Johanara
[Lignières , quelques temps après laccouchement ]
La baronne se tenait devant la grande Psyché et mirait son reflet alors que les grandes embrasures de sa chambre à coucher laissaient les rayons du soleil se perdre en mille éclats flamboyants sur sa longue chevelure tressée.
Plusieurs jours désormais que Johanara avait mis au monde son premier enfant. Si la jeune fille avait redouté le pire, simaginant moult fois passer de vie à trépas, force était dapperoir quelle se portait plutôt bien!
Elle fit glisser le déshabillé de dentelle beige le long de ses épaules graciles jusqu'à sa chute de reins. Ses grands yeux vert empire détaillèrent avec minutie la moindre parcelle de peau ivoirine.
Lenfantement avait arrondi quelques courbes, creusé plus voluptueusement encore le sillon de sa lourde poitrine, marqué davantage sa taille fine et éthérée de ses hanches girondes.
Ses lèvres purpurines se fendirent dun sourire satisfait alors que les prunelles jade caressaient les fleurs qui ornaient son épaule dalbâtre et la cambrure de son dos. Le premier tatouage représentait ses initiales et celles de son époux entrelacés à deux lys pourpres. Elle effleura du bout des doigts le dessin, symbole gravé dans sa chair de tout lamour quelle portait à Valezy.
On toqua à la porte. Le cur de la jeune femme semballa et elle fut prise de panique. Celle qui gardait le lit depuis des jours feignant une fatigue extrême, allant même jusquà pousser de petits gémissements de douleur de temps à autre pour donner le change , ne pouvait se montrer pimpante et sculpturale, baignée de lumière et gaie comme un pinson!
Surtout à son mari! Les présents saccumulaient au pied de son lit : fourrures, écrins, flacons , souliers et autres rubans de satin Il lavait même dispensé de sa visite hebdomadaire au village de Lignières où la belle rousse faisait la tournée des pauvres, des paysans et des crève-la faim afin de distribuer quelques écus et quelques miches de pain afin de préserver leur domaine des révoltes et mutineries de la populace.
Tudieu ! Les rideaux! Elle les tira prestement, plongeant la vaste pièce aux tentures pourprées dans la pénombre, avant de se jeter sur sa couche simulant une souffrance extrême , une main sur son front , lautre gisant comme inerte sur les draps de satin, les paupières mi-closes
Johanara laissa échapper de sa bouche , un faible et traînant :
Entrez
La chambrière exécuta une révérence polie avant de jeter à sa maîtresse un regard empli dangoisse :
Ma dame, le médicatre devrait pouvoir se libérer avant demain Toute la maisonnée sinquiète pour vous.
La rouquine émit un petit râle avant de rétorquer :
Si tu ne venais pas me déranger à tout bout de champs, jirais sans doute déjà mieux!
Mathilde rougit avant de lui présenter un petit plateau dargent :
Une missive pour vous. DAnjou.
Norf de norf! Qui pouvait bien lui écrire de ce duché de poulpes frits et de manches impotents?
Mais donne!
La Baronne découvrit avec grand plaisir quil sagissait dun billet de son amie Linon.
Citation:
Ma chère Jo,
Votre absence à mon mariage m'a bien peinée... Pourtant j'ai prévu de vous pardonner car j'ai besoin de vous.
Mon époux vient d'être anobli, il faut que vous veniez m'apprendre comment se conduire noblement, recevoir sur grand pied et m'habiller un peu plus en adéquation avec notre rang. Nous pourrons aussi nous présenter nos enfants. J'ai une fille Miel, qui est tout à fait parfaite. Je ne doute pas que vous ayez une demi-douzaine de gamins de votre côté, et il me tarde de les voir.
Venez vite, il est question que j'accède à certaines fonctions et je fais plein de bourdes.
Bien à vous avec toute mon affection
Linon
PS : vous pouvez apporter du bois, on vous le prendra à bon prix, et votre époux si vous y tenez. Mais on le prendra pas, lui...
Votre absence à mon mariage m'a bien peinée... Pourtant j'ai prévu de vous pardonner car j'ai besoin de vous.
Mon époux vient d'être anobli, il faut que vous veniez m'apprendre comment se conduire noblement, recevoir sur grand pied et m'habiller un peu plus en adéquation avec notre rang. Nous pourrons aussi nous présenter nos enfants. J'ai une fille Miel, qui est tout à fait parfaite. Je ne doute pas que vous ayez une demi-douzaine de gamins de votre côté, et il me tarde de les voir.
Venez vite, il est question que j'accède à certaines fonctions et je fais plein de bourdes.
Bien à vous avec toute mon affection
Linon
PS : vous pouvez apporter du bois, on vous le prendra à bon prix, et votre époux si vous y tenez. Mais on le prendra pas, lui...
Le rire cristallin de la dame de Saint Lys fusa dans lair alors quelle achevait la lecture du courrier.
Le regard soupçonneux de Mathilde le stoppa net et Johanara reprit sa mascarade et ses airs de madone agonisante :
De lencre , une plume , un velin Mais reste, je naurais pas la force décrire
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