Togukawa_kadokawa
C'est ainsi que les journées commençaient : séance de méditation avec son élève, face au soleil levant.
Il était devenu le maître d'armes du clan il y a quelques années, lorsque son propre maître, Nobuteru, s'était éteint. Cette mort avait été un coup dur pour lui, mais, ainsi que son maître lui avait appris, ainsi que son maître lui avait rappelé sur son lit de mort, il ne fallait pas que le jeune Kadokawa se laisse envahir par ses sentiments.
La mort physique n'est rien Kadokawa-san. Ce n'est qu'un passage ; notre vie n'est qu'une étape : telle la chenille devenant papillon, il est temps pour moi de changer de corps. Mon esprit doit à présent s'envoler.
Ne soit donc pas triste, je te l'interdit. Et rappelle toi que je verrai tes actes par delà la mort.
Ces paroles revenaient bien souvent en tête du nouveau maître d'armes du clan, et étaient devenu son moteur, sa ligne de conduite. Tout ce qu'il faisait était avec la certitude que son maître le voyait, et donc il s'appliquait à l'extrême pour ne pas le décevoir.
Il avait été le premier surpris lorsque le seigneur du clan les avait réunis et l'avait désigné comme le nouveau maître d'armes. Il lui semblait pourtant que son enseignement n'était pas terminé, son maître semblait ne jamais être satisfait du résultat de ses exercices. Il avait donc demandé entretien avec Takeshi pour refuser cet honneur, mais la discussion qu'il eut alors lui avait ouvert les yeux.
Ne soit pas surpris Kadokawa-sama lui avait dit le seigneur je suis certain que tu es l'homme de la situation. J'en ai discuté longuement avec Nobuteru, et il n'a pas hésité un instant lorsqu'il lui a fallu me donner le nom de son successeur. Il ne le montrait pas, c'était ainsi sa manière de tirer le meilleur de toi, mais bien souvent il m'a dit être surpris de la façon exceptionnelle que tu avais de réussir ce qu'il te demandait. Il n'avait pas assez de mots pour faire ton éloge, il m'a même fait comprendre que bientôt il ne serait lui-même plus assez vaillant pour oser continuer à t'enseigner.
Suis donc ton destin, et prend en charge cette responsabilité sans crainte mon frère, tu es celui qu'il faut au clan pour cette charge.
La conversation s'était terminé par une poignée de main, presqu'une accolade. Ce fut la dernière fois où le seigneur s'était laissé aller ainsi.
Depuis ce jour, Kadokawa était donc devenu maître d'armes, et appliquait les mêmes méthodes que son maître. L'insatisfaction permanente pour amener ses élèves vers l'excellence.
Citation:"Ohayo gozaimasu Kadokawa-sensei!
Je vous apporte le petit déjeuner? Il y a des galettes de riz dans les sacs près de la cabane en bois.
Kadokawa poussa un long soupir. Encore une fois le petit Kotaro n'avait pas réussi à se tenir tranquille jusqu'à la fin de la séance.
Il avait senti, lorsque Takeshi lui avait donné la charge de former son fils, donc sans doute le prochain seigneur du clan, que cela ne serait pas facile. Cet enfant était turbulent et n'arrivait pas à rester tranquille. A chaque fois il fallait que Kadokawa le remette en place. Mais la chose n'était pas facile, car malgré son détachement naturel, il n'arrivait pas à rester objectif face au gamin : la destiné de Kotaro l'influençait ; et comme le maître d'armes s'en rendait compte, cela le mettait dans des états de rages que seuls des séances de violence sur les mannequins de paille parvenait à calmer.
Kotaro-san, combien de fois dois-je te dire que c'est moi qui décide de la fin ou non de l'exercice ! Comprendras-tu cela un jour !?
La maître d'armes se lève, s'efforçant de rester calme en contrôlant sa respiration.
Nous ne mangerons pas ce matin, cela t'aidera peut être ainsi à suivre mes instructions ! Ou plutôt, tu ne mangeras pas .
Il sort de son sac un morceau de poisson séché qu'il mâchonne doucement. La frustration est souvent un moyen efficace d'entrer dans les crânes les plus rétifs les leçons qu'il donnait.
Et ne reste pas ainsi les bras ballants à me regarder ! Tu veux de l'exercice ? Tu en auras. Mais avant de mettre dans tes mains de quoi montrer ta valeur, il te faut te façonner ce corps de gringalet ! A moins que ta stratégie de combat soit de faire mourir de rire ton adversaire en voyant arriver en face de lui un tas d'os, dont les bras sont à peine assez forts pour soulever son arme !
Et, dans un geste brusque et précis, Kadokawa balaye les jambes de son élève qui se retrouve face contre terre.
Maintenant que tu es en position, muscle toi les bras, cela t'apprendra également à ne pas être attentif. Tu n'as même pas esquissé le moindre geste pour contrer mon attaque ! Et tu te crois prêt pour commencer à mener le boken !?
L'expression de Kadokawa était sans équivoque. Un mélange de colère et d'ironie, destinées à piquer au vif l'âme du jeune homme. Il connaissait cette envie qu'avaient tous ces élèves de manier le boken. A chaque fois il se devait de leur expliquer que le corps était la partie la plus facile à manier, mais que sans un esprit acéré, il ne servait à rien de savoir manier son arme. _________________