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La réserve du Banastié (Défense d'entrer - Piège à loup)

Paquita
Les bagages, c'est fait pour être faits, défaits, refaits...
Cette fois, c'est différent, Paquita ne part pas en mission et le calcul de ce qu'elle doit laver, sécher, plier, laisser, emporter la laisse perplexe.
Non, elle ne part pas en mission commandée ou plutôt si... elle obéit aux injonctions de sa Majesté Duflan qui se fait nerveux et péremptoire dans ses missives.




Viens me rejoindre et récupère Fuyant au passage, on va se faire une grande promenade et on verra la suite.


Paquita grommelle... promenade ! promenade !! comme si j'avais le coeur à promener ! m'a bien regardée ? j'ai une tête de promeneuse ?...Elle poursuit sa lecture....



Allez hop, c'est un ordre, tu prends tes bagages dès demain et en route et laisse tomber ces abrutis , viens on va foutre le feu à la fleche, on va laisser nos traces dans tout le royaume .
Et si tu trouves l'autre Alzinzin tu le ramènes.


Paquita est un brin perplexe...mettre le feu à la flèche, elle ignorait que le gros s'était engagé dans l'armée comme archer, pis enflammer des flèches, c'est une idée qui lui plait. Même en cas d'attaque contre sa ville, elle a toujours trouvé jolies ces banderilles luisantes qui courraient dans le ciel. A moins que l'ignoble se soit reconverti dans l'éclairage nocturne... une seule solution, aller voir.


Mais alors là, dès demain, il peut se brosser le joufflu ! je pars quand je décide, pis c'est comme ça !

N'empêche, elle s'active. L'idée de voyager la rend fiévreuse. Quels vêtements emporter ? Fera-t-il chaud ? froid ? de la pluie ? Dans la réserve, c'est l'étendage des frusques qui finissent de sécher.
Elle examine une liquette à la lueur d'un chiche soleil rasant quand l'Yassin fait irruption derrière elle.
L'ami comprend vite qu'elle va repartir. Il veut tout savoir, la destination, la durée, son itinéraire et même jusqu'au mode de transport qu'elle a prévu. Comme elle s'étonne de cet intérêt suspect, Yassin sort un message de sa manche et lui en donne lecture.




Accompagne Paquita, veille à ce qu'il ne lui arrive rien de fâcheux.
Fais la sourire...


Quand Yassin lit le nom de l'expéditeur, la brune se détourne et pleure en silence, émue. Elle se ressaisit bien vite et fait sa courageuse, laisse au brave garçon le choix de sa destinée.

Je pars jeudi, si tu es dans la carriole, je comprendrai et je serai heureuse, si tu n'y es point, je comprendrai aussi et je serai heureuse que tu aies choisi de veiller sur lui. s'ensuit une longue discussion sur les hommes et leur passage à l'état mature.


Paquita n'est pas au bout de ses peines et les bagages sont loin d'être bouclés. Sans cesse, elle est dérangée.
Anyssia, son escorteuse préférée vient lui rendre visite et pose mille questions.
Chaque réponse de la tavernière suscite une rafale d'interrogations :


Ben bien sur que j'en suis! elle risque de passer par où la grande virée ?? et ça veut dire quoi au juste faire caguer les gens ?? et penser à prendre à manger ça veut dire quoi ? faut en prendre beaucoup ?

euh.. ben oui, je sais, je suis un peu curieuse... bon en tout cas, je suis partante, quoi qu'il en soit... mon sac est quasi prêt
!


Paquita soupire et donne quelques éclaircissements, explique que cette fois, c'est vacances, qu'on va manger en faisant des miettes, mettre les pieds sur les tables, commander du rab de gigot et s'en mettre plein la lampe. Permission de Boulasse accordée. Vaste programme ! Elle ajoute cependant que si l'Anyssia espérait brigander, elle s'est trompée de convoi, Paquita, elle, n'a jamais touché ni ne touchera jamais à ça. La réponse fuse, rassurante.


Eh ben je suis prête à partir... ça tombe vraiment bien, fallait que je repasse en Anjou pour leur rendre un vieux mandat qui m'a bien servi comme coffre fort à une époque... mais bon la serrure s'est cassée récemment et il me sert plus à grand chose... autant leur rendre... pas d'inquiétude, j'avais pas envie de brigander... me promener me suffit... on part toujours demain ?


Paquita secoue la tête, les yeux levés.


Encore une qui pense que ça va être balade !

Plus tard, l'ancien bailli met le nez à la porte.

Je vous dérange Paquita ? Fait du bien de se reposer un peu, nenni ?

Thémis s'assied tandis que la future voyageuse plie des torchons, pas parce qu'on part loin qu'il faut négliger son établissement.... Intriguée par tout ce linge empilé, les malles ouvertes, les sacoches, elle s'enquiert elle aussi des projets en cours. L'aventure la tente, mais en femme raisonnable, elle craint de rester trop longtemps loin de chez elle. Paquita calcule qu'il va lui falloir une carriole du modèle au dessus si ça continue.

Té, on part, on verra bien, ceux qui auront le mal du pays et voudront rentrer le pourront à n'importe quel moment, je ne peux point vous dire mieux !
_________________
Toto.dangely, incarné par Paquita


Le temps était passé, aucune nouvelle échangée, pourtant souvent il pensait à elle, le taisant à sa compagne, car elle seule savait combien il avait été conquis par cette dame, et entre eux jamais le mot de Paquita n'était évoqué. Mais pour une raison que même le manchot ignore encore, un jour plume et parchemin il prit, et sur le parchemin la plume se mit à glisser




Bonsoir,

Pour sûr que l'écriture vous n'allez reconnaître, cela remonte à si loin maintenant. Mais j'ose espérer qu'en voyant la signature, vous vous souviendrez un peu. Je vous imagine là, laissant vos yeux se glisser au bas de ce parchemin, et voir le nom. Sourire ? Surprise ? Dommage je ne puis être là pour le voir...

Je voulais juste prendre de vos nouvelles, savoir comment vous et vos enfants alliez, le temps passe tellement vite, la vieillesse s'approche et chaque jour rend le lever plus difficile.

Pour donner quelques nouvelles de moi, j'ai quitté l'Armagnac, et quitté la vie que je menais auprès de la vicomtesse, j'ai repris un moulin, et bientôt une nouvelle nave je possèderai, si Aristote me le permet encore.

Voila, ma pensée en cette journée vers vous allait, enfin pas seulement ce jour, mais ce jour, j'ai eu envie de vous saluer, me remémorant cet été la bas, chez vous.

Avec ma tendre amitié, et l'espoir qu'un jour nos chemins se recroisent..

Votre dévoué Toto


Pourquoi avait-il fait cela ? Il ne savait pas, il repensait à ce ruban rouge offert, regrettant souvent de lui avoir rendu, mais la vie ainsi était faite.



rp reçu par courrier et posté avec l'autorisation de l'auteur
Paquita
Retour de voyage, courrier accumulé sur un meuble par le brave CasseTrogne qui a tenu la maisonnée.
Paquita trie, pile des factures, impôts, taxes, pile des importuns qui réclament toujours plus, pile des amis qui s'enquièrent de sa santé, pile des lettres de soutien au parti naissant, le Splich.

Une lettre retient son attention, l'intrigue, cette écriture... Léger frisson dans la nuque, bouche asséchée, tressaillement de la mémoire. Paquita va pour la poser sur une pile, laquelle ? Elle hésite, celle-ci ? celle-là ?
Aucune ne correspond, c'est qu'elle n'a pas créé de pile "amoureux" . Elle finit par s'avouer qu'elle n'a pas envie de la poser, de la mettre en attente. Doigts fébriles, elle l'ouvre, la parcourt du regard sans s'attacher au sens, seules les boucles déliées la ravissent. Une ondée après la sécheresse. Quelques larmes perlent à ses paupières. Elle l'aimait, il l'aimait et puis ? que s'est-il passé ? Ha oui ! Il avait fiancée, ravissante, et elle, elle Paquita ? Ha oui ! Amaël s'était interposé, la détournant d'une idylle tendre à son seul profit. Amaël le jaloux, Amaël le fantasque qui l'avait protégée à sa façon de tout prétendant et qui lui avoua plus tard une passion qu'elle ne soupçonnait pas.

Elle inspire longuement, reprend au début de la lettre. Cette fois, elle pèse chaque mot, évalue combien il a fallu de nostalgie à cet ami cher pour lui adresser cette missive.

Des bruits de pas, d'un geste vif, elle pose la lettre parmi les autres, se ravise et la glisse dans sa manche. Il faut croire que la crainte qu'Amaël a insufflé en elle est tenace. Qu'a-t-elle à redouter, il n'est plus là pour prendre ombrage d'une attention délicate qu'on lui porterait.

Plus tard, elle s'assure d'un moment de calme, solitude paisible et entreprend de répondre.






Bien cher Toto

Il m'est tojorn agréable de vous lire. Je vous paraîtrai fanfaronne mais avant même de l'ouvrir, j'ai su que cette lettre m'apportait de vos nouvelles. Vous avez en effet une façon bien particulière de plier et fermer vos missives. Je ne connais que vous qui en fasse autant.


Elle se garde d'ajouter que sans doute ce bras manquant en est la cause. Elle relit brièvement les mots couchés là et reprend.




Vous me dites que vous avez quitté votre Comtesse mais j'ignore d'où vous vous trouvez à présent. Est-ce loin ? J'avais moi-même été tentée par le Béarn et avais songé à m'établir à Tarbes mais finalement, ma compagnie d'escorte m'occupe grandement et je suis en train d'ouvrir une ligne Castel Bourges et j'escompte poursuivre jusqu'à Arles. La ville de Béziers retient mon attention.
Ainsi, j'aurai tojorn un pincement en passant devant cette auberge languedocienne où nous nous croisâmes.

Vous ? vieux ? allons donc ! je peine à le croire. Votre douceur vous fera un paravent aux injures du temps. Il ne peut en être autrement.

Au retour de notre dernier voyage, nous avons trouvé le Comté dévasté par une guerre fratricide. Il a fallu toute la force de notre conviction pour que Duflan et moy nous interposions. J'ignore si cela sera utile. Ni même si c'est souhaitable. Tant de doutes, tant de peines en se souvenant des splendeurs passées.

Cher Toto, un jorn, je l'espère, le hasard nous réunira de nouveau et ce jorn là, il me sera bien agréable de poser un baiser amical sur votre joue, même si elle est ridée.

Tendrement

Paquita



Elle clôt le courrier, l'expédie et vaque à ses affaires, la tête à ses souvenirs. Un léger sourire flotte sur ses lèvres.
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Toto.dangely
Leur voyage avait mené leurs pas en village de Castel, aussi, au passage de la garde, le manchot avait sourit, pour sur cela avait du surprendre les passagers de la chariote, et surement plus encore sa tendre compagne Laure. Laure connaissait bien ce passé de Toto, son été à Castel, et ce qu'il avait ressenti, et le manchot était bien persuadé que sa fiancée avait reconnu le garde... rien que l'évocation du nom de Paquita, avait parfois tendance à ... faire gronder l'orage, mais la confiance était de mise entre Toto et sa fiancée, du moins le manchot l'espérait.

Donc après avoir pris un repos bien mérité, à l'auberge il se rendit, prenant un pain, et une chope, il laissa sur le comptoir, les écus nécessaires, et également un mot.

Citation:
Le bonsoir à vous dame Paquita

De passage dans le village, je me suis permis de vous prendre un pain et une chope, laissant les écus pour ce repas pris.

Qui sait, peut être je pourrai vous voir avant notre départ

Mes Amitiés

Toto


Il entendit alors des pas, et laissa le mot sur le comptoir avec les écus, et retourna prendre place.

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Iskander
Dame Paquita ?

Personne.

On m'avait dit que ... enfin, bon, en ces villes étrangères, nous étions étranges, étrangers.

J'insistai.


Dame Paquita ?

Dame Paquita ?

Je suis Iskander, de passage et nouvellement arrivé en votre ville. Il parait que vous avez un endroit où je peux faire soigner mes ânes. Et pour prendre un bain. Enfin, pas pour les ânes, encore que cela leur ferait du bien, mais pour ma Vero et moi.

Dame Paquita ?

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Paquita
Occupée qu'elle est à trier les fèves ramenées du jardin de derrière, Paquita est plongée dans ses pensées.

Du bruit dans la grande salle, CasseTrogne s'en occupera....

Elle poursuit sa tâche, calculant mentalement d'acheter farine, d'envoyer Pascarel chercher du bois mort en lisière de forêt, de payer pour le professeur de gambe de Tanita...

Du bruit encore... elle tend l'oreille... Voilà qu'on l'appelle ! Elle s'essuie les mains au devantier et va s'informer.

Voilà ! voilà ! on arrive !

Durant les derniers pas, elle a entendu les demandes du client qui patiente.

Le bonjorn Visiteur... Entrez, installez-vous !

Au passage, elle saisit un cruchon et une chope propre. Tandis que l'homme prend place, elle lui verse de quoi faire descendre la poussière du chemin de son gosier.

Pour vos mules, y a de la place à l'écurie. Le Palefrenier et ma fille Tanita seront ravis de les étriller et de les nourrir.

Pour un bain, je puis vous faire monter un bain en chambre si vous voulez. Sinon, y a des baquets à l'étuve derrière la maison. en vous tassant un peu, vous y rentrerez facile.
Suffit de dire ce que vous préférez comme plante dans votre eau. Laurier ? écorce d'orange ? ou menthe ?


Elle affiche un bon sourire qu'elle réserve à ceux qui ont son estime.

Pour votre Dame et vous, je puis vous proposer une chambre. Nous en avons de coquettes. Les draps sont frais et il y a le choix. Vue sur la place ou vue sur la forêt derrière.
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Iskander
Et Dame Paquita arriva.

Elle était ... plantureuse, métaphoriquement pensant. Sans doute à s'occuper de mille choses et de milles gens en même temps, et parvenant à rayonner au delà.

Je me découvris machinalement, pour réaliser que je ne portais pas de chapeau.


Merci Dame Paquita.

Ce sera parfait.

Après avoir goûté intensément des oranges, je crois qu'il est temps pour nous de tenter la menthe. Ou les lauriers.

Et les étuves seront très bien.

Je cours porter mes ânes aux soins de votre fille. Ils ne sont pas vraiment indociles. Ni têtus. Mais ils sont assez exigeants. Enfin, après deux jours de route et des semaines de bivouac, je suppose qu'ils seront heureux de se faire choyer.

Et nous aussi. Une chambre coquette avec des draps propres et un vrai lit nous changera du régime de ces dernières semaines. Elle est très bienvenue.

Mille mercis.


Je remis le chapeau que je n'avais pas. Puis me ravisai. Puis la saluai, un peu confus, pour prendre congé.

Puis me retournai, incertain. Dame Paquita ... Dame Paquita ...


Ne nous sommes-nous pas déjà rencontrés quelque part ? Il y a longtemps ?
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Paquita
Déjà Paquta s'active, donne des ordres... les marmitons se dépêchent le cou rentré, les servantes courent en tous sens, des draps sur le bras, d'autres, balai en main grimpent les escaliers. Certains s'arment de seilles et foncent à la fontaine. Le feu est tisonné et le gros chaudron à chauffer l'eau se met à siffler.

Tanita est prévenue de s'occuper des ânes. Tous ont leur tâche et peu se défilent, redoutant les foudres de la Patronne.


Paquita aperçoit des pieds qui dépassent de sous une table. Elle soulève un pan de nappe et découvre un gâte-sauce en train de se remplir la panse de fruits confits. Elle tend le bras et le ramène au grand jour par l'oreille.

Cornecul la mère boeuf ! c'est ça qu'on t'apprend ? à te goberger quand les autres travaillent ?!

Un camouflet habilement envoyé, le gamin rejoint les autres, les joues encore gonflées de sucreries.

Paquita se retourne vers le visiteur.

Rencontrés ? longtemps ? té ! à votre accent, je dirais en Prouvenço, quand je servais au Phoenix d'argent, à Toulon ! L'auberge de Maistre Seletus ! Il y passait tout ce que la Prouvenço comptait de gens influents.

Elle vérifie l'avancement du travail. Son oeil balaie sa maisonnée. Elle sourit, satisfaite.


Votre chambre est prête et votre bain sera préparé dans un instant. Vous souhaitez un repas servi en chambre aussi ?
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Paquita
La vie de Paquita est trop trépidante pour tenir dans la seule Castelnaudary. Le besoin de grands espaces, le goût de la route lui est venu avec l'amour du frisson que procure le passage des frontières.
Le plaisir de fouiner sur les marchés des villes traversées. A chaque fois, elle s'informe des meilleurs prix.
Ce panier de fruits secs ferait-il plaisir au Padre ? et cette chope à bière ? c'est pour Bimbim, naturellement.
Chaque retour est une fête. Elle aimerait rester davantage, passer plus de temps avec ses amis, boire sans se rationner et rire à l'envi.
Déjà les contrats pleuvent, la rappellent à sa tâche. Escorter qui craint de voyager seul, c'est là sa mission désormais. Trop ont placé en elle leurs espoirs pour qu'elle ne fasse pas ses bagages avec au coeur une douce nostalgie.

Castel est si belle dans la lumière du soir. Elle sait qu'elle repassera vite car c'est icelieu que réside son âme.

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--Paquita.

Un retour, une halte.
Elle sait qu'elle n'aura que le temps de laver le linge, donner des consignes, flâner au marché le temps d'une matinée, remettre à chacun le présent qu'elle lui a réservé, retrouver des amis au détour d'une rue, des connaissances autour d'une chope, vérifier que sa maisonnée est en ordre. Vaste programme...

Emotion en poussant la porte qui grince sur ses gonds. Le jour point à peine et l'horizon se maquille d'églantine. La salle obscure est déserte. Lourds remugles de renfermé, Paquita se précipite à une fenêtre et l'ouvre en grand. Par la porte laissée ballante, l'air s'engouffre et soulève quelques mirages poudrés, étoles de poussières qui se dissipent aussitôt envolées. L'oeil de la maîtresse des lieux glisse sur toute chose, notant au passage ce qui a été déplacé, ce qui manque, ce qu'il faudra remplacer.
Les réserves ont été sérieusement entamées, elle a justement ce qu'il faut et s'occupe à défaire ses colis, à placer ce qu'elle a ramené.
Déjà les premiers clients affluent, certains patientent, tandis qu'elle achève de défaire ses bagages et de ranger ses biens, d'autres maugréent, fébriles de l'entendre raconter ou tout simplement, avides de la voir s'occuper d'eux.

Paquita aurait pu se dispenser d'aller au lavoir et y envoyer quelque servante mais c'est un moment qu'elle apprécie entre tous. Ses pensées vagabondent au rythme de son battoir et c'est toujours joyeuse qu'elle en revient.

La grande salle s'est vidée de ses commensaux. Une table pleine de miettes témoigne d'un repas hâtif par quelque goulu. La maîtresse des lieux manque glisser sur une couenne de lard oubliée au sol. Elle se rétablit de justesse et pose son panier à linge quand Oliver le forgeron entre et à son tour ripe sur le lard. Il se retient à la patronne qui l'aide à se rattraper et l'assied comme elle peut sur un tabouret.
C'en est trop ! Le tavernier qu'elle a engagé ne répond point à ses espérances. Elle peste et promet de l'admonester à la première occasion.



Tu n'aurais peut-être pas dû demander à Duflan de s'occuper de ta taverne. Outre piquer tes provisions, il ne fait que boire ton fond ! Ma pauvre, tu seras vite ruinée à cette allure ! et regarde moy un peu l'état des meubles !


Paquita doit bien admettre que sa taverne n'est pas tenue autant qu'elle espérait. Mais elle veut y croire, la rédemption du pêcheur passe par la confiance d'autrui.

Un bon renard ne chasse jamais dans le poulailler près duquel il gîte ! En revanche, il serait peut-être bon que je lui laisse quelques directives...

Elle étend le bras, se saisit de son nécessaire d'écriture. Un nuage poudré s'en échappe quand elle le laisse choir devant elle. Haussement de sourcil légèrement contrarié ...



Cher Duflan,

J'espère que tu te fais à tes nouvelles fonctions de tavernier.
Il y a quelques menues choses que j'aimerais te voir exécuter pour mon prochain retour. En voici le détail, comme tu pourras le constater, rien d'insurmontable et je suis sûre que cela ne te demandera aucun effort.

- laver les carreaux, ça fera gagner deux heures de jours
- passer tous les meubles et les étagères au chiffon doux ( il y en a un grand sac dans l'angle derrière le comptoir, tout un tas de petas* de vieilles chemises usées)
- frotter le comptoir à la brique à poncer
- ôter les toiles d'araignées qui sont tendues au dessus des poutres ( j'en ai compté au moins quatre !)
- décrasser les moulures de lambris
- vider et lustrer la crachoir en cuivre
- relaver toutes les chopes à l'eau bouillante vinaigrée (j'y ai aperçu quelques traces de calcaire)
- laver les cornes à boire avec un linge imbibé d'eau ammoniaquée, rince-les, puis polis les avec un chiffon de laine imbibé de quelques gouttes d'huile d'amandes douces.
- brosser les dalles à la brosse de crin dur et rincer à grande eau.
- ranger les chopes par tailles
- cirer les meubles puis les faire luire (là, pleure pas l'huile de coude, faut que ça brille !)
- nettoyer les tables après chaque client
- veiller à ce qu'il y ait tojorn de l'eau dans l'abreuvoir au dehors pour les chevaux des clients. En cas, aller en puiser quelques seaux et le remplir chaque jorn d'eau fraîche.
- quelques fleurs dans les vases seraient du plus bel effet, Amael m'en rapportait tojorn de la forêt chaque soir.
- pense à renouveler les torches éteintes et à placer des chandelles sur les tables.

C'est à peu près tout. Pour le reste, je te fais confiance, vois à ta convenance !

Paquita


Elle se relit sous le regard expectatif du forgeron du village.

Hem ... pour les lambris, j'ai peut-être demandé trop, mais une fois lancé, on ne pourra plus l'arrêter ! Y a point comme les fainéants quand ils s'y mettent.

Elle ne voit pas la moue pessimiste d'Oliver dans son dos tandis qu'elle laisse le mot en évidence sur le comptoir.
Elle a tant à faire pour préparer sa prochaine mission... plus le temps de bavarder, Oliver s'en va sur la pointe des pieds tandis qu'elle déplie la grande carte et commence à noter la liste des lieux et villages qu'ils traverseront. Il lui reste à envoyer les courriers aux escorteurs, à la cliente... Quand elle relève enfin le nez, la nuit est tombée et l'heure du départ est proche.


* Petas (--> rapetasser, pièces de tissus)
Ludivine
Fatiguée, frigorifiée, la rouquine béarnaise pousse un soupire de soulagement quand elle arrive aux portes de la ville.

- bon faut que je trouve une auberge pour me réchauffer un peu

Elle en était là quand elle se fit arrêter par l'énième garde de l'énième ville. Elle lâcha un énorme soupire de découragement.

Encore un qui va, toujours dans le même ordre, vociférer:

1- je vous expulse, vous avez deux jours pour quitter le Comté même quand y en faudrait trois
2- je vous fous au mitard parce que bien entendu doit pas y avoir d'hostellerie digne de ce nom pour accueillir les visiteurs
3- pas touche au marché comme si j'allais entasser dans ma besace Déos sait quoi et que les artisans devaient absolument ne pas faire d'affaires.

Le point 4 en général, il n'avait pas le temps de le dire, la rouquine lui faisait bouffer le LP quand le prévot local, exceptionnellement savait lire et écrire et lui avait envoyé sa bafouille.

Quand elle n'en avait parce que l'abruti, incompétent et inculte n'avait même pas daigner répondre à sa demande, là elle ouvrait sa grande gueule, forçait le passage, défonçait la porte de la prévoté, et ... hum passons les détails...


Tapant du pied malgré ses ampoules, elle la laissa débiter son texte.

Ouvrant grand les yeux, elle partit d'un éclat de rire.

Ah ben ça c'est de l'accueil !

Elle lui mit une grande claque dans le dos en souriant.

Toi je te paye un coup à boire demain quand j'aurai la paye!

Sur ce, j'ai froid, j'ai mal aux pieds et j'ai faim, tu me montres le chemin?

La béarnaise se laissa conduire, regardant de droite te de gauche les ruelles du village et entra à la suite de la douanière, tavernière du cru.

Par Déos, on se refuse rien ici...jolie taverne ! votre prévot, il m'a parlé de votre spécialité locale, du charbon ou un truc comme ça, c'est mangeable?
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Paquita
Allez Marâtre, es de pas ploura, je reviendrai vous voir tantôt.

Dans la taverne vide, l'obscurité s'est étendue à mesure que les habitués sont partis.
Un feu discret crépite dans l'âtre. De temps à autre le bois se fend en craquant et lâche un panache d'étincelles. Il drape les deux êtres qui se font face d'une lueur mouvante et safranée.
Paquita regarde Guillhem, fils d'Amael, jeune homme fougueux et entreprenant et elle se souvient...

UN ... FILS !!!!!
Ce soir là, la taverne était bondée Paquita peinait à passer, chopes formant bouquets à ses poings entre les bancs où se serraient les clients. Les conversations emplissaient l'espace d'un brouhaha exubérant et joyeux. On fêtait ce soir là, le retour des guerriers. Ceux qui avaient survécu aux assauts ennemis sous les remparts de Montauban.
Paquita savait déjà qu'elle était veuve et ses yeux n'avaient plus de larmes. Le coeur lourd, elle accueillait les héros qui leur revenaient. Qu'importe son chagrin, ce soir là, Castel était en liesse et il fallait se montrer à la hauteur.
Quand....


Oui, un fils, il sera bientôt là d'ailleurs. Il doit être en route.

Une commère fielleuse venait de lancer la nouvelle à travers la taverne, guettant de ses yeux chafouins le mal s'insinuer dans la tavernière. Celle-ci crispa les doigts sur les anses des chopes, un peu de mousse versa sur ses poignets et goutta lentement au sol.
La goton tenta de pousser son avantage en donnant quelques précisions que personne ne lui réclamait tout en prenant bien soin de laisser penser à une tromperie récente.
Un silence glacial s'abattit sur les commensaux quand Paquita posa sèchement les commandes sur la table.
La colère étincelait à ses yeux et ses joues se teintaient doucement tandis qu'elle exprimait de façon définitive son opinion sur la question. Rapidement, le ton monta et les conversations cessèrent.

Il est hors de propos que ce bâtard vienne me narguer ni réclamer quoi que ce soit.
Que sa mère vienne seulement revendiquer ! Que m'importe qu'il soit enfançon !


Tout le monde le sait à Castel. Quand Paquita s'énerve, ça fait du fracas. Les mots jaillissaient de la bouche de la tavernière à une cadence effrayante
La gaupe tenta bien de lui expliquer quelque chose en bafouillant, disant que ce n'était point un nourrisson, qu'adultère n'avait point été commis, que le jeune homme plutôt bien mis...
Paquita ficha tout le monde dehors et resta avec sa furie, débarrassant les tables à gestes saccadés, cassant plus qu'elle ne lavait les chopes.
Seule.
Seule avec son chagrin.

Puis à quelque temps de là, il y avait eu la rencontre. Ce jeune homme volant à son secours alors qu'elle était houspillée par la soldatesque vulgaire et brutale.
Le fils d'Amael
Elle n'avait pu qu'être émue par les circonstances de la rencontre et ne lui avait point refusé sa porte.


Un soir, dans l'intimité de l'après souper, elle avait sorti de sa poche deux médailles.

Vois, ce sont nos médailles de baptême à ton père et à moy. Je devais les conserver jusqu'à notre mariage, à son retour.

Il avait tendu la main, ses doigts avaient hésité au dessus de la paume où luisaient les deux bijoux. Puis il s'était emparé de la médaille de son père.

Je la conserve, cela vous soulagera de la peine d'avoir à y penser.

Elle avait laissé faire. Il n'y a que les jeunes hommes n'ayant jamais aimé pour penser que tout l'amour d'un être peut se trouver en un objet.


Bien plus tard, au retour d'une longue mission d'escorte , elle lui avait avoué avoir vendu l'épée de son père.


200 écus !
Mais ... mais... ça ne se vend pas une épée !
Si ! 200 écus !
Mais c'est ... sentimental... elle ...
Elle était rouillée et ébréchée !... Et j'ai trouvé... celle-ci !!!
Ha !
Oc !
Et c'est toujours 200 écus !
OC !


Le temps avait passé, il avait un peu de mal à se comporter avec elle. Tantôt provoquant, tantôt protecteur. Ils mirent beaucoup de temps à s'apprivoiser.
Lui, l'appelant Marâtre pour la faire enrager, elle, lui hurlant ne ne point la nommer ainsi, le tenant à distance et ne lui dispensant qu' avaricieusement des histoires sur son père alors qu'il en était avide.
Peu à peu leur défiance et leur animosité s'étaient dégauchies et ils avaient trouvé le chemin de leurs coeurs respectifs.
Il avait cessé de l'appeler Marâtre, sachant que cela la peinait, elle s'était montrée plus confiante et plus conviviale quand il paraissait, ne le corrigeant à coup de poêle que peu et seulement quand il l'avait mérité.



Allez Marâtre, es de pas ploura, je reviendrai vous voir tantôt.
Elle aimerait lui dire qu'elle ne pleure pas, qu'il se fait des idées, mais sa gorge nouée où s'étouffent des larmes l'empêche de mentir.
Ils sont tous deux debout, face à face. Déjà, il a mis son baluchon à l'épaule.
C'est qu'il a grandi durant tout ce temps passé à Castel. Il faut maintenant que Paquita lève la tête pour le regarder.


Je peux vous laisser Tourmaline ? Une jument de guerre n'a pas à être dans un monastère et je ne voudrais pas qu'on en fasse un cheval de labour. J'aimerais que Tanita s'en occupe. Vous voulez bien ?
Paquita va pour protester. Tourmaline n'est pas une haquenée, c'est un destrier puissant. Tanita est encore gamine et elle risque de se briser la nuque en tombant et....
Trop tard ! Un petit cri étouffé derrière la cloison, des bruits de pas nus qui s'enfuient vers les étages désolent Paquita.
Sa fille est déjà au courant qu'elle hérite de la cavale convoitée. Il sera bien difficile de lui faire entendre raison.

Guillhem a au coin des lèvres un sourire narquois et à l'oeil l'ironie de qui a mené son affaire rondement.
Il porte la main à sa tête et soulève son chapeau.


Et pour Pascarel, je laisse ceci.
Paquita est touchée. Guillhem a fait beaucoup pour le garçon rendu bègue par la mort d'Amael.
Il lui a patiemment réappris la confiance et la parole de l'enfant s'est faite plus sûre, moins bredouillante. Il attaque ses phrases sans appréhension désormais. Bien sûr, il reste des traces, quelques moments pénibles où les mots se refusent, où l'émotion et la crainte prennent le pas et où Pascarel, les larmes aux yeux s'acharne à prononcer ce discours qui ne veut se laisser maîtriser.
Paquita le sait. Ce chapeau, c'est l'apanage des hommes. Ceux qui avancent dans la vie avec assurance et certitude. Elle sait aussi que l'enfant sera honoré de ce présent. La couronne du chef !


Allez Marâtre, es de pas ploura, je reviendrai vous voir tantôt.
Il ouvre grand ses bras et elle vient lui donner l'accolade. Il s'étreignent comme mère et fils. Elle lui tapote le dos, comme pour lui assurer que tout ira bien, que l'inconnu n'est pas effrayant et qu'il aura toujours un foyer où se réfugier.
Il lui lisse les omoplates comme pour en ôter le fardeau du chagrin qu'il perçoit.
Un soupir partagé et ils se séparent.
Sur le seuil, elle le regarde s'éloigner. Le sol gelé craque sous ses pas. La lune fait scintiller le givre. La nuit est claire et sa haute silhouette se détache longtemps sur le sentier. Juste avant le buisson qui déborde au virage, il s'arrête et se retourne. Il lève le bras en sa direction. Elle lève la paume à hauteur de son épaule, hésitante. Le temps s'étire puis reprend son cours. Il disparait.

Paquita rentre dans la pièce où vacillent les flammes des chandelles, referme la porte. Il reviendra. Elle le sait au plus profond d'elle même. Elle souffle les lumières et va se coucher, forte de sa certitude. Une mère sait toujours quand ses enfants vont bien. Et marâtre, c'est comme mère.

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