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Confrontation...

nebisa
En quittant la funeste forteresse angevine, théâtre de son infamie, la Malemort avait fait route vers son fief, pour s'y terrer le temps de panser ses plaies, de reprendre le controlle de ses nerfs...

Et de fait, cela faisait prés d'une semaine qu'elle se terrait à Ségur, sa présence connue seulement de la domesticité du Castel . Prés d'une semaine que le cauchemard défillait sans cesse devant ses yeux, de jour comme de nuit et pas une fois sa douleur ne s'était exprimée par des cris ou des larmes, uniquement le vide et l'impavidité dans son regard égaré.

Pourtant, ce soir là serait différent... Une seule chose, une seule, pouvait la tirer de son inertie... La vengeance, non pas la sienne, elle refusait d'admettre encore la réalité de son viol, mais celle de son enfant... Pour cela elle recouvrerait, l'espace du soirée suffisament d'emprise pour éprouver la délicieuse perpestive de rendre justice tout en faisant souffrir...

Aprés avoir ordonné à Blanche de faire convoquer Figeac au Salon d'Opale, la Comtesse se vit vétir d'une de ses plus somptueuse toilette et coiffer avec soin... Elle voulait que d'un coup d'oeil le Figeac prenne la pleine mesure des risques qu'il avait pris, et se rende compte qu'elle pouvait faire de sa vie un enfer... ou de sa mort en l'ocurrence... Le plus délectable dans tout cela était l'idée qu'il ignore encore qu'elle avait percé à jour sa machination, grace à l'aide de sa niéce Cyrielle, qu'elle avait perdu Aliénaure au passage, et qu'elle était à présent perclue de haine...

Se jouer de lui serait un plaisir aussi intense qu'éphémére, pourtant, elle préparait depuis des mois cet instant, ayant pour l'occasion recouvrait des pratiques qu'elle avait fait serment de renier, mais pour lui... elle ferait une exception. Place prise devant la cheminée, la Malemort attend, l'instant de frapper, l'arrivée de sa victime expiatoire, l'heure de se relever qui sait ?

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Armand de Figeac
Figeac avait pris soin de revêtir ses plus beaux atours. Sa vie de pêcheur impénitent lui avait appris une chose : l'apparence suffisait souvent à faire boire avec délice le plus infâme des venins.
Il frappa délicatement à la porte, puis avant même que la Comtesse eut le temps de se retourner, s'inclina, mais sur la poitrine, avec la révérence du serviteur fidèle, n'osant pas même croiser son regard...


- Vous m'avez fait mander Madame. J'ose espérer que vous vous portiez mieux...Veuillez accepter mes plus sincères condoléances.
Sachez que ma souffrance n'a d'égale que l'estime que je porte à votre famille : s'il vous plaît de me renvoyer sur le champ, je le comprendrais aisément.
nebisa
Etouffant dans l'ombre un sourrire ironique, la Malemort pousse un soupir, que le Figeac attribuera sans y manquer à l'expression d'une rude souffrance, par chance sa mauvaise mine et ses cernes seront, elles aussi, mises sur le compte de ce deuil... Il lui convient que l'erreur demeurre sur le trépas d'Aliénaure, au moins quelques heures encore...

Armant... Vous n'avez manquer d'ignorer à quel point vous m'avez déçu. Vostre tache était fort simple. Veiller sur mon enfant, il me semble qu'un homme d'armes, bien moins grassement rétribué que vous, aurez su remplir ce rôle. Avant que de savoir si je dois, pour préserver l'avenir des enfants qu'il me reste, vous renvoyer à vostre misérable existence, j'exige de savoir le fin mot de cette histoire. La lecture des missives de ma niéce, la Comtesse de Meymac, ne m'a guére renseigné, la pauvre enfant était tout à l'émoi de la nouvelle... Racontez moi.

Le ton s'est fait mielleux, humble, la voix presque cassée elle affecte la fragilité d'un oiseau prêt à s'effondrer, la candeur d'une mére qui croirait sans y opposer plus de barriéres n'importe quelle version tendant à lui faire croire en une épilogue tragique mais douce pour son enfant... Affectant la plus grande innocence, toute rongée par la souffrance et l'incompréhension, elle n'a pourtant jamais été plus dangeureuse pour celui qui lui fait face... Jamais non plus elle n'a ressentie tant de haine et tant d'envie de blesser, meurtrir et briser un être humain, et delà de lui, l'homme qui, comme tous les autres, est pour elle, pour sa mesnie, une menace... S'en prendre à lui parce que l'autre est trop loin, s'en prendre à lui qui lui jette au visage sa propre culpabilité, d'avoir été absente pour Aliénaure, de n'avoir pas eut la force de mettre l'Angevin en échec, d'exister tout simplement... Elle doit, elle veut absolument tuer cette culpabilité là...
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Armand de Figeac
Accepter l'humiliation sans témoin était une chose plus facile pour l'orgueilleux capitaine. Mieux valait qu'il passe pour un incapable que pour un intriguant aux yeux de la Comtesse pour multiplier ses chances de s'en sortir sans trop de dommage.
Pourtant, le nom de Meymac le fît frémir et une crispation presque imperceptible fissura une fraction de seconde son visage d'enfant sage...L'arrogante pimbêche connaissait pratiquement le fin mot de l'histoire et si elle avait parlé....


- Madame, votre déception n'a d'égal que ma honte. Cependant...Il est de mon devoir de vous informer de plusieurs choses et de notament la raison de mon désespoir.

Il devenait impératif de lier les propos de Meymac avec son propos et pour cela, il devait prendre le risque d'ouvrir une partie de son jeu pour mieux faire avaler le mensonge et reporter la faute sur celui vers qui sa haine ne connaissait plus de borne...
Figeac prit sa respiration et affecta le plus grand chagrin, lorsque sa voix, brisée par les sanglots hypocrites de sa propre supercherie, prononcèrent les mots fatidiques....


- Madame la Comtesse...J'aimais votre fille et...Aliénaure m'aimait de retour.
Craignant votre refus, elle avait pour intention d'organiser un mariage le plus rapidement possible. Puis il y eu cette lettre qu'elle utilisa pour me convaincre, qui se révéla être fausse. J'ai été faible, j'avoue et je lui ai cédé...

Personne hormis Aliénaure elle même ne pouvait infirmer ces propos et la malheureuse devait pourrir quelque part dans une des mines de Rochechouart. L'idiote avait bien réussi son affaire...
La colère d'avoir vu son plan réduit à néant par l'idiotie d'une gamine gâtée transpira dans le ton qu'il prit pour parachever son récit


- Ce fût sans compter l'intervention du plus infect des êtres...le baron Trokinas. J'ai toujours senti en lui ce besoin lubrique de s'approcher d'Aliénaure et me suis plusieurs fois interposé face à lui lorsqu'il tentait de lui imposer sa présence.
Apprenant que nous devions nous marier, il fût fou de rage et demanda une dernière entrevue avec elle, qu'Aliénaure concéda, par bonté de coeur....Je n'eut pas le courage de m'opposer au choix de votre fille et respectait ses engagements, dictés par le coeur.

Son poing se crispa sur sa tunique, tandis qu'il feignait la culpabilité, le visage se détournant du regard accusateur de la mère de sa propre victime

- Faut il que je fus un parfait idiot pour avoir consenti à cette entrevue...
Dans la soirée, Aliénaure avait disparue, sans doute pour fuir l'individu. De fureur, j'envoyais immédiatement mon âme de confianc l'interroger. La brute lui fit perdre un oeil d'un coup d'épée, en pleine rue, abusant de ses prérogatives d'aristocrate pour échapper à la justice qui lui était dûe...
Aucune preuve ne fût retenue contre lui, mais mon âme entière le sait. Puisse Aristote ne jamais le faire croiser mon chemin de nouveau, car peut importe les conséquences, son sang souillera mon épée, j'en fais le serment...
Aliènaure
[Quelque part derrière les murs]


Elle avait reçu la missive alors qu'elle sortait la Mairie. L'hésitation avait été forte. Cet instant, elle l'avait espéré depuis un long moment déjà. Parce qu'elle avait souffert de cet épisode. Parce qu'elle avait presque perdu les personnes qui comptaient le plus. Parce qu'elle avait manqué d'y perdre sa vie. Mais se retrouver face à lui...

Mais le jour où elle ne ferait que ce que la raison voudrait, elle ne serait plus Malemort. Alors elle avait enfourchée sa jument, seule relique de sa vie "d'avant", et avait chevauchée jusqu'à Ségur.
Et elle y avait découvert un aspect du château qu'elle n'avait jamais eu connaissance. Un petit plan avait été joint à la missive, lui permettant d'entrer dans le bâtiment par une porte dérobée qu'elle n'avait jamais remarquée auparavant. De là, elle avait visité l'édifice entre deux murs, longeant un couloir très faiblement éclairé, parsemé ici et là des portes. Jusqu'à ce que deux voix la fassent stopper.
Alors elle s'était approchée et avait posé son visage contre la pierre, à l'endroit où deux trous avaient été taillés dans la pierre, pour les yeux.

Et elle les avait vu. Sa mère, droite, si elle-même, mais avec une voix qu'elle ne lui connaissait pas. Et lui... Figeac. Egal à lui-même, arrogant, sûr de lui, beau parleur... et menteur.
Chacun des mots qu'il prononçait lui donnait la nausée. Qu'il puisse insinuer un amour réciproque entre eux était déjà inimaginable, mais qu'il puisse incriminer le comte de lui vouloir du mal... Les dents serrées, l'émeraude s'enfonçant douloureusement dans sa paume, elle se calma pour écouter sa mère.

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nebisa
Les propos du bellatre s'écoulaient sans qu'elle ne l'interrompe, le jaugeant en silence, dardant sur lui un regard glacial qui aurait fait défaillir plus d'un page... Cependant, au trés fond de son esprit, elle lui reconnaissait un mérite, cet homme mentait admirablement et, si la vérité ne lui était connu, elle aurait put le croire...

L'homme aurait mis la moitié de son ardeur pour tromper et mentir en de nobles causes, il aurait pu déplacer des montagnes, mais il avait choisit son destin et elle serait, ce soir, la main qui le scellerait... Elle allait le briser, le réduire à néant et il n'aurait plus d'autre désir que de la voir mettre fin à ses souffrances, comme elle même aurait tout donné pour que l'Angevin en finnisse avec elle aprés qu'il eut pris ce qu'il désirait... Oui, elle allait passer de victime à bourreau pour venger l'offense. Le sang appelle le sang et lui s'en était pris à la chair de sa chair... Lui... Armant, c'est lui qu'elle devait châtier, c'est lui qui souffrirait, pas l'Angevin... Elle devait le chasser de ses pensées au péril de faire échouer son plan...

Aussi, pour plus de sureté, la Malemort s'efforce de cloisonner son coeur et son esprit, fermant les yeux quelques instants et se laissant aller contre sa chaise, affectant un malaise ...


Oh Armant... si j'avais su... j'aurais pu protéger ce bel amour qui vous unissait à mon cher ange... Et cet homme que je pensais d'une probité et d'une morale sans failles... ce vil Trokinas ... jamais il n'aurait pu l'approcher... Et mon bébé serait parmi nous ce soir... Oh Armant... Me pardonnerais-je jamais ?

Affectant le chagrin le plus intense, la Malemort, pour couronner sa tirade se fend de larmes et de sanglots poignants, le temps de réfléchir à la suite des événements... Elle devait le mener là ou elle désirait qu'il aille, le conduire à se croire sauver et en sécurité, peut être même pousser l'audace jusqu'à l'assurer de sortir grandit de la situation, en suite elle frapperait...

Dites moi, dites m'en plus... J'ai besoin de savoir comment vostre amour est né, comment il s'est épanoui... Ma chére petite ... sa vie si courte s'est trouvée embellie par cet amour...

Et soudain... imprévisible, aveuble, changeante, elle passe des larmes à l'attaque...

Et... ce soir là... N'avez vous pas cherché à la retrouver ? A la sauver ? Si vraiment vous l'aimiez tant, pourquoi n'avoir rien fait ? Pourquoi ?
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Armand de Figeac
C'est presque avec effroi que Figeac vit la grande muraille d'albâtre et de jais s'effondrer devant lui de la sorte...
Jamais il n'aurait penser la faire flancher aussi vite, aussi simplement...
Il avait, comme les autres, entendu les rumeurs sur le tempérament destructeur de Nébisa de Malemort, son passé flou et teinté d'une excitante touche d'hérésie...mais en ce moment précis, aucun de ces doutes ne traversa son esprit : il avait vaincu, voilà tout, comme toujours.

Il se redressa, paternaliste, digne et comprehensif, comme le père brisé tentant de rassurer son épouse qui vient de perdre son fils unique.


- Il n'était... il força une boule de salive à lui gonfler la gorge Il n'était qu'idylle et innocence...Je tempérais la passion ardente de votre fille et elle me donnait à nouveau la force de croire de choses nouvelles.
Combien de fois me suis je traité de fou, dans mon sommeil, un homme de mon rang, un déchu, comment osais je me tourner vers le soleil de nouveau...Lors j'ai tardé à me déclarer, même si je savais ce sentiment partagé, esquissé avec une subtile pudeur.
De craindre de la désavouer, j'ai attendu votre départ et obtenu son assentiment tacite...Je fûs transporté.
Puis le soir fatal, j'ai écumé sans relâche les forêts et les grottes, sondé chaque étang...Bastinguet me ramena même, inanimé sur ma couche...Brisé.

Il s'arrêta pour faire monter un temps la tension puis acheva son discours

- Je...C'est encore trop frais...Je ne puis continuer.Veuillez m'en excuser.
nebisa
Le manant devait être à présent persuadé de son heureuse fortune et se voir préservé des foudres Malemortiennes... Pourtant, il n'avait été plus proche du châtiment et cette pensée procurait à la Comtesse un frisson de plaisir anticipé.

Sa blanche main, tremblante, presque implorante se tend alors vers le Figeac, ses yeux embués de larmes expriment un désespoir profond, qui n'est pas feind mais dont l'objet est tout autre que celui qui l'occupe aujourd'hui. Elle n'a pas besoin de bien forcer ses larmes et sa douleur, les délicats traits de son visage pouvaient enfin laisser tomber le masque mondain pour dire toute leur douleur et leur égarement... Cette liberté prise sur le maintien que la Comtesse s'impose jour et nuit lui est bénéfique mais doit demeurrer sous controle, elle n'est là que pour faire céder les réserves d'Armant le temps nécessaire à ses projets...



Armant... Oh Armant... Nous partagerons ce deuil tous les deux... Pour l'amour de ma fille, je veux m'assurer de vostre avenir. Vous qui deviez estre mon genre, acceptez que je vous prenne pour fils et demeurrez à mes cotés pour m'assister dans la gestion de mes terres. Mon mari m'a quitté, comme vous le savez, et je suis si seule à présent... si seule... J'ai grand besoin de l'aide et de la confiance de quelqu'un qui sache conduire avec aisance la gestion de Ségur et de Chabrières. Serez vous cet homme mon cher ?

L'oeil brulant, elle voit se dessiner l'instant de vérité, qu'il s'avance, qu'il parle et le sort sera fixé... De ses lévres entrouvertes, la tête relevée pour lui offrir le panorama de sa gorge subrepticivement découverte, laissant sous entendre des espoirs qui ne peuvent laisser leFigeac de marbre, elle attend que le traitre scelle la lettre de cachet qui l'enverra rejoindre les rives inhospitaliére d'une mer aux eaux déchainées de perdition et de souffrance...
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Armand de Figeac
Un enchaînement aussi rapide entre la mort d'une fille et la nomination à de hautes responsabilités auraient pu faire réagir un esprit qui ne fût pas rongé par l'ambition comme Figeac, trop soulagé de voir cette affaire enterrée et prendre un tournant intéressant....
Il n'aurait pas à lutter : tout semblait se dérouler devant lui comme les voies des Cieux devant l'enfant béni....
Ses yeux s'ouvrirent en direction de Nébisa


- Je serais ce que vous me demanderez d'être, Comtesse, et vous servirais comme aucun autre.
Aliènaure
L'appât du gain avait été de tout temps le plus fort. Moteur du monde, bien plus que la luxure, et mille fois vainqueur sur l'amour, l'avidité régnait en maîtresse chez bien des hommes. Et celui ci en était rongé.
Figeac avait vu en elle le parfait passe-droit vers une fortune et des titres qu'elle ne possédait indirectement. Il avait imaginé une dote, sans doute avec domaine et bourse à la clé. Parce qu'il savait que la Comtesse faisait passer ses enfants avant tout.
Et elle n'aurait pas nourri des sentiments à l'égard du Comte, la jeune Malemort, toute naïve et inexpérimentée qu'elle était, serait sûrement tombée dans le piège qu'il refermait autour d'elle. Mais Zya et Trokinas avaient contribué à plus de clairvoyance dans cette sordide histoire.

Et maintenant, sa mère lui offrait sur un plateau d'argent ce dont il avait rêvé. Fortune, sécurité, emprise sur des dizaines de personnes qu'il pourrait terroriser à souhait.

Si le Comte savait qu'elle se trouvait ici, il serait furieux de savoir qu'elle lui ôtait le plaisir de se venger. Mais face à l'homme qu'elle aimait, rien ni personne ne pouvait être plus dangereux que le Malemort.

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nebisa
Je n'en doute pas Armant, je n'en doute pas...

De sa douce voix, elle lache ces quelques mois avec une intensité nouvelle, lentement ses lévres carmines s'étirent en un fin sourrire victorieux qu'elle n'essait plus de lui dissimuler, au fond de ses yeux la détermination céde la place à la douleur...

Pour commencer... j'aurais besoin de vostre avis, mon estimable et précieux allié... Vous devez bien vous douter que je ne veux rien de moins que me venger de l'homme qui osa s'en prendre à ma fille, à mon sang, au nom des Malemort.

J'ai déjà résolu du comment, dites moi donc ce que vous en pensez.

Aprés s'être levée, avec sa prestance naturelle, pour se rapprocher pas à pas du Figeac, comme un prédateur face à la proie qu'il pourchassse, elle le contourne lentement, passant une main distraite dans les cheveux blonds de sa victime.

Pour commencer... il doit ignore être perçé à jour... Je dois donc endormir sa méfiance... laisser passer le temps pour que le silence le rassure... Pendant ce temps là, je préparerai ma vengeance, récoltant au gré de mes pérégrinations les plantes nécessaire à mon oeuvre et qui ne se trouvent pas ici... A Paris je me fournirais chez les meilleurs apothicaire en langue de sorciéres, ces racines venues de Byzance et qui, une fois incorporé à l'aliment le plus banal, provoquent chez celui qui l'ingére la sensation insuportable d'être dévoré de l'intérieur par une nuée de rats... Dans les forêts du Sud, je trouverai de la langue de pucelle... Ces petites fleurs blanches, si innocentes qu'on caresse leurs corolles sans se méfier, pour découvrir le lendemain que la peau de sa main se détache sans raison apparente... Et des champignons méconnus, ces faiseurs de veuves comme on les appelle, et qui donnent à leurs victimes toute l'apparence d'un trépassé pour trois jours ... jusqu'à ce qu'ils s'éveillent dans leur cerceuil pour comprendre quelle horrible agonie les attend...

S'étant à présent penchée jusqu'à venir de ses lévres caresser l'oreille du Figeac

En suite, grace à quelques connaissances que j'ai des simples et des potions, je réaliserai le plus puissant des poisons... une arme à l'apparence si anodine et si redoutable pourtant qu'il me faudrait des nuits entiéres pour la rendre suffisament concentrée et précise pour être utilisée avec le controle et la retenue nécessaire...

Pendant ce temps... le boureau s'ignorant victime ne manquera pas de reprendre une existence apaisée, sans méfiance et sans remord... Je prendrai soin de placer dans son entourage des yeux attentifs qui me rapporteront sans faille le récit hebdomadaire de sa vie, de sorte que j'en connaitrai les grandes lignes, les petites habitudes et les gouts... de son vin préféré au tabac qu'il prise en passant par la catin rousse qu'il demande quand il se rend au bordel...

Alors... alors mon cher Armant... je pourrais préparer la frappe...

Sans cesser de jouer des méches blondes s'enroulant autour de ses doigts, elle se redresse à demi pour venir chatouiller la seconde oreille de son souffle brulant...

Avec minutie, j'introduirais dans son alimentation, dans ses boissons, jusque dans les parfums dont il s'inonde, une infime quatité de mon poison... Oh bien sur les symptomes seraient indécelables, anodins... une lassitude et une irritabilité saugrenue, des douleurs diffuses dans le vendre, des maux de tête réguliers et impossible à faire passer... Rien de bien méchant car dans un second temps, l'antidote que j'ai également pu mettre au poing lui serait fourni, dans des patisseries par exemple ou imprégnés dans ses gants de cuir préférés... Vous me suivez Armant ?

Préparant l'estocade, elle contourne tout à fait son interlocuteur, pour qu'il voit son visage, son triomphe alors qu'elle achéve de l'emprisonner ...

A ce moment là, il conviendra de préparer une entrevue, sans qu'il ne se sache démasqué, j'affecterai le chagrin et la stupidité, je le rassurerai, je lui dirais croire en ses mensonges et avoir besoin de lui ... l'homme sera déjà suffisamment empoisonné pour qu'en l'absence de l'antidote son mal finisse par l'emporter... Et jusqu'au moment ou je dévoillerai la situation, il ignorera que je tiens sa vie entre mes mains, que sans moi, il périra immanquablement, car je suis la seule à connaitre l'antidote et à savoir ou il se trouve...

Qu'en pensez Armant ? Que pensez vous du châtiment réservé à qui offense une Malemort et trahit la confiance d'une mére ?
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Armand de Figeac
Intarissable succube, presque effrayante dans sa sensualité à peine masqué par le voile plus attirant encore de la feinte distance...
Il se perdait dans ses propos, sentait un frisson lui parcourir l'échine à la découverte progressive de la folie montante qui avait envahit son employeuse...
Pardi, si elle était démente, il serait plus facile sans doute de biaiser sur son trésor. Pourtant, Figeac était bien loin de se réjouir de ce cruelle énoncé, et sa culpabilité faisait à nouveau surface alors qu'il prenait conscience du châtiment qui attendait le coupable : il ne souhaitait même pas celà à Trokinas aussi cruelle fût sa rancoeur contre le Duc du Limousin...


- Je pense...J'en pense Madame que bien sot est celui qui s'en est pris à votre chair. Même si la sanction semble cruelle, il n'est rien de plus affreux pour une mère que de perdre son enfant...et...je conçois que votre courroux puisse être amené de cette manière. Toutefois, je puis régler le problème d'une façon certes plus expéditive mais qui vous évitera ces tracas...

La peste soit des femmes et de leur esprit faible qui cédait à l'aliénation aussi facilement que devant les passions ineptes ! La présence de cette beauté insane le troublait et le mettait mal à l'aise.
Après tout, il était en partie responsable de la détresse mentale de cette femme.
Qu'elle soit enfermée, tonnerre d'Aristote ! Qu'on ôte ce macabre pantin de sa vue et son cortège de fantôme !
Pour la première fois, il sentait la culpabilité l'étrangler et était sur le point d'exploser...Pourtant. Pourtant il se contînt.


- Toutefois madame. Si tel est votre souhait, qu'il en soit ainsi.
Aliènaure
A l'écoute du discours maternel, un long frisson lui parcourut l'échine. Une brusque bouffé de chaleur l'envahit, ses jambes se mirent à flageoler, ses mains à trembler, sa tête à tourner.
Aliénaure avait beau se dire que toute cette description macabre était pour Figeac, son esprit avait relié les supplices à la victime virtuelle. Le Comte. Trokinas. Celui qu'elle aimait. L'homme qui lui avait demandé de l'épouser la veille au soir, dans les jardins du Château.
Elle imaginait sans mal les scènes narrées par sa mère. Elle le voyait, la tête entre les mains, grimaçant; puis allongé dans un lit, livide; mettant les gants qu'elle lui avait offert au gré d'une balade dans les rues commerçantes de Limoges, avant son élection; mangeant les petites brioches qu'il aimait tant...

Fermant les yeux pour apaiser le vertige aussi traitre que saugrenu, elle s'adossa au mur, tête appuyée entre deux cadres, et respira profondément.

Il ne s'agissait pas de Trokinas, mais de l'homme qui se trouvait dans la pièce adjacente. Lui. Figeac...
Rien que ce nom la faisait frémir.
D'horreur, au souvenir de son regard mi lubrique mi furieux le soir où elle l'avait giflé après la découverte de la lettre...
De dégoût, à l'idée que si elle n'avait pas été aussi rapide à fuir, il l'aurait sans doute jetée sur le lit pour prendre de force qu'elle voulait offrir à l'homme qu'elle épouserait...
De colère, au rappel de tout ce qu'elle aurait perdu si sa cousine et le Comte n'avaient pas été là pour la secourir...
De haine, à la vision des blessures que son homme de main avait infligées à Trokinas, qui serait passé de vie à trépas sans l'intervention du Gouverneur rochechouartais et des quelques notions de soins qu'elle avait acquéries en regardant faire sa mère...

Oui, elle haïssait cet homme malgré la peur qu'il lui soufflait encore. Et elle aurait été capable de le tuer de ses propres mains.
Mais les souffrances que venaient de décrire la Malemort... Nul ne pouvait mériter tels supplices. Elle devait sortir de sa cachette et arrêter tout cela.

Voulez vous m'épouser?

La voix du Comte résonna alors dans son esprit comme une litanie.

Rouvrant les yeux, un éclat soudainement métallique au fond des pupilles vertes, elle se retourna pour reprendre sa place et observer la scène.
Elle devait tout arrêter. Mais encore aurait-il fallu qu'elle le veuille...
Figeac serait sacrifié sur l'autel de la vengeance.

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nebisa
Visiblement il n'avait pas compris... La Malemort commencait à se lasser et devant le peu de raisonnement du Figeac, elle se trouvait pressée d'en finir.

Aussi elle finit par se lever, servir deux coupes de vin.


Trinquons donc à la vengeance et à la justice.

Sans lui laisser le temps de répondre, elle place derechef la coupe dans sa main. De toute façon il n'écoutait pas sinon il aurait déjà compris.
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Armand de Figeac
Le pacte allait être enfin scellé...Il trinqua, sérieux et sûr de lui....

- A la vengeance et la justice répéta t'il avec une certaine conviction amusée...
Le goût amer du vin ne l'étonna même pas, en réalité, il l'enchanta presque tant il avait fleurait la libération...
Il eût presque envie de rire lorsqu'il ressentit le premier tressaillement. Allons donc, il ne tenait pas plus le vin qu'un jeune puceau, ou bien était-ce l'angoisse des ces derniers moments à palabrer sur sa culpabilité ?

Il était vrai que depuis quelques temps déjà, il était plus nerveux et avait quelques difficultés à trouver le sommeil de par ces poussées de chaleurs. Couvait-il quelque chose ?
Ce visage calme de douce démence lui paraissait de plus en plus insupportable...De grosses gouttes de sueurs sur son front annoncèrent ce que sa raison refusait encore de croire....
Un sourire malsain se peignit alors sur son visage et un rire desespéré sortit de sa poitrine déjà brûlante.
Il tenta d'abord de se raccrocher à la table et entraîna son verre qui se brisa sur le sol...Son genoux fléchit, il jeta un regard de mort vers son bourreau, toujours aussi calme, à mesure que son estomac semblait être marqué au fer rouge....


- SORCIERE ! hurla le malheureux QU'EST CE QUE TU M'AS FAIT BOIRE ?

Le masque était tombé...Il allait mourir, il pouvait donner libre court à sa rage et ne plus se laisser aller à l'hypocrisie des convenances.
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