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[rp fermé].... que je hais...

Eusaias
Citation:
Au Seigneur des Auteux
A Puylaurens mon ami,
Bonjour.


L’ami,

Je tenais d’abord à te remercier pour ton épée loyale et fidèle qui ne nous fit jamais défaut à Dijon.

Mais, bien que honteux je suis de te dire cela, j’aurai besoin d’un service, d’un de tes services. Oui l’ami, cette lettre n’a rien de courtoise cette fois, j’ai besoin de toi, j’ai besoin que tu m’introduises en la chapelle des Hérauts à Paris afin de présenter « ta future fiancée » à ta suzeraine. Je réclame le plus grand silence évidemment sur cette affaire et me ferai une joie de te récompenser du mieux possible.

Je t’en prie, suis-mon fidèle serviteur afin qu’il te guide à Paris afin que je t’explique le tout. Victor a un langage bien à lui, mais c’est quelqu’un de très intelligent, il te fera rentrer à paris sans encombre.

Porte-toi bien.

Eusaias, Baron de Digoine et Seigneur de Saint Robert

*Pensez mon ami à mettre le feu à ce pli juste après sa lecture.



La lettre fut donnée à Victor, qui malgré la connaissance du projet était d’un calme olympien.

Porte lui ceci, fais hâter la marche et assure toi que le courrier soit brulé complètement avant de partir, je ne voudrais pas qu’un serviteur zélé vienne mettre son nez dans nos affaires. Si quelqu’un vous gène en route, arrange-toi pour qu’un terrible accident arrive à l’impudent.

Victor prit congé et le Baron souffla la bougie afin de dormir. Son escapade chez le notaire l’avait épuisé.


Quelques jours plus tard.

Ils arrivent monsieur le… *rire étouffé* Baron.

Bon dieu Guillaume cesse ! T’es benêt ! Il n’y a rien de risible ! Rien !

Rétorqua le baron excédé.

Mais c’est quoi ces mamelles que vous m’avez faites ? On dirait une vache laitière !

Ricanement des deux filles qui s’empressèrent de resserrer le bustier. Ce qui irrita un peu plus Eusaias. Bien qu’il n’était pas très corpulent, il était plus large qu’une dame et par conséquent le bustier n’était pas fait pour lui. Le « déguisement » était fort trompeur, mais « Digoine » souffrait physiquement et moralement. Non seulement les habits féminins étaient trop justes, mais en plus son personnel riait à le voir travesti ainsi. Pardon Cassian, Pardon mon fils… Pensait il sans cesse.

Cessez de rire bande d’abrutis ! Ah non ! Pas du sent-bon de grognasse !

PCHHHHHTTTTT

J’avais dit non ! Voilà maintenant que je pue la catin !

« Mais vous êtes belle ainsi Baronne » osa le cranequinier Guillaume.

Je suis belle ? Tu veux dire que je ressemble à une femme ?

Regard d’abord plein de haine puis incrédule qui se porte sur le miroir.

Oui c’est parfait tu as raison ! Mais si tu dis « belle » encore une fois je te fais bouffer tes c*uilles. On est bien d’accord ?

Regard de chien battu vers sa petite camériste

Fanchon non pas de collier à perles ! Non mais j’ai dit non ! Oh et pendant que j’y pense, si quelqu’un d’autre apprend cela…. Je vous fais tous pendre ! Fanchon j’avais dit pas de collier m*rde !

Nouveau ricanement dans son dos et Guillaume qui lui tend des fleurs.

Tenez. Prenez ce bouquet, vous l’offrirez à la suzeraine de votre promis.

Ce fut le mot de trop, celui qui fit que toute la chambre ria à gorge déployée. Toute, sauf le Baron qui saisit le bouquet et assena un déluge de coups de bouquet de fleurs sur la tête et le dos courbé de Guillaume.

Je vais te les faire bouffer !


Quelques temps après, Hôtel Saint Paul, Appartement de Dicé

Les pieds coincés dans les chaussures parisiennes, le grognement dans la gorge et la coiffe sur la tête, le Balbuzard travesti déambula, au bras de son ami. Il s’était éventé sans cesse, sans fatiguer, le visage bas même si les couloirs avaient été plutôt déserts à cette heure fort matinale. Personne d’inquiétant n’avait été croisé jusqu’à la grande porte. Mais pour être honnête seule la moquerie ou le refus de Dicé inquiétaient désormais Eusaias.

D’un regard furtif pour le garde aux couleurs des Auteux, qui les précédait, il lui indiqua de barrer la route à tout le monde. Il avait recruté l’homme pour son tact mais aussi pour sa détermination, il le savait à la hauteur. Il reporta son attention sur la porte massive. Trois coups secs !

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Puylaurens
Une fois de plus, Puylaurens regretta d'avoir brûlé la missive qu'on lui avait fait porter quelques jours plus tôt. Une fois de plus, il la parcourut mentalement, le texte étant encore bien présent en sa mémoire. Cependant, plus il se livrait à cet exercice, plus il avait l'impression que son imagination déformait les mots qu'il avait lu. Et pourtant, il savait aussi que lorsqu'il l'avait eu entre ses mains, le texte l'avait laissé tout aussi perplexe qu'il l'était à présent. Il n'empêche, il aurait aimé avoir cette lettre sous la main. Simplement histoire de s'assurer qu'il n'avait pas sauté une phrase, ou même un mot, un mot qui aurait pu l'éclairer sur la requête d'Eusaias.

Le Balbuzard. Il avait le don pour être énigmatique. Pourquoi devoir brûler la lettre ? Pourquoi ces mystères ? Qu'était-ce donc que cette histoire de fiancée ? Et, cerise sur le gâteau, ou goutte d'eau qui venait faire déborder le vase, c'est une affaire de point de vue, que diable venait faire sa suzeraine au beau milieu de tout cela !?! Auteux connaissait plutôt bien la Saint-Just, et cette connaissance n'était pas forcément pour le rassurer...
Il soupira, exaspéré d'y voir si peu clair. Il allait maintenant retrouver le Baron, dans quelques instants il aurait ses explications. Ou sinon gare : ce que le voyage jusqu'à Paris n'avait pu faire, la crasse, la puanteur et la grisaille de la grande ville y étaient parvenues, il était d'humeur massacrante. Il allait falloir lui dire pourquoi on lui avait fait quitter ses magnifiques vignes.


[Quelque temps plus tard, à l'Hôtel Saint-Paul, en compagnie de...]

Certes, maintenant il comprenait, mais il n'en était pas moins perplexe qu'auparavant. Sa perplexité était néanmoins différente, causée par l'inattendu davantage que par l'incompréhension. Il se maudit d'être venu, juste pour la forme.
Car un regard vers la personne à son bras suffit le persuader de n'avoir aucun regret quand à sa présence. S'il avait dû dresser une liste des choses les plus incongrues qu'il n'aurait jamais imaginé voir, eh bien celle-ci arrivait en tête : le Balbuzard travesti en femme ! Il songea qu'il fallait une certaine dose de courage - à moins que ce ne fut un grain de folie - pour que le Baron exposa ainsi sa légende. Le déguisement d'Eusaias était réussi, il devait le reconnaître, mais tromperait-il un oeil averti, ou pire : un oeil familier ? Puylaurens ne l'aurait pas gagé, mais il n'était plus temps de ces considérations.

La grande porte, devant eux - s'ouvrit. Rapide échange de regards avec son ami, et il s'avança.

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Gnia
[Hôtel Saint Paul - Appartements de Dicé]


Agnès toisa le valet qui venait de lui annoncer la visite d'un oeil dubitatif et mal réveillé. Puylaurens ? Ici ? Avec une... dame ?
Par tous les Saints, qu'est ce qui leur prenaient à ses vassaux de se dégotter les uns à la suite des autres des prétendant(e)s ?
Pour elle, la perspective de s'unir à nouveau à quelqu'un s'était évanouie quelques semaines auparavant. Et rien n'est plus vrai que l'on ne désire rien plus autant quelque chose que l'on sait avoir perdu, quand bien même, lorsqu'il était à notre portée, on le dédaignait.
Ombeline et Maltea, les plus aisément mariables ou remariables, rechignaient à la tâche, faute de prétendants dignes de ce nom et de leur rang. Melina s'était découvert un amour fou pour un chevelu du jour au lendemain et avait réglé le problème de l'accord de sa suzeraine en se faisant engrosser. Rose avait mis la main sur le plus infect prétendant qui soit et Agnès en était contrainte à devoir demander réparation pour les offenses qu'il avait fait subir à sa nièce.
Et maintenant Puy ? Quoique pour lui, il était plus que temps qu'il se décide enfin à trouver quelqu'un. Peut-être sortirait-il enfin de son ermitage vigneron avec une damoiselle à sortir au bras. Comme aujourd'hui.

La visite matinale ne lui avait pas vraiment laissé le temps de passer autre chose qu'une simple robe d'intérieur et puis il fallait avouer qu'elle était pressée de revoir enfin le Seigneur des Auteux et ne tenait point à le faire attendre outre mesure. Son compagnon préféré de beuverie, son confident, celui chez qui elle avait mandé tant de fois de conseil, elle ne l'avait pas revu depuis des lustres. Et souvent encore, leurs discussions nocturnes autour des meilleurs vins lui manquaient. Plus affreusement encore ces derniers temps qu'auparavant.

Voilà qu'on les faisait entrer. Le large sourire qui éclairait le visage abîmée de la Comtesse s'estompa imperceptiblement sans qu'elle ne puisse le réfréner à la vision de la femme qu'il tenait au bras.
Hahem... Ca pour une surprise... c'était une... mauvaise... surprise... Profonde inspiration avant d'aller au devant du couple incongru et d'ouvrir les bras à son vassal pour une accolade qui tenait plus de l'amical que du protocole vassalique. Regard en biais à la.. femme. Le front se plisse. Diantre ce visage en lame de couteau, ça lui rappelle furieusement quelqu'un mais qui ?


Mon cher Puylaurens, je suis si heureuse de vous voir icelieu. Votre visite est une agréable surprise. J'allais vous écrire pour vous convier à participer aux joutes du Lavardin que Sa Grasce Llyr organise chaque année à l'occasion de la Saint Michel...

Sans réfléchir, elle avait passé son bras sous celui de Puy, l'entrainant vers un guéridon où trônait bien évidemment carafe de vin et gobelets d'étain. Puis elle sembla se souvenir soudainement de l'espèce de truc que son vassal lui avait ramené et cessa là son bavardage pour se tourner vers... elle.

Mais je bavarde, je bavarde et j'en oublie les convenances. Présentez-moi donc l'heureuse élue.


La grimace qu'elle esquissa avait-elle été visible ? L'air bouguignon devait avoir irrémédiablement perturbé les sens du Seigneur des Auteux. Et dire que si elle avait fait d'autres choix à d'autres instants de sa vie, il aurait pu l'avoir, elle, à son bras plutôt que cette... chose.
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Eusaias
Il claqua la porte derrière lui et d’un geste des plus naturels porta sa main dans son décolleté sortant d’entre ses protubérances mammaires du jour un rouleau de deux papiers. Rien de bien élégant ni de très féminin, mais qui pouvait trouver féminin le Balbuzard, voir élégant ? Il montrait triomphant son trésor à Dicé et au seigneur des Auteux et à ce moment un « Tadam » triomphant aurait pu sortir de sa bouche, mais il n’en fit rien. Un simple sourire de carnassier et un œil malsain accompagnaient le rouleau.

Foutre dieu faut que je retire ces gaudiots de pisseuses j’ai les pieds ravagés ! Je ne vous présente pas j’n’ai pas de temps à perdre. Puylaurens, mon ami t’es un amour, mais je renonce à notre mariage tout compte fait

Ricanement de hyène qui s’échappe de la gorge du balbuzard alors qu’il se déchausse avant de se lancer à la visite des pièces. Il avait tellement passé de temps à être la fouine des uns et des autres qu’il se montrait toujours méfiant dans les lieux inconnus. Vérification des rideaux, des tentures en faisant fi de ce que pourrait dire la maitresses des lieux, personne. Il revint alors leur mettre le rouleau sous le nez.

Vous savez ce que c’est ? Notre future alliance, notre future prise de pouvoir. Si vous souhaitez en savoir plus je me ferai une joie de tout vous expliquer. Il est évidemment que TOUT est négociable, mais que nous ne ferons nulle marche arrière une fois engagés, il y a gros a gagné et pour tous.

Le regard d’oiseau de proie se concentre sur le visage d’Agnès. Les joutes du St Omer lui avaient laissé un excellent souvenir de cette « grenouille », souvenir qui était même resté dans sa chair, plus précisément dans la chair de son postérieur.

J’ai encore la marque ! *Lâcha-t-il fier de lui.* Sinon, bonjour belle enfant, vous voyez je pense encore à vous, sans doute parce que vous m’avez « marqué ». *Nouveau sourire malicieux sur le visage du piaf.* J’ai beaucoup progressé avec la « lance », peut-être vous montrerai-je cela si vous souhaitez, mais avant…. J’aimerai des habits plus masculins !

Extirpant l’une de ses mamelles de son décolleté, il fit apparaitre une paire de bas et de l’autre mamelle une chemise longue. D’un geste violent qu’il répéta, il tira les chaussons de cuir des chaussures de femme avant que ceci rejoignirent sur son avant bras droit la chemise et les bas.

Je vous pique, ô délicate et ravissante enfant un peu de place afin de me changer et une de vos caméristes. J’aimerai qu’elle porte la jolie robe que j’ai… sur moi. En attendant notre ami des Auteux aimerait sans doute se rafraichir le gosier et prendre nouvelle de sa suzeraine. Je fais vite, je vous reviens… Oh auriez-vous de quoi m’offrir une cape à vos couleurs Comtesse ? Je pense repartir dans Paris avec vous ! Quel homme serait meilleur éphémère valet ?
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Puylaurens
Sourire chaleureux à sa suzeraine, suivi d'un salut qui ne l'était non moins. Sourire de nouveau, mais sur un mode plus amusé, lorsque l'expression d'Agnès se figea et se transforma à la découverte de la "fiancée". Nul doute qu'elle l'avait imaginée d'une toute autre allure, moins terrible et plus féminine. Car l'habit, s'il en donnait l'apparence, ne suffisait pas toujours à faire le moine. Et en ce domaine, un Balbuzard déguisé en femme ne valait guère mieux qu'un perse en bure.

La demande, au demeurant fort naturelle, de sa suzeraine le prit au dépourvu. Lui présenter "l'heureuse élue". Ne sachant pas si le moment était vraiment adéquat pour éclater de rire, il chercha ce qu'il pouvait bien dire. Car il n'avait bien entendu jamais imaginé qu'il pourrait avoir à présenter cette délicieuse personne, quand bien même c'était le motif officiel de sa visite. Il se tourna donc immédiatement vers Eusaias afin de le consulter du regard, mais le Légendaire était déjà occupé à mettre à mal son déguisement.
Puy se demanda brièvement quel était l'intérêt d'avoir pris tant de peine à se travestir pour le rester aussi peu longtemps, mais il se dit que le déguisement en question devait être fort mal commode, et qu'in fine cela lui évitait d'avoir à cogiter pour trouver une présentation pas trop aberrante. Inutile de se poser trop de questions donc.

Coup d'oeil à Agnès, afin d'observer sa réaction. Qui ne manqua pas de faire naître un magnifique sourire aux lèvres de son vassal. La suite de l'affaire promettait d'être animée, et se sentant plus observateur que partie prenante dans tout cela il n'en était que plus réjoui.


Ne boirez-vous pas un verre Agnès ?

Invitation faite sur un ton tout à fait banal alors que la situation l'était bien moins. Il savourait les paroles du Balbuzard, qui ne devaient pas manquer de plonger un peu plus la Vicomtesse dans l'incompréhension. En tout cas, il avait du mal à voir comment les débuts d'explication de son ami pouvaient bien expliquer quoique ce soit.
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Gnia
Et la réaction d'Agnès valait le coup d'oeil effectivement. Son visage se décomposa à l'instant où elle reconnut la voix du Balbuzard s'échapper de ce qu'elle avait pris encore l'instant d'avant pour une rombière mal fagotée. Médusée, elle le regarda faire le tour du propriétaire, écartant les rideaux et sondant les coins sombres. Toujours sous le coup de la surprise, elle se saisit du rouleau de parchemins qu'il lui agitait sous le nez en un geste machinal.

Mais lorsqu'il mentionna sans gêne aucune les détails de leur rencontre aux joutes de Saint Omer, et qui plus est devant son vassal, les pommettes de l'honorable et austère Dicé s'empourprèrent violemment. Et toujours hébétée, elle hocha simplement la tête pour lui signifier qu'elle accédait à ses demandes. Même le puissant "Foutre Dieu Digoine, c'est quoi c'bordel !?" qui aurait dû franchir ses lèvres resta résolument coincé dans sa gorge.

Le regard ahuri continua à fixer la tornade tandis qu'elle s'en allait reprendre forme masculine. Ce fut la question de Puylaurens qui la ramena enfin à la réalité. Le rouleau de document toujours en main, elle se tourna lentement vers lui, les joues toujours roses et le visage reflétant une incompréhension aussi épaisse que de la purée de pois.


Mon cher Puylaurens, je crois qu'effectivement un verre ne serait pas de trop.

Avisant le sourire amusé de son vassal, elle fronça les sourcils, commençant à se demander s'il n'était pas complice d'une mauvaise plaisanterie que Digoine et lui avaient ourdis pour la tourner en ridicule. Aussi le ton se fit sévère lorsqu'elle demanda

Si vous savez quel est le but de toute cette mascarade, je vous enjoints très sérieusement à m'expliquer à quoi vous jouez...

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Eusaias
Le complot : un art de vivre

Il avait pris congé dans une pièce réservée aux toilettes afin de se débarrasser des superflus et de ses habits de parisienne. Bien que les deux caméristes étaient plutôt agréables à regarder et que l’appétit grivois du baron était rarement rassasié, il ne porta guère d’attention sur les deux même lorsqu’elles le déshabillèrent. Il souleva machinalement l’onyx qui trônait fièrement sur une de ses bagues et grimaça en constatant qu’il avait oublié de recharger la chambre qui se trouvait dissimulée sous la pierre. Certaines discutions devaient se terminer par un verre de l’amitié et pour cela rien de plus efficace que cette poudre blanchâtre qui donnait la mort dans l’heure. Le Balbuzard s’inoculait l’antidote fréquemment afin de pas se piéger dans un « trinquons l’ami » une fois lui avait suffi.

Il était encore débutant dans l’art du meurtre lorsqu’il avait décidé de « s’entrainer » au poison sur un marchand qui se voulait être son ami. Les premières gorgées avaient été difficiles et les dernières encore plus. Son « ami » s’était écroulé alors qu’ils étaient à table et lui avait passé une quinzaine de jour couché dans une ruelle d’une bourgade allemande. Il ne se ferait plus avoir et prenait soin de s’en préserver. Le dernier « client » avait été le dijonnais, mais là rien de bien compliqué, il avait vidé le contenu dans son broc d’eau avant de partir du monastère.

Si la sauterelle refusait, il allait devoir lui faire oublier l’idée et le fait de ne pas pouvoir compter sa bague « de l’amitié » pour cela le chiffonnait plus que de raison. Les caméristes avaient fini de l’habiller et il avait enfilé une cape aux couleurs de la comtesse.


Toi ! Avait-il désigné une des caméristes. Déshabille-toi prestement et enfile ceci ! Désignant les habits féminins qu’il avait quittés. Tu partiras avec mon ami, tu es sa promise tu es future ennobli par le duc Penthièvre. Ne me regarde pas comme ça, comment oses-tu penser que je vais te lorgner ou m’intéresser à ta croupe de cul terreuse ! Allez et prestement ! Et surtout pas un mot !

Lorsqu’elle s’était exécutée, rougissante à la limite des pleures, lui n’avait rien trouvé de mieux que de ricaner en la regardant et lâcher un : En fait t’es pas moche pour une boniche, je te ferai ton affaire un jour. En attendant ne bougez pas d'ici toutes les deux !

Il ajusta sa cape et entre-ouvrit la porte afin de rejoindre ses deux futurs complices.

« Les papiers sont bons, le héraut est froid, le cousin encore plus, l’autre Montjoie n’a pas passé l’hiver 1455, la dame doit dire oui et le monsieur aussi. » Cette phrase défilait dans sa tête alors qu’il traversait le couloir, il avait tout préparé : même le vieil écritoire vermoulu.

Soyez rassurés je suis de retour. J’ai entendu le mot vin, vous avez sans doute entendu le mot « complot » nous allons donc sans doute nous entendre ! Je vous invite à lire les documents et à me faire une proposition afin que vous puissiez bénéficier aussi. Il me faudra sans doute des appuis, mais si j’ai gain de cause,Il fit rouler son pouce contre son index dans un geste explicite. j’aurai de quoi rembourser nos aides.

Il étala alors le testament, le faux acte avec le vrai sceau, les fausses patentes avec de vrais signatures, des vrai faux sonnant terriblement le vrai.
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Puylaurens
Léger haussement d'épaule tandis qu'il remplissait deux verres. Lorsqu'il en tendit un à sa suzeraine, son visage s'était fait plus grave. Lui-même savait-il où cette affaire allait le mener ? Le Balbuzard le savait-il ? Certainement que non, car savoir où l'on souhaitait aller était une chose bien différente que d'y parvenir. Cependant, celui qui ne se lance dans rien avant d'être tout à fait certain d'arriver à ses fins est rarement celui qui va le plus loin.

Ma chère Agnès, je ne suis point celui qui saura le mieux vous expliquer de quoi il s'agit. Je puis juste vous garantir que malgré les apparences, cela est fort sérieux. Attendons-donc Digoine. Il ne devrait plus tarder s'il s'abstient de courtiser vos chambrières.

Mince sourire indéchiffrable, et lever de verre. Un claquement de porte, il se retourna pour voir Eusaias rentrer à grand pas. Tandis que ce-dernier recommençait à donner quelques mystérieuses explications, Puylaurens servit un troisième verre, et le tendant à son ami il le fixa droit dans les yeux.

Il est temps de parler un peu plus clairement, car je ne crains que tes documents ne soulèvent plus de questions qu'ils n'apportent de réponse, et il ne faudrait pas que la Comtesse ne se méprenne ni ne s'impatiente...
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Gnia
A la réponse de son vassal, Agnès se contenta de hausser un sourcil interrogatif avant de déposer le rouleau de parchemin sur le guéridon non loin de la carafe de vin. Elle levait son verre pour trinquer, un fin sourire sur les lèvres, lorsque le baron refit une entrée un peu moins spectaculaire que la précédente.

Ses débuts d'explications étaient plus que sibyllins et l'esprit de la Saint Just, encore légèrement embrumé par les dernières traces d'un sommeil lourd et acquis à grand renfort de vin, ne parvenait pas à déchiffrer les intentions du Balbuzard.
Tandis que Puylaurens l'enjoignait à être plus clair, elle se pencha sur les documents que Digoine avait déroulés.

Le front plissé, les sourcils froncés, elle découvrait enfin leur contenu. Elle releva sur le Balbuzard un regard austère alors qu'elle commençait à saisir où il voulait en venir. La voix rauque de la Comtesse, éternellement teintée de son accent artésien interrogea Eusaias.


Blanc-Combaz, si ce que je devine est ce que vous voulez, il va falloir être un peu plus explicite sur ce que vous attendez de moi et surtout sur ce que vous proposez en échange de mes services.

La Comtesse prise au dépourvu et hésitante du début de cette entrevue s'était muée en l'implacable Saint Just au regard sévère et au visage impassible. Elle n'avait pas jeté un regard à Puylaurens depuis que le baron avait parlé mais quelque part sa présence la rassurait. Au besoin, il saurait lui prodiguer les conseils, mises en garde et autres avis qu'elle savait en général mûrement réfléchis.
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Eusaias
Puisse qu’on me questionne, je vais vous répondre, mais je compte sur votre plus grande discrétion il va de soit.

Et le Balbuzard les rejoignit à la table. S’emparant d’un gobelet d’étain il le tendit vers la bouteille.

A moitié comme toujours. Il faudra qu’un jour, comtesse je vous fasse parvenir de celui qu’on extirpe de mon pressoir, bien que le nom semble féminin il est parfait.

Il renifla le contenu avant de poursuivre.

Bien commençons ! Vous voyez ces trois domaines, ce sont des sources de richesses immenses… Du moins je l’estime. Des vignes fructueuses, des champs à perte de vue, des collines et vallons riche en bois, mes amis ici est notre avenir.

Il avança plus la chaise contre la table afin de plus « s’impliquer ». Un sourire niais alors que des images de chars emplis de bois vendus à prix d’or, des faïences payées rubis sur ongle et ce bastion militaire qu’il avait préféré taire, lui emplissait la vue. Il savait qu’avec ceci il s’enrichirait grassement et donc qu’il pourrait entretenir une armée digne de ce nom, capable de faire pâlir d’envie les margraves de l’empire.

Il va de soit que je ne peux y arriver seul, j’ai donc choisi de m’appuyer sur vous. Le seigneur des Auteux, mon ami a remplit, sa part du contrat. J’avais besoin qu’il m’introduise auprès de sa délicieuse suzeraine en toute discrétion, il a remplit sa tâche avec soin. Je suis donc prêt à lui redonner une partie des bénéfices et pourquoi pas un lopin de terre Bourguignonne si jamais j’arrive à obtenir. Son rôle n’est pas terminé pour autant, il va de soit que ses conseils seront écoutés avec beaucoup d’attention. Sinon comtesse de mon cœur, sachez que votre vassal vient de découvrir son rôle en même temps que vous, jusque là il n’a fait que rendre service à un ami un peu chien-fou.

Il gratifia le dit seigneur des Auteux d’un sourire qui signifiait à la fois : merci et pardon. Les yeux d’oiseaux de proie se plantèrent dans les billes de la comtesse.

Quant à vous, rien de plus simple et de plus complexe à la fois. J’attends de vous un « oui » ensuite que vous trouviez un moyen de glisser ce petit quelque chose là où quelqu’un le trouvera sans faire exprès, ça c’était la partie « facile ».

Il porta son verre aux lèvres, plus pour marquer une pause que pour boire réellement.

Il nous faudra de l’aide à l’intérieur il va de soit, vous connaissez ce domaine mieux que moi. J’ai travaillé le tout selon les règles, les coutumes logiquement c’est « solide », il nous faut juste de l’aide d’une tierce personne. Promettez-lui ce qu’il faudra, rien de plus que le quart des gains qu’on pourrait avoir toutefois. Si j’obtiens ne serait ce qu’une maigre partie, vous pourrez demander ce que vous voulez, argent, service et tout ce qui peut vous passer par la tête. Je peux même vous épouser si vous voulez jouir pleinement de ses biens.

Enième ricanement de hyène.
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Gnia
La Comtesse daigna relever les yeux des parchemins qu'elle consultait pour écouter les explication du Baron de Digoine. Dubitative, elle l'observait faire sa démonstration tout en évaluant à mesure du discours la faisabilité probable de la chose.

A la mention de ce qu'il était prêt à avancer pour arriver à ses fins, Agnès esquissa une petite grimace et leva les yeux au ciel. Finalement, s'il semblait être prêt à céder beaucoup, Digoine ne proposait rien de concret. Elle haussa les épaules lorsque son rire de chacal finit de se répercuter dans le salon. Balayant d'un geste agacé le verbiage, elle relut une dernière fois les documents avant de les abandonner sur le guéridon.


Blanc-Combaz... Je ne vous cache pas que ce que vous me demandez est tout aussi périlleux que sa réalisation fortement improbable.

Le front se plissa un instant.

Vous ne promettez rien de palpable alors que les risques tant pour moi que pour l'aide que je pourrai trouver sont conséquents. Alors, dites-moi, mis à part partager vos chimères et parier sur du vent, qu'est ce que vous proposez pour appâter le chaland ?

L'éternelle petite moue boudeuse reprit possession du visage de la Saint Just. Il ne lui plaisait guère avoir discours de commerçant, mais il s'agissait surtout de s'acheter les bonnes grâces de la tierce personne qui pourrait rendre l'opération réalisable et tout avait un prix.

Une fois cela mis au clair, je vais vous demander de me laisser le soin de voir si cette affaire est réalisable. Et je ne vous promets pour ma part, rien.

Elle hocha la tête pour ponctuer sa tirade avant de se resservir un godet de vin.

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Eusaias
Le regard d’oiseau de proie s’était accroché aux lèvres de Dicé comme pour déceler dans ses mots une chose qu’il pourrait utiliser. Il était évident que l’entreprise était aussi périlleuse que juteux, périlleuse pour elle, juteuse pour lui. Il savait le caractère d’Agnès de Saint Just très fort tout comme il la savait réfléchie et il ne fut pas déçu par ses propos. Comme son contrebandier favori « La Camelote » ou alors le vieux Grégoire maquignon bourguignon, Agnès partait d’une quasi négation, s’appuyant sur le fait que rien n’était avancé.

D’un naturel calculateur, Eusaias n’abattait jamais en premier ses cartes, mais là, il devait bien faire une concession.

Bien alors parlons « palpable ». Je ne sais qui vous allez contacter, je ne sais donc pas ce qui pourrait intéresser ces personnes. Par contre je sais ce que je peux proposer des qualités, vous me direz ce qui peut être intéressant et alors je proposerai des quantités. Il me semble qu’ainsi nous irons mieux dans le même sens, belle enfant.

Ses doigts se croisèrent afin de lier les deux mains à hauteur de son menton. Les coudes posés sur la table et le front posé contre les mains, il réfléchit un court instant avant de relever le regard sur Dicé.

Bien, je peux donc mettre dans la balance, des écus sonnants et trébuchants, un destrier, quelques pièces d’armures, des arbalètes, des pièces d’artilleries venues d’Allemagne, un cheptel de bœufs ou encore de vaches limousines, des céréales, de l’excellent vin de Bourgogne, des faïences de Digoine, des menuiseries au bois fin et rare. Hum… des produits plus exotiques comme ses produits venant d’orient, ou alors des choses moins raisonnables : des vierges, des esclaves…. Certains de mes « remèdes ».

Au mot remède, il porta son pied contre la cheville d’Agnès et le remonta lentement le long du mollet un sourire malin affiché.

Quant à vous, ce que vous voulez je vous ai dit, même un anneau d’or.
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Gnia
Imitant son vis à vis, elle posa un coude sur la table, son menton fut reçut dans la coupe d'une paume, les doigts jouant sur les lèvres comme l'on presse les cordes d'un violon. Un discret sourire en coin vint soulever la commissure de sa bouche tendit qu'il parlait quantités et qualités. A l'énumération des largesses possibles du baron, le visage se zébra d'un sourire caustique et une lueur amusée brilla dans les azurs du héraut.
Jusqu'à ce qu'elle sente un petit bout de cuir froid contre la peau de sa jambe.

Agnès haussa un sourcil interrogateur, ignora la remarque sur les remèdes du Blanc-Combaz, même si elle bouillait de connaitre la spécifique composition de l'un d'eux et se contenta d'écarter lentement la cheville du bout de botte fouineur. Relevant le menton et toisant le Bourguignon, elle lui rétorqua


Ne confondez pas offre et demande, Baron.
La bague à mon doigt vous rapportera plus à vous qu'à moi. Dès lors, cela ne peut être considéré comme une offre que vous me faites, pour les services que vous requérez.
Et si vous n'offrez pas, Digoine, il faut alors demander....


Ponctuant sa pique d'un sourire cynique, elle jeta un coup d'oeil en coin à son vassal qui restait coi, pencha ensuite effrontément le buste vers le Baron et murmura

Mais puisque je suis en droit d'exiger de vous ce que je veux, préalablement à toute étude de cette affaire, vous ne partez pas sans m'avoir procuré de cette poudre dorée qui a scellé l'alchimie de notre première entrevue.

Une profonde inspiration qui soulève délicatement le galbe du décolleté, un sourire enjôleur, un battement de cil et la belle enfant laisse à nouveau aussitôt la place à l'Infâme.
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Eusaias
Il regarda sous la table voir si c’était bien la cheville de l’infâme grandeur qui avait repoussé son pied. Moue de déception avant de porter son attention sur l’encadrement de la porte ou venait d’apparaitre « la nouvelle promise du Seigneur de Auteux ».

Et bien voilà qui est parfait ! Avec des miches comme cela là, mon ami tu ne devrais pas t’ennuyer, si tu me permets évidemment de m’exprimer de la sorte.

Il porta son attention sur l’ami en question, Puylaurens Seigneur des Auteux.

Merci encore de ton aide et point ingrat je serai. Je t’obtiendrai fief en Bourgogne dès que possible, si tu l’acceptes. En attendant, porte-toi bien et prenez soin de ne pas être ennuyé en sortants. Le Garde devrait réussir à retenir quiconque de manière habile, puis… tu as bien le droit de voir ta suzeraine. Allez y et merci encore.

Il le salua de la tête et se leva en même temps afin de se glisser derrière la Saint Just. Il toisa d’un regard allumé le cou de la jeune femme, sa main allant se poser sur une des épaules.

Il y a du vrai dans ce que vous dites, j’y gagne dans ce mariage si rien ne se passe. Vous y gagnez, croyez-moi, si j’obtiens. Mais puisqu’il faut demander je demande sans hésiter à combien s’évalue votre aide. Ne voyez pas là, un jouvenceau qui demanderait le tarif à une puterelle. Mais par cette manière abrupt nous irons plus vite, ainsi nous pourrons vaquer à d’autres divertissements.

Profitant d’être seul avec elle, il saisit l’une de ses fioles cachées dans la manche de sa chemise. Ses dents tiraient sur le minuscule bouchon de liège qu’il cracha au sol. La fiole fut posée sur la table, devant Agnès et alors que la main aurait dû retrouver l’épaule, elle s’invita dans le décolleté de la Comtesse. Ses doigts saisirent délicatement un sein dont il tortilla l’extrémité rose.

Allons buvez ceci, vous aimez. Vous me direz ce que vous voulez, au creux de l’oreille et sur l’oreiller… entre deux gémissements.
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