Maeve.
Et c'est ce qu'elle faisait. Depuis sa plus tendre enfance. Partout où elle était passée, même pour un soir, pour quelques jours, semaines... Elle avait cherché le cours d'eau qui ne manquait jamais dans le village, quel qu'il soit.
Maeve aimait l'eau. Elle aimait se percher sur une grosse pierre ou une souche tordue, et regarder le fil de l'eau, les rides et ridules, les feuilles qui nageaient, les bulles, les poissons et autres habitants de rivière. Ça la calmait, l'apaisait, lui permettait de mieux réfléchir.
Etrange pour une Flamme de se sentir aussi bien au bord de son élément contraire, et pourtant elle en avait fait des choses au bord d'un ruisseau... Encore aujourd'hui, c'est là que la conduisent ses pas. Au bord de la Loire, sur un rocher plat qui semble flotter sur la berge, la rouquine s'assied en tailleur. Perdue, un peu. Elle va bien. Physiquement du moins. De sa rencontre avec l'armée, elle était ressortie indemne. Terriblement indemne, contrairement à d'autres. Et dans la caboche de la jeune fille, depuis, les images s'entrechoquent et choquent. Un fracas insupportable auquel ne prépare nul entrainement.
L'azur court au fil de l'eau, aussi nuageux que le ciel d'octobre qui se couvre. La douceur angevine... Quelle belle expression. Elle ne frissonne même pas, malgré le simple plastron qu'elle porte sur sa chemise, sans autre laine. De quoi choper la crève. Bah même pas.
Maeve se perd dans ses pensées et sa contemplation du fond aquatique. Une si courte vie pour tant de souvenirs. Qui tendent à s'espacer furieusement ces derniers temps. Elle fait de moins en moins de choses, la rousse. A peine si elle montre son minois en taverne toutes les deux semaines. Pas qu'elle fuie... pas l'envie. A part trainer ses guêtres au bord de l'eau, elle ne fait pas grand chose. Même le grand départ, manqué, vers St Sornin n'avait pas su l'exciter assez pour qu'elle reprenne du poil de la bête.
When you're feeling sad... It's not the case. When you're feeling mad... maybee that she is... Folle. Ne l'avait-on pas dit quand elle était sortie du couvent, parlant comme une poissonnière mal embouchée, refusant tout lien avec sa vie d'avant, mais refusant un quelconque engagement dans le conflit qui pourrait l'amener à se battre contre sa mère ? Maeve qui change du tout au tout, Maeve qui ne croit qu'en un et désespère de ne jamais le voir, sans aucun droit de se plaindre. Maeve qui passe ses journées à aller to the river...
Elle a tout eu. Trop tot peut être. Pas ce qu'elle voulait peut être. Trop tard peut être. Pas assez peut être. Elle compte ses souvenirs, la rouquine. Remonte dans le temps... se mire dans l'eau et la trouve belle. Et se trouve hideuse. Même la rivière ne saurait cacher cette balafre qui l'habille. Et dont elle se sent prisonnière. Même la rivière ne saurait cacher ce que Maeve voit d'elle meme. Ses erreurs, ses méchancetés, tout ce qu'elle a si mal fait en quinze ans à peine.
Et elle se sent si seule aussi. Angevine, mais pas vraiment. Amoureuse, mais célibataire. Rousse, et c'est pas évident de l'être. Fille de GMF, la dernière. Ennemie de la Couronne pour certains, sale royaliste espionne pour d'autres. Tout et rien. Surtout rien.
Maeve se penche toujours un peu plus, l'oeil attiré par une carpe qui passe par là. La pupille qui s'accroche à ce reflet qu'elle en vient à force d'exil et d'ermitage plus ou moins volontaire à exécrer. Et puis au final, un sourire se dessine. Elle imagine un petit blond en train de lui apprendre à pêcher, qui serait ravi de courir après cette carpe. Un petit blond qui lui a pardonné son égoisme, un petit blond qui a l'air d'être heureux, au loin. Elle voit aussi un jeune brun la bouche pleine de promesses et la main rassurante. Elle voit aussi une mère en deuil qui aurait besoin d'une fille aimante. Un moulinois qui peut être aimerait avoir des nouvelles. Un poitevin auvergnat qui l'emmenait poursuivre les étoiles et à qui elle avait promis de le rejoindre.
Elle sourit.
Une vaguelette emporte un trèfle un peu flétri à la surface de l'eau. Instinctivement, elle compte. Quatre feuilles. Elle sourit de plus belle. Voilà, de la chance. Elle se penche, pour le ramasser, la caboche pleine de bonnes résolutions. Trop longtemps qu'elle est là, ce qu'il lui faut, comme toujours, c'est reprendre la route.
Elle tombe.
Ce qui est vraiment con... c'est qu'elle a passé sa vie à regarder l'eau, sans jamais s'y baigner, sauf jusqu'au genou. Et que la Loire, un mois d'octobre, ce n'est pas le ruisseau de son enfance. Le cuir, le fer et la soie, ça ne nage pas non plus. Ni les bottes. Sans compter la tignasse qui se gorge d'eau et s'étale autour du minois. Tu vois, Maeve, on ne la voit plus ta balafre.
Elle a attrapé le trèfle, qu'elle serre dans un poing paniqué. L'eau afflue dans les poumons en chassant les derniers souffles d'air. Elle coule.
Quoi de plus normal... une Flamme qui s'éteint dans l'eau... Et si elle allait revoir la mer ? Fais bon voyage Rouquine, tu en avais tant envie.
Edit pour fautes.
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Maeve aimait l'eau. Elle aimait se percher sur une grosse pierre ou une souche tordue, et regarder le fil de l'eau, les rides et ridules, les feuilles qui nageaient, les bulles, les poissons et autres habitants de rivière. Ça la calmait, l'apaisait, lui permettait de mieux réfléchir.
Etrange pour une Flamme de se sentir aussi bien au bord de son élément contraire, et pourtant elle en avait fait des choses au bord d'un ruisseau... Encore aujourd'hui, c'est là que la conduisent ses pas. Au bord de la Loire, sur un rocher plat qui semble flotter sur la berge, la rouquine s'assied en tailleur. Perdue, un peu. Elle va bien. Physiquement du moins. De sa rencontre avec l'armée, elle était ressortie indemne. Terriblement indemne, contrairement à d'autres. Et dans la caboche de la jeune fille, depuis, les images s'entrechoquent et choquent. Un fracas insupportable auquel ne prépare nul entrainement.
L'azur court au fil de l'eau, aussi nuageux que le ciel d'octobre qui se couvre. La douceur angevine... Quelle belle expression. Elle ne frissonne même pas, malgré le simple plastron qu'elle porte sur sa chemise, sans autre laine. De quoi choper la crève. Bah même pas.
Maeve se perd dans ses pensées et sa contemplation du fond aquatique. Une si courte vie pour tant de souvenirs. Qui tendent à s'espacer furieusement ces derniers temps. Elle fait de moins en moins de choses, la rousse. A peine si elle montre son minois en taverne toutes les deux semaines. Pas qu'elle fuie... pas l'envie. A part trainer ses guêtres au bord de l'eau, elle ne fait pas grand chose. Même le grand départ, manqué, vers St Sornin n'avait pas su l'exciter assez pour qu'elle reprenne du poil de la bête.
When you're feeling sad... It's not the case. When you're feeling mad... maybee that she is... Folle. Ne l'avait-on pas dit quand elle était sortie du couvent, parlant comme une poissonnière mal embouchée, refusant tout lien avec sa vie d'avant, mais refusant un quelconque engagement dans le conflit qui pourrait l'amener à se battre contre sa mère ? Maeve qui change du tout au tout, Maeve qui ne croit qu'en un et désespère de ne jamais le voir, sans aucun droit de se plaindre. Maeve qui passe ses journées à aller to the river...
Elle a tout eu. Trop tot peut être. Pas ce qu'elle voulait peut être. Trop tard peut être. Pas assez peut être. Elle compte ses souvenirs, la rouquine. Remonte dans le temps... se mire dans l'eau et la trouve belle. Et se trouve hideuse. Même la rivière ne saurait cacher cette balafre qui l'habille. Et dont elle se sent prisonnière. Même la rivière ne saurait cacher ce que Maeve voit d'elle meme. Ses erreurs, ses méchancetés, tout ce qu'elle a si mal fait en quinze ans à peine.
Et elle se sent si seule aussi. Angevine, mais pas vraiment. Amoureuse, mais célibataire. Rousse, et c'est pas évident de l'être. Fille de GMF, la dernière. Ennemie de la Couronne pour certains, sale royaliste espionne pour d'autres. Tout et rien. Surtout rien.
Maeve se penche toujours un peu plus, l'oeil attiré par une carpe qui passe par là. La pupille qui s'accroche à ce reflet qu'elle en vient à force d'exil et d'ermitage plus ou moins volontaire à exécrer. Et puis au final, un sourire se dessine. Elle imagine un petit blond en train de lui apprendre à pêcher, qui serait ravi de courir après cette carpe. Un petit blond qui lui a pardonné son égoisme, un petit blond qui a l'air d'être heureux, au loin. Elle voit aussi un jeune brun la bouche pleine de promesses et la main rassurante. Elle voit aussi une mère en deuil qui aurait besoin d'une fille aimante. Un moulinois qui peut être aimerait avoir des nouvelles. Un poitevin auvergnat qui l'emmenait poursuivre les étoiles et à qui elle avait promis de le rejoindre.
Elle sourit.
Une vaguelette emporte un trèfle un peu flétri à la surface de l'eau. Instinctivement, elle compte. Quatre feuilles. Elle sourit de plus belle. Voilà, de la chance. Elle se penche, pour le ramasser, la caboche pleine de bonnes résolutions. Trop longtemps qu'elle est là, ce qu'il lui faut, comme toujours, c'est reprendre la route.
Elle tombe.
Ce qui est vraiment con... c'est qu'elle a passé sa vie à regarder l'eau, sans jamais s'y baigner, sauf jusqu'au genou. Et que la Loire, un mois d'octobre, ce n'est pas le ruisseau de son enfance. Le cuir, le fer et la soie, ça ne nage pas non plus. Ni les bottes. Sans compter la tignasse qui se gorge d'eau et s'étale autour du minois. Tu vois, Maeve, on ne la voit plus ta balafre.
Elle a attrapé le trèfle, qu'elle serre dans un poing paniqué. L'eau afflue dans les poumons en chassant les derniers souffles d'air. Elle coule.
Quoi de plus normal... une Flamme qui s'éteint dans l'eau... Et si elle allait revoir la mer ? Fais bon voyage Rouquine, tu en avais tant envie.
Edit pour fautes.
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