--Trainelapate
L'hiver l' affamait, presque autant que les oiseaux. Si ces derniers trouvaient toujours maigre pitance à picorer, lui ne s'était rien mis de solide sous la dent depuis une paire de jour.
Le bougre n'aimait pas ainsi mendier dans le froid et l'indifférence des passants qui enveloppés et encapuchonnés avaient encore plus facilité à l'ignorer.
Jour de chance, ou résultat de sa mine terreuse et presque cadavérique ? Peu importe, une jolie minaude miche à la main s'approche et lui tend le trésor fariné qu'il espérait.
Elle est charitable et gracieuse. Le pain serré dans les mains il remercie vite. Elle ne devrait pas s'attarder. Sa bonne action accomplie, elle va tourner les talons et l'oublier.
Que nenni ! Voilà pas que la jeune ribaude fait sourire et se met à discuter.
Ses mâchoires besogneuses font plus de bruit que les paroles de la belle. C'est important de prendre son temps et de mastiquer quand on a faim, ça fait durer le plaisir et ça cale mieux l'estomac.
Des mots qu'il écoute sans vraiment les entendre.
Enfance... Habitudes .... Messe ... Amie .... Eudeline ....
Ah tient ! Il a déjà entendu ce nom y a pas longtemps. Mais quand .... où .... ah oui ça lui revient.
Mais oui ... Bonté Divine ... c'est bien ça !
Avalant tout rond la dernière bouchée de pain qu'il venait de s' enfourner, il lève la main et stoppe le bavardage de la jeune femme.
Eudeline vous dites ? Une amie à vous ?
Tournant la tête de droite à gauche pour s'assurer de ne point être entendu, il lui fait signe de s' approcher plus.
Demoiselle, si la Eudeline en question est votre amie et si on parle de la même personne, il vous faut courir la prévenir.
Furetant pour trouver de quoi manger, accroupie fouillant un tas d'immondice , j'ai entendu ce que je ne devais pas certainement. Y a un homme que je n'ai jamais vu par ici qui trainait avec un petit faquin du coin, le Williamss. Votre amie, la demoiselle Eudeline, il la cherche et veut lui tendre un piège. Il veut l'enlever pour la ramener par chez elle !
La mignonne si joyeuse et volubile, passe du rose du plaisir au blanc de la stupeur. On dirait qu'elle vient de voir le Malin passer devant elle.
Ehhh .... M'demoiselle, ça va pas ? ! Mais où vous aller comme ça ? Attendezzzzzzzzzzzzzzz ... Je sais où ils sont les deux larrons ... là bas derri .....
Inutile qu'il continue, la belle toute retournée est déjà loin.