[Questions d'une frimousse à un supion qui se trémousse pour une révolution] Nessty laissa glisser ses pas en silence sur la place publique bretonne, attirée par les cris d'un homme inconnu pour elle et surtout par la tignasse rousse de son Kram. L'gros n'allait pas se mettre à tousser au scandale ici alors qu'il n'était ni brigand, ni malfrat, ni en terre d'opprimés et encore moins vandale. Elle colla une tape dans le dos de son fidèle Vilain pour le saluer et lui demander ce qui se passait ici. Un rapide compte rendu : un homme, ami des bêtes, voulait transformer en gigantesques latrines la Bretagne.
La gueuse impétueuse eut du mal à se contenter de cette explication des plus douteuses formulées avec une haleine empestant le chouchen. Une pensée affectueuse pour le Gras Double, un autre ami des porcelets en confit et des aigrelets en déconfiture l'effleura. Ce dernier prônait également la courante jusque dans le
confessionnal mais n'était point ici à sa connaissance. Elle balaya tout de même l'assemblée de son regard noisette, à la recherche d'un gros-lard hilare qui rebondirait vers elle pour l'étouffer contre son saindoux avec des mots doux. Malheureusement ce n'était point son Juliuz qui bavait en tenant des gorets en laisse et qui bramait en brandissant planflets contre noblesse. Une pointe de déception naquit mais elle la compensa rapidement en se souvenant qu'elle avait trouvé compagnie toute aussi hilare et satyrique pour dégommer savamment chauves et guimauves qui mettaient en berne les tavernes.
Elle laissa le bougre rouquin retourner à sa contemplation des jupons tournoyant sur la place et se glissa parmi les chalands pour mieux comprendre le thème du débat. Un renard lui fila malencontreusement entre les jambes. Dommage, sa pelage rougeoyant, cousu en alternance avec les peaux périgourdines collectées dernièrement, aurait été du plus bel effet comme couverture pour sa selle. L'animal au final lui parut bien amical et elle ne regretta pas de le voir retourner mettre son nez dans son terrier.
Nessty releva sa truffe pour humer l'arrogance ambiante et s'en amusa à un tel point qu'elle décida d'y laisser le brin d'insolence qui sommeillait sous son chignon. Le bougre donnant spectacle avait un fiel bien dispendieux qui s'effilochait pourtant de purin en lisier. De quoi finalement plaire à cette Vilaine qui n'avait pas encore réussi à se défaire de son sourire causé par la crétinerie scribouillarde de bidule et autres pédants. Elle se délectait déjà derrière son minois narquois, acérant avec joie sa verve toujours aux abois.
Sieur, bien le bon jour !
Je suis Nessty, connue par certains comme étant une grande Vilaine mais je me présente à vous, bretons ou non, sans haine et rengaine, sans arme et hors campagne. La donzelle baissa front devant le rétorque avant de se lancer dans l'affront avec le loufoque.
Votre contestation me semble bien faible et moyennement appuyée malgré un humour de charretier bien abreuvé. Hum... Il n'y avait pas moins de quatre mois de cela, elle avait assisté à une scène similaire ici même. Un juge à destituer à l'époque, un duc à spolier ce jour. Intriguant cet acharnement sur un seul et même homme. Qu'est ce qui avait changé depuis ? Peu de choses aux yeux de cette étrangère confrontée depuis quelques jours à la criée bretonne animant quotidiennement le marché des ports et des porcs.
Qui donc soutenez vous ou qui vous soutient dans votre ambition ?
Que cherchez vous donc à révolutionner comme un supion ? Parait qu'un homme qui était encore et toujours désigné du doigt soulevait non une nuée de mouches autour d'un charnier comme le braillard voulait le prouver mais bel et bien une ruée d'escarmouches de certains acharnés comme le gaillard venait de le démontrer. Ces détracteurs qui n'avaient osé se pavaner en toute dévotion devant les électeurs ânonnaient maintenant le satané nom de révolution comme sauveur. Mais de quoi ? Un sauvetage de sages oubliés dans le paysage des affutiaux ? Mais lesquels ? Un amorçage de présages voués à l'équarrissage d'un bestiau ? Mais lequel ?
De quoi dissertez vous ici ? D'une imposture ou de votre stature ? D'un dessein glorieux et mérité ou de votre destin vaniteux et sulfuré ? Dans la prêche du revêche était décrié un imposteur pourtant élu du peuple au poste le plus haut. Jetés dans la harangue sans coordination ni argumentation l'on retrouvait des faits et des méfaits ayant servis en tout temps à la Bretagne. Vraiment étrange ce pays non franc concentrant tant de débats inutiles menés dans la hargne.
Qu'offrez vous aux bretons en échange de votre remue ménage ?
Saurez vous vous montrer aussi vaillant en gestion qu'en babillages ?_________________