Terwagne_mericourt
(HRP : Pour info, autorisation m'a été donnée par LJD Kernos de faire agir sa marionnette.)
Entre Dié et Lyon, à quelques jours des élections ducales :
Assise dans le coche qui les conduisait tous deux vers les locaux des Gones, la Dame de Thauvenay se mordillait la lèvre en silence, n'échangeant pas le moindre mot avec celui qui se trouvait à ses côtés. Entre eux, il n'y avait pas toujours besoin de paroles de toute façon, ils se comprenaient au-delà de cela.
Elle ne se faisait aucune illusion sur le fait que Kernos avait bien remarqué que depuis de nombreuses minutes elle s'infligeait ces légères morsures qu'il connaissait à force de l'avoir vue faire en d'autres lieux et d'autres moments, ces signes indiquant qu'elle se torturait intérieurement sans oser faire part à l'autre de ce qui l'inquiétait ou la mettait dans cet état, comme si elle craignait de mettre des mots sur les maux, de les rendre plus réels et pénibles encore en les laissant s'exprimer. Parce que non, ces silences ne signifiaient en rien qu'elle craignait que son interlocuteur la juge au fond, elle savait que ce ne serait pas le cas.
Si ce cocher ne se décide pas à faire accélérer ses chevaux, nous allons finir par être les derniers arrivés à cette réunion.
Diversion... Habituel ça aussi chez elle, quand le silence lui semblait devenir trop lourd et son envie de hurler des vérités si forte qu'elle craignait de finir par les laisser s'échapper de ses lèvres dans un flot qu'elle serait incapable de retenir. Alors, comme on donne un bonbon à un enfant affamé pour le faire patienter, elle autorisait sa voix a se faire entendre, avec autre chose que ce qu'elle avait sur le coeur.
Le Rouvray ne répondit pas, se contentant de lui sourire avec douceur, comme toujours, accompagnant ce geste d'une caresse légère comme un vent d'été sur sa main. Elle lui rendit un semblant des siens, mais vraiment l'humeur n'y était pas, et on avait presque l'impression que sa nervosité était devenue palpable dans l'air.
Une semaine... Il restait à peine une semaine avant le début de la campagne électorale, et elle appréhendait grandement le début des hostilités.
Pour sûr, on ne la raterait pas, elle qui avait rejoint un parti autre que celui dans lequel elle avait été dès son arrivée en Lyonnais Dauphiné et qu'elle avait quitté il y avait à présent pratiquement quatre mois. Bien sûr on la jugerait, l'accuserait d'avoir retourné sa veste, rejoint les rangs de "l'ennemi"... On oublierait qu'entre les deux elle avait pris du recul par rapport à la politique et même par rapport au Duché pour voyager en Berry.
On oublierait qu'elle n'avait en aucun cas quitté son ancien parti pour rejoindre les Gones mais bien suite à un malaise qu'elle ressentait là-bas, suite à une impossibilité d'encore se reconnaitre dans les valeurs de la majorité des membres avec lesquels elle était sensée oeuvrer, suite surtout à une prise de conscience du fait que si les valeurs officielles de ce parti n'avaient pas changé, une bonne partie de ceux qui le représentaient aujourd'hui ne les partageaient pas, ne les comprenaient même pas pour tout dire. Certes, il y restait des "fossiles" garant de l'étiquette APD, mais ils étaient en sous nombre, et de plus en plus las. Alors oui, elle les avait quittés, sans rancune, sans colère, à peine de la déception dans le coeur suite à leurs non réponses à ses au revoir.
Ensuite, elle avait hésité, réfléchi, loin de tout et de tous, envisageant de fonder un nouveau parti, mais finissant par abandonner l'idée, persuadée que d'avoir quatre partis dans un duché était déjà bien suffisant, qu'un cinquième ne servirait qu'à amoindrir encore les possibilités d'un conseil ducal à pouvoir prendre de vraies mesures.
Très rapidement, oeuvrer pour ce duché lui avait manqué, elle s'était sentie devenue inutile, brulant de servir encore avec ses capacités et expériences cette terre qui l'avait accueillie, mais ne sachant comment le faire sans rejoindre un parti existant.
Rejoindre un parti autre que celui au sein duquel elle avait évolué... Elle avait mis du temps à se décider à le faire, non pas de crainte de la façon dont cela serait perçu, mais parce qu'elle-même avait du mal avec cette idée. Il avait d'abord fallu qu'elle l'assimile, la digère, s'en fasse une raison, et ensuite qu'elle se renseigne discrètement sur les idéaux de chacun des trois partis possibles avant de faire son choix.
Aucun de ceux qui demain la critiqueraient, qui sans doute déjà le faisaient aujourd'hui, ne devait s'imaginer un seul instant le cheminement intérieur qui avait été le sien avant de pousser la porte des Gones il y avait quelques semaines à présent. Pas plus qu'ils ne devaient se douter qu'au départ elle n'avait absolument pas voulu mener la liste aux élections qui arrivaient à grands pas.Elle avait voulu aider à la rédaction du programme, apporter ses idées, travailler avec eux, mais si possible dans l'ombre, pas sur le devant de la scène. Et puis, ils s'étaient mis à plusieurs à lui demander d'être tête de liste et, une fois la surprise passée, elle avait refusé, à maintes reprises. Refusé, encore et encore... Elle ne s'en sentait ni la légitimité ni les capacités, et puis surtout elle ne voulait pas que sa présence en tête de liste puisse servir les attaques adverses.
Seulement, ils avaient fini par la persuader d'accepter, au bout de plusieurs jours de travail d'équipe mais surtout d'arguments, et elle avait fini par dire oui. Ce n'était pas un oui forcé, pas un oui à contre coeur, pas un oui à la légère puisque tout ce qu'on attendait d'une tête de liste elle le faisait depuis et le ferrait jusqu'au bout avec le meilleur d'elle-même, mais ça n'en restait pas moins un oui rempli de doutes sur ses capacités à être à la hauteur des attentes de ses colistiers.
Assise dans le coche, voila bien ce qui une fois de plus la faisait se ronger intérieurement, mais aussi se mordiller la lèvre. Un choc du sans doute à quelque grosse pierre sur le chemin d'une des roues la fit relever le menton, la sortant un instant de ses pensées, mais surtout provoquant le début d'un aveu adressé à celui qui plus que tout autre avait une confiance aveugle en elle.
Vous me surestimez tous, Kernos.
Je ne suis pas forte assez pour porter cette liste et ce programme sur mes épaules.
Je vais juste vous décevoir, vous faire regretter votre choix.
Il ouvrit la bouche pour s'exprimer à son tour, mais elle ne lui en laissa pas le temps, comme souvent quand elle se décidait enfin à lui livrer ce qui la mettait dans l'état de nervosité où elle se trouvait.
Laisse moi finir, s'il te plait. Je sais ce que tu vas me dire...
Tu vas me dire que jusqu'à présent je m'en sors plutôt bien, que vous êtes tous derrière moi, et toi le premier, que j'ai fait de bons choix pour la liste, réussi à motiver les troupes, que le programme est d'ores et déjà prêt, que les affiches aussi, que nous sommes en avance sur l'emploi du temps prévu, que vous ne me lâcherez pas, que vous avez tous confiance en moi, que nous sommes une équipe, et tant d'autres choses encore.
Mais moi je sais qu'au fond je ne vais que vous faire du tord, servir de possibilité d'attaques en tous genres aux autres partis, être une mauvaise chose pour les Gones.
Tu veux la vérité?
La vérité c'est que si tu n'étais pas dans ce coche avec moi en cet instant, j'en serais presque à souhaiter une embardée, un accident, qui me laisserait blessée et vous oblige à me remplacer sur cette liste.
Voila, oui, j'en suis arrivée à souh...
La suite de ses mots se perdit dans son épaule à lui, sur laquelle le choc la fit basculer, juste avant que tous deux ne se retrouvent projetés hors de l'embarcation qui semblait soudain quitter le sol les roues vers le ciel.
Ce furent les dernières choses dont elle eut conscience avant de perdre connaissance.
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Entre Dié et Lyon, à quelques jours des élections ducales :
Assise dans le coche qui les conduisait tous deux vers les locaux des Gones, la Dame de Thauvenay se mordillait la lèvre en silence, n'échangeant pas le moindre mot avec celui qui se trouvait à ses côtés. Entre eux, il n'y avait pas toujours besoin de paroles de toute façon, ils se comprenaient au-delà de cela.
Elle ne se faisait aucune illusion sur le fait que Kernos avait bien remarqué que depuis de nombreuses minutes elle s'infligeait ces légères morsures qu'il connaissait à force de l'avoir vue faire en d'autres lieux et d'autres moments, ces signes indiquant qu'elle se torturait intérieurement sans oser faire part à l'autre de ce qui l'inquiétait ou la mettait dans cet état, comme si elle craignait de mettre des mots sur les maux, de les rendre plus réels et pénibles encore en les laissant s'exprimer. Parce que non, ces silences ne signifiaient en rien qu'elle craignait que son interlocuteur la juge au fond, elle savait que ce ne serait pas le cas.
Si ce cocher ne se décide pas à faire accélérer ses chevaux, nous allons finir par être les derniers arrivés à cette réunion.
Diversion... Habituel ça aussi chez elle, quand le silence lui semblait devenir trop lourd et son envie de hurler des vérités si forte qu'elle craignait de finir par les laisser s'échapper de ses lèvres dans un flot qu'elle serait incapable de retenir. Alors, comme on donne un bonbon à un enfant affamé pour le faire patienter, elle autorisait sa voix a se faire entendre, avec autre chose que ce qu'elle avait sur le coeur.
Le Rouvray ne répondit pas, se contentant de lui sourire avec douceur, comme toujours, accompagnant ce geste d'une caresse légère comme un vent d'été sur sa main. Elle lui rendit un semblant des siens, mais vraiment l'humeur n'y était pas, et on avait presque l'impression que sa nervosité était devenue palpable dans l'air.
Une semaine... Il restait à peine une semaine avant le début de la campagne électorale, et elle appréhendait grandement le début des hostilités.
Pour sûr, on ne la raterait pas, elle qui avait rejoint un parti autre que celui dans lequel elle avait été dès son arrivée en Lyonnais Dauphiné et qu'elle avait quitté il y avait à présent pratiquement quatre mois. Bien sûr on la jugerait, l'accuserait d'avoir retourné sa veste, rejoint les rangs de "l'ennemi"... On oublierait qu'entre les deux elle avait pris du recul par rapport à la politique et même par rapport au Duché pour voyager en Berry.
On oublierait qu'elle n'avait en aucun cas quitté son ancien parti pour rejoindre les Gones mais bien suite à un malaise qu'elle ressentait là-bas, suite à une impossibilité d'encore se reconnaitre dans les valeurs de la majorité des membres avec lesquels elle était sensée oeuvrer, suite surtout à une prise de conscience du fait que si les valeurs officielles de ce parti n'avaient pas changé, une bonne partie de ceux qui le représentaient aujourd'hui ne les partageaient pas, ne les comprenaient même pas pour tout dire. Certes, il y restait des "fossiles" garant de l'étiquette APD, mais ils étaient en sous nombre, et de plus en plus las. Alors oui, elle les avait quittés, sans rancune, sans colère, à peine de la déception dans le coeur suite à leurs non réponses à ses au revoir.
Ensuite, elle avait hésité, réfléchi, loin de tout et de tous, envisageant de fonder un nouveau parti, mais finissant par abandonner l'idée, persuadée que d'avoir quatre partis dans un duché était déjà bien suffisant, qu'un cinquième ne servirait qu'à amoindrir encore les possibilités d'un conseil ducal à pouvoir prendre de vraies mesures.
Très rapidement, oeuvrer pour ce duché lui avait manqué, elle s'était sentie devenue inutile, brulant de servir encore avec ses capacités et expériences cette terre qui l'avait accueillie, mais ne sachant comment le faire sans rejoindre un parti existant.
Rejoindre un parti autre que celui au sein duquel elle avait évolué... Elle avait mis du temps à se décider à le faire, non pas de crainte de la façon dont cela serait perçu, mais parce qu'elle-même avait du mal avec cette idée. Il avait d'abord fallu qu'elle l'assimile, la digère, s'en fasse une raison, et ensuite qu'elle se renseigne discrètement sur les idéaux de chacun des trois partis possibles avant de faire son choix.
Aucun de ceux qui demain la critiqueraient, qui sans doute déjà le faisaient aujourd'hui, ne devait s'imaginer un seul instant le cheminement intérieur qui avait été le sien avant de pousser la porte des Gones il y avait quelques semaines à présent. Pas plus qu'ils ne devaient se douter qu'au départ elle n'avait absolument pas voulu mener la liste aux élections qui arrivaient à grands pas.Elle avait voulu aider à la rédaction du programme, apporter ses idées, travailler avec eux, mais si possible dans l'ombre, pas sur le devant de la scène. Et puis, ils s'étaient mis à plusieurs à lui demander d'être tête de liste et, une fois la surprise passée, elle avait refusé, à maintes reprises. Refusé, encore et encore... Elle ne s'en sentait ni la légitimité ni les capacités, et puis surtout elle ne voulait pas que sa présence en tête de liste puisse servir les attaques adverses.
Seulement, ils avaient fini par la persuader d'accepter, au bout de plusieurs jours de travail d'équipe mais surtout d'arguments, et elle avait fini par dire oui. Ce n'était pas un oui forcé, pas un oui à contre coeur, pas un oui à la légère puisque tout ce qu'on attendait d'une tête de liste elle le faisait depuis et le ferrait jusqu'au bout avec le meilleur d'elle-même, mais ça n'en restait pas moins un oui rempli de doutes sur ses capacités à être à la hauteur des attentes de ses colistiers.
Assise dans le coche, voila bien ce qui une fois de plus la faisait se ronger intérieurement, mais aussi se mordiller la lèvre. Un choc du sans doute à quelque grosse pierre sur le chemin d'une des roues la fit relever le menton, la sortant un instant de ses pensées, mais surtout provoquant le début d'un aveu adressé à celui qui plus que tout autre avait une confiance aveugle en elle.
Vous me surestimez tous, Kernos.
Je ne suis pas forte assez pour porter cette liste et ce programme sur mes épaules.
Je vais juste vous décevoir, vous faire regretter votre choix.
Il ouvrit la bouche pour s'exprimer à son tour, mais elle ne lui en laissa pas le temps, comme souvent quand elle se décidait enfin à lui livrer ce qui la mettait dans l'état de nervosité où elle se trouvait.
Laisse moi finir, s'il te plait. Je sais ce que tu vas me dire...
Tu vas me dire que jusqu'à présent je m'en sors plutôt bien, que vous êtes tous derrière moi, et toi le premier, que j'ai fait de bons choix pour la liste, réussi à motiver les troupes, que le programme est d'ores et déjà prêt, que les affiches aussi, que nous sommes en avance sur l'emploi du temps prévu, que vous ne me lâcherez pas, que vous avez tous confiance en moi, que nous sommes une équipe, et tant d'autres choses encore.
Mais moi je sais qu'au fond je ne vais que vous faire du tord, servir de possibilité d'attaques en tous genres aux autres partis, être une mauvaise chose pour les Gones.
Tu veux la vérité?
La vérité c'est que si tu n'étais pas dans ce coche avec moi en cet instant, j'en serais presque à souhaiter une embardée, un accident, qui me laisserait blessée et vous oblige à me remplacer sur cette liste.
Voila, oui, j'en suis arrivée à souh...
La suite de ses mots se perdit dans son épaule à lui, sur laquelle le choc la fit basculer, juste avant que tous deux ne se retrouvent projetés hors de l'embarcation qui semblait soudain quitter le sol les roues vers le ciel.
Ce furent les dernières choses dont elle eut conscience avant de perdre connaissance.
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