Apolline
La nuit était tombée, une brise légère sengouffrait par la fenêtre crasseuse dune petite auberge miteuse. Au second étage, là où habituellement on entreposait de vieilleries devenues inutiles, demeurait une jeune femme, pelotonnée dans lun des fauteuils défoncés de sa misérable chambre. Elle lavait eue pour presque rien. Une bague vendue à un marchand ambulant de passage, et Apolline Gabrielle avait eu suffisamment décus pour pouvoir dormir sous un toit. Elle soupira si fort que son unique chandelle séteignit, la plongeant dans les ténèbres. Alors que ses yeux shabituaient au noir, elle parcourut son espace vital du regard. Pauvre petite chose. Seule et sans rien. Elle devait ladmettre, quelque part, elle avait échoué. Le regard fixé dans le néant, elle repensa, repensa à des dizaines dannées auparavant.
[Il y a quelques printemps, dans la lointaine Bretagne.]
-Blanche Apolline !
- Oui, mon oncle ?
- Descends sil te plait.
Abandonnant à regret ses poupées, la petite fille aplatit sa robe et passa un doigt frêle dans ses longs cheveux bruns. En vérité, il ne sagissait nullement de son oncle. Blanche Apolline avait été recueillie alors quelle poussait sa première plainte par un couple de nobles et généreux Bretons. Elle avait toujours refusé de les appeler « papa » et « maman », sans doute parce que B-A savait quelle était la véritable fille de Gabrielle De Caurel, morte en couche et dun père inexistant. Elle descendit donc les marches descalier en bois brut qui la séparait de son oncle et de sa tante, ainsi que de leurs deux filles. Blanche Apolline était aussi différente de leur descendance que létaient leau et le feu. Alors quelle était douce, fragile et hautaine, les deux fillettes étaient méchantes, colériques et pourries gâtées. Bien sûr, la De Caurel navait jamais manquée de rien, mais lon ne pouvait ignorer la différence entre la fillette recueillie et celles de sang.
- Je suis là, mon oncle.
- Il est temps que tu ten ailles faire ton apprentissage de femme.
- Oh Je
- Ce sujet nest pas discutable. Vas préparer tes malles.
Elle ne tenta pas de cacher sa peine, alors que les deux fillettes blondes affichaient une mine réjouit. Elle monta dun pas las jusquà son antre. Alors quelle bouclait sa dernière malle, on frappa doucement à la porte : Sa tante, lair plutôt ravi, se tenait immobile devant lentrée.
- Blanche Apolline, Charles 1er de Castelmaure nest plus. Ton père est mort.
Le sol se dérobait littéralement sous ses pieds. Cela ne lui faisait rien, elle ne le connaissait pas. Simplement, savoir que son père avait vécu, peut-être à coté delle, constituait un véritable choc. Elle ne répondit rien. Préférant senfoncer dans un silence prolongé. Le lendemain, elle prit la route, sans se retourner. Pour cette trahison, cette ignorance, elle renonça au prénom de Blanche. Prénom donné par sa famille dadoption. Non, à présent, elle ne serait plus quApolline Gabrielle De Caurel.
Le temps passa, et la fillette devint une jeune femme. Loin de son Grand-duché denfance, elle apprit lart dêtre une femme dans un couvent Savoyard, entourée de montagnes et de verdures dun vert éclatant. On lui donna sa liberté un certain dimanche, et depuis, elle trouva refuge dans le fin fond de la Savoie.
[Aujourdhui, il est grand temps.]
Elle cligna ses paupières, se sentant parfaitement ridicule. Quel plaisir pouvait-elle avoir à rêver du passé. Il était grand temps quelle vive son présent, pour pouvoir écrire lavenir. Elle se leva, sétira, attrapa ses vieux parchemins et ses livres achetés pour la seule poignée décus qui lui restait. Apolline alla saccroupir sur le sol dur, face à la cheminée. La faible lueur courrait le long des pages sèches de son livre sur la généalogie. Enfin, son doigt sarrêta sur le nom quelle cherchait. Son visage trahissait une expression de joie et de peur, de colère et de tristesse. Elle narrivait pas à mettre un nom exact sur ses émotions. Enfin, elle alla se poster à son écritoire, et de son écriture fine et penchée, elle fit parcourir sa plume sur son parchemin neuf.
[Il y a quelques printemps, dans la lointaine Bretagne.]
-Blanche Apolline !
- Oui, mon oncle ?
- Descends sil te plait.
Abandonnant à regret ses poupées, la petite fille aplatit sa robe et passa un doigt frêle dans ses longs cheveux bruns. En vérité, il ne sagissait nullement de son oncle. Blanche Apolline avait été recueillie alors quelle poussait sa première plainte par un couple de nobles et généreux Bretons. Elle avait toujours refusé de les appeler « papa » et « maman », sans doute parce que B-A savait quelle était la véritable fille de Gabrielle De Caurel, morte en couche et dun père inexistant. Elle descendit donc les marches descalier en bois brut qui la séparait de son oncle et de sa tante, ainsi que de leurs deux filles. Blanche Apolline était aussi différente de leur descendance que létaient leau et le feu. Alors quelle était douce, fragile et hautaine, les deux fillettes étaient méchantes, colériques et pourries gâtées. Bien sûr, la De Caurel navait jamais manquée de rien, mais lon ne pouvait ignorer la différence entre la fillette recueillie et celles de sang.
- Je suis là, mon oncle.
- Il est temps que tu ten ailles faire ton apprentissage de femme.
- Oh Je
- Ce sujet nest pas discutable. Vas préparer tes malles.
Elle ne tenta pas de cacher sa peine, alors que les deux fillettes blondes affichaient une mine réjouit. Elle monta dun pas las jusquà son antre. Alors quelle bouclait sa dernière malle, on frappa doucement à la porte : Sa tante, lair plutôt ravi, se tenait immobile devant lentrée.
- Blanche Apolline, Charles 1er de Castelmaure nest plus. Ton père est mort.
Le sol se dérobait littéralement sous ses pieds. Cela ne lui faisait rien, elle ne le connaissait pas. Simplement, savoir que son père avait vécu, peut-être à coté delle, constituait un véritable choc. Elle ne répondit rien. Préférant senfoncer dans un silence prolongé. Le lendemain, elle prit la route, sans se retourner. Pour cette trahison, cette ignorance, elle renonça au prénom de Blanche. Prénom donné par sa famille dadoption. Non, à présent, elle ne serait plus quApolline Gabrielle De Caurel.
Le temps passa, et la fillette devint une jeune femme. Loin de son Grand-duché denfance, elle apprit lart dêtre une femme dans un couvent Savoyard, entourée de montagnes et de verdures dun vert éclatant. On lui donna sa liberté un certain dimanche, et depuis, elle trouva refuge dans le fin fond de la Savoie.
[Aujourdhui, il est grand temps.]
Elle cligna ses paupières, se sentant parfaitement ridicule. Quel plaisir pouvait-elle avoir à rêver du passé. Il était grand temps quelle vive son présent, pour pouvoir écrire lavenir. Elle se leva, sétira, attrapa ses vieux parchemins et ses livres achetés pour la seule poignée décus qui lui restait. Apolline alla saccroupir sur le sol dur, face à la cheminée. La faible lueur courrait le long des pages sèches de son livre sur la généalogie. Enfin, son doigt sarrêta sur le nom quelle cherchait. Son visage trahissait une expression de joie et de peur, de colère et de tristesse. Elle narrivait pas à mettre un nom exact sur ses émotions. Enfin, elle alla se poster à son écritoire, et de son écriture fine et penchée, elle fit parcourir sa plume sur son parchemin neuf.
Citation:
A vous, Béatrice De Castelmaure-Frayner, Souveraine de Bolchen, Duchesse de Nevers, Comtesse du Lauragais, Vicomtesse de Chastellux, Baronne de Chablis et de Laignes,
De nous, Apolline Gabrielle De Caurel.
Chère Dame,
Je crains que vous soyez étonnée en lisant ma missive, mais je le suis dautant plus de vous lécrire. Le hasard ma menée à prendre ma plume et à tracer ces quelques mots en votre attention. Jaimerais vous visiter si vous lacceptez, je pense que nous avons des choses à nous dire. Du moins, jai quelques questions à vous poser.
Respectueusement,
Apolline Gabrielle De Caurel.
De nous, Apolline Gabrielle De Caurel.
Chère Dame,
Je crains que vous soyez étonnée en lisant ma missive, mais je le suis dautant plus de vous lécrire. Le hasard ma menée à prendre ma plume et à tracer ces quelques mots en votre attention. Jaimerais vous visiter si vous lacceptez, je pense que nous avons des choses à nous dire. Du moins, jai quelques questions à vous poser.
Respectueusement,
Apolline Gabrielle De Caurel.
Ceci fait, elle la plia et descendit dans la plus grande et à la fois petite salle de lauberge, et pria le tavernier de la donner à un coursier dés la première heure. Elle alla ensuite se coucher, les yeux grands ouverts. Lanxiété lavait submergée
Oups, rectification, j'ai écorché un nom.
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