Sigismonde
Depuis Dole, les voitures frappées aux armes de Morteau allaient bon train malgré les cahots et les trous de la chaussée. Dijon, Autun, Nevers, Bourges, Loches... Les vastes plaines verdoyantes du royaume de France offraient un contraste singulier avec le relief chaotique du Saint Empire. Les champs succédaient aux forêts, les forêts aux villages, les villages aux prairies. Le paysage monotone semblait propice au repos de la comtesse; le Maréchal d'Armes Impérial travaillait en fronçant les sourcils sur une liasse de parchemins fournis par ses hérauts, la plume alerte afin de raturer leurs erreurs. Leur fille Marie-Madeleine, quant à elle, alternait les siestes et les bêtises de son âge, la dernière en date était d'avoir donné le parchemin du compte-rendu de la mairie de Dole au chien sous prétexte qu'il était affamé. Une semaine de voyage enfermés dans un carrosse de l'aube à la nuit avaient mis les nerfs de la petite fille insouciante et de ses parents à rude épreuve, et tous étaient pressés de rejoindre le château du Lavardin.
La comtesse s'éveilla soudain aux cris enthousiastes de sa fille dont le visage était collé à la vitre. Elle frissonna et rajusta la peau d'ours qui l'emmitouflait, puis d'une main ferme ramena son enfant près d'elle en lui jetant un regard réprobateur. La voiture ralentit peu à peu, puis les lourds chevaux Comtois stoppèrent tandis que la clameur de la cohue se faisait entendre au-dehors. Le comte leva enfin les yeux de son travail pour rencontrer ceux de sa femme. Il eut un hochement de tête et un demi sourire. Elle lui répondit par un soupir de soulagement. Ni l'un ni l'autre n'avaient besoin de paroles pour échanger leur sentiment: enfin arrivés.
Les voitures s'ébranlèrent à nouveau, les coursiers fatigués louvoyant entre les tentes déjà installées jusqu'à un terrain propice indiqué par un garde à l'entrée du domaine. Puis l'arrêt fut définitif et ils entendirent les cris de leur valetaille montant le camp avec grande célérité. La porte de leur carrosse s'ouvrit, le marchepied fut déplié puis ils furent invités à rejoindre leur villégiature éphémère. En à peine deux heures une grande tente bleue et blanche aux couleurs de Morteau avait été dressée à leur intention. Lorsqu'elle sortit de la voiture, la comtesse remarqua l'odeur caractéristique de la saucisse de Morteau que le cuisinier préparait afin de sustenter ses seigneurs tandis que le sommelier sortait les caisses de bouteilles de vin jaune de la dernière voiture. Elle ordonna à une servante de débarbouiller sa fille pour le repas puis, accompagnée de son mari, ils s'engouffrèrent dans la tente afin de superviser les derniers moments de leur installation.
La comtesse s'éveilla soudain aux cris enthousiastes de sa fille dont le visage était collé à la vitre. Elle frissonna et rajusta la peau d'ours qui l'emmitouflait, puis d'une main ferme ramena son enfant près d'elle en lui jetant un regard réprobateur. La voiture ralentit peu à peu, puis les lourds chevaux Comtois stoppèrent tandis que la clameur de la cohue se faisait entendre au-dehors. Le comte leva enfin les yeux de son travail pour rencontrer ceux de sa femme. Il eut un hochement de tête et un demi sourire. Elle lui répondit par un soupir de soulagement. Ni l'un ni l'autre n'avaient besoin de paroles pour échanger leur sentiment: enfin arrivés.
Les voitures s'ébranlèrent à nouveau, les coursiers fatigués louvoyant entre les tentes déjà installées jusqu'à un terrain propice indiqué par un garde à l'entrée du domaine. Puis l'arrêt fut définitif et ils entendirent les cris de leur valetaille montant le camp avec grande célérité. La porte de leur carrosse s'ouvrit, le marchepied fut déplié puis ils furent invités à rejoindre leur villégiature éphémère. En à peine deux heures une grande tente bleue et blanche aux couleurs de Morteau avait été dressée à leur intention. Lorsqu'elle sortit de la voiture, la comtesse remarqua l'odeur caractéristique de la saucisse de Morteau que le cuisinier préparait afin de sustenter ses seigneurs tandis que le sommelier sortait les caisses de bouteilles de vin jaune de la dernière voiture. Elle ordonna à une servante de débarbouiller sa fille pour le repas puis, accompagnée de son mari, ils s'engouffrèrent dans la tente afin de superviser les derniers moments de leur installation.