[Pomponne, quelques jours auparavant]
Madame, une lettre pour vous.
Hmm ?...
La jeune femme releva la tête du parchemin sur lequel elle était affairée à dessiner le plan de l herbalurius quelle souhaitait faire implanter dans les jardins de son domaine. Liste de plantes à se procurer, liste à confier à son jardinier pour quil se mette à luvre dès que le temps le permettrait.
Elle posa la plume dans lencrier, et prit le pli que la servante lui tendait. Se saisir la fine dague posée sur le bureau, et en glisser la lame entre le scel et le fin parchemin, décacheter précautionneusement la missive avant de la déplier et de la parcourir du regard.
Une invitation. A un mariage.
Sourcils qui se haussent, détonnement.
Si elle avait ouï-dire quun tel événement était en préparation, Mag naurait cependant jamais pensé y être conviée.
Parce que les contacts avec Maltea sétaient fait rares, voire inexistants au cours des derniers mois.
Parce quelle navait que rarement croisé le Duc de Brienne dans les couloirs du château de Reims du temps où elle était au Conseil champenois.
Le regard parcourut une nouvelle fois le vélin, sarrêtant sur les détails.
La cérémonie aurait lieu à Paris, donc.
Après tout
Il y avait bien cette affaire dans la capitale, quelle remettait sine die, ce serait loccasion de sen acquitter. Faire dune pierre deux coups en somme.
Elle sétira. Regard vers la clepsydre qui déroulait le temps.
La réponse, plus tard.
Pour lheure, il était temps de descendre dans la cour pour la leçon dAliénor. Car depuis quelle sétait retirée à Pomponne, elle avait décidé de compléter léducation que la gouvernante donnait à sa fille. A Ysabault, tout ce quune petite demoiselle bien éduquée devait savoir, à sa mère la pratique de certaines disciplines
un peu particulières.
La gouvernante avait froncé les sourcils devant le peu de conformisme de ce que Mag voulait enseigner à sa fille, mais la jeune femme en avait décidé de la sorte.
Ainsi avait-elle été élevée, ainsi en ferait-elle de même pour sa fille.
Et nul nétait là pour la contredire. Ou le faire à sa place.
Elle reposa la missive sur le bureau, et se leva. Gagna la cour où Aliénor lattendait, une épée à sa petite taille et émoussée à la main. La Blanche saisit la bâtarde d'entraînement quun serviteur lui tendait et se dirigea vers le cercle, face à la fillette.
Sourire. Mademoiselle
En garde !
[Vendredi 13 février]
Epée battant son flanc au rythme soutenu imprimé à sa monture, elle avait quitté Pomponne à laube, en direction de Paris. Dans ses fontes, effets soigneusement pliés.
Elle avait hésité à faire préparer la voiture, mais avait finalement décidé de voyager « léger ». Plus rapide, plus maniable. Plus pratique pour ce quelle avait à faire, lorsquil sagirait de parcourir les rues de la capitale.
A mesure quelle approchait, les villages se faisaient plus animés, la foule plus dense. Puis enfin les murailles de Paris apparurent à sa vue.
Passer la porte, puis se renseigner, adresse dune auberge située à proximité de léglise où aurait lieu le mariage.
Elle dirigea sa monture à travers les rues pavées, jusquà arriver devant ladresse indiquée. Dans la cour, elle put confier sa monture à un palefrenier afin quil en prît soin moyennant quelques écus. Puis, fontes sur lépaule, elle pénétra dans lauberge. Mander une chambre, et y déposer ses légers bagages avant que de repartir pour lune des deux affaires qui lavaient amenée en la capitale.
[En soirée]
Yeux fermés, douce chaleur du bain parfumé dans lequel elle était plongée. Simmerger complètement, puis ne ressortir que lorsque le manque dair limpose.
Ouvrir les yeux, regard vers lextérieur.
Il était temps de se préparer.
Elle attrapa le drap posé à côté du baquet et sortit à regret du bain bienfaisant. Lodeur des huiles mélangées à leau, rose et lavande, parfumait son corps et ses cheveux, quelle frictionna de létoffe pour les sécher.
Sur le lit, étaient étalés les effets quelle avait prévu de porter.
Elle laissa glisser le drap, léger frisson, avant denfiler une chainse de lin blanc, que vint ensuite couvrir un bliaut de velours azur à lencolure bordée de fourrure dont les larges manches tombaient jusque terre. Autour de ses hanches, elle accrocha une ceinture de métal enchâssée de sardoines, qui retombait par devant jusquau bas du bliaut et à laquelle pendait son aumônière. Elle glissa enfin ses pieds dans des chaussures en cuir de Cordoue.
Puis elle attacha ses cheveux encore humides en une lourde tresse lui tombant dans le dos, avant de poser sur sa coiffure un voile bleu retenu par un fin cercle de la même facture que sa ceinture.
Se saisir enfin de sa cape fourrée, sortir de sa chambre, et quitter lauberge. Si elle avait choisi celle-ci, cétait bien parce quelle était située à deux pas de loratoire Saint Michel-Archange. Elle naurait pas long chemin à parcourir à pieds, alors que les cloches sonnaient déjà.
Le parvis débordait danimation, invités qui arrivaient, chevaux et voitures.
Mag ne sattarda pas, les joues rougies par le froid, et gravit les marches avant de pénétrer dans lédifice. Légère pause à la porte, regard qui embrasse lintérieur. Elle ne cherche personne en particulier, elle observe un instant.
Avant daller sasseoir à lombre dun pilier.