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[RP] Ciel...! Mon enfant!

Johanara
[Sur les routes berrichonnes…]


La Dame aux Lys mirait mélancolique la sylve verdoyante de son duché natal. Près de deux années s’étaient écoulées depuis leurs dernières pérégrinations en Berry. Si son époux n’était point si obtus, elle aurait sans respit recouvré son Castel de Lignières pour ne plus jamais le quitter. Pour l’heure, ils erraient sur les routes suivis de leur indisciplinée valetaille. Lasse d’être sans cesse sur les chemins, la belle Baronne aspirait à trouver foyer accueillant et stable où élever paisiblement l’enfançon qui grandissait en son sein.

Et qui ne tarderait pas à voir le jour… Johanara à la poitrine désormais stupéfiante et au ventre prodigieux arrivait au terme d’une grossesse sereine. Son bien-aimé,seul, semblait contrarié et pestait à qui voulait bien l’entendre qu’il ne souffrirait point la naissance d’une petite fille. Priant pour qu’Aristote lui accorda un héritier, la rouquine supportait les humeurs conjugales avec une patience peu coutumière.

Ce vil maraud de Valezy avait même préféré chevaucher sur son canasson plutôt que d’endurer les râles et les soupirs de la future mère à l’intérieur du coche.


Autant ce vaut nous n’étions jamais partis… Voyez ces fâcheux qui viennent nous détrousser? N’étaient ce pas déjà ceux que nous avions rosser la dernière fois? Il me semble reconnaître le faquin au nez bossué!

La jeune fille passa une main gracile par la fenêtre et fit signe à ses gens d’estriller la racaille.

Je suis moulue. Si cet enfant ne daigne pas sortir par tans, je jure de l’extirper de mes mains!! Il me tarde de pouvoir mirer mes chausses derechef!

Ses grands yeux verts s’illuminèrent à cette idée. Bientôt, elle retrouverait ses toilettes luxuriantes et ses souliers de vair. Pourtant la grossesse lui seyait fort bien : le teint délicieusement rosé, les pommettes pleines mais sa chevelure surtout n’avait jamais été si abondante et flamboyante.

Mathilde veux tu m’éventer je te prie? J’ai quelques bouffées de chaleur fort désagréables… Je suis certaine que la conduite désastreuse de cet ivrogne de cocher nous fera tous périr avant que d’avoir atteint Bourges. Peste soit de ce suppôt de Bacchus. Songez que ce résidu de picrate a été repris a forfait par le valet de cuisine à vider nos réserves de vins. On dit qu’il en vend la moitié au village et qu’il boit l’autre sans aucune vergonde! Mais…Cette douleur…

Johanara se crispa soudain sur la banquette de velours pourpré avant de serrer non sans force la main de sa dame de compagnie.

Palsambleu! On me lacère les entrailles…

Une larme perla entre ses longs cils de jais.

J’ai souvenance de cet ours dans le sud qui avait failli m’ôter un bout d’épaule, le déplaisir n’était pas si cuisant!!! Faîtes arrêter ce foutu coche! De l’air, ouvrez la portière!

De grâce ma dame, cessez de vous agiter! Vous allez provoquer l’accouchement!

A ces mots, Mathilde tenta de lui faire boire une gorgée d’eau.


Gourgandine! Il me faut quelque chose de plus fort!


Vous n’y songez pas ma dame???

La ferme. Envoie plutôt ton maître quérir un médicastre…

Mathilde, plus blême encore qu’à l’accoutumée, sauta hors du carrosse et se précipita vers le beau Seigneur d’Antras.

Maître! Maître! Votre dame est en train de perdre les eaux! Elle vous somme de gagner Bourges et de ramener un mire! Oh c’est affreux nous allons tous trépasser! Qu’Aristote nous vienne en aide! C’est terrible ce qui arrive à notre pauvre maîtresse! Courez! Volez! Oh seigneur je t’implore à genoux -Et Mathilde de se mettre à genoux parmi les herbes hautes , les mains jointes , ses longs cheveux blonds dansant dans la brise, le cou tordu vers les cieux- sauvez la Baronne, sauvez l’enfant!!!


Johanara leva les yeux au ciel entre deux hululements de douleur.


Pour sûr que je vais l’occire…
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Valezy
Valezy était un saint… En cela, force était de constater que l’évidence faisait loi. Car le seigneur de Magnet faisait partie de cette race d’homme à qui tout serait pardonnée lors du jugement dernier. Non point par privilège, mais par récompense pour leur incroyable patience et pour leur capacité à tout endurer sans jamais rechigner.

En effet, ces neufs derniers mois, le jeune noble avait su prouver qu’il possédait toutes les qualités requises pour revendiquer cet illustre statut. N’avait il pas supporté, tandis que le volume du ventre de son épouse grandissait à l’extrême, de voir sa femme devenir de plus en plus insupportable? Et tandis que les lubies de cette dernière se faisaient plus abracadabrantes qu’elles ne l’étaient déjà, tout comme ses crises d’hystéries, il était resté calme et serein.

Mais même un saint avait parfois besoin de vacances…

C’est pourquoi, Valezy avait prit, sans vergogne, quelques distances avec cette baronne incendiaire qui plus que jamais méritait ce qualificatif. Aussi, avait il refusé d’assister au mariage… De l’autre là, l’abominable et vulgaire vassal dont il ne se souvenait pas même du nom. Tout comme il avait choisit d’effectuer le trajet à cheval plutôt que de se laisser conduire au sein du coche que l’on aurait très bien pu renommer: l’antre de la bête.

Par ailleurs, grand bien lui avait prit, car il avait ainsi pu jouir sans réserve de cette rencontre avec des brigands. Car autant passer ses nerfs en rossant des domestiques était un acte immoral, autant mettre une raclée à des berrichons, hors-la-loi qui plus est, était une bonne chose qui pouvait être vu comme un geste de vaillance.

Et si, certes, cela ne valait pas le plaisir de brûler un village du Berry tout en regardant ces habitants velus à la face rougeaude, comme le sont bien souvent les gens de cette sauvage contrée, s’égosiller et courir en tout sens, il fallait savoir se contenter de ce que le Très-Haut vous offrez si généreusement.

Aussi, le cavalier, qui chevauchait à quelques pas seulement du carrosse, en était il là de ses pensées tout en contemplant l’inénarrable paysage que lui offrait la campagne berrichonne. Encore que si… Soyons fou et narrons la, car nous pourrions très bien la résumer par cette litanie: feuillu, conifère, caillou, feuillu, conifère, caillou,…

A ce constat, Valezy laissa échapper un soupir tout en s’écriant:


- Quelle plaie!

Mais il était bien loin du compte, car déjà le coche s’immobilisait laissant, par la même, apparaître Mathilde, la plantureuse camériste de Johanara. La jeune femme rendue affolée par on ne sait quelle raison lui annonça alors que sa chère épouse avait perdu les eaux.

- Allons vous avez perdu la raison? De telles simagrées pour si peu? Prenez donc ma gourde!

Mais l’écoutait elle seulement? Que nenni, au lieu de cela, la servante se jetait, genoux à terre, tout en psalmodiant quelques absurdités. Et c’est alors qu’il comprit, car mieux vaut tard que jamais.

- Accoucher! Ici? Par tous les saints dont je fais parti!

Et il lui fallu une certaine dose de sang froid pour ne pas se laisser démonter et pour reprendre:

- Remontez donc dans ce carrosse au lieu de débiter vos bigoteries et sommez Serguei de faire route vers Lignières. Nous serons au castel bien plus rapidement qu’à Bourge et il est hors de question que mon épouse donne naissance à mon héritier en pleine forêt.

Puis, avisant le reste de ses gens.

- Tâchez que ma bien aimée m’arrive là bas en vie! Ou je vais tous vous faire pendre haut et court!

Et sans autre forme de procès, il martela les flancs de sa monture pour filer, à bride abattue, sur la route qui le mènerait vers le fief de la famille Emerask.

Puis, alors que la sylve défilait sous son regard céruléen, il pensa, non sans raison, que son chemin de croix n’était pas prêt de s’achever. Il était déjà trop tard pour éviter l’irréparable, son enfant naîtrait berrichon. Et rien que cela, le mettait déjà en rogne. Mais voila que son épouse risquait bien fort d’accoucher là, sur le bord d’un sentier forestier, comme la dernière des laies mettant à bas une portée de marcassins.

A cette idée, ses chausses talonnèrent encore plus fort les côtes du destrier, qui en retour accéléra l’allure tout en piaffant.

Il ne manquerait plus que ce soit une fille… Ou pis des jumeaux!

Mais il n’eut guère le temps de penser plus avant à cette catastrophe que face à lui se dessinait la silhouette du village de Lignières.

Et ce fut un Valezy, rendu dépenaillé par sa folle cavalcade, qui fit irruption sur la place du paisible hameau. Apercevant alors une poignée de paysans qui vaquaient à leurs occupations, il tonna, plus qu’il ne s’exprima, à leurs adresses:


- Que l’un d’entre vous, se rende sans tarder au castel et informe les domestiques que votre baronne est non seulement en route mais qu’elle s’apprête à accoucher d’un instant à l’autre. Qu’ils fassent le nécessaire pour son arrivée.

Quand aux autres, allez me chercher la sage-femme, le médicastre ou le rebouteux qui officie dans ce village. Et ramenez le moi promptement ou le mordant de ma lame saura caresser la peau de vos séants rendu bien trop mou à mon goût!


Et c’est ainsi que la populace de Lignières quitta sa léthargie pour se mettre en effervescence.
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Bazamet
Quel drôle d'endroit ! Certes, on lui avait dit que le Berry était verdoyant et boisé, mais il ne s'attendait pas à rencontrer plus de gibier que d'humain.

Bazamet, dans sa queste de la vérité, dans la queste des ses origine s'était arrêté en cet endroit, fourbu.

Rien n'amenait le jeune homme en ces lieux. Les renseignements qu'il avait de ses origines n'étaient pas en Berry. Des maigres renseignements qu'il avait pu glaner, il se savait sang mêlé d'Anjou et d'Armagnac de Comminges.

Mais parfois, il fallait laisser le destin agir pour soi. Il ouvre une nouvelle fois la seule chose qui le relie à ses parents, ce pendentif avec ces quelques mots gravés " Au delà des apparences". Il aimait cette phrase, non seulement parce qu'elle le ramenait en arrière, mais aussi parce qu'elle était grande promesse.

Il était donc là, hésitant. L'auberge ou la grange la plus proche. Sa main ouvre sa bourse et une grimace lui déforme le visage. Sûr qu'il finira sur la paille avec ce qu'il lui reste.

Une galopade, un pas de côté pour éviter le noble cavalier et l'oreille aux aguets en entendant les ordres prononcés. Hey ! Peut-être un moyen de finir sur une couche ?

Le hic... il n'est pas d'ici. Nulle idée de ce château, dont il aurait bien garni la pièce principale pendant la nuit, et aucune idée des métiers des habitants de cette ville. Il allait falloir la jouer serré. Le bluf... utilise ce fameux bluf qui t'as déjà sorti de bien des situations !

C'est donc le sourire aux lèvres, du haut de ses seize printemps qu'il s'approche de l'homme dont il apprécie les vêtements, surtout cette chemise merveilleuse dont il aperçoit le tissu par l'échancrure du vêtement de voyage. Par chance, il a réussi lui même à préserver ses effets et son allure est certes modestes mais un peu plus gracieuse que celle des habitants qui déjà s'ébrouent de tout côté.


Monseigneur, permettez-moi de vous proposer mes services. Oh certes, je ne suis point médicastre, je ne savions point où se trouve la demeure que vous décrivez, mais je suis sûr que je puis vous aider. Je m'appelle Bazamet de.... Petit moment d'hésitation, puis il reprend. .... le calmeur. Oui, c'est ainsi qu'on m'appelle car il se trouve que j'ai cette faculté d'apaiser les humeurs mauvaises, pendant que les hommes de médecine officient.

Son chapeau mou tourne dans ses mains pendant qu'il parle, les yeux ne montant pas au dessus de la croupe du cheval, un léger sourire lui éclairant le visage.

Donc pour votre Dame, en l'échange d'un repas chaud et d'une couche pour la nuit, je puis sans doute calmer ses douleurs de l'enfantement, pendant que les sages femmes s'occuperont de la délivrance.

Il ose un coup d'oeil vers le visage du cavalier pour estimer l'effet de son discours, et reprend.

Vous voyez monseigneur, je ne suis pas très gourmand. Qu'est-ce qu'un maigre repas et une nuit pour un homme dont l'allure sur sa monture montre l'habileté, l'assurance et l'aisance ?

Ayant terminé son intervention d'une façon dont il n'est pas peu fier, il attend la réponse, priant intérieurement que cet homme ne soit que l'intervention de sa bonne étoile.
--Serguei





Merdasse… L’attaque avait encore foiré! Serguei biglait ses camarades de beuverie s’faire tabasser en maugréant. A chaque fois qu’sa maîtresse passait par l’Berry, il prévenait ses potes qu’y avait d’la maille à s’faire. Mais comme d’hab, ils s’étaient fait torcher par ces bouseux d’valets et par l’Baron endimanché.

Pour s’consoler il s’était mis sur la tronche avec Jeannot. Histoire d’lui apprendre à faire vasouiller ses plans.

D’façon tout allait mal. Surtout avec les gazoutes. La Baronne avait un lardon dans l’tiroir et semblait encore plus irritable. Même plus elle le laissait mater ses miches.

Sihaya le prenait toujours de haut. Elle avait failli lui broyer la caboche à coup de bâtons alors qu’il tentait en toute amitié de la débarrasser de son corsage afin qu’elle n’ai pas trop chaud.

Ingrate!

Seule Mathilde rendait son office quelque peu supportable en lui permettant de baiser sa peau laiteuse de temps à autre.

Elle était désirable la bonniche, avec des mamelles lourdes et blanches à outrance.

En la voyant à terre, Serguei n’eut qu’une envie, lui soul’ver les jupes! Mais l’nobliot lui en aurait surement retourné une…

Il passa sa tête hirsute dans l’embrasure de la porte du coche.


J’peux pit être vous aider nan? Genre regarder entre vos gambettes si tout va bien… Ou bien vous masser l’poitrail pour vous détendre…


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Tant va le verre à la bouche, qu'à la fin il se vide.
Cocher et souffre-douleur de la Baronne de Lignières.
"Plus rapide que mon bolide, tu meurs!"
Sihaya
[Pendant ce temps, dans le carrosse]

Valezy était parti en trombe, on ne voyait déjà plus de lui que la poussière soulevée par les sabots de son cheval, que Mathilde était toujours en train de gémir en tordant son tablier, à genoux sur la route. Avec une petite grimace de douleur, Sihaya dégagea doucement sa main de la poigne de la Baronne dès lors que celle-ci eût fini d'hululer.

Allons, de grâce Ma Dame, respirez profondément et tâchez de vous détendre, tout va bien se passer.

Passant la tête par la portière, elle avisa cette empotée de blondasse qui pleurnichait et fut très tentée de faire repartir la voiture en la plantant là. Réprimant un soupir, elle s'apprêtait à descendre la chercher lorsqu'elle recula précipitamment en voyant Serguei à la porte avec ses propositions inconvenantes.

Cette fois son sang ne fit qu'un tour. Des heures à un stupide mariage où la Baronne avait à tout prix voulu se rendre, à se faire broyer la main tandis que les premières douleurs se faisaient sentir, mais bien sûr n'en faisant comme toujours qu'à sa tête l'intraitable rousse avait voulu faire bonne figure jusqu'au bout, puis cet interminable voyage, une attaque de brigands pour couronner le tout, la Mathilde qu'elle ne pouvait plus souffrir depuis l'incident le jour du mariage qui faisait sa mijaurée, et maintenant ce dégoûtant de cocher !

Attrapant prestement le bâton qu'elle gardait toujours à portée de main pour ce genre d'occasion, Sihaya l'abattit vigoureusement sur le vilain museau de l'importun pour ponctuer ses cris de colère :


[BAM] Comment osez-vous ! [BAM] En un moment pareil ! [BAM] Vous n'êtes décidément qu'un animal en rut ! [BAM]

Puis, tandis que Serguei reculait en tentant de se protéger maladroitement, trébuchant et finissant assis par terre, elle sauta du carrosse en continuant de hurler :

Remontez donc sur votre siège, malotru que vous êtes, et restez-y !

Puis dans le même élan, elle flanqua un bon coup de pied dans le séant de la blondasse qui en arrêta net sa comédie pour la regarder d'un air éberlué et bovin.

Quant à vous, maraude, remontez tout de suite en voiture si vous ne voulez pas qu'on vous laisse ici, et si je vous entends encore ouvrir la bouche avant notre arrivée à Lignières, je vous tannerais le cuir à coups de bâton, et ce sera un plaisir, croyez moi, alors ne me tentez pas ! Et tenez donc la main à votre maîtresse, que vous vous rendiez donc utile pour une fois !

Se tournant vers Serguei qui avait fui en jurant vers son siège, elle lui ordonna sèchement :

Conduisez nous à Lignières au plus vite, et ne faites pas verser la voiture ou par Aristote il vous en cuira !

Puis elle remonta dans le carrosse à la suite de Mathilde qu'elle poussa sans ménagement pour la faire assoir près de la Baronne, juste à temps pour que celle-ci puisse s'emparer de la main de la blondasse au moment où ses douleurs recommençaient, et la lui écraser en poussant un hurlement. Le carrosse se remit en route dans une embardée et partit à toute allure, tandis que Sihaya regardait avec l'ombre d'un sourire satisfait la pauvre Mathilde qui se mordait les lèvres en la regardant d'un air apeuré pour ne pas crier à son tour sous l'étreinte de fer de Johanara.
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Dame de Compagnie de Johanara Bérénice d'Emerask Ambroise, Baronne de Lignières et Dame de Saint Lys, Antras et Magnet
Valezy
Perché sur son hongre, le baron contemplait la plèbe qui à ses pieds se mettait en œuvre suite à ses instructions, comme une petite armée obéissant à son capitaine. Et face à ce spectacle, il s’accorda quelques secondes pour savourer cet instant qui ne lui rappelait que trop bien sa folle carrière d’homme d’arme.

C’est alors qu’un jeune jouvenceau, qu’il ne connaissait ni d’Eve, ni d’Adam, s’avança vers lui tout sourire pour l’interpeller sans vergogne. En retour, le regard de Valezy se posa sur l’adolescent pour le détailler avec attention. La mise de ce dernier, bien qu’elle soit indigne d’un homme de goût, avait le mérite d’être propre et suffisamment soignée pour le distinguer des pécores du cru.

Aussi pour ce simple, mais salvateur effort, le noble prit le soin d’écouter patiemment les doléances du jeune homme au lieu de rabrouer sèchement l’impertinent. Après tout, par sa seule tenue ne venait il pas de lui prouver que même dans le plus sauvage des pays une poignée d’homme était encore capable de conserver quelques traces de civilisation?

Mais tout de même, sa patience risquait fort de rapidement atteindre ses limites. Pour qui le prenait on? Calmer les malignités! Et puis quoi encore, pourquoi ne pas embarquer dans une machine pour voler dans les cieux tant que l’on y était?

Soit ce Bazamet faisait preuve d’un grand fanatisme, soit il était le dernier des insolents!

Fort heureusement, le jeunot savait comment parler au Valezy et se rattrapa de bien belle manière à la fin de son discours. L’habileté, l’assurance, l’aisance… Voila qui le caractérisait de bien belle manière. On aurait certes pu rajouter l’intelligence, la beauté, la force, le charisme, la magnanimité, la grâce, la majesté, et j’en passe et des meilleurs. Quoi qu’il en était et il n’y avait nul doute là-dessus, son interlocuteur savait jauger les hommes à l’aune de leurs vertus!

Dès lors, le torse du cavalier ne manqua pas de se gonfler de fierté, à moins que ce ne soit de vanité, un peu à l’image de ses coqs qui aimaient rappeler qu’ils étaient les seuls maîtres de la basse cour.

Aussi répondit il d’un ton où se mêlait incrédulité et bienveillance.


- Le calmeur, hein?

Et un sourire en coin se traça sur ses lèvres.

- Il n’y a que deux possibilités, ou vous êtes un charlatan, ou bien vous êtes un grand thaumaturge… Quoiqu’il en soit il n’y a qu’une façon d’être fixé sur ce sujet, n’est il pas?

Aussi, comme je suis d’un naturel joueur, je vais accepter votre offre. Nous verrons bien ainsi ce qu’il en est et si vos dons ne se limitent pas à un talent certain pour la rhétorique.


A ses mots, son sourire se fit plus franc.

- Au fait, je me nomme Valezy d’Emerask, Baron de ces terres et seigneurs de quelques autres arpents disséminés dans le royaume.

Quant au castel, il est bien normal que vous ne sachiez le localiser car voyez vous, vous êtes dans la seule contrée du monde où les arbres sont suffisamment hauts pour éclipser des murailles. Néanmoins, la bâtisse se trouve à quelques lieux seulement au nord.


Pour mieux ponctuer ses propos, il pointa du doigt la route qui conduisait à sa demeure.

- Nous nous y rendrons quand ma douce sera là. Vous pourrez ainsi mettre vos talents à l’œuvre pour la soulager lors des derniers mètres qui symboliseront la fin de notre périple.

Se disant, il se retourna pour contempler la lisière du bois par laquelle devrait apparaître d’une minute à l’autre le convois qui acheminait son épouse, du moins il ne pouvait que l‘espérer.

- Mais en attendant, dîtes moi d’où venez vous? Je ne crois pas reconnaître en votre ton un quelconque accent berrichon?
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Bazamet
ô surprise, l'homme s'intéresse à lui et le voila qu'il lui répond, qu'il le prend au sérieux. Comme quoi l'audace était parfois récompensée autrement que par les coups ou le mépris.

Le sourcil de Bazamet se lève lorsque l'homme prononce son nom, et son regard se porte, en vain, au nord. Effectivement, comme Valezy l'avait annoncé, nul bâtisse en vue, seuls des arbres, des arbres et puis .... quelques arbres aussi.

La main de l'adolescent se porte à sa tête, qu'il frotte d'un air dubitatif. Il ose une parole vers le cavalier.


Un château normalement, ça se voit de loin, non ? Quelle drôle de contrée que celle où les bâtisses nobles se terre loin des regards ? Comment peut-elle donc remplir son devoir de protection s'il est impossible de voir l'ennemi arriver au loin ?

Lorsqu'il lève la tête vers l'homme qui inspecte la lisière des bois, la question auquel il ne s'attendait pas, tombe. Comment était-il donc possible qu'un cavalier puisse s'enquérir des origines d'un gamin ? Cette question eut l'effet d'une assiette de soupe chaude et réchauffa l'adolescent qui, bien content qu'on s'intéresse à lui, pose son chapeau sur sa tête pour répondre.

D'où je viens ? De là bas !

Il montre le chemin à l'Ouest.

J'ai parcouru bien des lieux depuis que je me suis enfui... euh... que j'ai pris congé de mes tuteurs. Des années qu'ils m'ont recueillis, des années que j'attends que mes parents viennent. Mais rien, je n'ai que quelques bribes d'informations sur ceux qui m'ont mis au monde.
La seule chose tangible que je connaisse est que je suis originaire d'Anjou et d'Armagnac et Comminges. Drôle de mélange n'est-ce pas ? Comment 2 contrées éloignées peuvent-elle donner un seul être ?


Des mois qu'on lui avait pas posé de question, qu'on ne s'était pas occupé de son sort, il n'allait pas laisser passer l'aubaine.

On m'a dit que ma mère était belle et piquante, que mon père était devenu important dans le Sud en partant de pas grand chose. Après, c'est un peu plus flou. Je n'ai aucune idée de ce qui a poussé mes parents à me laisser à ces tuteurs.
Paraîtrait même que j'ai le droit à une particule, que je sois Bazamet de quelque chose. Mais de quoi.... ?


Son regard se porte vers le nord.

Mais dites moi, je devrais peut être partir devant, je suis à pied moi.
Johanara
La proposition de son cocher laissa Johanara pantoise. Ce butor bouffi et libidineux n’entendait vraisemblablement rien à la bienséance.

Pour sûr, tu seras fouetté pour tes manières insolentes.

Puis ce fût au tour de la gironde Mathilde d’être rudoyée. La Baronne découvrait pour la première fois que sa dame de compagnie n’était pas la douce et naïve jeune fille qu’elle pensait avoir à son service.

C’était une furie! Jalouse et revancharde! Pour expliquer cet accès de colère, laissez moi vous rappeler quelques cocasses événements. Je plante le décor: Avril 1457, en la chapelle de Lignières, deux êtres portés par un amour immense à nul autre pareil s’unissent devant Aristote et les hommes : l’indomptable Dame de Saint Lys et l’éblouissant Valezy d’Emerask qui ne souffre la comparaison avec aucun autre mortel. Parmi les convives, le Duc d’Ylfan, Persan pour les intimes, qui profite de l’inattention des autres convives pour tâter la cuisse blanche et ronde de la bonne des Lignières dans le secret d’un confessionnal. La jeune Sihaya, témoin de leurs amours impudiques et amourachée du beau Duc l’aura mal pris et déverse depuis sa rancœur et ses regrets sur la blonde chambrière.


Ne la rabrouez pas trop fort ma chère, aucune domestique ne m’a servi aussi fidèlement que Mathilde….


Nous avons pour ainsi dire grandi ensemble au château des Ambroise. Sa mère était déjà lingère du temps où mon père régnait du main de fer sur Lignières et ses environs.


La main de la baronne se resserra plus fermement sur celle de Mathilde tandis qu’un braillement s’échappait de ses lèvres pourprées.


Je n’y survivrais pas…Sihaya, un velin , une plume, je souhaite rédiger mon testament…
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Sihaya
La jeune fille resta un instant bouche bée sous la rebuffade de la Baronne. Celle-ci n'était certainement jamais lasse de rudoyer sa bonne, mais elle s'en réservait apparemment le privilège. Se retirant dans le coin le plus sombre du carrosse pour cacher sa détresse, elle murmura :

Comme il vous plaira, ma Dame

Dieu sait pourtant que Sihaya se retenait quand il s'agissait de Mathilde, tant sa seule vue était pour elle comme une dague en plein coeur, douleur sans cesse renouvelée. Ajoutez à cela le retour vers Lignières, lieu des événements, et voila de quoi mettre ses nerfs à rude épreuve.

Comment oublier à quel point son coeur avait été brisé, quand celui-ci ne cessait de la faire souffrir, comment oublier lorsqu'on avait en permanence sous les yeux le rappel de cette journée, que ce soit par la présence des mariés eux même ou celle de la gueuse à la cuisse légère !

Comment guérir alors qu'elle n'avait pas même pu se résoudre à faire plus ample connaissance avec Bastien, le jeune homme étant trop lié dans ses souvenirs à cette funeste journée !

Si une personne au monde aurait dû la comprendre, c'était bien Johanara, dont le coeur avait été tant de fois brisé avant sa rencontre avec son époux, mais non, elle rabaissait cela au rang d'anecdote et voila qu'elle lui lançait au visage l'ancienneté de ses rapports avec Mathilde !

Pour la première fois, Sihaya sentit leur amitié vaciller, et douta de rester auprès de la Baronne. Presque deux ans de bons et loyaux services, d'un dévouement sans faille à son égard, supporter ses sautes d'humeur et ses caprices, et les réflexions sarcastiques de son arrogant époux qui, il est vrai était odieux avec tout le monde, mais tout de même.

Trop d'émotions bouillonnaient dans le coeur de la jeune fille, trop de pensées, d'images tourbillonnaient dans son esprit, la blonde Mathilde, le jour du mariage, le confessionnal, Persan, les tours blanches, la seule fois où il l'avait tenue dans ses bras, son regard si sombre où elle était tombée comme dans un puits sans fond, le couvent où elle avait voulu se laisser mourir de chagrin, mais c'était décidément trop long, sa propre mère qui était morte en lui donnant le jour, et maintenant Johanara qui voulait faire un testament ?!

Brusquement sortie de ses pensées, Sihaya s'avança sur son siège pour la regarder droit dans les yeux et lui dire fermement :


Certainement pas ! Vous n'allez pas mourir ! Vous êtes en parfaite santé et en pleine forme, vous êtes jeune et forte, et tout va bien se passer ! Maintenant respirez à fond et soufflez fort, cela va vous aider à supporter la douleur. Quant à vous Mathilde, délacez la enfin, vous ne voyez pas qu'elle est trop serrée dans sa robe !
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Dame de Compagnie de Johanara Bérénice d'Emerask Ambroise, Baronne de Lignières et Dame de Saint Lys, Antras et Magnet
Johanara
Aux paroles de sa jeune suivante , Johanara poussa un profond soupir avant de plonger ses grands yeux émeraudes dans le regard chagrin de cette dernière.

Il suffit. Le temps presse… Moult femmes de ma famille sont mortes en couche et j’ai le pressentiment que le Créateur me réserve le même sort… Je suis si lasse… J’ai l’impression que cet enfant s’amuse à me torturer et à me tordre les viscères!

Dîtes…


La Baronne prit ses mains dans les siennes et la fixa, l’œil humide avant de lui demander la voix chevrotante :

Jurez moi que vous prendrez soin du bébé… Surtout si c’est une fille. Vous connaissez le Seigneur de Magnet , son cœur est parfois aussi dur que la pierre… Il n’hésitera pas à l’abandonner dans quelque couvent… Jurez! Et toi, petite sotte , cesse de me dévêtir!

En effet, Mathilde, avait délassé les rubans de soie de la toilette azurine, qui glissa dans un bruissement de soie au pied de la jeune noble, dévoilant des jarretières de dentelle lavande et un corset violine.

Et ne laissez pas ce basin se remarier avec la première ribaude venue… Sa première épouse semblait une coureuse de rempart! Elle aura au moins eu le bon goût de trépasser sans avoir enfanté. Je ne ferais pas ce cadeau à sa future épouse! Elle croira voir mon reflet dès que ses yeux se poseront sur l’enfant qui je gage aura ma beauté et ma prestance. Cela la renverra à sa propre médiocrité…

Johanara eut un petit rictus cruel.


Je… souhaite vous ennoblir mon amie…Orval est à vous. Vous m’avez toujours été d’une grande fidélité et d’une aide salvatrice. Je me souviens encore des conseils avisés que vous me prodiguiez en Armagnac…

Mais…Une plume et de l’encre vous dis je! Ne m’obligez pas à vous mordre…

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Sihaya
Menfin !!! C'est qu'elle se croyait vraiment à l'article de la mort, la bougresse ! Mi attendrie, mi agacée par les sempiternelles dramatisations de la Baronne, Sihaya allait recommencer à la raisonner en dépit de ce flot de paroles ininterrompues quand elle se trouva fort décontenancée et émue de son offre d'anoblissement. Emotion prestement réprimée lorsque l'inénarrable rouquine menaça de la mordre ! C'est qu'il fallait suivre avec elle ! Reculant avec vivacité, la jeune fille commença à chercher une plume dans les bagages, sachant d'expérience qui lui passer ses fantaisies était le meilleur moyen d'en voir la fin.

Oui oui ! Je cherche, je cherche ! Ne vous énervez pas ! Vous me dicterez vos volontés !

Sortant enfin un écritoire :



qu'elle posa sur ses genoux, elle en sortit le nécessaire et attendît la dictée, la plume en l'air.
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Dame de Compagnie de Johanara Bérénice d'Emerask Ambroise, Baronne de Lignières et Dame de Saint Lys, Antras et Magnet
Valezy
Décidément, le jeune homme tombait à pique. En effet, s’il n’était l’agréable discussion qu’il lui offrait en cet instant, Valezy aurait eut tôt fait de se laisser aller au sentiment de panique qui menaçait de se saisir de lui.

Mais que faisait donc les cambroussards de Lignières? Leur fallait-il une éternité pour trouver un médicastre? Une chose était certaine, si on ne lui ramenait pas un mire très prochainement, il prendrait lui aussi tout son temps pour faire souffrir cette piétaille dans les donjons du castel.

Sa main se posa alors sur son sabre, serrant compulsivement le pommeau de l’arme, avant qu’il ne réponde à Bazamet d’un ton qui laissait transparaitre sa nervosité.


- Je me disais bien qu’il était curieux que vous ne laissiez échapper ni norf, ni autres sons étranges en parlant.

Car voyez vous les berrichons sont peuple étrange que ce soit dans leur langage ou dans leur façon de dresser leurs fortifications et il serait folie pour des étrangers comme nous que d’essayer de les comprendre. Aussi, ce duché est envahi et pillé tous les deux mois sans que nul âme ici ne s’en inquiète. Mais que voulez vous, si cela est leur mode de vie autant les laisser dans leur panade.


L’homme ricana alors à ses propres mots, sans pour autant que son rire ne laisse apparaître le moindre signe de joie.

- Ainsi, en vous coule à la fois du sang angevin et armagnacais? Quelle coïncidence que voila, j’ai moi-même vécu en Armagnac et Comminges durant un temps. J’y ai peut être connu vos parents, qui sait?

Mais autant vous prévenir de suite, si vous me dîtes que vous être le rejeton de Philipaurus ou de Cassandres, c’est sous un jet de pierre que vous quitterez mes terres.


Et suite à cette lugubre promesse, son regard azur se fit plus insistant tandis qu’il guettait chez son interlocuteur des traits qui auraient pu lui sembler familier.

- Quoi qu’il en soit nul besoin de vous hâter, mon fidèle destrier est suffisamment puissant pour porter deux passagers.

Soudain, interrompant par la même la singulière discussion qui se tramait là entre un noble et un orphelin, une poignée de gueux revinrent vers eux tout en escortant un homme qui ne payait pas de mine.

Jugez plutôt par vous-même en vous imaginant, un vieillard aux cheveux blancs, à la peau tannée par la rudesse du climat, à la face si rubiconde qu’elle transpirait l’ivresse et à l’accoutrement aussi sale et troué que dépenaillé.

Et ce qui devez arriver, arriva.


- Maître, maître, nous revoilà avec le rebouteux du village!

Dire que ces benêts respiraient le contentement en disant cela, au contraire d’un Valezy qui ne savait plus comment cacher son dépit.

- Vous vous moquez?

Et au vieillard de répondre avec une morgue que lui inspirait certainement le pinard bon marché qu‘il avait ingurgité toute la sainte journée et ceci sans modération.

- Non pas, je me présente Baudouin, bailleur et mire de mon état. J’ai même suivi des cours à la faculté de Bourges… Enfin une ou deux fois, norf! Mais parlons plutôt de mon salaire, mon bon seigneur…


Réponse ne tarda pas à lui revenir… Mais une réponse des plus désemparées!

-Par la bête, que suis-je venu faire dans cette galère?
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Bazamet
Son coeur s'emballe. Ainsi le fier cavalier, préoccupé par sa descendance à venir, pourrait être un allié de choix dans sa quête de la vérité, de ses origines.

Les yeux s'agrandissent, il observe l'homme. Il réfléchit.... Valezy... n'avait-il pas lu ce nom dans les bribes de parchemin qu'il avait réussi à sauver lors de sa fuite ?

Alors qu'il allait lui poser la question, un groupe de paysans approche, avec à sa tête un homme aussi hirsute qu'édenté. La conversation s'établit, entre la grasce de la noblesse et la crasse des serfs.
Bazamet regarde l'homme de plus prêt, le renifle et grimace. Comment un homme qui sent aussi mauvais et qui est aussi sale peut-il prétendre sauver les vies par l'art de la médecine ?
L'adolescent commence à comprendre pourquoi il ne rencontre que peu d'âmes qui vivent. Sûr qu'avec un tel rebouteux, la file d'attente pour le cimetière doit être plus longue que celle vers la voie de la guérison.

Son visage se pose sur le cavalier. Ouf, il semble être de son avis. A sa place, jamais il ne confierait l'entrejambe d'une femme à telle infamie. Quelle vision pour le nouveau né que celle de cet homme !? Sûr qu'il en ferait des cauchemars à vie.

Mettant le cheval entre lui et les habitants, on n'est jamais trop prudent, Bazamet tire doucement sur le bas de l'habit de Valezy.


Pssst.. Messire Valezy... autant faire ça de vos propres mains, qui le sont bien plus que ce drôle là ! Je ne sais pas pourquoi, mais ça sent le charlatan à plein nez.... par dessus les odeurs de vin aigre.
N'avez-vous aucune crainte de proposer cela à la pureté d'un enfant naissant ?


Son regard va du noble au vieux, puis du vieux au noble.
Johanara

Alors que la jeune Baronne dictait d’une voix serrée par l’émotion ses dernières volontés à sa fidèle camériste, le coche chancela dangereusement.

Le joli écritoire fut projeté sur une Mathilde ahurie et Johanara dut se cramponner de tout ses forces à la banquette pour ne pas choir de toute sa jolie mais lourde personne sur les autres occupantes du coche.


Lignières en vue! Lignières en vue! Beugla le cocher .

Époussetant ses volumineux jupons du plat de la main en maugréant, la rouquine sentit soudain une douleur plus aigu traverser tout son être.


Par Aristote , cette fois je crois que je vais m’occire moi-même! Délivrez moi de ce fléau! Immédiatement!

Ma dame, de grâce , cessez de vous agiter, j’aperçois le village , nous allons quérir de l’aide…


L’affolement régnait en maître dans le carrosse à présent. Mathilde gémissait , la Baronne hurlait, persuadée de vivre ses derniers instants, seule la solide Sihaya semblait quelque peu échapper à l’hystérie ambiante.

Lorsque la voiture s’arrêta abruptement , mettant une nouvelle fois ses occupantes en fort fâcheuse situation, Johanara jura de faire pendre haut et court l’arsouille répugnante qui lui servait de cocher.


Le voilà justement qui ouvrait la portière et passait sa tête hirsute et disgracieuse dans l’habitacle :

M’dame, y’ a votre basin à rubans avec deux gueux. On fait coué? J’suis d’avis qu’on fasse semblant de point les avoir vu.

Johanara administra à son domestique un formidable soufflet.

Misérable pendard! Gredin! Scélérat! Déguerpis sur le champs!

Sihay je vous prie d' aller voir ce qui se trame… C’est un complot… Une machination…


Lorsque la belle vit revenir sa fidèle suivante accompagnée du plus repoussant et du plus vil des charlatans, elle crut défaillir. Mais lorsque cette dernière lui annonça qu’il s’agissait du médicastre que son mari avait fait mander , elle fondit en larmes, les sanglots soulevant son opulente poitrine tandis que le pouilleux prenait place à ses côtés…
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Valezy
Valezy scrutait avec insistance le petit peuple de Lignières qui s’était réuni devant lui. Quelle outrecuidance que voila! Comment osaient ils ne serait ce que supporter son regard alors qu’ils vouaient leur maîtresse, la femme de sa vie, à une mort certaine en la laissant enfanter entre les mains de cet abject personnage?

C’est alors que Bazamet attira son attention pour lui adresser quelques fort justes remarques.

Allons bon, un charlatan… Pour sur, le jeune homme avait raison. Mais tout de même, c’était l’hospital qui se moquait de la charité. Aussi répondit il, avec une irritation presque palpable.


Moi donner la vie? Folie!
Guerroyer, voila une chose que je sais faire, mais cela… C’est bien loin de mes talents.


Puis regardant son interlocuteur avec circonspection.

Et puis vous n’avez qu’à le faire vous. Vous disiez avoir l’habitude de voir les médicastres officier non? Alors justifiait donc et votre réputation, et votre rétribution, en aidant mon épouse à mettre à bas.

Néanmoins il n’eut guère le temps d’exposer plus avant sa brillante idée que le rebouteux refit des siennes. Était ce là l’œuvre de la bêtise ou de l’alcool? Nul ne le su. Et de toute façon cela ne changeait rien à la teneur de la fanfaronnade qu‘il adressa à ses congénères berrichon.

Vla ti pas que le basin fait des siennes. Bein les auvergnats ça, à jouer aux plus malins et à faire les fiers-à-bras! M’en vais me retourner à ma chaumière reprendre de l’alcool de châtaigne moi. Mieux à faire qu’à m’occuper de ce zouave!


Dès lors, dire que le seigneur d’Antras vit rouge aurait été un euphémisme. On aurait presque pu voir de la fumée sortir de ses esgourdes, des flammes de ses nasaux et la foudre de ses yeux.

Quoiqu’il en soit, ce que l’on vit avec force netteté ce fut un Valezy rendu fou par la fureur qui, tout en faisant cabrer sa monture et en hurlant un suffi empli de hargne, dégaina son épée, Magnet, pour l’abattre de son plat sur le crâne de l’insolent. Ce dernier s’effondra alors au sol tout en poussant un hurlement de douleur. Était il besoin de préciser qu’en cet instant toute trace de morgue avait disparu de son faciès?

Quant à la plèbe, elle fit corps avec son affidé, empli de ce courage et de cette vaillance qui caractérisait si bien le peuple berrichon, elle se dispersa à toute vitesse tout en caquetant comme de la voletaille.


Voila qui a au moins le mérite de calmer mes nerfs, déclara le belligérant tout en remisant son braquemart au fourreau.

Mais déjà, le carrosse frappé aux armes de Lignières déboulait à toute allure sur la route qui le menait vers le lieu du crime, soulevant derrière lui un nuage de terre et de poussière.

Le rouquin soupira alors avant de déclarer, tout en descendant de selle:


Plus de temps à perdre.

Puis, il se dirigea vers le limaçon qui, recroquevillé à même le sol, geignait et pleurnichait telle une jouvencelle qui n’a jamais vu le loup tout en tenant à deux mains son crâne meurtri. Sa destre agrippa le col de sa victime pour le traîner sans ménagement vers l’abreuvoir qui se trouvait non loin.

Et le médicastre eut beau se débattre, il n’en finit pas moins par se retrouver entièrement immergé dans l’auge pour n’en ressortir que quelques longues secondes plus tard. Juste à temps pour accueillir le coche qui fit halte sur la place du village.


Un bon bain, voila ce qu’il vous manquait. Vous devriez me remercier au lieu de faire grise mine.


Valezy prononça ses mots sans même regarder l’intéressé dont le front s’ornait déjà d’une vilaine bosse et qui ne répondit que par un pathétique gémissement.

Enfin… Vous allez faire un peu plus illusion maintenant. Espérons que cela suffise. Et pas d’entourloupe durant l‘accouchement! Je le prendrais vraiment mal. Beaucoup plus mal que vos petites tirades à dire vrai.

Et c’est ainsi qu’un mire ruisselant prit place aux côtés de la belle baronne tandis que l’époux de cette dernière remontait en selle avant de tendre sa main vers Bazamet.

Allez monté, il est grand temps d’y aller.

Quelques minutes suffirent alors pour qu’un coche, un cheval et ses deux cavaliers ainsi que leurs escortes arrivent aux portes de ce castel qui cachait sa beauté derrière la frondaison des arbres.
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