Edern
HRP : qui ou quoi que vous soyez, viendez nombreux !
La cloche a sonné quatre fois dans la capitale.
Tremblez, pauvres Manceaux, devant votre Mal !
N'entendez-vous donc pas le glas qui sonne pour vous ?
N'avez-vous pas compris de quels instruments joue le Fou ?
Cinquante glaives sont prêts à s'abattre sur le cou grassouillet de la bêtise mainoise. Cent mains vont se joindre vers le ciel pour célébrer la victoire de l'art ancien sur l'ordre moderne. Les mots sont sur le point d'inonder les plaines ; ne s'arrêtant point aux basses profondeurs mancelles, ils s'élèveront jusqu'à des sommets que les dieux mêmes redoutent, élèveront les enfants qui cherchaient sans le savoir une clé à la porte de leur souterrain. Prêtres, craignez-les, car vous n'aurez plus le monopole du sacré. Surgissant des écuries en cendres, les créatures qui s'y morfondaient sans un bruit vont enfin pouvoir repeupler l'univers de Chimères piaffantes. Marionnettes angéliques contre pantins démoniaques... l'Apocalypse est imminente. Mouahaha.
Tsss.
Ça, c'est ce qui aurait dû se passer.
Dans un magnifique élan de prosaïsme, la réalité a en effet quelque peu résisté à ses efforts de grandeur. Rien n'a pourtant été laissé au hasard, ce farceur qui ne torture que les paresseux. Fallait-il adresser missive aux détenteurs de la puissance armée ? La plume n'a pas refroidi trois semaines durant. En moins de trois jours se sont succédés une régente, un vicomte et un duc. Fallait-il recruter d'innocents volontaires ? Il l'a fait. Dans une seule ville. Une seule table, même. Celle d'un établissement tout à fait respectable. Un quartier général au nom si pertinent qu'il a su une fois de plus être en présence d'une de ces bornes légères qui jalonnent sa route infinie. Là où le Fou gère... Combien de fois une porte tavernière peut-elle s'ouvrir en une seule journée ? Il a présenté un profil pour chacune des recrues. Pourquoi vous suivre, messire ? Pourquoi vous faire confiance ? Une histoire de vengeance le matin, un soulèvement populaire le midi, une opération criminelle le soir. Dis-moi ce que tu veux entendre et je te le dirai... il a été angevin, berrichon, breton, mainois, normand, orléanais, poitevin, tourangeau quand on le lui demandait. Accommodant avec les uns, exigeant avec les autres. Si peu ont pris garde à son nom. Mais face à l'Aventure, beaucoup ont trouvé des atouts à la douce petitesse, et l'avantage d'une position durablement acquise lui a indubitablement profité au regard des excuses invoquées :
Désolé monsieur, je ne peux pas vous aider du tout, j'ai un mariage dans deux semaines et il faut ab-so-lu-ment que j'y parvienne.
Hum, je suis le lieutenant de police en charge de ces lieux alors baissez d'un ton avant que je vous fasse enfermer. S'il vous plaît.
Ma ville a été prise cette nuit, il faut que j'aille aider là-bas. Oui, le vil traître est duc et candidat aux élections ducales, je sais.
Je refuse formellement de participer à une telle action, cela risque de déclencher une nouvelle guerre et moi j'aime la paix.
Touche pas à mes hommes, j'en ai besoin pour buter les Francs-Comtois et de toute façon y'a plus rien à piller en Maine.
Eeeuuh, je ne sais pas, ce n'est pas illégal de désobéir ?
Et dans le mauvais, il y a hélas le pire...
Non, l'amour me retient ici !
Youpi.
Échec annoncé. Sera-t-il brillant, ou... ?
Appendice nasal en moins...
Aucun plan n'a été changé.
La folie n'attend jamais.
Ni la Vie, ni la Mort.
Déjà des victimes, d'ailleurs...
La première ? Une gamine énamourée. Hystérique à se cogner la tête contre un mur à cloche-pied en récitant la liste des maris de la Grande Maîtresse de France. Des ficelles trop grosses. Or, pas de plaisir sans difficulté... c'est le prix de la séduction. Partie en reconnaissance, elle a reçu une vilaine flèche mainoise et doit aujourd'hui gentiment gésir dans un fossé. Dommage pour elle. Puis le forgeron breton en quête de Français à charcuter a lui aussi goûté aux charmes des boucheries françaises. A cinq - l'effectif de la glorieuse armée locale à plus ou moins dix pour cent - contre un, aussi... Dernier en date, l'éternel bandit des grands chemins avide d'or et d'argent. D'aucuns verront dans son combat perdu contre un célèbre tenancier manceau une forme de justice contre celui qui aida à piller les caisses comtales deux mois plus tôt. Quoique le résultat inverse eût probablement fait plus d'heureux.
D'autres, plus habiles, ont passé sans encombre l'entrée de la Cité aux Mille Rillettes. Parfois avec un laissez-passer en bonne et due forme : si l'engeance des douaniers est fourbe, elle n'en est pas moins d'une stupidité rare. Même si d'autres s'y sont trompés. Trompée, la dernière, même, puisqu'aucun soldat n'a empêché Edern d'entrer dans la ville. Ô Vérité... Mensonge que tout cela. Quand apprendras-tu à te servir du pouvoir qui s'offre à toi ?
Allons lui donner une petite leçon.
~~~~~~~
Au coeur de la nuit... une ombre furtive.
Elle a décidé que Le Mans est sien. Maintenant. Pas d'alternative.
Comment emportera-t-elle son butin ? Dans son grand chapeau, les poches du manteau qu'elle a revêtu ? Aucun sac n'est visible à son épaule. Dans le creux de son bourdon, peut-être.
L'homme jette un regard à la mauvaise troupe qui attend naïvement ses instructions et observe avec un peu de nervosité le château depuis le coin de l'allée où elle est tapie. Le clair de lune leur révèle des silhouettes éparses patrouillant sur les remparts et fait reluire l'argent des armures qu'on devine malgré la distance. Des étendards ? Quelques-uns, inanimés. Le vent est tombé pour eux. Les dernières instructions sont chuchotées ; bien malin et caché serait celui qui pourrait les entendre.
Je vous ai promis ce qu'on voit du haut de cette tour.
Les gardiens devront tomber un à un.
Agissez de concert.
Sous la baguette du chef d'orchestre...
Cinq ! C'est le nombre de ceux qui ont suivi le Fou sans périr en chemin. Il y a la Bretonne suicidaire. Mourir ici ou là, quelle importance ? Tous les cimetières se valent. Autant marcher aux côtés d'un camarade de l'Ankou. Il y a le vieux diacre auvergnat à la recherche d'une retraite isolée, qui tient à visiter d'abord un autre type d'asile. Il y a la compagne du brigand précédemment cité et abattu en plein vol. Et il y a le couple paisible. Sa réussite. Fâché par ses soins. Réconcilié, qui sait. Il est l'aimant qui perturbe chaque champ. Si l'une est attirée, l'autre est repoussé...
Alors que les cinq progressent séparément en direction de leur objectif, le Fou ne pense pas aux éventuelles complications techniques de son entreprise. Il songe avec un léger sourire à l'espion mainois qui a cru le berner et s'est retrouvé piégé en moins de temps qu'il n'en faut pour l'écrire. Aux troupes mobilisées à Laval par sa faute. Au Breton qui pourrait réagir avec toute la délicatesse qui est à la sienne quand le Français se masse à ses portes.
A propos de portes... que se passe-t-il là-bas, près de l'entrée ? Un garde semble avoir été neutralisé sans grande discrétion. Et, tournant au coin de la rue, un autre ne va pas tarder à le découvrir. Il va lui falloir intervenir. Le Fou quitte sa position pour venir lui barrer le passage. Et naturellement...
Eeeh là ! On bouge plus ! Qu'est-ce que vous v'nez faire ici à c'te heure ?
Le rassurer, surtout.
Le bonsoir. On nous a dit que le château se visitait la nuit.
Silence.
D'accord...
Vous faites des tarifs réduits pour les groupes ?
Bien.
Vous foutez d'ma gueule ?
Moins bien...
Son distingué interlocuteur n'a pas encore vu le corps de son frère d'armes étendu sur le sol derrière lui. Il est armé, un peu trop armé. Pressentant la suite de la conversation, le Fou soupire. Sa main gauche vient rejoindre sa voisine de droite sur le bâton qui est violemment dirigé contre la tête de l'importun milicien. Injustement protégé par un casque type salade - grise -, celui-ci se contente de reculer sans perdre conscience et de hurler à tort qu'on l'assassine, ce qui arrache un nouveau soupir à son agresseur un peu lassé de composer avec des hommes de mauvaise volonté.
Dans moins d'une minute, ils auront aux trousses la moitié des forces armées qui ne dort pas à cette heure.
Il ne peut apercevoir tous ses complices, ne connaît pas leur position exacte. Quoiqu'il en soit, ils sont repérés et ils ont échoué. Du moins...
Indiquant le dédale urbain derrière eux, le Fou signifie à ses compagnons d'assaut qu'il est temps de choisir leur route. Qu'ils se débrouillent sans lui. On peut déjà percevoir le bruit des bottes battant le pavé rien que pour eux, et ce n'est pas tout à fait bon signe, sauf à vouloir fraterniser avec la maréchaussée en se passant de paroles.
Un étrange rictus vient déformer le visage du Fou.
A-t-il vraiment cru que cette révolte aurait une chance d'aboutir ?
A quelles richesses va-t-il renoncer, s'il fuit sans même combattre ?
Des écus... non. Personne n'attaquera plus ce comté pour sa trésorerie.
Ce qu'il cherche est toujours dans cette ville.
Il n'y aura pas de renoncement.
L'ennemi est en vue, à présent.
Et si on jouait au jeu des labyrinthes ?
Et si on se libérait des contraintes ?
Appelons les acteurs.
Il est l'heure.
VENEZ À MOI !
Un rugissement qui embrase l'air, vers les défenseurs d'une forteresse vide, vers les fenêtres d'une capitale sans majuscule, vers les étoiles enfin.
Et le Fou de partir d'un rire à la hauteur de son nom.
De se retourner prestement dans un tourbillon de noir et de blanc.
De s'engouffrer dans les ruelles imprégnées de cette obscurité qui ouvre tous les possibles.
Elle court, elle court, la folie...
A sa propre rencontre ?
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La cloche a sonné quatre fois dans la capitale.
Tremblez, pauvres Manceaux, devant votre Mal !
N'entendez-vous donc pas le glas qui sonne pour vous ?
N'avez-vous pas compris de quels instruments joue le Fou ?
Cinquante glaives sont prêts à s'abattre sur le cou grassouillet de la bêtise mainoise. Cent mains vont se joindre vers le ciel pour célébrer la victoire de l'art ancien sur l'ordre moderne. Les mots sont sur le point d'inonder les plaines ; ne s'arrêtant point aux basses profondeurs mancelles, ils s'élèveront jusqu'à des sommets que les dieux mêmes redoutent, élèveront les enfants qui cherchaient sans le savoir une clé à la porte de leur souterrain. Prêtres, craignez-les, car vous n'aurez plus le monopole du sacré. Surgissant des écuries en cendres, les créatures qui s'y morfondaient sans un bruit vont enfin pouvoir repeupler l'univers de Chimères piaffantes. Marionnettes angéliques contre pantins démoniaques... l'Apocalypse est imminente. Mouahaha.
Tsss.
Ça, c'est ce qui aurait dû se passer.
Dans un magnifique élan de prosaïsme, la réalité a en effet quelque peu résisté à ses efforts de grandeur. Rien n'a pourtant été laissé au hasard, ce farceur qui ne torture que les paresseux. Fallait-il adresser missive aux détenteurs de la puissance armée ? La plume n'a pas refroidi trois semaines durant. En moins de trois jours se sont succédés une régente, un vicomte et un duc. Fallait-il recruter d'innocents volontaires ? Il l'a fait. Dans une seule ville. Une seule table, même. Celle d'un établissement tout à fait respectable. Un quartier général au nom si pertinent qu'il a su une fois de plus être en présence d'une de ces bornes légères qui jalonnent sa route infinie. Là où le Fou gère... Combien de fois une porte tavernière peut-elle s'ouvrir en une seule journée ? Il a présenté un profil pour chacune des recrues. Pourquoi vous suivre, messire ? Pourquoi vous faire confiance ? Une histoire de vengeance le matin, un soulèvement populaire le midi, une opération criminelle le soir. Dis-moi ce que tu veux entendre et je te le dirai... il a été angevin, berrichon, breton, mainois, normand, orléanais, poitevin, tourangeau quand on le lui demandait. Accommodant avec les uns, exigeant avec les autres. Si peu ont pris garde à son nom. Mais face à l'Aventure, beaucoup ont trouvé des atouts à la douce petitesse, et l'avantage d'une position durablement acquise lui a indubitablement profité au regard des excuses invoquées :
Désolé monsieur, je ne peux pas vous aider du tout, j'ai un mariage dans deux semaines et il faut ab-so-lu-ment que j'y parvienne.
Hum, je suis le lieutenant de police en charge de ces lieux alors baissez d'un ton avant que je vous fasse enfermer. S'il vous plaît.
Ma ville a été prise cette nuit, il faut que j'aille aider là-bas. Oui, le vil traître est duc et candidat aux élections ducales, je sais.
Je refuse formellement de participer à une telle action, cela risque de déclencher une nouvelle guerre et moi j'aime la paix.
Touche pas à mes hommes, j'en ai besoin pour buter les Francs-Comtois et de toute façon y'a plus rien à piller en Maine.
Eeeuuh, je ne sais pas, ce n'est pas illégal de désobéir ?
Et dans le mauvais, il y a hélas le pire...
Non, l'amour me retient ici !
Youpi.
Échec annoncé. Sera-t-il brillant, ou... ?
Appendice nasal en moins...
Aucun plan n'a été changé.
La folie n'attend jamais.
Ni la Vie, ni la Mort.
Déjà des victimes, d'ailleurs...
La première ? Une gamine énamourée. Hystérique à se cogner la tête contre un mur à cloche-pied en récitant la liste des maris de la Grande Maîtresse de France. Des ficelles trop grosses. Or, pas de plaisir sans difficulté... c'est le prix de la séduction. Partie en reconnaissance, elle a reçu une vilaine flèche mainoise et doit aujourd'hui gentiment gésir dans un fossé. Dommage pour elle. Puis le forgeron breton en quête de Français à charcuter a lui aussi goûté aux charmes des boucheries françaises. A cinq - l'effectif de la glorieuse armée locale à plus ou moins dix pour cent - contre un, aussi... Dernier en date, l'éternel bandit des grands chemins avide d'or et d'argent. D'aucuns verront dans son combat perdu contre un célèbre tenancier manceau une forme de justice contre celui qui aida à piller les caisses comtales deux mois plus tôt. Quoique le résultat inverse eût probablement fait plus d'heureux.
D'autres, plus habiles, ont passé sans encombre l'entrée de la Cité aux Mille Rillettes. Parfois avec un laissez-passer en bonne et due forme : si l'engeance des douaniers est fourbe, elle n'en est pas moins d'une stupidité rare. Même si d'autres s'y sont trompés. Trompée, la dernière, même, puisqu'aucun soldat n'a empêché Edern d'entrer dans la ville. Ô Vérité... Mensonge que tout cela. Quand apprendras-tu à te servir du pouvoir qui s'offre à toi ?
Allons lui donner une petite leçon.
~~~~~~~
Au coeur de la nuit... une ombre furtive.
Elle a décidé que Le Mans est sien. Maintenant. Pas d'alternative.
Comment emportera-t-elle son butin ? Dans son grand chapeau, les poches du manteau qu'elle a revêtu ? Aucun sac n'est visible à son épaule. Dans le creux de son bourdon, peut-être.
L'homme jette un regard à la mauvaise troupe qui attend naïvement ses instructions et observe avec un peu de nervosité le château depuis le coin de l'allée où elle est tapie. Le clair de lune leur révèle des silhouettes éparses patrouillant sur les remparts et fait reluire l'argent des armures qu'on devine malgré la distance. Des étendards ? Quelques-uns, inanimés. Le vent est tombé pour eux. Les dernières instructions sont chuchotées ; bien malin et caché serait celui qui pourrait les entendre.
Je vous ai promis ce qu'on voit du haut de cette tour.
Les gardiens devront tomber un à un.
Agissez de concert.
Sous la baguette du chef d'orchestre...
Cinq ! C'est le nombre de ceux qui ont suivi le Fou sans périr en chemin. Il y a la Bretonne suicidaire. Mourir ici ou là, quelle importance ? Tous les cimetières se valent. Autant marcher aux côtés d'un camarade de l'Ankou. Il y a le vieux diacre auvergnat à la recherche d'une retraite isolée, qui tient à visiter d'abord un autre type d'asile. Il y a la compagne du brigand précédemment cité et abattu en plein vol. Et il y a le couple paisible. Sa réussite. Fâché par ses soins. Réconcilié, qui sait. Il est l'aimant qui perturbe chaque champ. Si l'une est attirée, l'autre est repoussé...
Alors que les cinq progressent séparément en direction de leur objectif, le Fou ne pense pas aux éventuelles complications techniques de son entreprise. Il songe avec un léger sourire à l'espion mainois qui a cru le berner et s'est retrouvé piégé en moins de temps qu'il n'en faut pour l'écrire. Aux troupes mobilisées à Laval par sa faute. Au Breton qui pourrait réagir avec toute la délicatesse qui est à la sienne quand le Français se masse à ses portes.
A propos de portes... que se passe-t-il là-bas, près de l'entrée ? Un garde semble avoir été neutralisé sans grande discrétion. Et, tournant au coin de la rue, un autre ne va pas tarder à le découvrir. Il va lui falloir intervenir. Le Fou quitte sa position pour venir lui barrer le passage. Et naturellement...
Eeeh là ! On bouge plus ! Qu'est-ce que vous v'nez faire ici à c'te heure ?
Le rassurer, surtout.
Le bonsoir. On nous a dit que le château se visitait la nuit.
Silence.
D'accord...
Vous faites des tarifs réduits pour les groupes ?
Bien.
Vous foutez d'ma gueule ?
Moins bien...
Son distingué interlocuteur n'a pas encore vu le corps de son frère d'armes étendu sur le sol derrière lui. Il est armé, un peu trop armé. Pressentant la suite de la conversation, le Fou soupire. Sa main gauche vient rejoindre sa voisine de droite sur le bâton qui est violemment dirigé contre la tête de l'importun milicien. Injustement protégé par un casque type salade - grise -, celui-ci se contente de reculer sans perdre conscience et de hurler à tort qu'on l'assassine, ce qui arrache un nouveau soupir à son agresseur un peu lassé de composer avec des hommes de mauvaise volonté.
Dans moins d'une minute, ils auront aux trousses la moitié des forces armées qui ne dort pas à cette heure.
Il ne peut apercevoir tous ses complices, ne connaît pas leur position exacte. Quoiqu'il en soit, ils sont repérés et ils ont échoué. Du moins...
Indiquant le dédale urbain derrière eux, le Fou signifie à ses compagnons d'assaut qu'il est temps de choisir leur route. Qu'ils se débrouillent sans lui. On peut déjà percevoir le bruit des bottes battant le pavé rien que pour eux, et ce n'est pas tout à fait bon signe, sauf à vouloir fraterniser avec la maréchaussée en se passant de paroles.
Un étrange rictus vient déformer le visage du Fou.
A-t-il vraiment cru que cette révolte aurait une chance d'aboutir ?
A quelles richesses va-t-il renoncer, s'il fuit sans même combattre ?
Des écus... non. Personne n'attaquera plus ce comté pour sa trésorerie.
Ce qu'il cherche est toujours dans cette ville.
Il n'y aura pas de renoncement.
L'ennemi est en vue, à présent.
Et si on jouait au jeu des labyrinthes ?
Et si on se libérait des contraintes ?
Appelons les acteurs.
Il est l'heure.
VENEZ À MOI !
Un rugissement qui embrase l'air, vers les défenseurs d'une forteresse vide, vers les fenêtres d'une capitale sans majuscule, vers les étoiles enfin.
Et le Fou de partir d'un rire à la hauteur de son nom.
De se retourner prestement dans un tourbillon de noir et de blanc.
De s'engouffrer dans les ruelles imprégnées de cette obscurité qui ouvre tous les possibles.
Elle court, elle court, la folie...
A sa propre rencontre ?
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