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[RP] Taverne le Rat Crevé

--Janoz




Mille visages …

Mille visages prisonniers de l’infâme vinasse au reflet violacé qu’il agite doucement au fond de son verre.

Mille visages aux contours rendus flous par le doux roulis du picrate, mais qui renaissent inlassablement, limpides et nets, lorsque cesse le balancement léger. Mille fantômes du passé qui surgiront éternellement de cette plaie à jamais béante, au fond de lui. Enfants rieurs aux traits espiègles parsemés de taches de son, capables des pires bêtises mais si attachants. Faciès taillés à la serpe des adultes nourriciers, aux gueules épouvantables. Expression affectueuse et perpétuellement soucieuse de sa maman, penchée sur la casserole de soupe fumante. Bouilles fripées et édentées des aïeux qui radotent en tremblotant et ressassent les mêmes histoires depuis des décennies.

Mille visages, comme mille poissons prisonniers de la nasse, grouillant en tous sens, dans un flux et reflux argenté et visqueux.

Janoz ferme un instant les yeux, et il les entend. Les tambourins invitent à la danse, et les jupons colorés tourbillonnent et s’envolent, laissant apparaître les jambes bronzées des gitanes. Ensuite, un violon se met à pleurer dans un coin. Ses notes sont approximatives mais si belles. Des voix éraillées s’élèvent autour du feu. Il reconnaît ces voix, il reconnaît ces chants qui naissent au fond de l’âme et grimpent allègrement vers les cieux. Des frissons lui parcourent la peau. Ses entrailles se nouent.

Et le retour dans le passé se termine soudain dans le fracas d’un verre brisé, à une table voisine. Il est à nouveau seul au milieu de ce troupeau bruyant, dans ce bouge infâme. Douloureux sentiment d’être invisible, de n’intéresser personne. De ne pas être là. De ne pas être, tout simplement. D’ailleurs, qui remarquerait ce jeune homme maladif, au teint sombre, parmi les brigands aux regards féroces, les ivrognes aux regards arrogants ? Alors que son regard à lui est vide, fuyant, humide, à demi dissimulé par sa tignasse épaisse.

Besoin de parler, pourtant. De partager une parcelle de sa vie d’avant. Besoin de parler, oui, mais qui lui donnera un peu de son temps ? Qui se passionnera pour sa famille, sa roulotte, son Danube ? Bon sang, comment n’a t-il pas remarqué que le bonheur était là, sous ses doigts ? Que de temps perdu si loin des siens. Tout est vain dans ce vin.

Mais de nouveau ses yeux s’amarrent à son verre. La piquette aux teintes pourpres se métamorphose en un tendre miroitement du soleil sur l’ondulation azurine de son fleuve, là-bas, à l’Est. Et il s’évade à nouveau sur ses rives sauvages.

Carmeen
L'homme est égoïste. Il ne pense qu'à lui et à lui seul. A son passé, à son futur. A ses malheurs, à ses amours, à ses ennemis. A son argent, ses dettes, ses histoires et ses problèmes. Toujours à se préoccuper de ses affaires, mais aussi de celles des autres. Car oui, notre homme est de nature curieuse... il est aussi chiant, impatient, râleur, certaines fois peureux et lâche. Bref, tellement l'intérêt général de tous tourne autour des humains qu'on en oublie que sans certaines choses -à première vue insignifiantes- ils ne pourraient vivre à leur aise.

Par exemple, regardons cette porte en bois usé, délicatement calée entre les murs miteux du Rat Crevé. Savons-nous seulement ce qu'elle a enduré ? Le nombre d'années qu'elle se trouve ici, sans jamais ronchonner ? Elle, petite porte, qui s'ouvre et qui se ferme au gré des envies de l'homme qui la maltraite, qui la frappe... comme la donzelle qui vient d'entrer. Baaam, elle claque contre le mur, et baaam elle se ferme avec tout autant de brutalité. Voilà un exemple parfait de l'humaine égoïste et qui se fout de tout. Et comme tout le monde, même pas elle s'excuserait celle là !!!

**

Carmeen, en furie, essoufflée, trempée, marmonne un juron en argot incompréhensible lorsqu'elle sent derrière elle claquer la porte de la taverne, porte qui se referme sur une violente averse venant tout juste de tomber sur la Cour des Miracles.
De se mains lourdes de bagues, elle remet ses cheveux dégoulinant d'eau de pluie en arrière, dévoilant entièrement son visage et son front laiteux, -ou pâle comme la mort, chacun son point de vue- contrastant avec sa cape noire, qui l'emmitoufle toute entière.

Tout doucement, elle avance dans la salle bondée et bruyante, alors que sous ses longs cils ses pupilles sombres s'activent et cherchent un endroit où se poser. Son corps tout entier réclame de la chaleur et son estomac à manger. Se laissant rêvasser quelques instants, elle repense à la Provence et sa mer, sa tranquillité, mmh il est loin le temps des siestes à l'ombre des oliviers et des alcools aux épices...

Machinalement, l'ombre qu'elle est se glisse entre deux tables, se fait bousculer par des clients barbus qui partent, donne des coups de coudes à ces mêmes clients, qui les lui redonnent, échange de regards noirs, le poing de la brune se pose bruyamment sur la première table venue, avertissement pour les messieurs, non je ne me laisserai pas faire et oui, partez vite... ses sourcils se froncent, et déjà la porte d'entrée se referme.
Ses lèvres se tirent légèrement en un sourire de satisfaction, elle continue d'avancer vers la table vide repérée.

Soudain, quelque chose l'arrête. Quelque chose de brûlant, là, entre ses doigts.
--Janoz




Au fond de son verre se dessinent lentement quatre roulottes mal éclairées, immobiles depuis des mois sur les rives boueuses du Danube. La plus longue d’entre elles résonne de braillements, de jurons et de rires. Son plancher vermoulu tressaille sur ses roues étroites. Cette nuit là, la sljivovica coule à flots. L’oncle Vladimir est revenu de France, des cadeaux pleins les bras, des bagues pleins les doigts, massives, jaunes, brillantes ... Jamais Janoz n’en avait vu de pareilles ! L’or monopolise son regard, et, du haut de ses douze ans, il ne loupe pas une seule syllabe des prodigieuses aventures vécues par cet oncle qu’il connaît si peu, mais qui s’est enrichi en quelques années de magouilles et d’entourloupes plus rusées les unes que les autres.

Cette nuit, c’est la fête, tout est permis, Janoz boit autant que les adultes, qui ne lui consacrent que peu d’attention, absorbés par la joie des retrouvailles. Il a le feu dans la gorge, mais il est un homme, à présent. Et quand son père se lève en titubant, les yeux révulsés par l’alcool, emmenant avec lui oncles et cousins, Janoz les suit.

Une charrette est rapidement attelée ...



Soudain, une quinte de toux l’arrache à ses souvenirs. Une toux rauque, pareille à un aboiement, une toux qui déchire la poitrine. D’une main fiévreuse, Janoz tâtonne dans la besace miteuse qui pendouille à son épaule. Ah, le voilà, le petit flacon de verre épais, au contenu mystérieux et à l’odeur infâme, qui vous soulève le cœur et vous agite les tripes dès qu’on l’approche du nez. Quelques gouttes sur la langue … patience …


Et les voici attablés dans une taverne crasseuse de Mlada Boleslav.

Ambiance surchauffée, regards méprisants entre gadjos et gitans. L’hostilité est palpable. Le défi étincelle dans les prunelles. Les poings se serrent. Les rancunes accumulées depuis des générations se réveillent. L’alcool enflamme, l’alcool exacerbe les haines et les passions. Les insultes entraînent les premiers coups, et la bagarre est générale.

Débris de verres, geysers de sang éclaboussant les murs, poignards surgissant entre les doigts comme par magie, frayeur d’un gamin impuissant se dissimulant dans l’abri dérisoire que lui offre une table renversée par deux colosses qui s’écharpent furieusement. Cris des enfants. Larmes des femmes. Blessures. Agonie.



La robe couleur rubis du vin et le rouge écarlate du sang se confondent dans le verre qu’il serre entre les doigts. Une peur rétrospective inonde son front brûlant.


Et la grande faucheuse réclame impitoyablement son dû, son quota de cadavres. Tableau d’horreur que ce corps émasculé, que ces lambeaux de chairs flasques et sanguinolents pendouillant entre les jambes de ce gadjo qui était trop fort en gueule.

Mais leurs adversaires sont trop nombreux. La fuite est la seule issue. L’oncle l’a tiré par le bras et le jette vivement dans la carriole. Les deux canassons partent au galop vers leur refuge, leurs roulottes, que deux cousins battus à mort ne reverront jamais.


***

Un choc, tout à coup, et bien réel cette fois ! La porte de la taverne s’est refermée dans un claquement assourdissant. Entraînant à sa suite une bourrasque de pluie et de vent, une donzelle est entrée en marmonnant quelques jurons qu’il reconnaît sans peine. Du hongrois.

Sacré caractère que cette fille ! La voilà qui essaie de pulvériser le mobilier à coups de poing, tout en foudroyant du regard quelques poivrots qui chancellent vers la sortie. Le verre de Janoz ne résiste pas à un tel remue-ménage et roule sur la table. Le gitan l’empêche d’extrême justesse de se fracasser sur le sol poisseux, et, mi-amusé, mi-contrarié, il tend la main pour se saisir du poignet de l’inconnue. Ce sont ses doigts qu’il agrippe entre les siens.

Il lève les yeux et dévisage la brunette avec insistance. Ce teint si clair, cette peau diaphane, est-ce bien l’apanage des filles de sa région ? Voilà qu’il doute un peu.


Jó napot … Bonjour … J’ai entendu tes paroles lorsque tu es entrée. Je pense que tu viens comme moi des rives du Danube, non ?

Une nouvelle quinte de toux le submerge et il détourne la tête pour ne pas imposer ce triste spectacle à la brune. Il attend quelques instants, histoire de retrouver un brin de souffle, puis poursuit d’une voix rauque et voilée. L’amorce d’un sourire se fraye un chemin sur ses lèvres pâles.

Si tu ne crains pas les microbes, assieds-toi à cette table, et parle moi du pays. Il me manque.

Carmeen
Carmeen baisse la tête, avec lenteur presque exagérée, comme si sous ses pieds venait de se produire la catastrophe du siècle. Ses pupilles se posent alors sur une main agrippée à ses doigts. Avec méfiance, elle continue sa découverte, de ses billes noires elle longe un bras recouvert d'une chemise sale dont l'odeur dégagée n'est pas bien odorante, remonte le long d'une épaule presque affalée sur la table, puis finit sur une tête qui, à première vue est composé seulement d'une grande et longue tignasse.
Puis, l'homme parle, et l'air qu'il expire à ce même moment soulève quelques mèches brunes, laissant entrevoir un bout de sa bouche, autour de laquelle perlent des gouttelettes de sueur.
Sans le quitter du regard, prenant garde à lâcher doucement sa main embrasée, attentive à ses paroles -enfin, les dernières, les premières bizarrement elle les a loupé-, ses attitudes propices à la découverte, elle se pose sur la chaise en face.

"parle moi du pays. Il me manque."

Involontairement, plutôt par habitude, ses sourcils se froncent, puis le gauche se lève. Elle attend quelques secondes, se demande s'il blague, puis s'avisant qu'il ne réagissait pas et attendait une réponse, elle se laisse retomber contre le dossier de sa chaise en poussant un grand soupir.

Eh, mon gars, je crois que tu fais erreur. Tu parles de quel pays ? D'ici, t'veux dire ? Bah y a trop rien à raconter, des rats, des flaques d'eau, des ivrognes et des catin, la routine quoi ! Bon, si tu parles du sud, bah là, il fait chaud, la guerre est terminée, j'sais pas trop comment ont fini les provençaux mais bon...


Un couple rentre dans la taverne, laissant pénétrer un courant d'air frais qui fait frémir Carmeen, et élevant les cheveux de l'homme en face, de manière à découvrir son visage, entièrement.
Sa peau ambrée, ses yeux injectés de sang et pourtant si sombres, ses lèvres dessinées avec une stricte précision, son front large et imposant, qui lui rappelle étrangement quelqu'un...

"Monte ! Carmeen, allez, monte là-dedans, et surtout, surtout ne fais pas de bruit..." il fait nuit, la voix masculine raisonne dans l'atmosphère silencieuse aux vapeurs d'herbe et de feuilles humides. La fillette, âgée d'à peine 4 ans, opine de la tête, puis grâce à l'aide de l'homme, grimpe dans un tonneau aux effluves fruités. De l'intérieur, elle le regarde. Ses traits sont flous, mais le contour de sa bouche et l'intonation de sa voix portent à croire qu'il est plutôt confiant, voir même serein.


Carmeen se sent très fatiguée. Elle se frotte le front, et de sa main essuie plusieurs perles de pluie qui roulent sur sa joue, formant ainsi des gouttes identiques aux larmes, juste sans sel. Émoustillée elle se sent, aussi. La présence de cet homme en face d'elle devient lourde, et plus elle le regarde, plus ça devient une évidence, et plus l'évidence devient... plus un poids se forme dans sa poitrine, un poids lourd de souvenirs et d'interrogations.

Ce n'est plus Carmeen qui parle, mais sa mémoire, qui refait surface, là, tout d'un coup, à la vue de ce brun.

Gitan, pourquoi tes yeux sont si rouges ? pourquoi chacune de tes paroles sont ponctuées par une toux ? pourquoi tout ton corps crie au martyr, et pourquoi bois-tu ça ? finit-elle en désignant de son doigt entouré d'une bague d'argent la fiole au mystérieux contenu.
Gitan, elle se rapproche légèrement, s'appuyant de ses coudes sur la table, je crois que nos cœurs battent au même rythme.
Et là, elle se sent redevenir enfant, sans famille, sans repères. Il y a juste ses yeux noirs et ses oreilles percées qui ont vu et entendu, des scènes coupées et incertaines, des bribes de conversations et des musiques tirées vers des aigus dissonants.
--Janoz




Pourquoi ? Pourquoi diable lui parle t-elle de la cour des miracles, puis de la guerre en Provence ? D’ailleurs, où est-ce, la Provence ? Franchement, il se moque comme de sa première cuite des misères de ce monde ! Les siennes lui suffisent amplement ! Chacun porte sa croix. Une incompréhension soudaine vient se nicher dans les yeux de jais du gitan. Et s’il se trompait totalement ? Si cette brunette explosive n’était point une enfant de Bohème, mais simplement une gueuse parmi tant d’autres, n’offrant aucun intérêt particulier à l’exception d’un visage agréable ? Non, ce n’est pas possible. Il ne peut se tromper à ce point. Les filles et les fils de l’Est lointain, les romanichels, les voleurs de poules, ainsi qu’on les surnomme avec dédain et un zeste de crainte, il les identifie d’habitude sans commettre d’erreur. Il a l’instinct de sa race. Il les reconnaît à leur accent, mais aussi à leur attitude, à leur caractère. Miséreux et fiers, souvent arrogants et provocateurs, voilà ce qu’ils sont ! Voilà ce qu’elle est ! Voilà ce qu’il était aussi, autrefois, avant que cette fichue maladie ne le grignote lentement, ne le ronge comme un vil charognard, ne le prive de force et de souffle. Avant qu’il ne devienne cette bougie qui se consume depuis longtemps, trop longtemps, cette flamme vacillante et ténue qui s’éteindra bientôt, inexorablement.

Et la brune, assise face à lui, poursuit, interroge, récupérant sa blanche main avec douceur, essuyant délicatement ses joues humides. Oui, gitane tu es, oui, tu es de mon sang, mais tu es femme aussi, curieuse et pressée de tout savoir, répondant à mes murmures à peine audibles par une foule de questions, alors que je me désespère, alors que j’ai hâte de t’entendre parler de chez nous. Là-bas.

A contre-cœur, le gitan écoute, maîtrisant son impatience, cette impatience héritée de son père.



Son père qui le pousse à l’abri des buissons, qui l’oblige à y rester caché, puis qui se rue vers ces maudits gadjos qui ont rapidement retrouvé leur trace. Devant les roulottes en flammes, vie et mort dansent un sinistre ballet. Les lames des poignards brillent dans la fumée de l’incendie. Les gitans, encerclés, en nombre restreint, tombent un à un devant le brasier rugissant. Leurs adversaires triomphent et s’acharnent sur le dernier d’entre eux, désarmé, à leur merci. Ils le soulèvent et le projettent au milieu des flammes. C’est une torche vivante qui s’éloigne en hurlant et qui s’effondre au milieu des rochers. Puis, loin d’être repus, riant aux éclats, ivres de violence, les gadjos arrachent les vêtements des femmes, et violent odieusement mères, filles, sœurs, cousines. Impuissant, blotti dans le feuillage, Janoz assiste à la barbarie de la scène. Seuls quelques gosses affolés réussissent à échapper au massacre en s’éparpillant dans les ténèbres. Orphelin depuis quelques instants, lui aussi se met à courir sur les rives du fleuve, la rage au cœur, les yeux remplis de larmes, s’éloignant du tumulte et de la fournaise.


La brune s’est enfin tue et le dévisage. Janoz émerge lentement de l’enfer. Il répond par phrases brèves, par saccades, épuisé par les événements qu’il vient de revivre si intensément, tout autant que par cette fièvre qui ne le quitte plus. D’un geste du menton, il désigne la fiole de verre posée entre eux.

Tu vois cette bouteille, petite ? J’ai longtemps cru que cette mixture allait me maintenir en vie. Mais j’en doute à présent. Mes jours sont comptés. Je le sens. Je le sais. Il me reste quelques semaines à vivre, tout au plus. J’aurais voulu revoir mon pays, contempler une dernière fois mon Danube se faufilant entre les collines comme un serpent de lumière. J’aurais voulu emporter avec moi sa douce image dans le pays de l’au-delà, celui que je vais rejoindre pour toujours. Mais désormais je me sens trop faible pour entreprendre ce long voyage. Je suis seul, sans argent. Je suis épuisé. Je ne suis plus qu’une loque. Oui, j’ai trop attendu, espérant naïvement que le beau temps me rendrait les forces nécessaires. J’ai eu tort. Je crèverai ici, au fond d’un fossé, et mon cadavre nourrira les rats …

Janoz se tait un instant, posant une main brûlante sur sa poitrine. Il respire rapidement, avec avidité, comme si c’était la dernière fois. Le feu se calme dans ses entrailles. Il pose les coudes sur la table et reprend d’une voix brisée.

Il me reste quelques sous, petite. Veux-tu les boire avec moi pour fêter dignement notre rencontre ? Oublions un moment que la mort m’a choisi pour compagnon de route. Tu es jeune et légère, peut-être danseras tu pour moi tout à l’heure ?

Carmeen
La brune, une main soutenant son menton, boit avec avidité les propos du gitan, et il parle, et ses mots s'enchainent, s'enroulent, résonnent agréablement, et il a cet accent, cette assurance, chaque syllabe est soigneusement pesée et soupesée, donnant l'impression d'être encore plus importante et solennelle que la précédente, et ses soupirs, ses pauses sont méticuleusement dispersés, l'un plus retenu que l'autre, l'autre plus accentué que l'un... et il parle, et elle l'écoute inlassablement, elle se surprend même, pour une fois qu'elle porte de l'attention à quelqu'un. Lentement, involontairement, peut être même instinctivement, son visage caché par les mèches désordonnées brunes se mue en celui d'un autre homme, mais sûrement pas moins gitan que lui.

"Tu vois, ma jolie Carmeen, toutes ces couleurs rouge-orangées, tu as vu comment elles font mal aux yeux ? Ce sont des couleurs vives et chaudes, c'est pour ça qu'il ne faut pas s'en approcher car elles brûlent en plus elles dégagent une mauvaise odeur, mais ne tousse pas mon enfant, ne tousse pas, il ne faut pas faire de bruit, n'oublies pas. Toutes ces couleurs, elles ont horriblement faim, alors elles engloutissent tout, l'herbe, les arbres, nos roulottes. Mais ne t'inquiète pas, ma Carmeen, tu es en sécurité ici, je te le promets, ton père te le promet."
A l'intérieur de son tonneau, la fillette l'écoute, la tête dirigée vers le haut, vers un ciel dont les étoiles sont dissimulée par une épaisse fumée.


Alors buvons, gitan. Et garde ton argent. D'un signe de la main, elle interpelle le serveur, lui glisse deux pièces, et presque aussitôt, il pose deux choppes débordantes de mousse. Tu crois que la bière c'est bon pour toi ? sans attendre de réponse, elle lève son verre pour trinquer avec celui de son voisin, boit une gorgée, le repose. Dans son état, rien ne doit être bon, et ce ne sont pas les tavernes misérables des Miracles qui doivent le soigner.

Je danserai pour toi, oui, mais avant, réponds moi, écoute moi, j'ai tellement de questions pour si peu de réponses, et t'avoir en face de moi, je ne sais pas... je me souviens, je me souviens de toutes ces choses que me semblent si inutiles, sans importances, je me souviens de l'Avant, alors que jamais, jamais je n'ai pu m'en souvenir, c'est comme si ma mémoire avait banni toute trace de mon enfance. Il y a des images dont je ne sais la provenance, des lieux, des visages dont je ne connais le nom, et plus je te vois, et plus ils me hantent.

Son coeur commence s'affoler, sonnant des grands coups irréguliers sur ses côtes, avec sauvagerie.

Alors dis moi gitan, pourquoi est ce que mon passé est si vide ? Je ne sais pas d'où je viens, pourtant mon corps vibre et mes sens sont en éveil lorsque la musique résonne. Puis-je être des vôtres seulement de corps, dis moi ?
--Le.masque
[ACTE PREMIER]

Il pénétra dans l'établissement haute silhouette couverte d'une cape d'un gris profond, ample capuche tirée sur la tête.

Son entrée ne passa pas inaperçue, et plusieurs paires d'yeux se posèrent sur lui avant que le tavernier ne l'apostrophe d'une voix forte alors qu'il se dirigeait vers le comptoir.


Et toi ! Montre nous ta trombine, on aime bien savoir à qui on a affaire dans l'coin.


Il s'arrêta, ses mains se portant sur sa capuche qu'il tira en arrière pour dévoiler son visage... Mais, à défaut de visage, c'est un masque, un masque de bois poli qui s'offrit aux regards incrédules qui l'observaient.



Il reprit sa marche vers le comptoir, sous les murmures entrecoupés parfois d'exclamations des clients. Le tavernier était habitué à voir des gens étrangement accoutré en ce lieu. A première vue, le visiteur lui était inconnu, mais malgré tout, il lui rappelait vaguement quelque chose, quelque chose de perdu dans les tréfonds de sa mémoire...

L'homme masqué s'accouda au comptoir, et plongea son regard sombre dans celui du tavernier. Ce dernier ne s'en laissa pas compter, et soutint le regard avant de lâcher d'une voix haineuse, pensant ainsi prendre l'ascendant sur son interlocuteur.


Qu'est c'qu'il veut l'saltimbanque.


En même temps qu'il prononçait ses mots, sa main se posait sur la garde d'une épée dissimulée derrière le comptoir. Il savait aussi que dans la salle, plusieurs hommes étaient prêts à bondir pour régler son compte à l'importun si cela s'avérait nécessaire. A la Cour, mieux vaut prévoir, car l'erreur ne pardonne pas...

Le Masque est de retour.

La voix était froide et dure, les mots prononcés sur un ton monocorde et sans émotions.

L'homme tressaillit. Il se souvenait enfin de ce masque, mais c'était impossible... Le Masque... Pour les jeunes il ne s'agissait que d'une vieille légende bonne à faire peur aux jouvencelles et aux gamins capricieux. Les anciens, par contre, en parlaient à demi-mot, le regard empli d'admiration ou de haine, mais toujours, la peur pouvait se lire dans leurs yeux lorsqu'ils évoquaient ce nom.

Le Masque, l'un des seigneurs de la Cour, du temps de l'âge d'or. Mais ce temps était révolu, perdu dans les méandres du temps qui passe, et Le Masque n'était plus qu'un mythe, une mythe dont le souvenir encore vivace s'éteignait lui aussi peu à peu, malgré les efforts futiles d'une poignée d'illuminés agissant encore en son nom...

Sauf que... sauf que l'homme qui se tenait devant lui portait un masque similaire à celui qu'il avait dans son lointain souvenir. Il tenta de lire dans ses yeux sombres, dans ce regard insoutenable qui semblait vouloir lui transpercer l'âme. Son regard se porta alors sur son visage, pour essayer d'y trouver une quelconque trace d'humanité à laquelle se rattacher, mais, où que se posent ses yeux, il ne voyait que le bois lisse, sans aspérités, et froid de ce masque inhumain.

Il croisa de nouveau le regard de l'homme, une lueur de défi dans les yeux. Il en avait vu bien d'autre, mais la lueur qui s'éteignit bien vite devant la détermination farouche née d'une volonté inflexible qu'il lit alors.

Il avait perdu. Il ne le savait pas encore, mais il avait perdu. Car le doute s'empara de lui, un doute qui s'insinua petit à petit dans tout son être. Et si... et s'il s'agissait bien de lui... et s'il s'agissait bien du Masque, craint et honni entre tous, maître des apparences, seigneur de la Cour qui y avait droit de vie et de mort...

Il luttait... luttait pour que ses genoux ne tremblent pas. Mais ses genoux tremblaient.

Il luttait... luttait pour que la boule dans son estomac disparaisse. Mais elle ne disparaissait pas et ne faisait que grandir.

Il luttait... luttait pour ne pas détourner les yeux. Mais il baissa la tête, signifiant par la même qu'il était vaincu.

L'homme masqué se redressa alors, un sourire fugace s'inscrivant sur son visage. Il se retourna, posant son regard noir sur l'assemblée plongée dans un silence inhabituel, rabattit sa capuche et sortit sans un mot de l'établissement...




Un ruelle entre deux bordels
--Janoz



Curieuse rencontre, en vérité, entre cette gitane qui n’a pas de passé et ce gitan qui n’a pas d’avenir, cette gitane qui tente de se reconstruire une vie, et ce gitan dont la vie est détruite. Le destin avance ses pions de manière inattendue. Curieuse rencontre, oui, mais loin de satisfaire la curiosité de Janoz, la brune, dont il ignore encore le nom, semble chercher au fond de ses yeux sombres la clef qui ouvrira sa boîte à mystères. Pourquoi fouille t-elle ainsi en lui ? Pourquoi toutes ces questions dont il a du mal à cerner le sens profond, la finalité exacte ? Qui est-elle ? Que veut-elle ?

Tu me dévisages avec insistance, mignonne. Essaies-tu de lire en moi ? Espères-tu trouver au fond de ma vieille carcasse malade un chemin qui te mènera vers la lumière, vers le souvenir ? Ecoute. Ecoute ce que fût ma vie. Prends pour toi ce que tu y trouveras d’utile. Et ensuite tu me raconteras ce dont tu te rappelles de la tienne. Mais je t’en prie, ne me parle pas par énigmes, petite, mon cerveau embrumé a atteint ses limites, et je ne connais pas la réponse à tes questions étranges. Allez, egészségedre ! Na zdrawie ! A ta santé …

Janoz vide son verre d’un trait, comme si la bière coulant en lui pouvait éteindre l’éruption de lave qui lui consume les entrailles. Il s’essuie la bouche du revers de la main, étouffe dans le tissu de sa manche un éternuement douloureux, puis reprend son histoire, se déshabille le cœur pour la première fois depuis des années.

Ma famille toute entière a péri dans un incendie allumé traîtreusement par des inconnus, en représailles d’une bagarre extrêmement violente dans une taverne pourrie de Mlada Boleslav. Ces salauds n’étaient pas des gitans, ils n’étaient même pas des hommes, non, c’étaient des monstres. J’ai réussi à m’enfuir de justesse. J’étais encore un gamin à cette époque, et j’ai erré durant une éternité. J’ai volé pour vivre, ou plutôt pour survivre. Je me suis battu souvent. J’ai dormi où je trouvais, n’importe où, dans des maisons en ruines, dans les bois, dans la neige. Et je suis devenu un loup solitaire, un fauve aux abois, ne donnant sa confiance à personne, marqué à tout jamais par la vision d’horreur des corps de mes parents dévorés par les flammes. J’entends encore les rires de leurs assassins, j’entends encore les cris de douleur de ma mère, de mes sœurs.

Epuisé par cette tirade interminable, le gitan s’interrompt, puis se tourne vers le comptoir, hèle le tavernier rougeaud en discussion avec un homme masqué. Aucun intérêt. Janoz vide cul sec un autre verre, puis poursuit le récit de ses mésaventures.

Tu as raison, petite, la bière ce n’est pas ce qu’il y a de mieux pour moi, mais c’est un de mes derniers plaisirs. Et parfois, elle chasse mes fantômes. Que disais-je donc ? Ah oui. C’est là que j’ai attrapé cette fichue maladie qui a raison de moi, en traversant ces hivers rudes et glacés. Ensuite, longtemps après, le hasard m’a mis en présence d’une roulotte d’émigrants se dirigeant vers l’Ouest. Ils parlaient notre langue. Je me suis approché malgré mon insociabilité. Ils m’ont aidé, ils m’ont déposé ici, avant de repartir vers d’autres horizons plus accueillants. Je suis resté. Quelle erreur monumentale. Voilà, à présent tu connais tout de la vie de ton nouvel et éphémère ami Janoz, petite. Tu connaîtras bientôt aussi tout de sa mort. Ce que je regretterai le plus, c’est de ne pas avoir revu ma terre natale avant de fermer mes paupières pour l'éternité. C’est dommage, oui, mais les regrets n’y changeront rien. A toi, maintenant, petite. Raconte moi. Ramène mon esprit et mon cœur sur nos rivages, puisque mon corps est condamné à moisir ici.

Carmeen
Carmeen pousse un très discret soupir d'aise, ses muscles contractés se détendent, et elle se blottit langoureusement au fond sa chaise. Enfin, enfin elle a réussi à susciter la curiosité du gitan, qui s'intéresse à elle et la voit maintenant autrement qu'en une gitane banale venue du Danube, dont elle pourrait lui remémorer le paysage et les couleurs. Il finit sa bière d'une traite, et déjà sur son visage se devine un plaisir intense. Le verre reposé est ponctué par des mots dont la consonance lui rappelle bizarrement ses propres jurons, qu'elle croyait sortis tout droit de son imagination. Finalement, est ce possible que ce soit la même langue ?

"Davaï, idi suda ! Carrrrmeen ! Chto eto takoe ? Qu'est ce que tu as fait là ? Tu t'es rrroulée dans de la boue ? Arrhhh ti !*" voix paisible et bienveillante, même les phrases les plus quelconques donnent l'impression d'être une mélodie, accompagnée de r roulés, plusieurs langues confondues, fusionnées.


De statue de marbre il est passé à conteur d'histoires, c'est comme si un déclic s'était tout à coup produit dans son cerveau ravagé par la maladie, la bière et la vie, sa vie. D'ailleurs, il a repris vie. Ses mots sont plus rapides que les précédents, plus rythmés, comme si son heure allait sonner et que chaque parole était une délivrance avant l'heure fatidique, une confession. Il ne tousse plus, et pourtant, ses yeux brillent encore plus fort, comme s'il retenait entre ses entrailles un incendie dont les flammes brûlent sa gorge.

Le récit suit son cours, les propos prennent forme dans la tête de Carmeen, elle s'imagine, elle rêve, elle a certaines fois l'impression de se rappeler, puis l'impression disparaît et le vide revient. Pourtant, certains souvenirs du gitan se combinent étrangement aux siens, qui ont refait surface lorsqu'elle s'est assise à ses côtés. Des flammes, la panique, et certainement la fuite qui s'en suit. De toute manière, il ne lui en faut pas plus pour se rendre à l'évidence.

Janoz... Janoz le gitan...
elle le regarde avec insistance, articulant lentement les deux syllabes de son nom, maintenant qu'il lui est connu. Je crois, j'en suis même sûre, cet incendie dont tu me parles... j'y étais. J'ai comme l'impression de revoir ces flammes, d'entendre ces cris, de sentir cette odeur oppressante de fumée. Mon passé est comme totalement effacé de ma mémoire, et pourtant ton récit me parait presque familier. J'en suis presque certaine, j'étais parmi ces gosses, et un adulte m'a aidé à m'enfuir. Mon prénom, Carmeen, t'évoque t-il un quelconque souvenir ?

Elle s'arrête un instant, s'hydrate une dernière fois le gosier avec sa bière, puis reprend.

Je ne peux ramener ton esprit vers nos rivages, comme tu dis, vu que c'est ce que le mien cherche également. Tu ne peux y retourner, et les regrets n'y changeront rien? Peut être, mais moi je peux y changer quelque chose.
C'est très simple. Voici ce que je te propose... je t'accompagne jusqu'à notre Danube si envoûtant, nous faisons le voyage ensemble, tu m'apprends à devenir une...
elle réfléchit un instant... vraie femme du peuple et en échange, je m'occupe de toi ainsi que de l'argent pour notre voyage.

Elle repousse sa chaise, se lève, retire d'un grand geste sa cape dont des petites gouttes de pluie dégoulinent encore.

Sans connaître réellement mes origines, et sans en savoir la raison, j'ai toujours été attirée par la danse ! Regarde !
Un pas sur le côté, et la brune tournoie sur elle même, faisant voleter une jupe volumineuse et colorée aux motifs fleuris brodés minutieusement. De ses pieds chaussés de bottes rouges flambantes neuves, elle frappe le sol de la taverne, attirant ainsi toute l'attention sur elle. Pourtant, seule celle du gitan compte.
Puis, elle s'arrête, ses mains se posent de chaque côté de sa taille fine enserrée dans un corsage au décolleté prometteur.

Il nous manque seulement un chapeau pour récolter quelques pièces. As tu une idée, gitan ?


*Allez, viens ici ! Carmeen ! Qu'est ce que c'est que ça ? Qu'est ce que tu as fait là ? Tu t'es roulée dans de la boue ? Ahh alors toi !!
--Janoz




Le destin est cynique. Le destin est capricieux. Voilà qu’à la veille de la mort du gitan, il lui offre une complice débordante de vie, une complice qui croit que rien n’est impossible, qui est prête à l’accompagner dans son ultime randonnée. Prête à renverser barrières et montagnes, prête à l’aider à éviter les pièges que lui tend la faucheuse. Mais Janoz est lucide, il sait que le mal qui le tenaille est impitoyable, il sait que cette improbable aventure sera la dernière, une sorte d’ultime retour aux sources, de pèlerinage sur sa propre tombe. Il sait que la fin de sa vie l’attend à la fin du chemin. L’espoir est mort en lui depuis trop longtemps. La résignation a pris sa place. Carmeen est un superbe arc-en-ciel qui s’élève et scintille au-dessus du fleuve où il se noie, un arc-en-ciel majestueux mais finalement bien inutile, qui ne modifiera point le cours des choses, qui ne retardera pas l’échéance.

Mais Janoz lui est reconnaissant d’être apparue et de le soutenir de la sorte. Il ne désire surtout pas ébranler les convictions de la brune par son propre scepticisme, d’autant plus, à sa grande surprise, qu’ils sont très probablement unis par les liens du sang, ce qui confère à Carmeen une valeur inestimable à ses yeux.



Les flammes crépitent et s’allongent, le vent les aiguillonne, l’azur entier s’embrase en un ouragan de lumières éclatantes. La fournaise se reflète dans les eaux du fleuve, son manteau sombre s’illumine soudain d’éclats vermeils et orangés. Le fleuve devient lit de rubis. Janoz est repoussé vers l’arrière par l’intense chaleur qui se propage et la peur qui l’étreint. A reculons, il s’enfonce à l’abri des buissons qui risquent aussi de s’enflammer à tout instant. Et soudain il entend un tambourinement sourd qui se mêle au grondement du brasier. Là-bas, de l’autre côté d’un bouquet d’arbres en feu, une carriole lourdement chargée s’éloigne dans les ténèbres, tirée par des chevaux affolés. Janoz peut juste entrevoir un instant le cocher qui hurle ses ordres, mais il ne distingue pas son visage …


Hélas non, Carmeen, ton prénom et ton visage ne m’évoquent rien. Mais de nombreuses années ont défilé depuis cette catastrophe, et nous étions encore des enfants tous les deux. Par contre, j’ai effectivement le souvenir, plutôt flou, d’une charrette qui quittait les lieux à toute allure. Tu étais peut-être à son bord. Je me rappelle aussi qu’une ribambelle de petits gosses jouait dans le campement avant ces sinistres événements. Mes parents accueillaient souvent des oncles et des cousins avec leurs mioches. L’hospitalité était reine, chez nous. Nous sommes donc peut-être cousin et cousine, et cette éventualité me réjouit vraiment car tu es une jeune femme remarquable et généreuse. Je retrouve un soupçon d’espoir en ta compagnie, ta volonté est contagieuse, et peut-être arriverons nous quand-même à regagner notre terre natale.

Ces derniers mots, Janoz les prononce d’une voix ferme. Il y met toute sa conviction, toute son âme, même s’il ne croit guère à la réussite de cet expédition. Il est malade depuis trop longtemps, aucun revirement n’est envisageable. De plus, il leur faudra de l’argent pour entreprendre ce voyage. Le gitan a à peine assez de force pour effectuer quelques pas, il leur faudra donc également des chevaux et une carriole, sinon il ne parviendra même pas à quitter Paris.

Ses entrailles l’agressent à nouveau, ses doigts se cramponnent à son siège. Mais déjà Carmeen s’est levée, elle tourbillonne avec grâce, elle est radieuse, elle ne vit que pour la danse, c’est évident. Tassé au fond de sa chaise, Janoz se force à sourire en la contemplant.

Elle lui jette soudain quelques mots. Il tend l’oreille. Que lui dit-elle ? Un chapeau ? Ah oui, bonne idée un chapeau pour quémander quelques écus, même s’ils ne sont entourés que de rustres, d’ivrognes et de mendigots crasseux. Le gitan plonge une main dans sa besace usée et attrape son vieux bonnet de laine, celui qui protège ses cheveux couleur corbeau lorsque la bise se faufile dans les ruelles. Il l’agite devant Carmeen.

Ca fera l’affaire, je pense ! Vas-y maintenant, vas-y, danse, danse, ma cousine. Eblouis tous ces pouilleux !

Janoz se lève d’un bond, le teint livide, les yeux hagards. Il rugit comme un animal pris au piège tout en brandissant son verre en direction du comptoir.

Apporte-nous à boire, tavernier, aujourd’hui nous buvons à la famille, nous buvons à la vie et à la mort. Presse-toi, l’ami ! Et vous les gueux, soyez généreux, vous avez devant vous la plus belle danseuse de la terre entière.

Aethys
Place centrale de la Cour des miracles

La rumeur enflait, telle une vague s’apprêtant à se briser sur un rivage trop orgueilleux. Tous en parlaient déjà et seuls les fous ne voulaient l’entendre ou ne voulait comprendre. Tous craignaient ce retour sachant la déchéance de la Cour, la perdition qu’elle avait connu et qui la ravageait encore. Les langues se déliaient dans l’ombre, chacun racontant ce qu’il pouvait savoir du mythe, de l’histoire, hier encore connue sur le bout des doigts et récitée avec respect. Les catins esseulées grommelaient tandis que les hommes préféraient la compagnie d’une chope solide et d’une pipe remplie, l’esprit trop occupé pour jouer avec elles. Le masque était de retour…Cette pensée habitait tous les pauvres hères de la Cour, les suivant avec autant d’acharnement que les rats dans les rues.

La Garce avait pensé quitter la Cour avant que les corps ne s’accumulassent et que leur pestilence rappelât à tous le retour d’un des seigneurs des lieux. Mais les choses ne pourraient qu’être intéressantes et son insatiable curiosité la poussa à rester. Son pas ondulant comme à l’accoutumée, la menèrent donc aux ruelles du Rat Crevé. Le minois pensif, la lèvre inférieure mordillée au sang, le regard étrangement songeur, elle n’arrivait à se convaincre de son retour. Ses souvenirs affluaient, mêlant enlèvement à meurtre, tous teintés de l’image d’un masque de bois. La jeune femme frémit. Il n’était pas le temps de jouer aux plus forts face à lui et certains feraient mieux de l’apprendre vite.

Du plat de la main, elle poussa presque par mécanisme la porte de la taverne. Tout y était étrangement silencieux et la Gasconne releva le minois, inquiète. Seul un couple de gitan discutait, la femme dansant avec effronterie, un bonnet posé devant elle. Etait-il passé par ici ? Déjà ? Le mordillement habituel se fit plus pressant et d’un pas vif, elle se dirigea vers le comptoir. Tous ceux qui avaient levé la tête à son arrivée, la baissèrent comme soulagé. Oui…il devait être venu par ici…Dans un bruissement de tissu, elle se posa au comptoir, le front plissé.


« Le plus fort de vos alcools, tavernier et en double. »

En un autre temps, elle aurait pris du vin, le meilleur, le plus fin. Mais le temps n’était pas au plaisir mais à l'oubli. Une question la taraudait. Pourquoi ? Pourquoi était il revenu après tant de temps ? Que cherchait il dans ce monde qui d’apparence ne lui appartenait plus ? La Garce eut un rictus narquois. D’apparence…car s’il venait à reprendre sa place, combien d’entre eux le suivrait ? La plupart certainement et le reste mourrait de sa main. La brunette porta la main à la chope qui venait d’apparaitre devant elle. Levant les yeux, elle croisa le regard du tavernier qui esquissa une moue étrange. Partageait-il ses pensées ? Sa mine soucieuse semblait le hurler au monde. Qui ne serait pas anxieux ?

Deux gouttes d’opiacés se fondirent dans l’alcool servi et celui-ci se vida de moitié. Un soupir de soulagement franchit les lèvres de la belle. Une main lasse vint se perdre dans sa tignasse. Le masque…Elle n’eut pourtant pas le temps d’y penser, la torpeur caractéristique de sa drogue l’emplissant. Ses ambres se ternirent, une brume opalescente y tourbillonnant. En temps voulu, elle agirait peut être. Mais pour l’instant…

Elle ferma les yeux, s’abandonnant à sa drogue.
Carmeen
Le gitan tend un bonnet de laine filé ça et là, visiblement fidèle à son porteur, usé mais résistant tout comme lui.

Ca fera l'affaire, je pense ! Vas-y maintenant, vas-y, danse, danse, ma cousine. Eblouis tous ces pouilleux !


Carmeen est encore jeune, tellement jeune, la vie pour elle se résume seulement aux mélodies joyeuses accompagnant un feu de camp, autour duquel des jolies dames dansent, leur jupe manquant de brûler à chaque déhanchement trop près des flammes. Un jeu dangereux, aux couleurs flamboyantes, chaque saut, chaque bras, chaque coup de bassin est marqué par une note, le rythme des violons et des flûtes est respecté par les danseuses à la lettre, jamais de mouvements superflus, toujours en douceur et délicatesse, jamais de vulgarité non plus, juste de la sensualité ...
Carmeen est encore jeune, et pourtant elle analyse de ses petites billes noires les demoiselles, la manière dont elles bougent, la manière dont leurs chevelures s'animent, observe la couleur de leurs brassières mais aussi celle de leurs boucles d'oreilles aux reflets dorés. Et puis, lorsque les fougueuses gitanes s'assoient quelques instants pour se reposer aux côtés des hommes, c'est la petite brune qui se lève. Haute comme trois pommes, elle se dandine sous les rires de ses spectateurs, agite fièrement ses bras, tourne sur elle même, finit par perdre l'équilibre, et la voilà les fesses par terre.
"Rrrelève toi, Carrrmeen. Padnimaisja, i tanzouij krrrasavitsa*! Montrrre comme tu danses bien ! Oui, c'est ça, encorrrrre, encorrrrre !"


Les coins de la bouche de la gitane brune en devenir s'abaissent, laissant discerner un instant une expression de désespoir profond dans ses yeux voilés, avant qu'elle ne reprenne son masque de joie. Elle en a pas fini avec ces souvenirs, surtout si elle veut traîner avec elle le gitan malade. Choix volontaire, pas vraiment réfléchi, mais qui lui servira, elle en est certaine.

Janoz donne le ton, Carmeen suit, pose un pied botté sur une chaise et une main sur sa hanche, main qui remonte doucement sa jupe, faisant découvrir le galbe d'un mollet, puis un genou. Un clin d'œil, et elle sort de l'intérieur de sa botte un chiffon, ou bien un foulard. Chacun sa vision des choses, la veuve pourrait voir là le bout de tissu qui a épongé ses larmes, le marin verrait le mouchoir que sa femme a agité lors de son départ en mer, le soldat y verrait la paix, le rêveur un nuage, l'ivre lui, ne le verrait pas et prêterait plutôt attention à la peau ivoire de la gitane.

Timidement, sa voix s'élève dans la taverne, tout comme le mouchoir qu'elle tient, dont la couleur contraste avec la sombre et glauque ambiance de la pièce, blanche, presque livide.
La mélodie, incompréhensible, est dans une langue étrangère, aux consonances slaves, un peu tziganes, parfois simplement inventées en fonction de leur timbre, de leur harmonie.

Carmeen tournoie au centre de la salle, faisant cliqueter les bracelets encerclant ses fins poignets, créant avec sa jupe un arc-en-ciel de couleurs. Ses pieds tapent le sol au rythme de ses "Lalaaaaalaaaaaaa" enjoués, montant en crescendo.
Le petit mouchoir, lui, devient une illusion, se pose un instant sur son épaule, disparait, réapparait sous les yeux pétillants de la gitane qui s'amuse à cacher son visage en s'approchant d'un client. Ses sourcils battent à une folle allure, elle devient femme taquine et amoureuse.
S'éloignant un peu des tables, elle se dirige maintenant vers le comptoir, le ton de sa voix devient plus grave, ses paupières se baissent, ses mouvements se minimisent. Ses bras deviennent aériens, des doigts bagués tracent des arabesques gracieuses au dessus de sa tête, descendent lentement, hypnotisent, finissent par se poser sur sa poitrine, son cœur. Et elle est femme bouleversée, abattue.
Encore un changement de personnage, elle danse, elle chante, elle joue. Attrape entre ses doigts chaque côté de la jupe, sautille, devient une gazelle légère, libre et sans attaches. Elle frappe dans ses mains, balance ses fesses de droite à gauche, la cadence accélère. Reins cambrés, elle jongle avec des mouvements d'épaule, la droit en avant, la gauche en arrière, en haut, en bas, mouvements qui finissent en un tremblement de tout son corps, couvert de frémissements exquis. C'est le final, une goutte de sueur perle lentement sur ses joues rosies qu'elle essuie avec son mouchoir. Regard vers le gitan, va ramasser l'argent, va !


*danse ma jolie !
--Janoz




Elle ne danse pas, non. Elle resplendit, elle illumine le bouge, elle envoûte, elle offre un coin de son âme tzigane à chaque note, à chaque envolée de son corps de liane. Et soudain, elle s’envole, oui, elle s’envole, saisissant par le cœur le gitan hypnotisé, hissant son corps très haut, très loin, puis le déposant parmi son peuple, leur peuple, sur les rivages fangeux du Danube. Là, des piétinements d’enfants ont transformé le sol en un bourbier infâme et noirâtre. Là, un chien galeux et peureux vient le renifler prudemment, puis pousse un jappement joyeux. Là, en aval du méandre le plus large, là où le fleuve vient s’étendre et grignoter la rive, une poignée de roulottes sans âge s’agglutinent autour d’un feu qui pétille de joie entre une couronne de rochers noircis par des années de cendres. Et là, des femmes dansent, au rythme enivrant des tambourins ornés de dessins chamarrés et de minuscules grelots, leurs jupons bariolés tournoyant au-dessus des flammes qui crépitent allégrement. Il est de retour chez lui, et elle est là. Maman, c’est moi … C’est Janoz. Je t’aime. Maman, je ne veux pas mourir …

Son cri, son râle, se perdent dans le claquement cadencé des talons de Carmeen. Les yeux mouillés de larmes, de sueur et de fièvre, Janoz la regarde danser autour des flammes, entre sa mère et ses sœurs, sans en perdre une miette, jusqu’au dernier lalala, jusqu’à la dernière pirouette, jusqu’à ce silence plus harmonieux qu’une mélodie portée par mille violons tziganes. Où est-il ? Janoz ne sait pas, Janoz ne sait plus. Passé et présent se superposent, se confondent par magie. Tout se brouille dans son esprit. Ses yeux aux cernes bleutées cherchent à accrocher le regard doux et protecteur de sa mère, et c’est dans le regard de Carmeen qu’ils se plongent. Elle lui répète un message, un message muet qu’il déchiffre et qui le ramène sur terre. L’argent ? Ah oui ! L’argent pour le voyage sans retour !

Janoz se redresse, empoigne le bonnet miteux. Il prend sur lui, combat sa douleur d’un effort gigantesque de sa volonté, et accoste les ivrognes et les loubards qui ont déjà replongé le bec dans leur verre de picrate. Sa haute stature fait encore illusion. Même les arbres morts se dressent vers le ciel. Il explique, il répète, il insiste, il argumente. Quelques piécettes roulent au fond de son bonnet pue-la-sueur. Accueil mitigé pourtant. Il n’obtient pas de quoi pavoiser, et n’ose pas se montrer désagréable avec les plus pingres, ceux qui n’apprécient pas d’être dérangés par un inconnu. Non, il ne résisterait pas à une bagarre, avec cette mort lente qui l’affaiblit de jour en jour et lui bouffe les entrailles. Il rejoint la gitane près du comptoir crasseux en lui adressant une moue de résignation.

Nous n’y arriverons pas de cette manière, ma cousine. Ce ne sont que des porcs, des bouseux, des moins que rien. Ils sont incapables d’apprécier ton talent, et de plus la plupart d’entre eux sont encore plus fauchés que nous. Tu devrais danser durant dix ans pour rassembler une somme valable, et moi je serai mangé par les vers bien avant ça !

Une idée ancienne, un plan délicat échafaudé depuis belle lurette, et maintes fois repoussé, s’insinue en lui avec insistance. Il dévisage Carmeen, hésitant longuement, puis il se lance.

Il y a bien une autre possibilité, mais ce n’est pas sans risque. Jusqu’où irais-tu pour m’aider, à présent que tu m’as rendu l’espoir. Penses-tu que tu pourrais voler pour moi ?

L_angelusPNJ
[De Paris, depuis la Cour des Miracles, prémices d'un retour démoniaque...]


Souvenirs...souvenirs.... Deux années s'étaient écoulées déjà depuis sa dernière visite en ces lieux malfamés... A l'époque on s'en souvient, il était orgueuilleux, arrogant, égoïste et des plus cruels, le beau libertin ténébreux,le grand Jordan lui qui avait su se faire aimer de toutes les femmes, simples domestiques ou Grandes de ce Royaume, des catins jusqu'aux Duchesses... Une seule femme pourtant avait su compter à ses yeux, cette jolie blonde aux courbes bien appétissantes, chez qui fragilité et force vivaient en harmonie bien troublante pour cet homme, mais toutes ses envies pour les autres cuisses l'avait emporté, et l'avait conduit bien loin de ses bras..
Bien des choses avaient changé, le libertin sanguinaire s'en revenait de longues blessures, causées par une troupe de maris cocus qui l'avaient laissé pour mort sur un chemin de terre. Deux années presque, à se remettre, pour se diriger vers un lieu où, semblait il, rien ne l'effrayait, et tout l'accueillait...



[Taverne du Rat Crevé]


L'homme s'engouffre dans les nombreuses ruelles de la Cour, masquant une bonne partie de son visage, grace au col de son mantel, éviant les coins trop sombres et trop calme; bien qu'il était en grande forme a nouveau, il ne se risquerait pas de perdre la vie ici, dans la puanteur pour quelques écus. Il continue son chemin trouvant enfin ce qu'il cherchait..

La porte de la taverne s'ouvre, suffisament pour qu'il y entre et s'y installe. Toujours le même genre d'individus à l'interieur, faisant part de leurs larcins dans tout Paris, quelques aguicheuses pour gagner leur croute dont la maigreur et la crasse pourrait faire fuir nimporte quel homme. On était bien loin des formes envoutantes qui se trouvaient au bordel de La Rose Pourpre..
Le démon se fait discret, et part s'installer sur l'une des seules tables encore libre, il ne se laisse point impressionner par quelques regards sournois, les devisageant tout autant avant de passser commande d'une chopine de biere bien fade, et d'un repas digne d'un condamné a mort... Mais il ne faisait plus guere la fine bouche comme autrefois, apres tout il etait lui aussi presque un condamné a mort...


Il se laisse aguicher quelques instants par l'une de ces créatures affamées et meurtries des lieux, écoutant amusé comme par le passé ce qu'elle a à proposer. Mais sa laideur le répugne, d'un signe de main, d'un regard noir, il la chasse de sa table préferant boire ce jus de grenouille qu'on avait osé lui servir.
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Grenat_alexandria
[ La cour des miracles où se qu'une noblione peut y faire ]

Rien de bien joyeux à voir dans ses ruelles sombres pour ceux qui connaissent, pour la blondinette des haut de coeur tout les 2 mètres, mais qu'était elle venue faire ici ? Chris son garde l'avait dissuader d'y aller peine perdu autant parler à un mur il écouterait plus. Elle l'avait rabouer, l'avait ignorer, comme à son habitude elle en avait fait qu'à sa tête.

Elle avançait à pas feutré dans ses rues sombres et malfamés, une capuche sur sa tête pour voilé son visage aux passant, la cape sur ses épaules elle dissimulait une dague à sa ceinture. Elle espérait que l'homme qu'elle devait rencontrer serait à l'heure, non mais la faire ce déplacer en plein quartier aussi peu fréquentable. Bon si elle se déplaçait c'est aussi car il avait des informations importantes à lui transmettre.

La blondinette enchaîna les ruelles, les faubourgs, à un moment donner elle eût l'impression de s'être perdue, ça aurait té le comble pour la toute nouvelle Capitaine de l' OSt de l' Aigle. Elle soupira, d'énnervement elle tapa dans un caillou qui alla cogner contre une porte, un regard pour s'assurer que personne n'avait remarquer son geste et oh surprise elle était arrivée à destination.



[ Taverne du rat crevé ]

Elle aurait respirer un grand coup mais les odeurs nauséabondes lui donné des nausées donc mauvaise idée, la porte s'ouvrit et se referma derrière elle. Bon vu le monde qu'il y avait et les regards posaient sur elle, elle aurait du mal à se fondre à la masse, la blondinette observa autour d'elle, il était là, elle pouvait pas le manquer. L'homme n'avait pas mentit dans sa missive " Dame vous pourrait me reconnaître sans aucun mal, j'ai un oeil borgen, une oreille de moins, le nez casser et manque des dents".

Quelle horreur se type, elle avança en se faufilant entre les table, prit place assez loin de lui, en plus d'être moche il sentait pas la rose, rien pour lui donner envie de rester. Ce fut le comble quand il lui servit à boire, il appelait ça de la bière rien qu'à la couleur et à l'odeur elle aurait penser à des urines de chat, elle laissa le godet devant elle prétextant qu'elle n'avait pas soif.

Elle fit signe à l'homme de parler, la patience ce n'était pas pour elle, autant en venir au but rapidement surtout qu'elle avait hâte de partir et de respirer un air pur et pas lourd comme ici, entre le tabac, la poussière et elle en passait, bref elle l'écouta ou essaya de l'écouter, pas facile de le comprendre le type quand il bouffe ses mots. Les mots qu'elle distingua était " Hydre et Alençon". Froncement de sourcils, il se foutait d'elle et ça commencer à l'énnerver, ce qu'il venait de dire elle le savait déjà, sil croyait toucher des écus pour cela il se fourrait le doigt dans l'oeil.


Dégage!

Dit elle d'un ton tranchant et froid, pour accompagner ce qu'elle venait de dire elle avait mit un coup de pied dans sa chaise le repoussant quelque peu de sa vue. Le peu de patience qu'elle avait fut envolé. Le type ne demanda pas son reste, il partit de suite. Haussement d'épaule de la blondinette, tout ce chemin pour ça ? Hors de question, elle allait trouver quelque chose... Et si elle allait faire les échoppes et se trouvait de belles robes ?

Tout en pensant à cela elle fit tomber la capuche sur ses épaules, dévoilant ainsi sa chevelure blonde, elle posa son pied sur la chaise prés d'elle et s'affaira à nettoyer sa botte. Un regard sur ses braies arf une tâche aussi, heureusement c'était une robe qu'elle avait salie sinon elle aurait entendu la gouvernante se plaindre, sur que pour venir icelieu une paire de braies et de botte étaient ce qu'il fallait.

Pensive cherchant se qu'elle allait faire et surtout qui elle pourrait voir pour des infos pas connu de tous, elle sortit de sa chemise une chaine... Dessus point de médaillon mais une bague... Pourquoi l'avait elle garder ? Surtout après ce qui c'était ? C'est que le ténébreux qui lui avait offert avait compter dans sa vie, elle aurait tout donner pour lui... Son côté obscure l'avait attiré de suite, l'avait séduite... Elle s'était amusé à vouloir lui plaire et elle y était arriver mais à quel prix? Au prix qu'il aimait plaire et séduire, nouveau soupire en repensant à cela.

Accoudé à la table elle sortit sa dague et pour passer le temps elle grava quelque chose dans le bois. Elle s'arrêta nette fixa de nouveau la bague puis elle repensa à quelques années auparavent, dans une taverne similaire... Elle lui avait ouvert l'arcarde, lui avait jetter des chopes au visage, elle l'avait surprit avec une autre, elle avait voulu le tuer ce jour là mais ne l'avait pas fait... Là encore y avait eu rapport de force entre eux... Après s'être blesser, il lui avait dit ce qu'elle voulait entendre qu'il l'aimait... N'avait elle été qu'une blondinette naïve? Peut être ou peut être pas, mais dans ses bras elle avait connu le frisson, la passion et la déception...

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