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[RP]... passe le message à ton voisin...

Mackx, incarné par Fildais
Ce RP a pour base l’annonce du décès de Maxime d’Alesme à sa promise Fildaïs, il est ouvert à toutes les personnes qui connaissaient le Mackx et qui auraient eu vent de la nouvelle de manière cohérente !!! Donc merci d’attendre que Fil soit au courant avant de poster, à moins que le perso soit au courant avant elle, bien sûr.
Certains recevront une lettre de la blonde…
Le texte de ljd Mackx n’est qu’un préambule au reste et est là pour permettre une meilleure compréhension de tous et surtout ça le fait, hein !




On était un lundi, on était en juillet et le soir tombait. Un soir chaud et presque étouffant puisqu’à la chaleur, il fallait ajouter le manque de vent et le peu d’humidité laissé par un orage de la veille. Et malgré cela, malgré cette lourdeur qui faisait poisser le Vicomte sur chaque parcelle de sa peau, il était heureux d’être là.

Il était heureux d’avoir fini la mission dans la Maine … il était heureux de bientôt pouvoir rentrer chez lui, ne fussent que quelques jours, pour régler certains détails comme la vente de son blé ou la remise d’un mandat. Il était également soulagé car même si le Maine avait été long, aucun des leurs n’était tombé. Il n’y aurait pas d’enterrement à déplorer, pas de cérémonie à Ryes et pas de besoin de picoler pour oublier les visages de ceux qui n’étaient plus.
A cette pensée, un large sourire illumina son visage couvert d’une barbe naissante et il sortit sa gourde, la déboucha et en but une large rasade. Cela ne pouvait pas faire de tort à quiconque, et c’était si agréable. Une fois cela fait, il referma ladite gourde et la rangea tandis qu’un léger hennissement de Samme lui faisait comprendre qu’elle n’était pas dans le même état de béatitude rêveuse que lui et qu’il fallait accélérer un peu le pas pour arriver à Angers avant la tombée complète de la nuit.
Tant qu’à faire … quand on n’a pas de femme, autant se laisser dicter sa conduite par une jument … Et c’est donc ce que fit le Cavalier licorneux. Il faut dire que c’était elle qui faisait tout le boulot depuis qu’ils avaient quitté Laval trois jours auapravant, lui se contentait de se reposer sur son dos, de picoler, et de dormir sur un coin de route quelconque enroulé dans sa cape. La chaleur le permettait …

Il faut peut-être ajouter que le poitevin était le seul à être reparti si tard vers le sud, une retraite inopinée l’ayant forcé à se séparer des autres cornus. Il aurait peut-être du se rendre vers le nord, vers la Normandie sur laquelle s’amoncelait de noirs nuages, mais il s’était forcé à repasser absolument par chez lui avant, sans quoi il n’aurait pas assez de vivres pour survivre chez les descendants de Guillaume.
Angers lui apparût alors au loin, se découpant sur le ciel étoilé comme une tache de sang sur un drap blanc. Angers la belle, Angers l’angevine, Angers la guerrière … encore quelques dizaines de minutes et ils y seraient. La jument pourrait profiter de quelques menus soins chez un palefrenier tandis que le Vicomte se trouverait certainement des compagnons de ripaille avec qui boire la moitié de la nuit. Il y aurait bien un groupe de moines teutoniques égarés non ? Ou une quelconque section d’archers italiens avec lesquels il pourrait parler de vin et d’olives ?

La fin du voyage approchait, les lumières des torches devenaient de moins en moins confuses …

Un bruit plus loin sur la route le fit alors sursauter. Ce n’était pas qu’il soit couard mais l’expérience des armes aidant, il avait appris à se méfier d’un bruit sur la route pendant la nuit. Sa main se posa lentement sur le pommeau de l’épée, et il laissa ses doigts caresser délicatement la licorne gravée tandis qu’il intimait - d’un mouvement lent mais ferme des rênes - à Samme de ralentir.
Un groupe de cavaliers déboula alors du tournant qu’il s’apprêtait à prendre et le sol trembla sous l’effet des chevaux au pas de course. Heureusement, Samme, en cheval bien dressé resta bien sur ses crampons tandis que Mackx sortait son épée et essayait de se couvrir au mieux de son bouclier. Il n’avait pas le temps de lancer sa jument au pas de charge pour mieux contrer l’effet de la charge adverse et tourner le dos lui était interdit en plus d’être un mauvais choix tactique. Rester en position était dès lors le seul choix tactique qui lui restait s’il voulait en découdre avec ce groupe de bandits.

Les cavaliers approchaient à vive allure … le choc était pour dans quelques secondes mais le poitevin trouva l’énergie de lancer son cry tout en plaçant son épée de façon transversale, pour tenter de couper la route à l’adversaire qui passerait à sa droite.


Ad Ultimam !!!

Le premier coup atteignit le licorneux à la cuisse senestre, ce qui le fit chavirer pendant qu’un autre coup touchait la jument qui s’effondra sous le poids. Un deuxième assaillant fit virevolter son arme et toucha la Vicomte à la tête, ce qui eût pour effet immédiat de le tuer net puisqu’il ne portait que son chapeau et non un heaume. Les assaillant suivants, qui étaient bien une dizaine, vinrent parachever l’œuvre dans un ballet de sang inutile … D’Alesme et sa jument étaient tous les deux au sol, le premier aussi mort qu’un caillou et la deuxième, ouverte au garrot et au cou et se débattant avec la grande faucheuse dans de grands mouvements de patte.

On était lundi, on était en juillet et le soir était tombé. Maxime d’Alesme, Vicomte de Fontenay, Seigneur de Saint-Pierre d’Oléron, Cavalier de l’Ordre royal de la Licorne et Champion du Poitou était également tombé, parti rejoindre d’autres déjà partis avant lui. Ce qu’il adviendrait sur cette terre, il n’en avait plus cure … il n’avait plus cure de rien … il n’était plus.


Fildais
Une chaleur étouffante s’était abattue sur la ville de Conflans-lès-Sens depuis quelques jours, annonciatrice d’éclats orageux d’ici peu.
La Champagne ? Bientôt Fil allait la quitter, ayant pris à l’embauche le fou pour la distraire elle n’avait plus rien à faire dans un comté qui glissait lentement dans des mélos politiques auxquels la blonde ne comprenait rien et surtout ne cherchait pas à comprendre.

Il était tôt encore, le dernier Angélus du jour avait à peine retentit au clocher, martelant de la cloche la fuite incoercible du temps. La jeune fille se tenait allongée sur sa couche, à l’auberge de la poste, essayant de pallier à l’oppression qu’exerçait l’air lourd sur son poitrail.

Les yeux mi-clos se rattachèrent mollement à une tache brune qui siégeait au plafond et son esprit partit en douces rêveries.
Sous peu elle retrouverait La Rochelle, son bord de mer jalonné de souvenirs heureux. Depuis quand n’avait elle plus rit ? Il lui semblait une éternité et Fil se refusait de se laisser entraîner dans ce genre d’acrimonie.
Peut-être même que Son brun serait de retour, avec un peu de chance… ainsi ils pourraient grappiller un peu de temps ensemble, et si aucune mission le rappellerait à un coin funeste du Royaume, envisager leurs épousailles. Enfin, depuis le temps qu’ils en parlaient…
Soupire.

La tache devint tour à tour hérisson à longues oreilles, marchand de fleurs avec banne débordante de pétales, puis fier galion jeté en pâture à l’océan… les paupières clignèrent faiblement courbant sous le sommeil et finalement toute lutte perdue, l’assoupissement prit possession de la jeune fille.
Totalement.

Et les rêves d’arriver, en cohorte, en armées oniriques qui assiégèrent l’esprit embrumé de la blondinette, qui, lentement se laissait couler dans une torpeur de plomb. Succession de songes informes et sans raisonnement, entrecoupée d’abîmes obscures qui agitèrent le somme fildaïssien.
Jusqu’à ce que clairement lui apparût son Maxime.
Enveloppé de superbe, sa flasque d’alcool dans une main, il montait son équidé sourire ourlé sur ses lèvres.
Charmeur comme au premier jour de leur rencontre où elle avait mis tant d’énergie à le détester.

Fil se sentit tendre une main d’ivoirine vers lui, dans une invitation à venir la rejoindre…
Il ne bougea pas, semblait être figé dans son rictus, inatteignable… les doigts de la jeune fille palpèrent le vide, et l’absence s’en fit encore plus cruelle.
Soudain, tout devint d’un noir d’une densité rare… la poitevine se sentit s’effilocher dans cet univers oppressant et dans un éclaire violent de carmin, un bruit assourdissant la fit trembler de tout son être.
Naquit son cri, si puissant qui lui déchira les poumons, en provenance du fin fond de sa gorge, du tréfonds de son âme. Elle cria comme jamais...


Maaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaackx !!!

Brutalement, les azurines pâles s’ouvrirent sur le néant, se raccrochant à l’abysse où la chambre était plongée. La nuit s’était glissée subrepticement, et avait investi les lieux balayés par le vent qui s’était engouffré à grandes bouffées dans la pièce par une fenêtre dont le pan claquait à présent le mur. La rochelaise se passa furtivement la main sur son front. Trempé…

Ce n’était qu’un rêve… enfin… j’espère… Seigneur….

En assise sur la paillasse, dans une position étrangement roide, la bouche sèche avait prononcé ces paroles comme pour exorciser ses craintes les plus profondes. Dans la chambre, on pouvait entendre des vélins voleter sur le sol, ceux qu’elle s’était promis d’envoyer au plus tôt et qui traînait.
Sa poitrine se soulevait au rythme de son palpitant, déserteur partit en cavale. La chainse devenue moite à cause de l’air chargé, lui collait à sa peau halitueuse.
Lentement, ses prunelles s’habituèrent à la pénombre et elle put descendre ses pieds sur le plancher. Doucement la blonde enferma son visage dans ses mains et eut une envie irrépressible de sombrer dans le chagrin.

La solitude venait de tomber sur Fildaïs, si pesante, la bardant de son linceul et avec elle, l’odieux pressentiment lui poinçonnait la poitrine, la ceindait douloureusement. Elle sentit l'épuisement sur ses épaules soudainement frêle.


Au loin l’orage faisait rage.
On était lundi, on était en juillet, le douzième jour pour être exact…

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Muette et cintrée !
Luciedeclairvaux
[Angers]

Depuis plusieurs jours déjà, les combats avaient cessé contre l'ennemi Comtois et son allié du Maine. Mais d'autres menaces avaient pris le relais, et l'Anjou fauchait sans relâche sur les chemins.

Lucie, après avoir soigné ses blessures, avait réintégré l'armée sans engouement. Mais la Zoko en faisait encore partie. Et où Maleus combat, l'Ange n'est jamais loin. Aussi avait-elle mis de côté d'autres projets de balade, pour suivre son maître d'armes, jusque dans la mort s'il le fallait. Ad Eternam ...

La veille, elle avait occis un Comtois qui tentait sans doute d'échapper au bourreau d'Anjou. Mais outre ce petit amusement passager, force était de constater que les ennemis qui tombaient sous sa lame n'étaient bien souvent que des paysans dont la fourche, de loin, dans le noir, et par temps de brouillard, ressemblait trop à une lance de chevalier. Ou bien des jouvenceaux trop pressés qui s'en allaient rejoindre une drôlesse en cachette de leurs parents. Mais rarement la cible escomptée.

Et Lucie suivait, blasée, déçue de ne combattre point en rangs, sous étendards portés par le vent. Ici, point d'adrénaline, point de machines de guerre, d'archers, ni de tactiques de combat. L'armée prenait la largeur du sentier, définitive. Expéditive.

Quand, entre chien et loup, elle croisa le licorneux, il était déjà mort. La mercenaire regarda un instant les premiers soldats s'éloigner lentement. D'un mouvement souple, elle descendit de son destrier blanc et approcha. Ses yeux clairs s'illuminèrent de rage et pétillèrent dans la pénombre. Quand la pointe de sa botte toucha la masse allongée au sol, elle leva bien haut son épée, à la verticale, et d'un coup vif acheva la bête.

Les hennissements avaient cessé. Le silence, moite et glauque, planait lourdement. Elle s'agenouilla et récupéra un objet qui brillait dans l'ombre. L'épée de l'homme certainement. Elle la glissa à sa ceinture, contre la sienne, et fit signe aux gars qui suivaient le convoi de poser la dépouille dans le chariot.

Ce ne serait qu'en rentrant au campement, à la lueur de sa lanterne, qu'elle reconnaîtrait le pommeau de la licorne.

...

Le 12 ...

Lucie hésita longuement. S'ils envoyaient quelqu'un, on lui reprendrait cette magnifique épée. D'un autre côté, si c'était l'un de ses compagnons d'armes qui était tombé, elle aurait aimé le savoir. Il fallait donc les prévenir.
Et puis elle cacherait l'épée, et le tour serait joué.

Un seul nom lui revenait en mémoire : Cerridween. Les deux femmes ne se portaient pas dans leur cœur, mais à la guerre comme à la guerre. On ne pouvait pas laisser ce gars moisir ici. Pas qu'elle se sentait redevable, Blondie, après tout les affaires de l'Anjou n'étaient pas les siennes, mais bon ... Elle sentait qu'il était digne des honneurs. Un gars avec une si belle épée ... Du bout de ses doigts maigres et abîmés, elle caressa la licorne gravée dans le pommeau. Pour la mercenaire, on évaluait un homme au soin qu'il portait à ses armes. Et celui-ci méritait qu'elle se fende d'une lettre. Chose rare pour l'Ange de la Zoko qui ne savait guère s'étaler en longues missives passionnantes. Elle estimait que le nécessaire suffisait.

Citation:
Cerridween,

C'est vous que le sort a désignée pour tomber sous ma plume. On a ici un gars de votre Ordre. Un brun qui approchait d'Angers par le nord. Je suis au regret de vous dire qu'il est bel et bien mort. Sur le coup.

Je serais vous, j'enverrais un chariot avant que l'Anjou ne l'enterre dans la fosse commune.

Lucie de Montmorency
Zoko ad Eternam.

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Cerridween
[A Léard ]

Elle est dans son antre. Assise au large bureau qui lui sert d'outils de travail comme les lames qui reposent à l'entrée dans les râteliers. Elle savoure un verre de vin à l'abri de la fraicheur des pierres.

Tout est calme depuis quelques temps. Les licornes sont en Normandie. Elle est restée. Léard s'est vidé de ses habitants comme une saignée qui s'écoule. Elle devrait apprécier le calme pourtant d'une vie devenue un peu plus tranquille. Mais sur sa table une plume noire posée l'empêche de chasser les songes. Le bras droit sorti de sa gangue de tissu fait de lents mouvements. Elle a reprit un peu d'amplitude pour le coude, mais chaque geste reste difficile. Mieux que rien.

Quoi d'autre ? Une lettre est partie hier pour le petit aventurier dont elle espère des nouvelles. Gaspard s'entraine dehors sur un mannequin en évitant de se prendre le retour de bâton du guerrier imaginaire. Les coups résonnent dans la cour à un rythme plus ou moins égal. Laïs étudie, normalement, dans sa chambre... peine perdue. Adrian est au Mans pour affaire. L'été s'écoule alors que le blé pousse aux alentours.


Trois coups résonnent à la porte.
Elle rouvre les yeux.
Un petit ordre pour inviter à entrer. Et un garde d'Isles devant elle dans un salut militaire.
Il tend un pli.
Elle le prend en remerciant d'un signe de tête.
La porte se ferme dans un petit cliquetis.
La main droite aide la gauche à déplier le velin.
Les yeux entament la lecture...
Et la bouche ne peut pas laisser sortir le cri d'horreur.

Non...Les émeraudes s'affolent en relisant encore et encore les lignes qui défilent. Le parchemin est lâché au sol pendant que la main s'empare des registres. Un brun... les pages tournent, tournent... un brun qui approchent Angers par le Nord... les doigts filent les listes... ça ne peut être... tous les bruns qui sont partis en Normandie. Une à une les têtes s'effacent... Enguerrand... Julios... Shishka... les doigts remontent... liste des licorneux en Maine... le coeur bat trop vite... la peine lui explose les tempes... qui est mort ?... Sur le coup.... mort sur le coup... l'index cherche... pourquoi sur le coup ?

Le registre tombe au sol.
Elle halète, une main crispée sur le bureau pendant que l'autre presse sa poitrine.
Encore un... ça faisait longtemps qu'elle n'avait pas dû supporter ça... cela peut être.... Mackx... Eragon n'était pas là... et les autres sont au Nord, partis... ça peut être...

Elle a dû attendre de pouvoir rouvrir les doigts... lentement elle est partie à la fenêtre et a hurlé à Gaspard de faire les bagages et de préparer une carriole. Elle s 'est laissé retomber sur la grande chaise. Avec une difficulté infinie, elle a prit un parchemin et de l'encre.


Citation:
Au prévôt d'Anjou,
Salut et connaissance de vérité,

Je viens d'apprendre qu'un licorneux a été tué à Angers. Ne connaissant pas les circonstances exactes qui ont amené à ce qu'il passe de vie à trépas, je passerai dans deux jours la frontière angevine pour identifier et récupérer son corps en la capitale, puisqu'il est hors de question qu'il pourrisse dans une fosse commune.

Je serai accompagnée simplement de mon écuyer, Gaspard de Nerra et d'une carriole. En guise de reconnaissance, j'aurai un étendard blanc, signe de deuil et un étendard à mes armes, de gueule aux trois quintefeuilles d'or.

Ainsi soyez prévenus,


Cerridween de Vergy,
Capitaine et Maitre d'arme de l'ordre royal de la Licorne.
Le quinzième jour de juillet de l'an de grâce mille quatre cent cinquante huit.



Le garde d'Isles est déjà sur les chemins. Et elle doit prendre la plume... encore une fois.... recensement à venir... pour vérifier l'intuition qu'elle a déjà.


['tention image trop grande donc retirée... Ici c'est 200 maxi !
Bon jeu,
Modo Rod']

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Fildais
[Blois… sur le chemin du retour]

Le relais où l’équipée avait trouvé repos pour la journée, s’animait lourdement de bruits et d’éclats de rire qui effleuraient à peine le bistre à l’âme de la blonde.
Se tenant dans un recoin bien à l’écart, le dos toujours emprunt de cette austère rigidité, Fil terminait sa lettre pour le prévôt du Berry. Finalement, elle avait fini par trancher. Après de longues hésitations, la prudence avait prévalu sur la question. Ils passeraient par son ancien Berry, évitant soigneusement l’Anjou où une fois de plus tout y était d’une complexité diplomatique.
Le monde avançait mais les choses ne changeaient guère.

Avec soin, la poitevine roula le vélin et le laissa pour l’instant de côté. Un autre prit sa place, vierge de son écriture et destiné à un être cher.
Nerveusement, la blondinette se mordillait les lèvres.
Allait-elle lui parler de sa sourde angoisse qui lui annihilait le sommeil depuis quelques temps, de ce ressenti étrange qui la pesait. D’un geste furtif de la main, elle tenta de chasser ces sombres pensées de sa tête.
Non, de toutes manières il se moquerait d’elle et de ses craintes, et tout ce que Fil recevrait, serait une lettre aigre-douce accompagnée de fines plaisanteries dont seul lui avaient le secret.

Ses perles bleutées planèrent un instant sur la plèbe locale, l’esprit en absence s’étirait nonchalamment dans le temps. La plume latente des ordres de sa maîtresse.
Puis vint l’instant où la pointe encrée croisa le vélin, dans un léger scritchi régulier. L’autre main, la senestre, inutile à l’écriture, se contenta de tapoter doucement comme pour inciter les mots fugueurs à retrouver le chemin du parchemin.


Citation:
De votre blonde bien aimée, Fildaïs
A mon brun préféré, « Vice-compte de la Pie-Qui-Chante », Maxime.

Je prends route pour La Rochelle en passant par le Berry-Limousin. Nos « amis » angevins font encore parler d’eux alors je ne vais pas aller leur rendre visite.
Et vous ? Allez-vous rentrer promptement ? J’ai de bonnes nouvelles à vous conter.
Et puis vous me manquez cruellement, je n’aurai pas dû partir si loin de vous et rompre la promesse que je vous avais faite, de toujours rester à vos côtés.

Prenez soin car je vous aime.
Votre blondeur, Fil.
Blois le dix-huit du septième mois


L’encre séchait pendant qu’elle déposa une poignée d’écus pour régler sa note à l’auberge qui faisait aussi office de relais. Et lorsque le minois de sa noiraude apparut à l’entrée, la rochelaise sut que les chevaux étaient prêts et que l’heure était au départ.

La missive pour le Berry fut confiée à un messager, l’autre d’allure plus concise fut pliée, avec grand soin et fut glissée dans la paume de sa main. Le petit morceau de vélin attendit patiemment que les doigts hyalins allèrent délivrer un pigeon d’un gris léger qui dormait dans un panier carré en osier, attaché à son cheval.

Le mot bien accroché à la patte de l’oiseau, elle le libéra son étreinte, battant des ailes furieusement dans son envol et rapidement devint un point à l’horizon. Les azurines le suivirent un instant, la blondinette était confiante, la bestiole à plume saurait le retrouver…

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Muette et cintrée !
Fildais
Une quinte de toux lui emporta les poumons pendant cinq bonnes minutes. Une fois calmée, la demoiselle jeta une œillade hâtive aux alentours, pas de Pherea dans le coin, ça lui évitera les questions indiscrètes, les regards inquiets, les couvades et tout ça.

Depuis le cauchemar, le sommeil avait déserté ses nuits, et l’appétit s’était égaré dans les limbes de son esprit devenu oublieux. Des traits ombrageux marquaient la peau fine dessous ses yeux et ses joues se creusaient pour preuve.
Ses forces s’amenuisaient au fil des jours qui passaient sans aucune nouvelle de lui. Que de temps inutiles à passer à ausculter sans fin le ciel de bleu épuré, à s’en écorcher les azurines, à s’en abîmer les rétines, le regard se cassant sur la voûte claire.

Mais rien… point d’ailes brisant l’air, point de gris léger parmi l’immensité. Le pigeon ne s’en revenait pas. Et lorsque la nuque devenait trop douloureuse à rester le nez pointant le céleste, et qu’elle baissait les yeux lourds de ce chagrin inavouable, son cœur se vidait de sens. Ses lèvres d’habitudes volubiles, pétales souriant à tout vent, s’écrasaient l’un contre l’autre, plissant les badigoinces en mince trait et terminant le portrait de la blonde dans une attitude sévère et plus grave que d’accoutume.

Sa noiraude, soupçonnait quant à elle, une nouvelle d’un autre acabit, la voyait déjà grosse, portant les prémices d’un enfançon alors que le ventre de la poitevine sonnait le creux de l’absence mackxienne. Non point de graine d’Alesme ne grandissait par ici.
Une nouvelle quinte lui déchira la poitrine, plus courte et pourtant bien plus violente.
Le regard d’opaline bleutée fouilla derrière elle, le cerbère ne la surveillait pas à ce moment-là par chance. Il n’y avait que son fou, Baladin qui foulait son sillage, le quatrain malsain et impudique à la bouche, du genre qui faisait fuir les demoiselles sorties du couvent. Elle n’aurait pas traîné son état d’inquiétude qu’elle en aurait ri.

Finalement, n’y tenant plus, l’âme rongée jusqu’au quignon par l’anxiété et surtout par une rumeur qui enflait en terre poitevine, elle profita d’une pause dans l’après-midi chaude pour se munir d’un vélin et de quoi écrire.
Sous un arbre, à l’ombre, elle s’isola. La plume dressée au-dessus du parchemin comme un serpent prêt à fondre sur sa proie…
La main resta un moment en suspens.
A qui pouvait-elle demander pareille renseignement ? A un membre de la Licorne assurément…

Mais Fil n’y connaissant personne, dut trouver la personne adéquate et surtout dont elle se souviendrait le nom avec plus ou moins d’exactitude. La blonde allait coucher sur vélin le nom d’Ethan… puis se ravisa… un homme pourrait-il la comprendre sans qu’il prenne ceci pour une crise d’hystérie féminine ? Nerveusement, Fildaïs se pinça les lèvres…
Non, non, une femme serait mieux, plus encline à entendre son angoisse sans la juger, à son humble avis. Et la lettre de commencer…



Citation:
De moi Fildaïs de Compostelle, Dame de la Roche Majeure et promise de Maxime d’Alesme, Vicomte de Fontenay, Seigneur d’etc… Cavalier à la Licorne (pour faire court).

A vous, Besse de Saincte Vermeille, pourvue très certainement de beaucoup de titres que je ne connais malheureusement pas et sœur d’armes à la Licorne de mon promis.

Salutations et respects,

Rappelez-vous d’une blonde aux cheveux courts, pas très grande, radine du sourire, montée sur une camarguaise pendant la campagne du Maine ? C’est moi donc, aujourd’hui je fais recoure à votre personne par cette missive. Je ne sais à qui demander. Voilà un temps que je n’ai point de nouvelle de Mackx. Un pigeon lui a été envoyé mais ne m’est jamais revenu. Vous trouverez certainement cela stupide mais je me fais un sang d’encre depuis…

Si vous pouviez accéder à ma requête et me fournir informations.

Est-il encore en mission au Maine ? Ou bien avez-vous dû vous déplacer ailleurs ? Est-il en retraite chez les moines ? Si vous pouviez m’éclairez vous en seriez bien aimable ma Dame.

Je vous en remercie par avance et m’ôterez bien des soucis en me donnant réponse.

Qu’Aristote vous garde éloignée du fil des lames
Cordialement Fildaïs de Compostelle

En Poitou faict le vingt-sixième jour du septième mois

P.S. Si vous pouviez lui dire de m’écrire aussi… merci.



A terminer la missive, elle fut agitée par une grosse quinte bien bruyante qui cette fois attisa le regard de Pherea qui rappliqua la mine sévère, la bouteille de diacode à la main, apparemment bien décidée cette fois à soigner la blonde avec ou sans son approbation.
Fil grimaça avant de trouver en l’envoi du pli prétexte à remettre à plus tard la prise de cette odieuse préparation.

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Muette et cintrée !
--Levieux
[Quelque part pas loin d'un massacre]

Un jour comme un autre pour le vieux, sillonner les routes et emmener ses clients là où ils le désirent. Même si il s’imposait une distance pour pouvoir rentrer chez lui le soir. Après tout, de nos jours nos âmes s’envolaient plus vite que la pluie sous un soleil aride. Les guerres, les maladies parfois même les deux, il voulait profiter de sa bonne femme qui avait un talent inné pour le faire sortir de ses gonds. Mais bon il l’aimait malgré tout, ça rendait aveugle cet étrange sentiment, il aurait préféré la surdité…On en choisit pas et il endurait tout cela depuis suffisamment de printemps pour faire attention à ce genre de détails. Une journée comme les autres donc, le crachin du matin en plus, il ajusta sa cape et serra son bout de tissu autour du cou. Même si l’été trainait sur nos portes, il en faisait pas moins froid quand le jour paressait encore. Il caressa l’encolure de son unique monture, des années pour l’avoir sans compter la calèche qu’il avait construit de ses mains. Une chose était certaine, le vieux prenait soin de tout cela. La bouffe était meilleure depuis que l’ancien trainait ses guêtres sur les routes, jamais bien loin de la ville ceci dit. Pour les brigands, il était une proie facile et faut dire que l’armée n’avait jamais été son truc.

Ceci dit cette journée n’allait pas être comme les autres car une personne était morte d’après les rumeurs, sur les routes de l’Anjou. En même temps qui dit frontières fermées dit…poutrage à l’entrée. Ce que certains nommeront coïncidence, le vieux appelait ça destin. Et surtout il ne faut jamais dire jamais.

[Rencontre avec une bourse et des écus]

Un jeune, en même temps tout le monde avait l’air jeune pour lui. Lui il pouvait dire qu’il avait vu passer des printemps, y en avait moultes qui avaient défilé sous sa fenêtre. Alors, maintenant que l’indifférence des âges l’avait marqué à grand coup de fer brûlant, il pouvait se targuer d’être un vioc. Enfin retour à l’histoire, un homme qui lui file une bourse bien pleine contre un menu service…Transporter un cadavre dans un tonneau rempli d’alcool jusqu’à feu ses pénates. Pour faire plus original que cela il fallait se lever tôt, un sourcil qui s’arque le visage interrogateur. Que dire que faire, s’éloigner de chez lui pour ravir la rombière et au passage lui-même. Un regard vers la droite observant son fier destrier qui n’avait pas loin d’une dizaine d’année, le panache d’antant avait disparu aussi bien que celui de son maître.

Bon filez moi le colis que je le livre. Au faites c’est qui dans le tonneau ?

[Ultima]

Assis à sa place de conducteur, brun d’herbe dans la bouche le vioc regardait attentivement le paysage qui défilait devant ses mirettes. Les brigands étaient son angoisse, deux jours de cheval pour atteindre la fameuse arrivée. Heureusement qu’il avait fait le plein d’écus, sinon il n’aurait pas risqué un morceau de sa couenne. Enfin le domaine qui se pointe, enfin le colis qui va être refilé. Pas qu’avoir un cadavre dans le dos lui faisait frémir la moustache, mais la mort en moins au dessus de sa tête il ne dirait pas non. Arrivée dans la cour, il descendit de sa carriole pour frapper à l’imposante porte. Un garde l’ouvrit sans vraiment perdre de temps.
Bonjour, je suis.. peu importe, je vous ramène le maitre des lieux, il est là bas dans le tonneau.

La mine du garde se changea.

C’est la vérité, navré de vous apprendre qu’on lui a bien poutré le museau au brave. On m’a dit de venir ici, le cadeau est à vous maintenant.
Bess.scte.merveille
Quelques heures aprés réception d'un courrier de la Capitaine Tyran

'Les courriers se croisent et s'envolent, passent et repassent, se lisent et se transmettent ou attendent réponse. Des nouvelles, bonnes ou mauvaises, de simples lettres d'informations ou des lettres plus privées, venant du Limousin. Toutes demandant son attention pour x raisons.

Depuis quelques jours Cerrid avait informé le Haut Conseil qu'une licorne était portée disparue... non en fait il était question d'une licorne tombée en Anjou, mais qui ? ça personne ne le savait encore. C'est pourquoi la Capitaine Tyran avait prit la route pour aller chercher le corps. C'était ces courriers que Bess attendait avec impatience... d'une parce que ça lui plaisait pas tant que ça de voir la Cap partir là ou ça fauche à tout va, mais en plus elle était quelque peu rétive à l'idée de connaitre celui ou celle qui n'était aujourd'hui plus.

Ses craintes furent réveillées par un courrier de Fildaïs, Si Mackx ne répondait pas alors peut être ... résultat ? elle n'avait pas répondu de suite, peur que ses craintes soient justifiées et sans doute aussi par superstition. Mais aujourd'hui ..; aujourd'hui elle ne pouvait plus reculer. L'information était tombée. Une brève missive de la Cap qui confirmait que le disparu n'était autre que Mackx. Elle avait mit plusieurs heures à pondre sa réponse, grattant et regrattant ce qu'elle avait écrit, tout cela semblant trop impersonnel, trop fade, trop pleurnichard. Elle n'aimait pas être l'oiseau de mauvais augure mais il semble qu'elle n'ait pas le choix, Fild c'étant adressé à elle personnellement.


Citation:
De Bess Saincte Merveille, plein de chose qui n'ont pas d'importance icelieu.

à Fildais, dont je me souviens parfaitement.

Salutation et Respects.

Il est des choses qu'on n'aime pas faire, il en est d'autres qui sont douloureuses. Je suis désolée de n'avoir répondu plus tôt, mais n'ayant moi même pas de nouvelle, il m'était difficile de t'écrire.

J'aurais préféré t'annoncer ça de vive voix, d'être là, mais je ne puis, et je ne peux te laisser non plus sans t'avertir.

Mackx n'est plus. La nouvelle m'est parvenue il y a quelques heures. Le Capitaine Cerrid est parti chercher son corps. Je sais que ce que je vais te dire ne te le rendra pas, et que ça ne te rendra pas son absence plus facile. Il est mort l'arme à la main, tel un chevalier qu'il serait sans doute devenu si Le Trés Haut ne l'avait rappelé si tôt.

Pleure le, comme nous le pleurerons tous, mais soit fière de ce qu'il fut, qu'il vive en ton coeur comme il continuera à vivre en le notre.

Que le Trés Haut veille sur ta peine et la rende moins lourde.
Bess

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Fildais
Néant.
Ténèbres.
Et douleur…

Le noir était complet, l’englobait dans sa totalité. Un silence pesant l’avait recouverte comme le linceul de la faucheuse et qui néanmoins l’apaisait. Pour combien de temps encore ?

Pour l’instant rien…

Si, juste un nom… Maxime.
Susurré, chuchoté, crié, hurlé mais uniquement dans son crâne.


Les premiers bruits furent ceux de son être, étrangement démesurés. Les battements de son cœur, sa respiration lente et profonde ; tout prenait une telle ampleur, l’assourdissant presque.
Et une à une les sensations revinrent. Elles se distillaient lentement dans sa carcasse, un poison prenant possession de son âme… ses tempes la frappèrent durement, et une douleur insatiable s’était saisie d’elle, la grignotant.

On la souleva, la p’tite blonde le sentit bien, la pression de mains sur elle, le sol qui se dérobait, puis le balancement lancinant de son corps, cette odieuse impression de n’être qu’une poupée de chiffon dans des menottes d’enfant, de ne plus rien contrôler.

Des voix de l’extérieur lui parvinrent, indistinctes, étouffées, perçant sa brume épaisse où la blonde avait trouvé refuge.
Lasse, Fil fit une première tentative pour mouvoir ses paupières, lourds rideaux de chair, qui n’exécutèrent d’abord pas son commandement. Enfin les azurines s’ouvrirent, lui obéirent après acharnement, et la rétine s’aveugla, crucifiée par un ciel si bleu, si pur, si clair et ce soleil qui lui cuisait l’oeil.

Ils l’entraînaient dans le sombre, sa tête dodelinait au rythme de leurs marches, elle ne savait pas qui était ces « ils », peut-être les gardes ou ses serviteurs… pour le moment la rochelaise se trouvait si loin de sa dépouille mortelle, l’esprit déjà, s’était scindé rejoignant de vieux souvenirs qu’elle avait exhumés.

Un goût de vieille eau rance, un parfum de lavande flottant dans l’air… et toujours la même réminiscence incertaine, une Dame, le ventre rond, le regard et le cœur froids… un lavoir… ses cinq ans…
« Ma Dame que je ne dois pas appeler mère, pourquoi ce jour là, votre main si blanche a flanché ; sur mon cou, je l’ai sentie desserrer son étreinte. Me rendante libre, de sortir la tête de l’immonde flotte où vous m’aviez trempée… »

...

Néant.
Ténèbres.
Et douleur…
Le cycle recommençait, inlassablement.


On l’avait installée là, sur la couche dans sa chambre, posée comme un objet fragile et précieux, au milieu des draps blancs. On chuchotait dans la pénombre, on s’activait, l’oreille pouvait suivre chaque frisson d’étoffes, chaque frisson de voix.

Le réveil fut incertain, la souvenance remontait à la surface, par bouffées désordonnées, par bribes décousues, sa mémoire fracturée eut du mal à remettre en place les pièces et les imbriquer pour former une vérité. Sa vérité ?

Elle se rappelait…



[Quelques heures plus tôt…]


Cela aurait dû être pour Fildaïs un jour parmi tant d’autre qui s’étalait dans l’été poitevin, une heure coincée entre deux autres, toutes pareilles, toutes égales, sans discernement aucun.
Il n’en fut rien, l’arrivée impromptue d’une charrette et d’un tonneau dans l’air lourd de Fontenay sonna le coup de semonce. De loin, les azurines observaient son entrée dans la cour, soulevant l’agitation inhabituelle des gardes.
Une fois rapprochée de l’attroupement, les prunelles inquiètes naviguèrent entre le faciès fermé de ses gens, la barrique de bois trônant à présent dans la cour et l’inconvenant livreur de mauvaises nouvelles qui répéta ses dires.

Silence…

Elle intima sèchement l’ordre de l’ouvrir, traitant le vieux coché fripé par les ans, de sénile et de vil menteur qu’elle pendrait.

Un corps dans un tonneau…

Brusque mouvement de recul, à sa vue, la nausée lui remontait dans la gorge, et son palpitant tambourinait furieusement sous sa poitrine diaphane. Et comme les nouvelles venaient toujours à deux… surtout si elles étaient mauvaises… le pli attendu de la Licorne fut apporté à la Compostelle.

Mains qui tremblèrent à décacheter le vélin, rapidement Fil parcourut l’écriture qu’elle reconnut de suite pour lui avoir donné les ordres dans le Maine.
Elle dut la relire plusieurs fois, pour en imprimer le contenu, attraper les mots et leurs trouver une cohérence.
Lentement, la poitevine s’avança et se pencha pour mieux voir dans la barrique, osa une azurine puis les deux, terrifiée par ce qui deviendrait une évidence.

Non, pas un corps… Maxime.

Fildaïs se recula, le visage exsangue, agrippant de sa main aveugle un de ses serviteurs, s’y raccrocha avant de vomir sa bile sombre et souiller le cuir de ses bottes.
Puis elle hurla à s’en arracher les poumons, un cri inhumain tout droit sorti de ses entrailles, jusqu’à ce que la voix se brise au fond de sa gorge douloureuse.
Puis, elle frappa, de ses mains, de ses pieds, le vide autant que la chair, lorsqu’un garde enfin put la maîtriser. Il ne la relâcha que en sentant s’affaiblir la hargne de la Compostelle, qui chancela et s’affala à bout de force, la tête frappant durement le sol.

Le Vicomte était mort et elle avec lui.



[Retour au présent et à la chambre]

Pherea se pencha sur sa blonde amie, tournant un visage marqué par une inquiétude silencieuse. Sa noiraude lui parla, quelques mots qui se voulaient rassurants doucement glissés à son oreille et qui ne parvinrent même pas à l’esprit de la jeune rochelaise.
Déjà elle se retourna, rabattant sur elle un bout de drap, les larmes brûlantes ruisselaient sur ses joues, ses lèvres pincées pour étouffer son chagrin.
Fil n’avait pas besoin de compassion, elle était gangrénée déjà par le remord.

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Muette et cintrée !
Pherea
Bonheur.

Voilà un mot que la fée avait oublié depuis de longs mois. Et pourtant, c’était un sentiment bien simple qui commençait à regagner le cœur de la berrichonne. Le bonheur de se sentir vivre, celui de tenir la main aimée et aimante de sa sœur de cœur, celui d’envisager une vie qui ne serait plus qu’errance et solitude. A en oublier qui était la Dame de Compagnie.

Mais ça, c’était avant.

Avant qu’une effroyable nouvelle franchisse les portes du domaine étrangement empaquetée.
Avant que l’air ne soit fendu des cris déchirants d’une blonde.
Avant que son corps ne vacille au sol, et entraine avec lui Néant,Ténèbres et douleur… L’inlassable cycle.

Pherea s’étant retirée dans son appartement un peu plus tôt, elle n’assista pas à la macabre découverte. Ignorant même les inquiétudes de son amie quant au silence de son fiancé, la brune ne pu se douter un seul instant de la gravité de la situation lorsque les pleurs déchirants lui parvinrent de la cour. Elle ne pu non plus associer les hurlements à son amie blonde. Les cris étaient bestiaux, sanglants… Et même si elle n’avait jamais remis en question la puissance vocale de sa noble préférée, elle ne pensa pas à elle dans un premier temps. Mais alors… qui ?

Trêve de réflexion, Pherea jeta sa plume sur le pupitre non loin et entama une folle cavalcade à travers la bâtisse. Elle n’emprunta sûrement pas le chemin le plus court, mais finit par arriver à la porte principale où elle trouva son amie, quasi morte dans les bras de ses gardes, tout aussi blancs qu’elle.

Norf.

C’est tout ce que la brune pu dire avant de se précipiter vers la blonde et poser ses mains sur son visage et son ventre. Elle senti un faible souffle qui la rassura mais releva ses yeux effrayés vers le plus grand des garde et le questionna silencieusement.


[Quelques temps plus tard, dans la chambre]

Voilà des heures que Pherea veillait Fildaïs. Elle avait d’abord attendue qu’elle se réveille. Mais le choc avait été tel que la Dame de la Roche Majeure ne pouvait vraiment sortir de sa torpeur. Puis la brune lui avait soufflé des mots rassurants, aimants, probablement stupides et très communs. Mais rien n’y faisait. La blonde n’entendait rien. Alors la noiraude avait fini par craquer et laisser elle aussi échapper quelques larmes. Elle avait tout fait pour les garder bien au chaud dans son être, elle n’avait pas le droit de se laisser aller, pas le droit de voler à son amie la seule chose qui lui restait : ses larmes. Mais voir sa sœur lui échapper ainsi, lui tourner le dos et s’enfoncer dans sa peine fut trop lourd pour Pherea. Fil ne la vit pas pleurer. Et quand bien même, elle ne pouvait sûrement plus analyser les réactions de son entourage.

La brune fit sortir les servantes, vint s’assoir sur le lit près de Fil, tenta d’accrocher son regard dans le sien et murmura :

Parle moi…
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Fildais
[Et les pans de la raison s’effondrèrent… enfin naquirent les prémices du règne de la folie]


Parle-moi…

Les mots se perdirent, s’égarèrent dans le dédale de l’esprit, ils n’atteignirent jamais Fildaïs perchée dans sa tour de désolément.
Et quand bien même, la réponse ne serait jamais sortie du carcan de ses lèvres pincées. La voix s’était brisée avec son être, mille éclats avaient fusés et lacérés sa chair en blessures invisibles. Les paroles s’engorgeaient dans le gosier, et ne pouvaient sortir. Tout n’était que fouillis intense et elle ne put y remettre de l’ordre dans tout ce bazar bancal qu’était devenu sa tête.

Les heures se succédaient, les jours bientôt.
Combien de temps d’errance ?
La Compostelle n’aurait pu trouver réponse, elle se trouvait, elle-même dans l’ignorance.



Un matin, gris et paré de maussade se profilait au loin, les grands yeux de la jeune fille étaient ouvert bien avant le jour, bouffant du néant.
De temps à autre, une toux raclait le fond de sa gorge sèchement que la blonde mettait en sourdine dans les plis du drap.
La pluie se réveilla à son tour et entama son chant de mélancolie.


Ploc... ploc… ploc…

J’écoute… c’est toi, la pluie ?

Ploc... ploc…

Tes gouttes cognent inlassables sur le carreau, elles m’ennuient à faire ainsi du bruit.

Ploc... ploc… ploc…

Pourquoi ?
Elles désirent entrer ?
Tu ne peux point, pluie, tu dois rester dehors sinon tu vas tout tremper…


Ploc... ploc… ploc… ploc…

Chuuuuuuut… sinon je vais être découverte et l’armée phereanienne va débarquer tout soudain, tais-toi, tais-toi à la fin et reste donc à ta place !

Ploc... ploc… ploc… ploc… ?

Pluie ! Cesse donc de m’importuner de tes stupides questions aquatiques !

Quelle armée dis-tu ?

Celle montée par ma brunette, elle a décidé que je ne devais pas crever, tu parles ! Pfeu on peut même plus canner en paix maintenant.

Tous les matins sont pareils depuis….
Silence … enfin t’sais bien…

Dès la pointe du jour l’escouade de servantes dressées par cette maudite Blanche vient, on me force à ingurgiter de la bouillie d’avoine, de l’opiacé qui me trouble les sens, on me fait la toilette comme à une enfant impotente, on m’habille, on me peigne… on m’apprête et on m’agace surtout et elle ! Elle observe tout de son œil de Cerbère.


Ploc... ploc… ploc… ploc… !

Je t’en foutrai d’la compassion moi ! Rien à carrer !!! Qu’on me laisse crever en paix bordel, qu’on nous laisse…
Silence gêné … oui, parfaitement ma honte et moi !

Ploc... ploc…

Chuuuut personne ne doit le savoir, c’est un secret… Personne tu entends ! C’est ma honte à moi !

Ploc... ploc… ploc…

Chuuuuut maintenant ! Tu m’agaces !




La créature qui macérait dans le lit haussa les épaules et se tourna dans l’immensité cruelle de la couche accompagné d’une quinte qui lui déchira la poitrine.
Elle s’enveloppa dans un tissu épais, enroula son corps décharné dedans.


Maxime ?

Le nez s’enfouit dans l’étoffe d’une des capes alesmiennes qui traînait dans une malle et qui portait encore son odeur, à lui, rassurante. La jeune fille prit une large bouffée, s’enivra des souvenirs ramenés à quai par les effluves.

Maxime ?...

Les azurines pâles s’agrippèrent un moment sur la tenture puis glissèrent lentement à l’endroit de déréliction sur ses draps. Là il fut un autre temps, il y avait eu des éclats de rire et d’autres soupires.

Vous vous souvenez mon aimé ?

Le silence pour seul écho et la pluie lancinante sur la vitre. La Compostelle ramena la cape sur ses frêles épaules, les naseaux effleurant son parfum. Un bruit fut immédiatement étouffer, on aurait dit un pleur.

Vous allez revenir, hein ? Et vous m’emmènerez sur votre barque pourrie et nous pêcherions toute une matinée. Et le soir au coin de la flambée je vous écouterai me parler de politique ou vous m’expliquerez la rhétorique tarabiscotée de la législation de je ne sais quel trou perdu du Royaume, et comme de toujours, je m’appliquerai à faire celle qui comprend en me retenant de bailler…

J’veux à nouveau subir vos clins d’œil décimeurs de demoiselles


Les doigts se crispèrent sur la cape vicomtale. Une toux entrecoupée de pleurs enleva sa respiration.

J’veux encore… de vos blagues idiotes, de vos regards sur moi… de votre présence… je ne survivrai pas à votre absence, je vous l’ai déjà dit, revenez… je vous en supplie… revenez Maxime…
Sinon.. sinon je vais crever de peine.


A nouveau la main s’abattit implacable et dure contre sa bouche déformée de douleur. Il fallait à tout prix tuer ce chagrin mais le flot ne se contenait pas si aisément et il remonta pour inonder le bleu hyalin, les noyèrent sous la brûlure affligeante de l’amertume.
La blonde, habituellement pudique du sentiment, que l’on connaissait surtout pour ses épanchements arides, là, s’étiolait en pluie salée sur ses joues.

La rochelaise sombra dans ce demi-sommeil, entre douce folie et amère peine jusqu’à ce que la brigade sous le haut commandement de Phé fasse son entrée. Et comme prédit, s’affaira sur la demoiselle en totale inertie sous le joug oculaire de la noiraude.

Noiraude d’ailleurs qui lui glissa quelques mots, d’une redoutable lucidité, il y avait des personnes à avertir. Fil baissa la tête, toujours emmurée dans son silence et acquiesça.
Ce sera fait en ce jour.
Cela et d’autres dispositions qu’elle devait prendre urgemment aussi.

En milieu d’après midi, Fildaïs siégeait pâle dans le cabinet du Vicomte, devant elle des vélins, de l’encre, une plume ayant du superbe dans sa panache et une main tremblante. Sa respiration sifflante coupait le silence mortuaire qui régnait dans les lieux.
Le chagrin devenu trop sec au fond de sa gorge d’avoir pleurer, n’avait plus de larmes à offrir à ses yeux. Bénédiction que cela.
Ces maudites lettres, la jeune femme, les écrira seule. Un verre de liqueur mackxienne pour unique compagnie.



Citation:
De moi, Fildaïs de Compostelle, Dame de la Roche Majeure, promise de votre bien aimé frère

A vous, Justine d’Alesme, Baronne d’Illiers, Dame de Montperthuis


Je m’excuse de troubler ainsi votre retraite au monastère mais une bien triste nouvelle entraîne ma plume sur ce vélin et m’oblige cette missive qui me coûte. Comment vous ménager, vous que je connais si peu et qui étiez la fierté de Maxime. J’eusse préféré ne pas avoir à vous écrire mais il le faut, je vous le dois, j’ai déjà que trop tardé.

Peut-être l’avez-vous apprise d’autre bouche et je ne suis qu’une messagère de plus. Votre frère bien aimé, Maxime d’Alesme, n’est plus. La vie lui a été ôtée en Anjou, et j’en suis la seule responsable. J’aurai dû rester à ses côtés, tout aurait été différent. Pussiez-vous un jour me pardonner car j’ai failli et le remord désormais sera mon ombre à jamais.

Je me joins à votre chagrin, il doit être immense. Maxime était un de ces êtres de qualités qui illumine la vie des autres par sa noblesse d’âme et son intelligence. Son absence creuse ma vie à présent.

Le château de Fontenay et ses terres attenantes sont maintenant vôtres et j’ai laissé des instructions pour vous laisser en ordre le domaine. Je quitte ce lieu emplit de rire et de bonheur, remplit de son souvenir qui me sont insoutenables. Je m’en retourne à mon fief en Touraine.

J’ai à vous soumettre une requête et je vous prie de l’accepter. A mon départ, je souhaiterais que vous me cédiez une chose qui a une importance symbolique. Je désirais que vous me donniez l’autorisation d’emporter avec moi, un autour qui se trouve dans la fauconnerie vicomtale. Ce fut avec un de ces oiseaux que votre frère m’a séduite, cet animal est le témoin de notre histoire. J’en prendrai grand soin, soyez en assurée.

Pour la cérémonie funèbre, je n’ai plus qu’à attendre réponse, il n’est pas aisé de trouver curé en ces périodes de retraites spirituelles. Dès qu’une date sera établie, je vous la transmettrai.

Qu’Aristote veille sur vous, Justine, qu’Il illumine vos pas et éclaire votre chemin.

Amicalement

Fildaïs de Compostelle.



Et de se rafraîchir le gosier d’une infime gorgée qui lui laissa une agréable sensation.

Maxime, c’est comme si vous étiez à mes lèvres.



Citation:
De moi, Fildaïs de Compostelle, dicte Justelle par tes soins, amie de toujours

A toi, Velaron, Seigneur d’Auzay, ami, fidèle et loyal


Un grand chagrin anime ma plume en ce jour et je dois partager avec toi une funèbre nouvelle. J’ai reçu réponse de la Licorne, j’ai reçu un corps aussi et avec, mille maux, mille douleurs indescriptibles ce sont abattus sur moi.

Ton camarade de levé de coudes, ton ami, ton suzerain, ton filleul, Maxime, notre Maxou, est passé sous le fil des lames angevines. Je ne sais ni pourquoi, ni comment, je sais seulement qu’il est passé à trépas.

Dès que j’aurai vendu les terres que j’ai acquises en Poitou, je m’en irai probablement en Touraine là où j’ai mon fief et ma Saigneuse à moitié folle.

J’ai à te parler au plus vite, Vel, d’une chose qui requiert toute ta discrétion et tu as ma confiance absolue pour ça.

Qu’Aristote te garde, mon ami, des lames qui pourraient écourter ta vie.

Affectueusement

Fil



RAPPEL : Ma blonde étant muette pour l’instant, tout ce qui se trouve en rouge n’est que sa voix intérieure !
HRP : L’heure étant tardive, les missives attendront un peu ^^

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Muette et cintrée !
Fildais
Ploc… Ploc… Ploc…

La pluie toujours frappait le carreau, n’attirant que peu le regard de la Compostelle dont les yeux vides erraient sur le parchemin dans une relecture rapide. Sa respiration accablait sa poitrine, l’âpre toux lui avait écorché à chaque passage un peu plus ses poumons et rendait son souffle difficile.

Un nouveau vélin prit place devant elle, sa carcasse étiolée se courba dessus et le couvrit d’encre et de mots. Son écriture étriquée qu’elle avait toujours eu du mal à maîtriser avec la classe nécessaire noircissait le parchemin. A chaque phrase inscrite, c’était la dure réalité qui la rattrapait doucement.


Citation:
De moi, Fildaïs de Compostelle, votre vassale, amie, sœur d’âme et ancienne sœur d’armes

A toi, Bitterly, Vicomtesse de Montoire, Baronne de Saint-Paterne, Saigneuse adorée, amie et sœur


A trop courir après la faucheuse, on se fait un jour rattrapé.
A trop se croire invulnérable, on en oublie que l’on est mortel.
A trop aimer, on occulte la part de chagrin qui s’accompagne.

Mon amie, un lien unique nous uni toutes deux et aujourd’hui, je peux te l’avouer, je verse dans une folie sombre. J’aime à croire que ceci n’est qu’un songe, que cette lettre que j’écris en fait parti et que dans quelques minutes les lames du soleil viendront me frapper les paupières sommeilleuses. Mais de toutes apparences, il n’en est rien, je suis là échouée dans ce qui fut le cabinet du Vicomte, à glisser plume sur parchemins afin de sceller la froide évidence par quelques missives.

Maxime m’a abandonné.

De la plus cruelle des manières, en dressant un fossé infranchissable entre lui et moi.
La mort.
Maîtresse exclusive et si hautaine, qu’elle se refuse à mon appel.

Je suis orpheline du chagrin de veuve, auquel je ne peux même pas prétendre, n’étant pas son épouse. Que suis-je ? Rien, un tout petit grain de rien.

Je me refuge derrières de pâles souvenirs, je crois encore à tout instant qu’il va revenir, que sa voix va résonner entre ses murs. Pourtant j’ai bien vu son corps, et au fond de mon être, je sais qu’il s’est éteint et ça me bouffe de chagrin.
J’en suis navrante de pathétisme,

Un dernier hommage lui sera rendu, je te communiquerai le lieu et la date ultérieurement. Et par la suite, je partirai, en Touraine fort probablement après avoir régler quelques affaires attenantes au Poitou.

Affectueusement,

Ta petite blondeur

P.S. Suis-je sotte à ce point. T’es-tu remise de tes blessures ? Je m’excuse de cet odieux oubli.




Les vélins se succédaient dans une danse interminable et macabre. Le verre quant à lui se vidait peu à peu, lui fournissant un réconfort suffisant pour lui permettre d’être inlassable à la tâche. Sa toux, par bribes, venait troubler sa fausse quiétude et heurtait les parois du lieu avec des accents rauques qui ne présageaient guère d’amélioration.

Une missive furtive pour Montluçon à l’intonation un peu rageuse fut vite pliée et mise de côté. Puis vint en cortège, des plis courts, qui pour sa filleule, qui pour son parrain, qui pour Jades et Alandrisse, qui pour Kali.

Fildaïs prit un moment de répit, où elle colla son dos devenu douloureux contre l’immense dossier aux allures épiscopales de la chaise. Une grande inspiration fut prise, dans un dernier élan sans courage, la blonde prit pour la énième fois un parchemin vierge.
La boucle allait être bouclée avec cette ultime lettre.
Avec une lassitude stagnante, la pointe de la plume se posa en douceur et commença les piteuses arabesques de son écriture.



Citation:
De moi, Fildaïs de Compostelle, ton ancienne sœur d’armes

A toi, Nennya Blackney, mon amie malgré le temps qui passe


Tu excuseras certainement cette lettre si peu protocolaire, mais il me fut impossible de remettre des noms à tous tes titres, j’ai paré donc au plus simple.

Cette missive aurait dû être tout autre, elle aurait dû être annonce de joie, d’union et de bons festins. En lieu de cela, je dois me montrer raisonnable de larmes en t’écrivant. Me montrer digne, à toi peux être plus qu’à nul autre.

Je me rappelle d’un jour de février, où tu m’avais présentée ce qu’il me semblait être le plus odieux, enjôleurs, charmeurs à deux écus et suffisants des hommes. Le Mackx. Je ne savais pas à l’époque qu’il serait aujourd’hui l’instigateur de ce chagrin. Ma main tremble en y repensant, les mots soudain me font défauts.

Maxime est tombé sous les lames angevines. Il n’est plus…

Reste les douces réminiscences qui siègent dans mon cœur et me rendent fragiles comme jamais je ne l’avais été. C’était pour moi le plus exceptionnel des hommes qui m’a été donné de rencontrer.

Une cérémonie sera donnée pour un dernier hommage, j’espère t'y voir et que dans ton cœur tu puisses trouver la force de me pardonner le gouffre du temps que j’ai laissé instaurer entre nous. Je te donnerai lieu et date dès que j’aurai trouvé un représentant de Dieu disponible et le temps estivale se prêtant à la réflexion spirituelle, beaucoup sont hélas absent et les autres bien trop occupés.

Ma pensée t’accompagne et qu’Aristote prenne soin des tiens et de toi.

Affectueusement

Fil.




Un large soupire s’échappa de sa gorge constamment raclée par la toux à présent. Les quintes se suivaient, épuisantes. Fildaïs prit la dernière gorgée de son verre et s’affala dans le siège.
Ramassis informe de calcédoine qui respirait bruyamment et de manière saccadée.

Elle tourna son visage vers la fenêtre lavée par la pluie et conversa longuement avec le ploc-ploquement languide de l’eau jusqu’à ce que Pherea, inquiète vienne la chercher.

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Muette et cintrée !
Pherea
Des heures, des jours passés au chevet de la blonde, à tenter de la sortir de sa morbide antalgie, à lui vanter la splendeur du levé du soleil, du chant des oiseaux, de la bêtise humaine par quelques ragots du village voisin… Rien n’y fit. Pas un mot. Encore moins un sourire. Que de vagues regards embués. Et des larmes, et cette toux.

Peu de visites, et le temps qui pleurait à son tour.

Pherea ne savait plus quoi faire pour son amie. Sa présence semblait pesante à la blonde qui aurait certainement préféré se tailler les veines discrètement. Mais la brune veillait. Et quand les pleurs et les quintes se faisaient trop silencieux, la Blanche venait s’assurer que seul le sommeil en était responsable. Non elle ne laisserait pas son amie rejoindre son aimé.

Mais Fil, aussi muette soit elle, semblait de plus en plus consciente de la tâche qui lui incombait et s’affairait désormais à écrire des pages et des pages : des lettres, des requêtes et que sais-je encore. Enfermée dans le bureau du vicomte, des heures durant, elle couchait sur les vélins ses pleurs et la mauvaise nouvelle. Si le choc lui avait volé sa voix, il n’avait pas eu raison de toute sa conscience.

En ce début d’après-midi, c’est entre deux averses qu’un messager vint se présenter à l’entrée du domaine. Mais cette fois-ci, il ne venait porter des condoléances à la veuve mais un document scellé du scel des Blanches. La guerre. Voilà ce qu’il annonçait, et avec elle le départ de la noiraude. Elle fit ses bagages en grande hâte puis alla trouver Fil dans le cabinet du défunt :

Ma Fil… Ma Fil… répéta-t-elle pour attirer son attention.
Il me faut… elle se mordit la lèvre. Ne pas l’affoler, ne pas l’inquiéter. Il me faut partir quelques temps. Silence.
Oh mais je ne serai pas loin ! A quelques jours à cheval tout au plus… Elle s’avançait vers le bureau et lui prit la main dans les siennes. Des affaires… inquié…importantes… Mais si tu ne veux pas, dis le moi et je resterai à tes côtés.
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Tutia...
[Verneuil]

Voilà plus d'un mois que Tutia était coincée à Verneuil pour cause d'attaque de l'armée Orléannaise. A part cueillir des fruits elle ne faisait pas grand chose. La grange à quatrain était son seul divertissement.

En ce jour, au contraire, elle était toute en joie, plus qu'un jour et elle serait enfin remise et pourrait repartir vers d'autres horizons, vers la Champagne, mais il fallait encore passer par les terres Orléannaises. Elle s'était levée aux aurores afin de préparer ce voyage. Que devait elle trouver en premier ?... un cheval !! Pour cela la brunette ne cherchait pas bien loin. Les tavernes !!! car il y avait toujours quelques nobles, soûl comme des barriques avec leur cheval qui piaffait d'impatience à leur côté.

D'ailleurs elle en trouva un pas très loin, son maître ronflait comme un sonneur de cloche, de la bave s'échappant de ses lèvres. Tutia s'approcha, non sans faire une grimace. Flattant l'encolure du cheval elle lui chuchota à l'oreille pour le calmer et le pousser à la suivre. Se saisissant de la bride, le cheval l'a suivit sans aucun problème, vu le maître qu'il avait il serait bien mieux avec elle. Certes c'était mal de voler mais, après tout, elle ne le volait pas, elle l'empruntait... Aristote lui pardonnerait.

Arrivée devant la petite ferme qui lui servait d'abri pour la nuit, elle aperçu un coursier. Attachant les rênes du cheval à un anneau en fer, elle alla saluer le donneur de missive. Lui mettant une petite pièce dans la main, elle le remercia, puis après avoir nourri son cheval, ouvrit cette missive. Elle était de sa chère marraine, Tutia sourit, car voilà bien longtemps que Fil ne lui avait donné de nouvelles.

Cependant son sourire fut de courte durée, et la pâleur la gagna. Sa chère marraine lui apprenait une terrible nouvelle.

Vite la brunette s'assied à la petite table qui lui servait de bureau, s'empara d'une plume et d'un encrier. Puis se mit à écrire fébrilement.


Citation:
De moi Tutia, ta filleule

A toi, ma chère marraine.


C'est avec horreur que j'ai lu ta missive, sache que je suis de tout cœur avec toi, et espère, malgré la distance, te transmettre un peu de ma force.

Je ne connaissais pas vraiment Mackx, mais je savais que c'était un homme bon et loyal. Hélas je suis coincée à Verneuil, mais dès que je pourrais, j'irai te retrouver, j'espère être là pour la cérémonie en l'honneur de celui qui restera dans nos cœurs.

Je préférerais être à tes côtés pour te soutenir comme toi tu l'étais lorsque j'allais mal. Si tu as besoin de quoique ce soit qui m'est possible de faire, n'hésite pas. Je n'ose imaginer en quel état sont ton cœur et ton âme, mais courage, qu'Aristote t'aide dans ton chagrin et soulage ta peine.


Affectueusement.

Tutia, ta filleule.



Ayant fini d'écrire, Tutia marqua un temps d'arrêt. Puis se souvenant du coursier, elle avait peut être une chance de le rattraper. Elle cacheta sa missive, sauta sur son cheval et le lança au galop. Elle eut tôt fait de rejoindre le transmetteur de missive ; sautant à bas de son cheval, elle lui transmis son message en précisant que c'était urgent.

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Nennya
[Dans un bureau à Paris]

L'écritoire ne cessait de la harceler de ces parchemins, remplis pour la plupart de tâches, d'abréviations, ou d'inepties plus grosses que ceux qui l'avaient écrits, de son encre noire, elle raya l'intégralité du paragraphe avec pour seul commentaire en marge "A revoir". La correction de certaines copies la rendait chèvre, pouvait-on estre aussi de nobles ascendance et énoncer des idioties de telle ampleur? C'était un sujet à méditer pour la rectrice. On frappa à la porte, le bruit la tira de son marasme, sans attendre, elle se leva, ce moment de liberté, même furtif, restait rare dans la journée chargée de la Duchesse. Niconoss entra, le baron, le jardinier du dimanche, un sourire éclaircit son visage, le moment de liberté avait belle allure, mais il avait aussi des plis en main, et déjà les yeux de Nennya s'assombrirent un peu plus. Avec délicatesse, son assistant au Collège, lui déposa les plis, et repartit.
La liberté était terminée, et la porte se referma comme une sentence. Elle commença à décacheter quelques unes, des devoirs, des excuses, un quotidien qui l'ennuyait. Elle se saisit d'une, le sceau ne lui disait rien, elle ouvrit. Ses prunelles reflétaient ce qu'elle pouvait lire, la noirceur de ce qu'elle pouvait ressentir, de la tristesse, elle passait à la colère, au déchirement. Des éclats se firent entendre, l'encrier déversa son contenu sur sa main, du sang et de l'encre, elle avait fait éclater sous ses doigts l'objet de verre. L'encre noire roulait à présent le long de son bras, des gouttes venaient souiller le sol et l'esprit de Nennya restait confus emplit de tristesse. Il y avait quelques temps, sa plume avait eu plus de courage qu'elle, et l'amena à écrire à sa meilleure amie Justine. Point de réponses, Justine avait sombré dans le silence, et elles resteraient sans doute que de vagues connaissances. Depuis, elle estait devenue sauvage, noire, peu de personne trouvait grâce à son pardon. Elle eut spontanément la folie de jeter contre sa porte le verre qui lui restait en main et qui la faisait saigner.
Refermant celle-ci à clé pour étouffer sa rage, la Duchesse enroula sa main avec un foulard, un maigre pansement pour sa plaie. Elle ne savait que répondre à cette missive, cela faisait si longtemps, lui...le vicomte à la bouteille fournie, celui qui l'avait faict rire, celui qui était des plus humble, celui qui avait offert à son mariage, un couple de chat grandeur nature, sculptée dans le bois. Il n'était plus de ce monde, les souvenirs restaient vivaces dans son esprit. La main tremblante, elle chercha un nouvel encrier, pour écrire à Fildais. Instigatrice de leur rencontre, elle avait souhaité une femme DE caractère pour lui, la Duchesse avait arrêté de chercher des personnes adéquates pour les autres, encore fallait-il qu'elle arrive elle même à s'entourer de personnes de confiance.

Citation:

A Fildais de Compostelle, âme éplorée, à toi, je te salue.

Le temps passe, les souvenirs restent. Je n'oublie pas avoir partagé des larmes et des confidences avec toi, c'est avec grande tristesse que je couche ces mots sur parchemin. Que puis-je faire de plus pour te rassurer, te soulager? Seul ton courage, et l'amour de tes proches aideront à ta survie. Mes pensées se tournent vers toi, et vers la famille de Mackx, un frère, un ami qui m'a appris à sourire, et à rire dans les situations que je jugeais désespérée. Je garde de lui, sa jovialité, son enthousiasme, et sa dévotion envers ses amis. Les phrases que je peux écrire ne te feront pas oublier ta peine, sache que je serais présente à la cérémonie qui honorera sa mémoire. A tout instant, je prierais pour toi et lui, garde espoir.

Avec mon amitié

Rédigée à Paris le trentième jour du moy d'aout 1458

Par Nennya Blackney Desbois




Elle reçut en conclusion un coup de son enfant, et l'assurance que ce courrier partirait dans les plus brefs délais.
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