Cerdanne
Les bois, depuis des lustres.
Le vert à perte de vue.
Elle ne supportait plus tout ce vert.
Il fallait que cette attente cesse.il fallait quelle retrouve sa gitane, il fallait quelle retrouve le sourire, il fallait quelle respire...
il fallait
.
Lété sétirait lent et grisâtre.
Sans chaleur aucune.
La frileuse, la Provençale, râlait après ce vert sombre et humide.
Le soleil et le bleu lui manquait.
A grandes enjambées rageuses, visage fermé, elle avançait sur un chemin escarpé, son cheval suivait docile et silencieux.
Depuis une bonne heure environ elle avait délaissé sa monture et lanimal habitué aux sautes dhumeur de sa cavalière restait tranquillement en arrière.
Ces derniers jours pourtant claquaient comme un étendard arborant fièrement les couleurs de la victoire.
Elle entrevoyait un bout de lumière qui ressemblait a du bonheur et la trace dAttia et Sad se précisait.
Son ours devait trainer non loin et cétait bien là sa seule raison de trouver ces bois sympathiques.
Seulement le gris rajouté aux verts avait tendance à déteindre sur les humeurs particulièrement aiguisées en ce moment.
La marmonneuse repéra la trouée entre les arbres et la trouva à son gout. Elle se retourna vers sa monture.
Celui-ci suivait tranquille.
Stach !!
La lame claqua tout près et Cerdanne plissa les yeux.
Avançant à pas feutrés, elle découvrit létrange tableau.
Lil réduit en une fente bleutée étrangement brillante, la brune releva sa bouche sur un rictus mauvais.
La hache bien plantée semblait la narguer et dun mouvement sec elle larracha de lécorce blessée.
Nonchalante, le visage impassible , elle savança vers celle qui pendant très longtemps avant tenu la tête de liste de sa haine.
Depuis, le temps, leau, le vin et les saisons avaient coulés..
Agnia la gasconne honnie nétait plus quun souvenir de haine
un petit point au fond de sa mémoire.
La revoir tout à coup raviva un instant la douleur et les mots claquèrent. Plus ironiques et amers quautre chose.
Cest sur ! Pour te couper la main qui te reste va te falloir de laide
Marrant
jaurais plutôt pensé moccuper de ta tête à une époque.
Planté devant la gasconne, elle la toisait
.indécise encore
Coupera, coupera pas
.la tête...Alouette
.
ptit édit pour les fautes
Cerdanne
La brune toisait toujours la Gasconne
Placidement elle détaillait la brunette.
Méthodiquement, minutieusement, les yeux azurs appréciaient les traits tirés, lamertume du rictus des lèvres, le vert délavés des yeux autrefois si pétillants,
jusquà la chevelure qui paraissait ternes et mêlée de fils blanc.
Lui restait un brin de fierté quand même. Un fond de rage qui la fit se lever et la regarder avec hauteur
Cerdanne esquissa un léger sourire
Un comme lancienne faucharde aimait tant.
Tas vieilli...Agnia.
Et les yeux bleus de se poser sur la main tenant la dague
Tu naurais pas pris la peine dannoncer la couleur
avant. Tu naurais surtout pas lâché ta hache...Ouais, tu vieillis Damisella
La gasconne avance, mauvaise, et Cerdanne sourit à nouveau. Le regard se fait lumineux.
Tas jamais encaissé la longueur de mes gambettes hein ?
Et à chaque fois elles traversent ta route.
Ou elle se planque Ginette ? Cest mon bon samaritain cette boule de poil. Et pi cest pas Theo qui dirait contraire
Lest ou dailleurs le peintre ?
Le regard se plante mauvais dans celui la brunette.
Il est ou Agnia le peintre ?
Ne me dis pas que tu las laissé partir
Tas pas essayé de te couper un pied... ??
Serait ptet rester
Les souvenirs remontent en vague, les douceurs, les couleurs et la noirceur de cette furie qui lui avait arraché SON peintre à coup de hache sur sa propre main.
Bâton de misère entre ses longs doigts, celle-ci maintenant tournoie. Cerdanne la soulève, la soupèse.
Regarde la lame et opine. Belle lame...
Eprouve le fil, apprécie le tranchant.
Bel affutage.
La Provençale lâcha un soupir et regarda Agnia.
La lame blottie contre la brune, cest le manche qui se fend vers lépaule de la Gasconne avant de sabattre sur lunique main de la folle.
Suffisamment hargneuse la brune pour accompagner violemment le mouvement du bâton et faire reculer la Gasconne.
Son regard se pose sur la dague.
Tu fais chier.
Tu meurs quand hein ??
Je vais pas être obligé de le faire quand même.
Jen ai plus envie.
Jai dautres projets.
Agnia
Il y a certaines expressions qui, à certains moments, prennent un sens plus réel. Le coeur qui saigne... Agnia sentait son coeur saigner dans sa poitrine, physiquement. Et un torrent de larmes lui noyait la gorge et assaillait ses paupières lourdes. Une déchirure, la brune se fissurait, elle avait esquivé le mouvement de hache de la provençale, machinalement, comme un réflexe, malgré elle. Car ses mots résonnaient dans sa tête, martelant ses tempes.
Citation:Lest ou dailleurs le peintre ?
Il est ou Agnia le peintre ?
Ne me dis pas que tu las laissé partir
Tas pas essayé de te couper un pied... ??
Serait ptet rester
Bras ballants, la main serrée sur sa dague, elle referma son bras gauche amputé sur son ventre. Cette douleur serait-elle donc toujours là? aussi vive, aussi forte. Le fruit de ses entrailles n'était plus et son souvenir était aussi douloureux que celui de Theobalde, l'un et l'autre liés, à jamais.
Elle se fichait d'être devenue plus vieille, elle se fichait d'être plus lasse, où moins vive, elle se fichait de vivre ou même de mourir, mais cette douleur lancinante, la culpabilité de ne pas avoir su sauver celui qu'elle avait tant aimé, si mal aimé... c'était insupportable. Elle n'avait pas su le retenir, et il avait disparu dans les brumes matinales des routes de Gascogne, mort... disparu et mort... Voilà ce qu'il était devenu mais aucun son ne sortait de la bouche de la brune, pas même un soupire. Les sanglots restaient attachés à sa gorge, les larmes à ses yeux verts, grand ouverts sur Cerdanne, sur la vie, mais qui pourtant, regardaient dans le vide, revoyant les derniers instants de son bonheur envolé.
Réagir, il le fallait... oui, quelle l'achève, qu'on en finisse, une lame dans le coeur, sa hache dans le coeur. Et qu'elle l'abandonne là, au fond de cette forêt en ce jour gris, cadavre déchiqueté, rongé par la nature, rongé par ceux qui vivent encore.
Le temps s'écoule, si lent, si long et puis, comme rien ne sort, la rage remonte, en vague foudroyante, elle relève la tête, les yeux verts devenus rouges, couleur sang. La folie la reprend, le chagrin noyé dans sa rage et c'est un rugissement qui sort de sa poitrine, un rugissement bestial et furieux.
RHAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAA!
Achève-moi! Vas-y puteborgne! T'en crève d'envie! pis tu l'as dis! Je suis vieille, t'auras vite le dessus! Pis t'auras qu'à me balancer dans un fossé, comme ça je reposerai comme Théo! Dans un fossé! Bouffée pas les bêtes!
Dans un mouvement de rage, les larmes ruisselants enfin sur ses joues, elle tend sa lame vers la provençale, se jetant sur elle, lame affûtée, une entaille très légère sur son bras, la lame a tranché, à peine, et pourtant le liquide carmin s'écoule doucement. Le goût du sang. La brune jette un regard de braise à son ennemie, un regard de sang, un regard de mort. Il n'en restera qu'une. Plaise au ciel que Cerdanne ait le dessus._________________
--Etincelle
A force de routes, toutes les forêts se ressemblent, chemins larges et sinueux, avancé droite et tortueuse, traverses passagères et sombres.
Toujours à l'affut du temps et des ambiances, la forêt révèle et cache ses secrets selon les ombres et les couleurs.
Inspirée et aspirée par ces moments ou ta vie se sent en otage d'une vaste famille, les bois étendent leur fixité légendaire.
Un chêne ici, un hêtre là bas, une mousse légèrement envahissante rejoint leurs racines, trais d'union, pour combien de temps?
Mon étalon chemine, il est comme moi, nullement pressé, juste découvrir les promesses d'autres horizons.
Citation:RHAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAA!
Achève-moi! Vas-y puteborgne! T'en crève d'envie! pis tu l'as dis! Je suis vieille, t'auras vite le dessus! Pis t'auras qu'à me balancer dans un fossé, comme ça je reposerai comme Théo! Dans un fossé! Bouffée pas les bêtes!
Volte face, pieds à terre, immobilité, j'ordonne le silence à mon étalon.
Ouf! nous avons été discrétion, un large charme camoufle ma silhouette, l'étalon s'écarte sans bruit.
Obeserver...toujours commencer par observer m'avait-il dit....
Cerdanne
Jai plus envie, jai dautres projets
La hache fut projetée au loin, retrouvant un arbre à fendre.
Une main posée au creux de son ventre elle tachait de revenir vers sa vie. Elle ny arrivait pas.
Elle grommela, ferma les yeux violemment, les images dansaient et les taches lumineuses arrivaient en gerbes étincelantes.
Le temps reculait et elle revoyait la Bourgogne et les chemins de traverse quils avaient suivis.
Cur contre cur, juste le vent pour guide.
Jusquà Elle.
Pendant des mois, elle avait trainé cette putain de plaie, le cur arraché par la Gasconne qui avait entrainé dans son sillage le peintre qui partageait sa vie.
Aujourdhui, aujourdhui, la cicatrice seule, rappelait la douleur passée. Alors quelle songeait à son chemin qui à chaque pas cristallisait une étoile de bonheur, elle sentit la fracture tout au fond delle.
Lespace dun instant elle tenta de saccrocher aux murmures, aux couleurs qui à nouveau emplissaient sa vie.
Le regard de Cerdanne peu à peu virait au sombre.
Inexorablement, elle senfonçait
imperceptiblement elle sentait la faille sagrandir.
Elle avait beau chercher, le sol souvrait malgré ses efforts
Peut-être, peut-être que si le silence moite avait duré, elle aurait simplement rejoint la bulle protectrice qui lui avait tant de fois servit de refuge.
Peut-être, peut-être aurait-elle réussit encore une fois à dompter lappel, à refouler le monstrueux.
Son regard vide et morne toisait lespace par delà la gasconne.
Happant les bruns des bois, engloutissant les verdâtres.
Peu à peu les couleurs sestompaient et le paysage sécartait de son champ de vision.
Jusquaux hurlements dAgnia...
Jusquau sang...jusquà lappel...
Le regard se posa fixement sur les perles moirées qui lentement réchauffait son bras.
Pas une seule ne devait rebondir, retomber, flasque et froide sur le sol. Non ! Pas question !
Elles furent happées par des lèvres gourmandes qui lentement se coloraient dun rouge sombre.
Et le regard sanima, comme allumé de lintérieur.
La main, avide empoigna la lame, appuyant sur le tranchant, quémandant sa part de nectar, entaillant la chair.
Une ganse de peau chaude et vivante qui senroulait sur la dague, sur la main qui la tenait et quelle regardait dun air détaché.
Une main contre une main
Le rire de le Provençale jaillit comme un cri.
Avançant sur sa proie, elle trouva sa gorge et sa main telle une serre se referma sur elle. Les yeux agrandit, perdus dans leur monde ne voyait plus rien dautre que la tendre chair entre ses doigts nerveux.
La gasconne recula sous la violence de lempoigne et Cerdanne avançait encore, le visage collé contre celui dAgnia.
Jusqu'à lappui dun arbre mort. Martelant la tête contre le bois froid, appuyant encore et encore.
Lèvres pourpres contre lèvres pales, la voix rauque murmura, chuchota, enveloppant chaque mot dun souffle chaud et caressant.
Théo est heureux maintenant. Il a rejoint le vent.
Et toi pauvre tache, tu pleures sur toi.
Tu vas vivre ma belle.
Tu vas vivre et tu vas me regarder marrondir.
Tu vas me regarder vivre et rire. Et chaque jour qui passe, il en sera ainsi.
Tu sais pourquoi Agnia ?
Ton très haut te punit.
La main ne relâchait pas la pression et les lèvres frôlèrent une dernière fois le visage de la Gasconne pour revenir vers ses lèvres et chuchota une dernière fois.
Sois maudite mais vis.
Les doigts se détachèrent lentement de la gorge et Cerdanne posa ses yeux sur sa main ensanglantée, figée dans lacier et tira dun coup sec.
Juste un soupir et la main blessée blottie contre sa bouche, Cerdanne recula. Le rire fusa clair et ses yeux éclairés dune lueur malsaine, elle éclata de rire.
A la vie à la mort
Cest comme ça que tu dis non ?
Cerdanne
La fatigue, lépuisement qui vient du dedans, lourd, et qui appuie sur ses épaules.
Les gestes mécaniques de linstinct. Arracher un coin de tissus à sa chemise et comprimer la plaie.
Ignorer les battements du cur, là, dans le creux de la main ;
ignorer la vie qui tape, là, dans le creux de son ventre.
Juste son souffle haineux qui lempoisonne encore et qui peu à peu séchappe, enfin
Elle tend encore un peu le dos, attendant la riposte comme on attend un verdict.
La gasconne ne lâchait jamais rien.
Un seul murmure
mais qui la transperce comme une lame.
Memento... Memento Mori...
Figée, le regard perdu, elle laisse les mots tourbillonner et esquisse un sourire narquois...
Ah oui
.La seule et lunique famille. Ton capitaine si fort si beau.
Memento Mori !
Les mots claquèrent : voix masculine et sans appel.
Cerdanne enfin se retourna.
Un homme est là quelle na même pas entendu arriver et qui parait soudé à la brunette.
Livide devant le tableau quelle contemple.
Agnia et sa manie de faire ce quelle veut, quand elle veut.
La dague plantée dans son ventre, les mains de lhomme comme une caresse sur sa gorge
les mains dAgnia qui arrache la lame, les lèvres masculines entrouvertes sur un murmure.
Les yeux marines vont de lun à lautre.
Approchant encore, contemplant leur danse
La provençale sait. Tas finit par trouver ton exécuteur
hein
Les poings serrés, elle savance encore vers le couple et pose son regard sur la Gasconne.
Agnia
Agnia
reine des chieuses entre toute les chieuses. Faut que tu es le dernier mot. Quoiquil ten coute hein
Elle ne quitte pas la brune des yeux tandis que sa main légère effleure le visage blême, écrasant les perles deau, écartant une mèche folle.
Esquissant un léger sourire devant les images dun lointain passé. Cerdanne regarde enfin lhomme qui la soutient et lâche dune voix atone ...Fais ça bien Memento
Laisse lui son sourire à la Damizella
Cerdanne
Elle lui doit ça
Elle ne sait pas vraiment pourquoi
mais elle se doit dêtre là.
A la vie, à la mort.
Les yeux éclairés par une lumière intérieure puisée dans les souvenirs qui reviennent en force.
Le temps se suspend, juste, juste elle a cette impression de voir, de toucher le fil entre elle deux.
Tendu prêt à se rompre.
Malgré tout les coups de hache, de dague, les blessures de lâme, il avait tenu bon ce brin damitié.
Elle a choisit le vent la damizella.
Envers et contre tous.
Elle fixe ce visage qui retrouve une sérénité enfantine et qui attend le coup de grâce.
Libérée enfin de tous ses démons.
Rejoindre Son Très Haut
Cerdanne veut le croire.
Quau moins lui soit accordée la paix.
Juste un frôlement des doigts, et dans le silence, le bruit assourdissant de la vie qui senvole vers lailleurs.
Le craquement sinistre la pénètre et se plante au plus profond de sa mémoire, souvenir de la vie à la mort.
La Provençale tressaute comme Agnia tressaute et le regard rivé sur la gasconne, elle saccroche à ce sourire fugace qui traverse son minois de sauvageonne.
Elle la regarde intensément pour emporter un bout delle, effleurer une dernière fois ses joues pour sceller le pacte.
Il parle, lami qui a su comprendre, il parle et se tient dressé devant elle. Regard contre regard.
Ses paroles senroulent autour delle.
Tu lamènes
Hochement de tête machinal. Mon chemin...Oui
Juste
Nouveau regard sur lui
Dernier regard à sa Gasconne.
Les ombres samenuisent et se fondent dans la lumière irisée.
Juste le vent qui murmure là haut dans les hautes branches tandis quau fond de ses entrailles, la vie tressaille et manifeste.
[
bon vent Ljd Agnia
et tout ce qui sen suit
]