_hans_
Il arriva enfin en ville. Le matin naissant éclairait à peine les murs de la cité. Loches, pourquoi cette ville plus qu'une autre, il n'en avait aucune idée. Il était arrivé ici sans but précis, vraisemblablement plus pour fuir un passé pesant que pour chercher l'aventure.
Il fallait avouer que la vie ne l'avait pas gâté ces quatre dernières années. La perte de sa femme et de son fils et encore là, celle qu'il l'aimait s'était éteinte elle aussi quelques jours auparavant. C'était à se demander si le tout puissant ne l'avait pas dans le nez cette fois pour s'acharner de cette manière sur lui. Pourtant il n'avait pas eu le sentiment dans sa vie d'avoir fait le mal autour de lui, mais voilà, certains naissent sous une bonne étoile et d'autres ont une vie qui tend à ressembler à un enfer. Et c'est bien ce qu'il vivait en ce moment, un enfer. Et pour couronner le tout, la cerise sur le gâteau, il s'était fait brigander à une lieue de Saumur où ils lui avaient laissé une face ouverte en deux comme une orange. Tout allait donc pour le mieux dans le meilleur des mondes. Il ne cessait de penser à ce qui allait lui tomber sur le coin de la gueule à présent. Si, que les enfants lui jettent des cailloux ou que les chiens le mordent une fois en ville, il n'y avait pas loin. Faut dire qu'il inspirait pas la sympathie, avec une plaie qui partait du front jusqu'à sa joue gauche, résultat de l'attaque des malfaisants dont il avait été victime, il faisait peur à voir. En haillons, sans un rond en poche, un tissu enroulé autour du visage pour panser sa blessure et en plus il sentait la vieille bête morte. Sûr que les gens changeraient de trottoir pour ne pas avoir à le croiser. Et cette chaleur qui l'écrasait, ses bottes étaient en plomb tellement le soleil cognait. Oui, étrangement ils lui avaient laissé ses bottes, bon certes pas neuves mais.....bon évidemment on hésiterait à y mettre ses pieds dedans c'est peut-être pour ça.
Il ne rêvait que de se taper une bonne bière.....puis pourquoi une seule. Finir la tête à l'envers serait peut-être une idée pas si mauvaise que ça. Mais sans l'sous c'est pas évident de se faire servir en taverne sans prendre un bon coup de pied au cul.
C'est donc naturellement qu'il posa ses fesses sur les marches de l'église de la ville histoire de glaner quelque argent qu'il boirait. La bouche pâteuse, l'écume blanche à la commissure des lèvres, l'haleine de.....ben comme pour le reste de bête morte, il en rêvait de cette divine boisson, bien fraiche, légèrement amer, juste ce qu'il fallait pour éveiller les sens et redonner gout à .......à rien, mais au moins il n'aurait plus soif. Il s'y installa dès le petit matin, les quelques grenouilles de bénitier qui franchiraient la porte de l'église auraient peut-être pitié de la "bête" blessée.
A vot' bon coeur m'sieurs dames.... Z'auriez pas deux ou trois tites pièces pour un pauvre bougre?????
Il avait honte de faire ceci. Incapable de regarder les gens dans les yeux. Peur qu'on l'observe avec mépris ou pire encore, peur qu'on le prenne en pitié. Mais il n'avait pas vraiment le choix de la profession à exercer en ce moment. Et tout ça en évitant les gardes de la cité qui ne manqueraient certainement pas de, au mieux, le foutre dehors de la ville, au pire, au zonzon. Il ramassait bien vite les écus qui lui étaient jetés au sol au fur et à mesure des manifestations de générosité des croyants. Mais c'est qu'à la fin de la journée il se retrouvait avec un bon paquet d'écus en poche. Bon certes pas de quoi se faire le gueuleton du siècle, mais au moins de quoi se taper quelques roteuses. Il en avait un peu marre de boire l'eau saumâtre de la fontaine toute proche, si ça lui fout pas les intestins en débâcle il aura de la chance.
Il les voyait courir sur la table, les chopes, les unes à la suite des autres............bénit soit l'inventeur de ce breuvage. Il poussa la porte de la première taverne qu'il vit. Pas la plus classe. Entre catins, brigands, alcooliques, loqueteux et tout ce qui pouvait bien constituer la lie de la société il passerait inaperçu. Dans son coin, il se fit servir une puis deux puis tout ce qu'il pouvait payer avec ce qu'il avait récolté en aumône. C'est qu'il en aurait bu plus, mais il n'avait plus de quoi payer. Se levant, soupirant, pestant après le tavernier qui ne voulait plus le servir, fulminant après Dieu et toute sa clique de saints, il finit sa soirée dehors, balancé dans la rue par les clients, comme il l'avait vu faire tellement de fois quand il était quelqu'un d'autre. Restant ici sans plus bouger, attendant qu'on lui donne le coup de grâce. Mais rien ne vint. Il finit par se relever. Titubant, il se dirigea à l'église pour exprimer tout son amour pour le très-haut. Il entra et regarda droit devant lui le chur de la bâtisse.
'tain, espèce de s'laud. Tu m'auras tout enlevé hein cette fois.
Tu m'auras rien épargné. Ben sache bien que j'en ai plus rien à foutre de tout ça. C'est moi qui déciderais quand ce sera le moment d'en finir.....et c'est le moment...Tiens, un dernier p'tit cadeau pour tes ouailles. C'est tout ce que je peux offrir, tu m'as tout pris.
Il s'approcha du bénitier, ouvrit ses braies et s'y soulagea allègrement tout en pensant à la vision d'horreur que tous auraient le lendemain matin. Avant que de se faire prendre par un curé un peu trop zélé et courageux, il fila sans demander son reste. Il était peut-être l'heure de quitter cette ville à présent, ou de trouver un coin pour dormir définitivement.
Il aperçu une rivière toute proche. Enfin gonf' comme il l'était, il apercevait plus grand chose là. Mais il lui semblait que le clapotis pourrait bien être celui d'un court d'eau, ou d'une fontaine....sinon c'est un gars qui pisse. Il descendit vers le bruit de l'eau, avec pour simple éclairage une demi-lune.
Il s'agit bien d'une rivière. Il la longea, son cerveau était dans une brume épaisse, un vrai "fog" Anglois. Et ce voile qui se formait doucement devant ses yeux, transformant les arbres en divines créatures ondulantes. La bière devait être plus forte qu'il n'y paraissait. Toujours est-il qu'il n'avait pas vu la belle branche au sol en travers du chemin.....
Ahhhh !!!!!! 'tain de bordel !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
Une tentative de rattrapage.....un pas de deux, suivit d'une valse à trois temps et.... Ploufffffffffff !!!!!!! le gars à l'eau. Et allez nager avec un bide plein de mousse vous. Ben c'est pas possible. Un vrai poisson.......pierre, enfin, plus pierre que poisson quand même. Il coule, remonte, recoule...pour ne plus remonter. Tiens.....encore des bulles partout autour de lui...Il était poursuivi par les bulles lui en ce moment. Mais tout devenait paisible, le bourdonnement de ses oreilles se faisait de moins en moins douloureux, il n'entendit plus que battement de son coeur, qui se faisait de plus en plus inaudibles....pour ne plus rien entendre.....il ferma les yeux et se laissa aller. La mort n'est peut-être pas aussi pénible que ça tous comptes faits.
Une vieille branche sèche emportée par le courant.............
Il fallait avouer que la vie ne l'avait pas gâté ces quatre dernières années. La perte de sa femme et de son fils et encore là, celle qu'il l'aimait s'était éteinte elle aussi quelques jours auparavant. C'était à se demander si le tout puissant ne l'avait pas dans le nez cette fois pour s'acharner de cette manière sur lui. Pourtant il n'avait pas eu le sentiment dans sa vie d'avoir fait le mal autour de lui, mais voilà, certains naissent sous une bonne étoile et d'autres ont une vie qui tend à ressembler à un enfer. Et c'est bien ce qu'il vivait en ce moment, un enfer. Et pour couronner le tout, la cerise sur le gâteau, il s'était fait brigander à une lieue de Saumur où ils lui avaient laissé une face ouverte en deux comme une orange. Tout allait donc pour le mieux dans le meilleur des mondes. Il ne cessait de penser à ce qui allait lui tomber sur le coin de la gueule à présent. Si, que les enfants lui jettent des cailloux ou que les chiens le mordent une fois en ville, il n'y avait pas loin. Faut dire qu'il inspirait pas la sympathie, avec une plaie qui partait du front jusqu'à sa joue gauche, résultat de l'attaque des malfaisants dont il avait été victime, il faisait peur à voir. En haillons, sans un rond en poche, un tissu enroulé autour du visage pour panser sa blessure et en plus il sentait la vieille bête morte. Sûr que les gens changeraient de trottoir pour ne pas avoir à le croiser. Et cette chaleur qui l'écrasait, ses bottes étaient en plomb tellement le soleil cognait. Oui, étrangement ils lui avaient laissé ses bottes, bon certes pas neuves mais.....bon évidemment on hésiterait à y mettre ses pieds dedans c'est peut-être pour ça.
Il ne rêvait que de se taper une bonne bière.....puis pourquoi une seule. Finir la tête à l'envers serait peut-être une idée pas si mauvaise que ça. Mais sans l'sous c'est pas évident de se faire servir en taverne sans prendre un bon coup de pied au cul.
C'est donc naturellement qu'il posa ses fesses sur les marches de l'église de la ville histoire de glaner quelque argent qu'il boirait. La bouche pâteuse, l'écume blanche à la commissure des lèvres, l'haleine de.....ben comme pour le reste de bête morte, il en rêvait de cette divine boisson, bien fraiche, légèrement amer, juste ce qu'il fallait pour éveiller les sens et redonner gout à .......à rien, mais au moins il n'aurait plus soif. Il s'y installa dès le petit matin, les quelques grenouilles de bénitier qui franchiraient la porte de l'église auraient peut-être pitié de la "bête" blessée.
A vot' bon coeur m'sieurs dames.... Z'auriez pas deux ou trois tites pièces pour un pauvre bougre?????
Il avait honte de faire ceci. Incapable de regarder les gens dans les yeux. Peur qu'on l'observe avec mépris ou pire encore, peur qu'on le prenne en pitié. Mais il n'avait pas vraiment le choix de la profession à exercer en ce moment. Et tout ça en évitant les gardes de la cité qui ne manqueraient certainement pas de, au mieux, le foutre dehors de la ville, au pire, au zonzon. Il ramassait bien vite les écus qui lui étaient jetés au sol au fur et à mesure des manifestations de générosité des croyants. Mais c'est qu'à la fin de la journée il se retrouvait avec un bon paquet d'écus en poche. Bon certes pas de quoi se faire le gueuleton du siècle, mais au moins de quoi se taper quelques roteuses. Il en avait un peu marre de boire l'eau saumâtre de la fontaine toute proche, si ça lui fout pas les intestins en débâcle il aura de la chance.
Il les voyait courir sur la table, les chopes, les unes à la suite des autres............bénit soit l'inventeur de ce breuvage. Il poussa la porte de la première taverne qu'il vit. Pas la plus classe. Entre catins, brigands, alcooliques, loqueteux et tout ce qui pouvait bien constituer la lie de la société il passerait inaperçu. Dans son coin, il se fit servir une puis deux puis tout ce qu'il pouvait payer avec ce qu'il avait récolté en aumône. C'est qu'il en aurait bu plus, mais il n'avait plus de quoi payer. Se levant, soupirant, pestant après le tavernier qui ne voulait plus le servir, fulminant après Dieu et toute sa clique de saints, il finit sa soirée dehors, balancé dans la rue par les clients, comme il l'avait vu faire tellement de fois quand il était quelqu'un d'autre. Restant ici sans plus bouger, attendant qu'on lui donne le coup de grâce. Mais rien ne vint. Il finit par se relever. Titubant, il se dirigea à l'église pour exprimer tout son amour pour le très-haut. Il entra et regarda droit devant lui le chur de la bâtisse.
'tain, espèce de s'laud. Tu m'auras tout enlevé hein cette fois.
Tu m'auras rien épargné. Ben sache bien que j'en ai plus rien à foutre de tout ça. C'est moi qui déciderais quand ce sera le moment d'en finir.....et c'est le moment...Tiens, un dernier p'tit cadeau pour tes ouailles. C'est tout ce que je peux offrir, tu m'as tout pris.
Il s'approcha du bénitier, ouvrit ses braies et s'y soulagea allègrement tout en pensant à la vision d'horreur que tous auraient le lendemain matin. Avant que de se faire prendre par un curé un peu trop zélé et courageux, il fila sans demander son reste. Il était peut-être l'heure de quitter cette ville à présent, ou de trouver un coin pour dormir définitivement.
Il aperçu une rivière toute proche. Enfin gonf' comme il l'était, il apercevait plus grand chose là. Mais il lui semblait que le clapotis pourrait bien être celui d'un court d'eau, ou d'une fontaine....sinon c'est un gars qui pisse. Il descendit vers le bruit de l'eau, avec pour simple éclairage une demi-lune.
Il s'agit bien d'une rivière. Il la longea, son cerveau était dans une brume épaisse, un vrai "fog" Anglois. Et ce voile qui se formait doucement devant ses yeux, transformant les arbres en divines créatures ondulantes. La bière devait être plus forte qu'il n'y paraissait. Toujours est-il qu'il n'avait pas vu la belle branche au sol en travers du chemin.....
Ahhhh !!!!!! 'tain de bordel !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
Une tentative de rattrapage.....un pas de deux, suivit d'une valse à trois temps et.... Ploufffffffffff !!!!!!! le gars à l'eau. Et allez nager avec un bide plein de mousse vous. Ben c'est pas possible. Un vrai poisson.......pierre, enfin, plus pierre que poisson quand même. Il coule, remonte, recoule...pour ne plus remonter. Tiens.....encore des bulles partout autour de lui...Il était poursuivi par les bulles lui en ce moment. Mais tout devenait paisible, le bourdonnement de ses oreilles se faisait de moins en moins douloureux, il n'entendit plus que battement de son coeur, qui se faisait de plus en plus inaudibles....pour ne plus rien entendre.....il ferma les yeux et se laissa aller. La mort n'est peut-être pas aussi pénible que ça tous comptes faits.
Une vieille branche sèche emportée par le courant.............