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[RP] Le retour de l'Apocryphe : la plume défie l'épée

--Jean_aymar_du_bellatre


Il le fallait. Malgré sa répugnance, et parce qu'il n'était pas sourd aux gémissements du peuple, l'ermite de la poésie sortit de sa grotte, traversa les champs semés de cadavres, évitant soigneusement des lambeaux d'armées, et s'en vint afficher ses vers sarcastiques sous les murs de ceux qui se croyaient des puissants intouchables — ou pire, qui, se sachant perdus, machinaient d'entraîner avec eux tout l'Anjou.

Une œuvre de plus, qui écrivait l'Histoire, et que plus tard on relirait avec incrédulité, témoignage de la folie des grands, capables de faire d'une terre bénie des dieux une région maudite des hommes.


Ces grands Manceaux pierreux, ces vieux durs que tu vois

Furent premièrement les gens d'un lieu champêtre :

Et ces graves Comtois, qui semblent te connaître,

En paisibles pasteurs ont vécu quelquefois.



Lors prirent les bandits les ornements des rois,

Et le fol Aurelien de fer arma sa dextre :

Puis le ducal pouvoir le plus grand se vit être,

Et fut encor plus grand le pouvoir de deux mois :



Qui, par présomption, se crut en la puissance

Que l'aigle impérial de lui prit sa naissance :

Mais le Ciel, s'opposant à tel accroissement,



Mit ce pouvoir ès mains d'un Aurelien tout autre,

Qui, désignant son double au courroux des apôtres,

Montre que tout retourne à son commencement.


Jean-Aymar du Bellâtre, juillet 1458
Scènes de la douceur angevine, Opus VIII
--Jean_aymar_du_bellatre


En ce temps-là je vous le dis, les poètes sortaient des forêts, les mots sortaient des arbres, au matin on les retrouvait écrits sur les murs, et les muets (car la peur trop souvent rend muet) en devenaient moins sourds. C'était déjà ça, jubilait le Vengeur.


Celui qui de son chef les étoiles passait,

Et d'un pied sur Le Mans, l'autre foulant Toulouse,

D'une main sur l'écu, et l'autre sous les blouses,

Détroussait, déchirait les traités, menaçait :

Aristote ayant peur, si plus elle croissait,

Que sa tête gonflée ne crevât comme une outre,
Lui vissa sur le front sa couronne et en outre

Y rajouta le poids des soldats trépassés.

Il lui fit un collier de ses pensées bancales,

L'enchaînant vaniteux à sa cage impériale,

Aux deux pieds, pour boulets, bêtise et et courtisans,



Les poignets entravés par violence et scandales,

L'esprit tout empêtré de religion locale,

Et, pour pire poison, l'amour des complaisants.


Et de signer, car son nom n'en finirait pas de faire des vagues :

Jean-Aymar du Bellâtre, juillet 1458
Scènes de la douceur angevine, Opus IX

Bientôt, réédition des sept premiers sonnets, tremblez, Grands de la Terre !
Edern
Oui ! la poésie sonnait...
Défi relevé, poète masqué.
Vers écrits à la craie...

Si à l'acier ducal, fers royaux ne s'arriment,
Si de vivre royaume ne trouve plus raison,
Si conteurs, musiciens, en tirent des chansons,
Alors, que s'escriment ceux qui à rien ne riment.

Ils voient les basses fosses, puisque aveugles aux cimes,
Ils entendent la mort, puisque sourds aux passions,
Ils font taire la vie, pleins de fausses émotions,
En tout point ils se trompent, car l'envie les anime.

Là-dessus, pour deux sous, ils déposent une gerbe
Sur le tombeau rêvé du barbu, de l'imberbe
Las ! Bien vivants ils bravent encor leur destinée,

Jouent contre le trône de la lame et du verbe,
Ôtent aux prêtres indulgents leur romaine superbe,
Criant à ce monde toute sa vérité.


Et de ne pas signer, car les vagues des noms ne sont rien face à l'océan des mots. Alors que le vent tombe et que le calme s'installe pour mieux laisser passer l'orage à venir, le Fou s'y plongera deux semaines corps et âme. Sortir de la quiétude du monde...
En attendant la rentrée et ses feux.
Qu'ils soient d'artifice...
--Jean_aymar_du_bellatre


Tiens tiens, un collègue, pensa en sourdine le solitaire masqué. Voilà qui est encourageant, la plume finira peut-être par gagner du terrain sur l'épée, en nos pauvres terres ravagées par des générations d'ambitieux en armure… Nous allons pouvoir faire assaut d'une émulation de plus saine nature.

Sur ces entrefaites, il apprit tout à fait incidemment (car les hautes sphères veillaient à étouffer toute information susceptible d'éclairer les masses) que le duc brigand avait déserté sa charge, abandonnant le conseil aux pires difficultés, avec peu d'amis, beaucoup d'ennemis criant vengeance, une croisade aux portes du duché… Panique dans le poulailler, qui lui inspira son nouveau sonnet :

Tant que l'oiseau de Jupiter vola, 

Cocoriquant à tous vents ses menaces,

Toute sa Cour faisait assaut d'audace

Bravant Le Mans et Tours et au-delà :



Mais aussitôt que l'outre désenfla

On s'aperçut que la terre était basse,

L'ennemi rude et les périls en masse,

Le trésor vide et le moral à plat.



Alors on vit les buses et les hyènes

Se déchirer en luttes incertaines,

Désorientées par le moindre grief,



Ou fuir piteusement comme l'autruche,

Cherchant en vain la présence d'un chef :

Car c'est ainsi, quand crève la baudruche.


Jean-Aymar du Bellâtre, août 1458
Scènes de la douceur angevine, Opus X

Allez, il n'y a plus qu'à filer de taverne en taverne le distribuer sous le manteau !
Edern
De douze à dix pieds... du sonnet à la fable.
Un pot d'écarlate est débouché.
Il est sombre...

~ Le loup blessé et le berger meurtrier ~

Un berger gardait tranquillement ses moutons
Les pâtures étaient joyeuses, le commerce bon ;
Si de la montagne un loup descendait parfois,
Ce n'était que pour contenter son estomac.
Malheur ! Car notre homme n'est que témérité
Pourquoi, dit-il un soir, ne pas tuer pour la paix ?
Contre l'avis de ses frères, seul il part chasser.
Or, un loup endormi reçoit un de ses traits ;
Hurlant à la lune sa douleur, sa colère,
Il convoque alors la meute de ses confrères.
Se liguant d'une même rage fraternelle,
Les loups fondent ensemble sur la plaine rebelle,
Des bergers ne font qu'une bouchée,
S'abreuvent d'une ovine saignée ;
À l'aube, repus enfin, ils s'endorment,
La gueule rouge et le ventre énorme.
Par le fait d'un pasteur, mourut une cohorte ;
Leurs enfants ne répèteront pas cette offense.
La leçon retenue, ils mettront à leur porte :
L'attaque n'est pas la meilleure des défenses.


À l'écriture de ces lignes, le Fou n'a pu se départir de cette image de crocs ensanglantés...
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