanteur de corps et d'esprit... Déraison ou... la Mort ?
Puis, doucement, un semblant de réalité s'impose à moi... Je sens qu'on me touche... reprise de conscience de mon corps... douleur, lancinante mais supportable... ma poitrine me pèse, comprimée dans un doux étau de linges propres... une fraîcheur bienfaisante sur le front...
Boudiou !... Où suis-je ?...
Le brouillard s'estompe brutalement... en un regard, je réalise où je suis lorsqu'une voix douce, mais inconnue attire mon attention :
- Bonjour, l'on m'appelle Frère Fabien, je suis celui qui s'occupera de vous désormais, tâchez de vous reposer, vous en avez grand besoin.
Je regarde l'homme. Visage franc, grave, mais souriant. Immédiatement, il m'inspire une grande confiance. Pas de pitié dans son regard, juste une immense compassion... Je devine en lui une grande noblesse, un coeur généreux et ouvert. S'occuper de moi ?... L'espoir me revient peu à peu... mille questions, mille inquiétudes... Azz... Mon ange, ma Sirène... elle doit être morte d'angoisse.
Je lui prends la main :
- Mon Père... depuis combien de temps suis-je ici ?... ma compagne... ma fiancée... elle doit me chercher... Quand pourrai-je la rejoindre ?
Les yeux braqués sur lui, fiévreux, au bord de l'inconscience... fou de désespoir, je considère soudain cet homme comme ma planche de salut.
Je n'en puis plus de cette inactivité. Je me sens faible certes, mais la douleur semble s'atténuer, à moins que je finisse par m'y habituer, ou encore que le bandage serré comprimant ma poitrine calme la douleur... qu'importe !
Le Frère Fabien va m'aider à me vêtir, m'emmener au camp des Dames Blanches...
Je me redresse sous le regard désapprobateur de l'ecclésiastique, la tête me tourne un instant, mais je n'en ai cure... Je tente alors de pivoter sur mon séant afin sortir mes jambes du lit lorsque soudain... Un coup de poignard me vrille le flanc, tandis qu'une violente quinte de toux réveille la douleur... plus cruelle que jamais !
Cette toux me déchire la poitrine, je n'arrive plus à reprendre mon souffle entre deux spasmes. Ma vision se brouille, les yeux emplis de larmes... Larmes de douleur, de chagrin, de rage. Je maudis cette impuissance qui me taraude l'esprit tant je souffre de ne pouvoir agir.
La toux ravage ma poitrine, crispe douloureusement tous mes muscles... j'en ai des nausées et, soudain, je vomis un flot de liquide rougeâtre dans un spasme ultime qui m'abat sur ma couche. Plus faible que jamais... la respiration haletant, hoquetant lamentablement, je m'abandonne au désespoir tandis que de grosses larmes roulent sur mes joues.
Aengus O'Sullivan, le fier guerrier Irlandais, l'amant fougueux de l'ardente Azzera, n'est plus qu'un pantin désarticulé, incapable de se tenir debout !
Honte... Honte et déshonneur... Même pas la force de mourir les armes à la main !... Car, je sens, je sais soudain que je vais mourir...
Ma faiblesse, mes douleurs, l'extrême gentillesse des moines... Je ne suis pas dupe... Je cherche des yeux le Frère Fabien... mais mes yeux ne voient rien.. plus rien qu'un visage dans le flou de mes larmes... Un grand cri sort de mes lèvres asséchées :
- AZZERAAAAA !!!!