Horloger
Horloger avait passé la bandoulière de sa besace, remplie d'écus, sur son épaule. La nuit était noire; la Lune avait disparu derrière un épais rideau de nuages, et le vent venu de la mer s'était levé. Par intermittence, les nuages laissaient filtrer la pâleur jaunâtre de la Lune, et c'est comme si le paysage, qu'il connaissait pourtant par coeur, prenaît des allures fantômatiques, subitement éclairées par cette lueur blafarde et éphémère.
Il gravit rapidement le chemin menant chez Matou et lui, et referma le portail de bois. Un chien hurlait, au loin; le vent avait grossi, faisant entendre sa plainte sourde dans les arbres alentour...
Il poussa la porte de bois, et ne fut pas mécontent de se retrouver chez lui. Le feu crépitait dans la cheminée, et Matou s'était installée près de l'âtre, cousant patiemment quelque petit vêtement pour le bébé à venir. Horlo sourit, ferma la porte, et déposa sa besace sur la table en bois ciré de l'unique pièce, sans compter la chambre. Les pièces firent entendre un bruit métallique en s'entrechoquant, rappelant à Horlo qu'il devait demander quelque chose à Matou. Pour l'heure, il se pencha vers elle, et déposa un baiser sur ses lèvres, avant de regarder ce qu'elle faisait. Il l'interrogea du regard, et elle lui répondit en souriant:
Ce sont de petits chaussons, mon coeur...fille ou garçon, le bébé en a toujours besoin!
Il rit, Matou gardant toujours son bon sens en toutes circonstances; les chaussons étaient bien entendu une excellente idée, comme premier vêtement.
La regardant, il dit:
J'aurai besoin de tes souvenirs, mon coeur. Te rappelles-tu exactement qui a été victime du chapardeur? Il va s'agir de rembourser ses victimes; nous diviserons simplement la totalité des pièces par le nombre de victimes, ne sachant combien il a pris à chacun.
Attendant la réponse de Matou, Horlo se dirigea vers la table, et renversa le contenu de la besace sur la table; une multitude de pièces apparut.