Pagena
Cette histoire a débuté au bureau du tribun. Les lecteurs sont invités à s'y rendre avant de lire ce qui suit.
Pagena marchait d'un pas de somnambule. Non, elle ne dormait pas, mais ses pas semblaient être guidés. Depuis son réveil dans la hutte du tribun, elle n'était plus la même. Elle se sentait engourdie de corps et, en même temps, tout à fait alerte d'esprit. En fait, elle était portée. Par quoi? Par qui? Elle ne savait pas trop, mais elle soupçonnait les dieux de la diriger là où elle devait se rendre.
Avant de sortir du clan, elle était allée chercher une très longue corde et un grand morceau de tissu qu'elle avait enroulés autour de sa taille. Les mains libres, elle avançait sans machette, la végétation semblant s'écarter devant elle.
La jungle se taisait. Elle n'entendait que le bruit de ses propres pas écrasant les herbes et les petites branches de bois sec.
L'intérieur de sa tête était aussi calme que la surface d'un lac par un soir d'été sans vent, ne reflétait que le vert feuillage des acacias et des cyprès. Nulle pensée ne venait troubler le miroir de son esprit.
Elle chemina ainsi très longtemps. Le soleil qui était à son apogée lorsqu'elle avait quitté Tototlan avait décliné et se trouvait maintenant à mi-course entre le zénith et l'horizon. Elle ne ressentait ni la faim ni la soif, ni la chaleur. Ses jambes la portaient sans se fatiguer.