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[RP] Alerte sur les remparts

Cl0e
La nuit tombait sur Lectoure. Les jours se faisaient de plus en plus courts, et l'hiver de plus en plus présent. Mais elle aimait bien cette ambiance autour d'une feu, avec des godets de lait chaud. En révision de sa nuit de surveillance sur les remparts, en compagnie de Georgia, elle se vêtit chaudement. Souvent, ces derniers temps, elle s'endormait, fatiguée par sa grossesse, et Georgia prenait le relai. L'alençonnaise désapprouvait bien assez ces gardes, qu'elle disait mauvaises pour le petit, alors dès qu'elle voyait sa maîtresse glisser dans les bras de Morphée, elle la couvrait si bien qu'on ne lui voyait plus que les yeux. Elle prévoyait une couverture, pour l'y enrouler dedans, afin qu'elle n'ait ni froid ni ne souffre d'inconfort plus que ça ne l'était déjà. Et, jusqu'au petit matin, la servante veillait, les deux yeux grands ouverts, buvant infusions sur infusions pour se tenir éveillée, et notait les gens qu'elle reconnaissait. A force de vivre dans le village, faire le marché, aller au lavoir, suivre sa maîtresse, elle en connaissait des gens ! D'autres non, et il fallait attendre le lendemain au petit matin de voir les rapports de douane, fait par sa maîtresse également, pour mettre un nom sur ces visages. Quand personne ni rien ne passait, que le silence se faisait écrasant, la blonde lisait quelques vieilles lettres, mais pas trop car s'il elle le faisait trop longtemps, ses paupières tombaient et le sommeil la gagnait. Cette fois-ci, c'était les règles de la nouvelle loterie qu'elle étudiait de près, méditant sur les chiffres tirés au sort.
Georgia, qui était à quelques pas d’elle, revint au petit trot vers elle.


- Ma dame, j’crois que j’vois queq’chose vers là-bas.
- Vers là-bas où ? La forêt ? Le chemin qui mène à la porte principale ? Dis-moi ? Puis ils sont où les miliciens en plus ?
- Aux autres accès du village, un peu plus loin. Puis ça bouge en lisière de forêt.
- Ce n’est qu’un écureuil, ou un pauvre chevreuil, Georgia. Ton estomac joue sur ton esprit.
- Tout d’même pas !
- Oh méfies-toi des tours de l’esprit.


Elle regarda tout de même la lisière, et, comme elle l’avait prédit, c’était un sanglier qui passait en reniflant le sol.

- Tu vois Georgia, ce n’est qu’un jambon vivant, tu peux reprendre ton poste.
- Bien ma dame.


Tranquillisée, l’alençonnaise s’éloigna de nouveaux de quelques pas, lorsque ce fut au tour de la blonde de crier alerte. Mais pas pour la sécurité du village.
Une petite tâche rouge venait d’imprégner le tissu de sa robe, et les coups du bébé, vigoureux ces derniers temps, se calmaient étrangement. Alors ça, ce n’était pas normal. La jeune femme n’était vraiment pas rassurée. Elle lâcha le parchemin des règles de la loterie, et regarda Georgia, paniquée. Elle vit avec inquiétude la vieille femme sourire, mais pourquoi souriait-elle devant cette fichue tâche rouge ?


- Ma dame, il semblerait que votre p’tiot daigne sortir !
- Mais … pourquoi cette tâche de sang alors ? Et pourquoi est-ce que je ne perds pas mes eaux d’ab …


Justement, la poche avait décidé de se vider à ce moment précis.

- Mais … Georgia ! Je ne peux pas accoucher sur un rempart !
- Que si ! Vous n’bougez pas d’ici en plein travail, on n’a pas idée ! Non, non, j’m’en vais chercher un milicien, qu’il aille chercher c’qu’il faut. Vous, vous n’bougez pas d’un pouce !
- Non, je ne veux pas rester toute seule, je ne sais pas quoi faire, j’y connais rien … Georgiaaaaaaaaaa !!!!


Trop tard, la bonne femme courait déjà sur le rempart, gênée par son embonpoint, mais courant malgré tout. Non, non, elle serait déjà seule pour éduquer cet enfant, bon sang, pourquoi fallait-il que Georgia aussi la laisse en plan ainsi ? Malvinae était en vadrouille dans le Royaume, Bee devait dormir à l’heure qu’il est, et Simonin …

- Georgiaaaaaaaaaaaaaaaa !!!!!!! Reviens tout de suite ! Ou je te scalpe !! Ouch !!

Une douleur lui déchira les entrailles, lui coupant le souffle. Alors c’était ça les contractions ?

- Georgia, ça fait trop mal, je veux plus qu’il sorte !!!!!!!!

Bon sang, mais quand allait-elle revenir ? S’était-elle perdue sur les remparts ? Non, une attaque de brigands ? Pas possible, pas maintenant, il fallait qu’ils attendent, elle accouchait. C’était pas du tout, mais alors du tout le moment.
Enfin, elle finit par revenir, du plus vite qu’elle le pouvait. La blonde aurait bien sourit, soulagée, si une nouvelle contraction ne s’était pas pointée.

_________________
--Georgia
Le lecteur aura suivi avec joie notre feuilleton du moment « Joie de la maternité. », dans la scène 1 de l'Acte I, « La révélation ou Mon dieu, il m'a engrossée & il en a profité pour clamser », il aura goûté avec délice, la scène 2 « Les nausées matinales ou poussez-vous le p'tit déj' passe pas c'matin.  » et se sera régalé de la scène 3 « Les envies incongrues ou B'jour m'sieur l'épicier, j'voudrais des fraises, comment ça on est en automne ? ». Après avoir été ému devant la scène 4 dite « La perte des eaux ou on va tous mourir, c'quoi cette bouteille de lait. » Lecteur, apprêtes-toi à vomir tripes & boyaux, car Georgia's Productions présente :

    Joie de la maternité, Acte I – Scène 5 « La délivrance ou Le fruit de ses entrailles, on le maudit ! »


Des gardes, des gardes, oui mais des gardes à vue ..

Et elle a vu la tâche de sang, minime soit, mais elle l'a vue, et l'eau qui s'écoule, souillant au passage les jupes de sa maîtresse. Le sourire se fait doux, compatissant, tu vas souffrir, petite, mais il faudra le faire en sachant que c'est pour une plus grande joie que la souffrance que tu endureras. Elle part la vieille sans se retourner, trouver un homme pour la maintenir puisqu'il s'agit d'un cas d'extrême urgence. La matrone sait bien qu'il ne faut pas normalement, mais est-ce normal d'accoucher en plein air sur un sol aussi solide que l'est celui d'un rempart ? Sûrement pas. Et de trouver un garde entrain de bailler aux corneilles, ledit garde est attrapée d'une main ferme et tirer sans autre forme de procès à sa suite.

Sourde aux protestations quand elle défait tout ce qui pourrait être considérer comme noeud ou attache sur la tenue du garde, elle ne pense à rien d'autre qu'à cette jeune femme dont la grossesse a été difficile dès le début au regard du contexte l'entourant, qu'à cet enfant qui doit naître beau et viable pour ce qu'il est le seul qu'ils auront eu tous deux dans leur trop grande et trop courte félicité d'amoureux. Oui, elle s'obstine la vieille alençonnaise parce qu'elle-même n'a jamais connu la joie d'enfanter, parce qu'à Escouché, le vieux duc ne supportait pas l'idée que l'on enfante alors qu'Elle était partie des suites d'une fausse couche, parce qu'à Nogent-le-Rotrou, elle avait revu sa mère qui lui avait appris que le palefrenier qui la courtisait dans son jeune temps, était décédé d'une mauvaise fièvre, et surtout, parce qu'à ses yeux, la seule personne qui occupait cette place d'enfant, n'était autre que cette blonde dont on entendait les râles sur les remparts bien trop froids de Lectoure. Une bouffée de fierté à la considérer, assise, tentant vainement un sourire à son attention. Elle est forte cette fille qui n'est pas la sienne mais qu'elle aime comme si c'était le cas.

Trop grande responsabilité que celle qu'Elle lui a confié. « Aime-la comme ta mère m'a aimée. Chéris-la comme elle m'a chérie. Sois alençonnaise pour ce qu'elle ne l'est pas tout à fait et garde la bien comme Dieu lui même le ferait. » Et elle a aimé, elle a chéri, elle a gardé, et maintenant, alors qu'elle voit la grimace, elle craint de la perdre, comme Elle-même a été perdu par sa mère. Mais la vieille Georgette n'était pas là quand c'était arrivé, alors qu'elle-même est présente. Un signe au bonhomme en la désignant.


-  « Tu la maintiendras par derrière, si tu la touches ailleurs qu'aux épaules et aux bras, j'te tue, foi de moi. »

Et l'homme de s'exécuter, non sans avoir salué au préalable la blonde qu'il attrape d'une poigne ferme et qu'il redresse en la tenant contre lui sans un mot.


-  « Parfait ! J'vous ai manqué ma dame ? Voyons où c'qu'on en est. Allez écartez moi tout ça ! »


Franc, direct, et tellement Georgia qui récupère les couvertures en trop pour en faire un coussin qu'elle glisse sous la parturiente pour tenter d'incliner son bassin de sorte que l'enfant puisse sortir sans complication. La ceinture de la jeune femme est dénouée, la chevelure aussi, et quand au noeud qui retient son propre tablier, il est dénoué en hâte pour servir de linge quand il faudra recevoir l'enfançon. Et déjà, elle se contorsionne pour être à hauteur de femme enceinte, la main soulève pudiquement les jupes, et deux doigts viennent tâter le terrain, s'immiscer doucement pour considérer l'avancée du travail, la venue de l'enfant, et les doigts trouvent en réponse des parois qui tentent dans la douleur de s'écarter pour laisser passer l'ignoble individu qui déchire de l'intérieur celle qui donnerait sa vie pour qu'il vive la sienne.


- « On respire fort, et on pousse. Y a un beau bébé qui d'mande qu'à vous faire des risettes à l'intérieur. Allez ma dame, un effort.


Facile !
Bee.zee
[On peut avoir des révélations sur l’Acte II ?]

Bercée par l’ivresse de la tâche terminée –et pas trop mal accomplie- Bee ferma les yeux sur une dernière image de la robe achevée qu’elle pourrait envoyer dès le lendemain à l’Atelier.

Elle les rouvrit après ce qu’il lui sembla avoir duré une poignée de secondes seulement. Une paupière se soulève, lui apprenant par la même qu’elle n’avait pas été réveillée par le lever du soleil. Enfin, pour espérer être sortie du lit par le soleil en cette période, il fallait avoir une bonne dose d’imagination. Remontant un peu plus l’édredon sous son menton, la blonde tendit une oreille attentive à la pièce voisine. Pas de cris, pas de pleurs, pas non plus de pas de Georgia sur le parquet. En même temps, ce n’était pas du haut des remparts que l’Alençonnaise aurait pu la réveiller en piétinant. Bon, si elle n’avait pas été virée comme une malpropre des bras ô combien confortables de son ami Morphée par Roxanne, par le jour, par une quelconque odeur de lait chaud, de caramel ou par des lutins qui lui saccageaient sa robe –il y a des suicidaires partout- pourquoi elle n’était pas encore en train de se complaire dans des rêves futiles ?
De mauvais poil, la Bee. Si un saoul était la cause de tout ça, il avait intérêt à planquer ses fesses, et vite, parce qu’elle descendait.
Elle n’avait pas terminé d’enfiler sa robe de chambre molletonnée qu’une ruée de coup frappée à l’entrée virent réveiller toute la maisonnée. Comme toute ladite maisonnée se limitait à elle et à une Roxanne imperturbable, ce fut à la blonde de se précipiter dans l’entrée, précédée de près par son humeur de chien.

Prenant soin de se munir d’un petit couteau, elle entrouvrit prudemment la porte.


"- C’pourquoi ?
- Dame Bee ?
- Elle-même. Je réitère, qu’est ce que vous me voulez à cette heure là ?
- J’étais d’garde sur les remparts aujourd’hui, Dame ! Mais…
Mais accouchez bon sang ! Qu’il se passe ? Invasion de doryphores ?
- De quoi ?"


Face à la moue sceptique du garde, un léger soupir agacé s’échappa des lèvres de Bee, et d’un signe, elle l’enjoignit de poursuivre.

"- Non, rien, continuez.
- Et, euh, on a entendu des cris, du bruit porte Ouest !"


Il n’en fallut pas beaucoup à la jeune femme pour monter au créneau.

"- Vous plaisantez j’espère. J’espère pour vous, surtout. Parce que si ce n’est pas le cas, il va falloir m’expliquer pourquoi vos miches sont ici alors que le risque est là bas ! Bon… euh, voyons, vous êtes passé à la caserne pour ramener des renforts ?
- Non, je croyais que… Enfin, on m’avait dit que…
- Vous vous payez ma fiole ma parole ! Mais filez-y donc ! Zou zou zou !"


Le garde n’était même pas parti que Bee cogitait. Tout s’embrouillait. Hop, on se pose, et on désembrouille. Problème premier : se changer, et fissa. Problème numéro deux : Roxanne –les voisins sont nos amis. Problème troisième : Cloé.

On a un problème, un gros problème, un gros gros problème.

Prise d’une montée aussi brutale qu’inattendue d’adrénaline, elle ne prit pas la peine de se changer, mais boucla le fourreau de son épée à sa taille. Pressée de rejoindre son amie, priant silencieusement pour que rien ne lui arrive, ni à elle, ni à sa fille, pour que Georgia soit là, qu’elles prennent soin l’une de l’autre. Une blonde enceinte jusqu’au cou et une vieille servante sur le lieu d’une bataille, on avait connu mieux en matière d’auto-défense. Ne parvenant pas à mettre la main sur ses chausses, elle retourna toute sa chambre dans un souffle excédé. Et les mauvaises habitudes de revenir à la course.


Geooooorgiiiiiiia ! Où sont mes bottes ?

Elle stoppa net sur le pas de la porte, se rendant compte de sa propre stupidité. Sans la présence presque maternellement réconfortant de Georgia dans de tels moments, elle avait du mal à retrouver toute sa tête. S’engouffrant dans la chambre de sa fille, elle la sortit de son lit sans autre forme de procès, attrapa une couverture sous le bras, et s’est ainsi chargée qu’elle vint tambouriner à la porte du voisin le plus proche. L’idée qu’elle pourrait elle aussi tirer quelqu’un de son sommeil ne lui vint même pas à l’esprit, ni même que son futur interlocuteur, fort charmant quand il s’agit de converser au marché, se retrouverait d’une humeur exécrablement désastreuse. De toute façon, la diplomatie n’était pas à l’ordre du jour.

OUVREZ !

L’imaginant surement en train de sortir de ses draps avec une lenteur exaspérante, elle redoubla les coups, sous les yeux éberlués mais encore embrumés de sa fille. Se penchant sur celle-ci, elle murmura :

Chérie, je te laisse avec le Vieux Claude. Sois sage mon amour.

Le voisin en question pointant son nez à la porte, la jeune maman s’empressa de lui débiter des explications à une vitesse tellement impressionnante et dans un désordre des plus complets qu’il la toisa, avant de la fixer et de tendre les bras, où vint se réfugier la petite.

Vous êtes un amour ! Promis, je vous fais une tarte la prochaine fois !

Oui, elle était une véritable catastrophe en pâtisserie, et alors ? A quelques pâtés de chaumières de là, elle s’arrêta, déjà essoufflée et les bottes pleine de terre devant la porte de Lanceline. Elle avait déjà fait des gardes, elle pourrait aider.

Lanceliiiine, on sort du lit, illico !
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Lanceline
[L'acte II! L'acte II!]

La jeune femme dormait. Quoi, ça vous étonne? Il fait nuit. Il fait froid dehors. Et il était tard. Si peu. Donc oui, elle dormait. Alors être réveillée soudainement, comme ça, elle était un peu... énervée. Réveillée par quoi? 'Ttendez, ça vient. En trombe, même. Et c'est une tornade blonde qui vient frapper à sa porte. Mais ça, elle l'ignore encore.

Citation:
Lanceliiiine, on sort du lit, illico !


Kékessé?

Elle bondit de son lit, va pour prendre son arbalète comme dans les films et... Ah ben nan, pas d'arbalète. Juste un couteau. Ce qui n'est pas si mal. Donc elle prend son couteau, fait gaffe de ne pas se blesser, descend en trombe et dit derrière la porte.

Qui c'est?

Hum, à bien écouter, on reconnaît le souffle -c'est possible?- de Bee, et on reconnaît aussi son pas qui trépigne. La Blonde ouvre prudemment la porte -ben oui, quoi, elle est en chemise de nuit et fait... nuit, justement. Vous vous attendiez à quoi?- et jette un regard méfiant dehors.

Bee?

Oui, c'est elle, pas de doute. Peu oseraient réveiller de la sorte la Blonde sans risquer d'être démembré. Au moins. Alors elle ouvre grand la porte, soulagée et anxieuse à la fois. Soulagée parce que c'est sa marraine, et parce qu'elle ne la voit que peu et anxieuse parce qu'elle sait qu'il se passe quelque chose de grave... Sinon son amie aurait attendu le lendemain.

Que se passe-t-il? Y a le feu chez toi?

Aussitôt elle se prépare à bondir, court chercher ses affaire après avoir crié un Entre, mon amie! Deux minutes et je suis à toi! à Bee pour qu'elle n'attrape pas froid. Vite elle s'habille le plus chaudement possible -chandail, etc- et c'est là qu'elle ne retrouve plus ses bottes.

Nom de nom!

Où...? Ah ben si, en fait, en bas, elles étaient humides donc la jeune femme les avait mis sécher. Elle redescend vite, les met, attrape son couteau et le glisse à la ceinture -on sait jamais- et retoune près d'une Bee qui manque de passer au travers du sol parce qu'elle trépigne trop.

Voilà, je suis prête. Dis-moi tout! Où on va?

Soudain elle a un doute.

Fallait bien que je m'habille? Non?
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Bee.zee
[Le changement de décor est un peu longuet !]

Nan nan naaaan, t'as pas deux minutes ! Une, chrono !

Et une Blonde qui piaffe en attendant une autre Blonde. Elles font décidemment bien la paire. Après niveau efficacité, ça reste à voir, mais désolée, le SAV est fermé.

Lanceline, ne bondis pas trop dans tous les sens, tu veux, j'ai pas spécialement envie de me retrouver avec une filleule momentanément unijambiste.

Quand on poiraute, le temps semble s'étirer de façon inconcevablement longue, et Bee ne déroge pas à la règle. Ajoutez à ça une patience des plus limités, et quelques secondes plus tard, elle sonne à nouveau le rappel. Toujours très discrètement, sinon ce n'est pas drôle, et ça ne calme pas les nerfs.

LANCELIIINE ! On est parties là ! Au pire, si tu n'es pas habillée, on sera deux.

Et sa filleule de faire des aller-retours dans la chaumière, et vas-y que je cherche ma cape, et mes bottes, vive l'organisation.
Hum, comment ça le dispensaire se moque de la charité ? Pfff, mauvaises langues.


Donc non, il n'y a pas le feu chez moi, mais un garde a entendu des bruits suspects et des cris du côté de la porte Ouest. Donc il a appelé les renforts. Et lesdits renforts, c'est nous. Astucieux, je sais, mais pas le temps de tergiverser, suis moi !

Entrainant sa filleule par la manche, elle traversa Lectoure à une vitesse dont elle ne se serait jamais cru capable. Cloé était là bas, et si jamais on attaquait là où elle était de surveillance, ce ne seraient pas les yeux noirs de Georgia qui leur sauveraient la mise. Au rythme des coups de son épée contre sa cuisse, dans la course, elle tranversa les ruelles, reçut une bonne dizaine d'insultes d'ivrognes pelotonnés contre un mur, dérangés dans leur sieste par la cavalcade blondesque.
Arrivées sur le rempart, Bee dégaina son épée d'un geste que l'entrainement avait rendu sur, et survolla la scène d'un regard angoissé. Ses yeux s'écarquillèrent de surprise.
Remarquez, quand on s'attend à une bonne dizaine de bandits -ou plus- et que l'on se retrouve avec trois personnes, dont deux bonnes femmes, en face, ça peut surprendre.
Il ne lui fallu pas beaucoup de temps pour prendre conscience de ce qui se déroulait sous ses yeux. La grimace de douleur qui déformait le visage de sa blonde préférée en disant long, très long sur ce qui se passait. Un léger soupir de soulagement s'échappa tout de même des lèvres de Bee lorsqu'elle aperçut Georgia. Si la sage femme avait les choses en mains, tout irait bien.

Dénouant machinalement la boucle de son fourreau, elle s'acroupie aux côtés de Cloé et lui attrapa la main.


Cara, je crois que c'est ton tour, maintenant. Allez ma belle, aie confiance en Georgia, tout va bien se passer. Courage, ma belle.

Et Bee d'embrasser le front de sa marraine, avant de se retourner vers Lanceline et de lui murmurer :

Tes noeuds....

Puis, se retournant vers la future maman.

Sur les remparts, elle fait rien comme tout l'monde, c'te gosse, elle a de qui tenir ! Remarque, elle doit avoir un grain, comme maman. Parce que sortir maintenant, alors qu'on se caille mais bien correctement dehors, alors que la princesse, elle est au chaud, nourrie longée et presque payée, en frileuse accomplie que je suis, j'ai connu mieux comme logique....

Alors oui, chut, les tentatives loupées d'humour valent ce qu'elles valent, mais Bee, tentait de se calmer comme elle pouvait, de manière à éviter de contaminer son amie par son angoisse.

Bref, l'équipe de choc blondesque était dans la place.

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Cl0e
Mais quel foutoir !!! Et quelle douleur ! Puis quelle idée aussi, de tomber enceinte alors qu’elle en avait une trouille bleue ? Et bien, ses peurs étaient fondées. Elle avait l’impression qu’on la déchirait de l’intérieur. Déjà, tout au long de la grossesse, le bébé s’était on ne peut plus mis à l’aise, et maintenant, le voilà qui jetait aux ordures ces neufs mois de confort personnel. Même pas encore tout à fait né que déjà ça faisait un caprice … Voilà qui promettait.
Seule sur son rempart, elle claquait des dents, angoissée plutôt que frigorifiée, et il pesait un silence de mort. D’ailleurs, c’était peut-être ça qui l’attendait, à force de tant de douleur : la mort. On ne pouvait décemment pas survivre à une telle douleur, c’était inhumain. La prochaine qui lui dirait qu’être mère est quelque chose de merveilleux, elle allait comprendre sa douleur. Nouvelle contraction, nouveau hurlement de la lectouroise. Non mais quelle idée, vouloir venir au monde sur un rempart. Vraiment pas rusé le drôle quand même … C’était peut-être un signe de sous-développement du cervelet du gamin ? Ou alors une déformation, ce qui expliquerait peut-être son retard à voir la lumière du jour ? Ou alors …
Les idées, toutes plus farfelues les unes que les autres, pas forcément censées, se bousculaient dans l’esprit de la jeune femme. Et puis, le sourire, presque sadique sur les lèvres de Georgia ne l’avait pas rassurée non plus. Quelle devait être contente qu’elle accouche. Ou peut-être était-ce parce qu’elle pensait qu’elle perdrait la vie en couches, qu’elle en avait marre de la servir ? Les pensées négatives continuaient de s’insinuer dans toutes les méandres de son cerveau. Elle n’aurait pas si mal, elle aurait sentit l’atroce migraine qui tambourinait à l’avant de son crâne.
Puis, finanelement – Ô miracle –, la vieille alençonnaise revint, après tout ce temps où la blonde avait perdu espoir, et était persuadée qu’elle allait y laisser sa peau, peut-être même sans avoir donné vie au petit être en elle. Le milicien, dont elle ne vit pas bien le visage dans la nuit, passa derrière lui, inquiétant la blonde.


- Quoi, qu’est-ce qu’il fait ?

Personne ne répondit à sa question, et l’homme la redressa, dans une position des plus inconfortables qui semblait convenir à sa servante, laquelle était tout à fait à son aise – au moins une des deux-, et qui s’amuserait presque à plaisanter. Elle la regarda défaire tous les nœuds autour d’elle. Ah oui, c’est vrai, les nœuds. Décoiffée, jupe remontées, et sa bonne aux commandes, elle ne savait pas trop si elle était rassurée ou pas. Au moins, elle n’était pas seule. Une petite bulle de souvenir passa dans son esprit, le jour de l’accouchement de sa filleule. Comme tout lui avait semblé plus simple ! Elle comprenait maintenant pourquoi Bee lui avait quasiment broyé la main. Bon sang, si elle avait souffert autant qu’elle, ce qui était certainement le cas, elle avait dégusté aussi ! Et à présent que les contractions se rapprochaient de plus en plus, elle ne comptait plus les élancements, les cris, les grimaces. Des gouttes de sueurs commençaient déjà à perler sur son front, et probablement dans son dos également. Pardieu, mais que cette torture cesse !!!

- Un effort ? Et je tricote peut-êt… Aaaaaaaaaaaaaaaaaaah !!! Georgia, fais-le sortir, viiiiiiiite !

Elle ne voyait pas où en était le travail, elle avait l’impression de souffrir depuis des heures déjà. Le soleil pouvait se lever qu’elle ne serait pas étonnée. D’ailleurs, il lui sembla même apercevoir quelques lueurs à l’horizon. Ou alors elle avait des hallucinations. Non, si elle en avait, elle imaginerait que le bébé serait déjà né, tant que faire. Il pouvait être la mi-nuit comme le milieu, elle n’en savait fichtrement rien, et s’en fichait. Elle voulait juste qu’il sorte. Ou alors non, qu’il ne sorte jamais. C’était trop douloureux. C’est alors qu’elle comprit. Ce n’étaient pas les lueurs de l’aube, seulement deux chevelures blondes flottant au vent. Des blondes ? Elle observa sa filleule, essouflée d’avoir couru, s’accroupir à côté d’elle et lui donner la main. Tiens, du broyage de main en perspective ! Elle sourit, mais une nouvelle contraction le tordit presque aussitôt en grimace. C’est à peine si elle entendit les paroles de la maman, si ce n’est quelques bribes.

- Ne critiques pas mon enfant ! Naméohhhhhhhhhhhhhhhhh ! … J’ai trop mal, je ne veux plus que ce bébé sorte, c’est trop douloureux.

A cet instant, elle aurait voulu mordre, frapper, n’importe, faire mal à quelqu’un, tant elle avait mal. Un juste retour des choses en soit. Mais le peu de raison qui lui restait lui disait de ne pas s’en prendre aux personnes présentes. Quoique le milicien à la limite … Puis le coupable idéal se présenta à elle. Le fossile. Après tout, c’était sa faute si elle avait l’impression qu’on l’éventrait, qu’on la brûlait de l’intérieur, qu’on lui infligeait la pire torture inimaginable. Mais pas de chance, il avait déjà quitté ce monde. A croire qu'il avait prévu qu'il passerait un sale quart d'heure s'il restait en vie. Et Bee n'avait pas été mieux lotie. Ils avaient dû se faire passer le mot. Ces lâches. Un chevalier lâche joli paradoxe … Un rire inquiétant s’échappa de sa bouche, pour se transformer en gémissement quelques instants après.

- Georgiaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaa !!!
_________________
--Georgia
[C’est l’actrice principale qui fait un caprice de star, j’y peux rien !]

    Acte I – Scène 6 « Les contractions ou La jeunesse d'aujourd'hui écoute la musique trop fort & va perdre ses oreilles »


Fais le sortir, fais le rentrer ! Sortir, rentrer, sortir .. Les jupes sont replacées en hâte, et l’Alençonnaise de jeter un regard à sa pupille avant de lâcher, goguenarde.

-« C’est un bébé, hein. Pas un bilboquet.. »

Dans le doute, des fois que .. Et de relever les jupes non sans avoir jeté un coup d’œil au garde, lui aussi, dans le doute, des fois que, et au moment où elle s’apprête à tâter le terrain, bel euphémisme, du bruit derrière.

-« Vin dieu .. M’laisserez pas tranquille ? Ah c’vous ! »

Oui, vous. A voir les deux autres blondes, elle sourit. Un sourire qui s’étale sur le visage concentré de la vieille, pas si vieille que ça à bien y regarder, mais le travail creuse les visages, et le sien n’a jamais été très beau, rien d’étonnant à ce que la trentaine passée et bien comme il faut, celui de Georgia soit tanné par les journées au lavoir en Armagnac et Comminges, que ces mains soient boursouflées par le battoir et l’eau froide qui ne sauraient l’arrêter, et que les rides s’amoncellent généreusement autour des yeux et des lèvres, car oui, les rides qui gagnent la face ronde de l’Alençonnaise, sont des rides de plaisir. Où sa mère avait été ravagée par la douleur de la perte d’un être cher, elle-même était ravagée par les gazouillements de Roxanne, les rires de Bee et les caprices de Cl0é. Elle qui n’avait jamais eu de famille à elle si ce n’est cette mère et sa sœur cadette, avait réussi à s’en construire une bon an mal an, une famille entièrement féminine, aucun homme, puisqu’il les avait quittées, et de les voir réunies presque au complet, lui retourne le cœur, ce cœur qu’elle pensait asséché en arrivant à Lectoure, ce cœur qui aurait du battre pour un homme, battait pour des jeunes filles qui avaient réussi à lui redonner l’envie de vivre avec le sourire.

Et avec le sourire, elle observe Bee qui murmure à sa voisine, un clin d’œil à la voisine, les nœuds, elle y tient la superstitieuse et si ça n’avait tenu qu’à elle, elle aurait été chercher la chatte de la blonde sous le simple prétexte que les chats sont les seuls animaux à mettre bas en ronronnant pour se donner du courage et du réconfort. Braves bêtes. Et de répondre à Bee, en replongeant sous les jupes, merveille de la féminité qui permet de faire plusieurs choses à la fois.


-« Croyez quand même pô que l’petit bout allait nous faire la grâce d’être sain d’esprit avec les parents qu’y s’payent le pauvret ! Dites ma mignonne.. Lanceline, c’est ça ? Pourriez pas rapprocher le brasero là-bas ? Elle doit s’cailler les miches. »


Et de montrer d’un signe de tête, le brasero utilisé par les gardes pendant leurs tours. Oui, pas sain dans sa tête l’marmot, garçon ou fille, d’ailleurs, sortir en plein hiver et à c’te moment-là.. L’air de l’Armagnac ne réussissait pas aux femmes enceintes. Et pour cause, un sourire complice quand elle sort le museau de sous les jupes tandis que la main dextre masse sous la robe, le ventre doucement pour activer la venue de l’enfant.


-« J’pourrais dire pas mal d’choses sur les marmots qui naissent avec les frimas ou même en plein hiver, j’ai connu une donzelle, sa drôle a pointé son nez dans une p’tite cahute alors que dehors, c’t’ait tout blanc. J’suis sure que vous aimeriez la rencontrer. »


De l’ironie ? A côtoyer la blonde, elle commence à se débrouiller, pour un peu, elle en rirait, tiens. Alors, elle se retient et fixe la blonde l’air soucieux sans le vouloir pour relever les jupes, pensive, avant d’introduire deux doigts pour analyser la situation.


-« Sauf que celle-ci veut jouer à la plus casse-pieds. »

A quatre pattes, la dévotion, y a que ça de vrai, et de constater avec une boule à la gorge que l’enfant sort, mais mal.. Foutu drôle qui gigote bien trop, le crâne visqueux de se faire son chemin lentement au prix de douleurs atroces pour la mère et pour lui aussi, qui descend trop vite et s’emmêle dans le cordon ombilical. La main de retenir en urgence le dôme qui s’extrait sans pitié du corps de sa mère. Et la voix qu’elle veut assurée.


-« On arrête tout, vous ne poussez plus ! Et vous aurez de la brioche ! »


Si, si, ça joue dans la balance la brioche. Alors sous les jupes, un combat se joue, entre la vie et la mort, entre le bébé et la vieille, entre un lien mère/enfant trop destructeur.


-« Bee, ma mignonne, z’auriez pas un couteau, une dague, un coupe-papier, une aiguille à tricoter, une cuillère, j’sais pas moi ? »


L’humour, oui, toujours, elle ne la perdra pas, elle y tient, elle s’y tiendra. Et dans ses mains, la tête boursouflée de l’enfant qui veut sortir lui donne le courage et l’envie d’aller plus loin, de les sauver tous les deux pour ce qu’elle sait que si il meurt, sa maitresse n’y survivra pas.


-« Mon ange, vous me ferez le plaisir de vous arrêter que’ques instants, j’suis en pleine discussion avec vot’ rejeton. Permettez ? »


Oui, permets mon Ange, je tente de sauver ce qui ne l’a pas été il y a de cela plusieurs années.
Lanceline
[Ah bah bravo. Et une blonde qui comprend rien et qui s'demande ce qu'elle fait là, une!]

Ben, oui, elles couraient. Bee lui avait dit de se dépêcher. Alors elles étaient sorties en trombe dans les rues froides de Lectoure. La jeune femme s'en fichait bien de réveiller qui que ce soit, "c'est une urgence" lui avait dit Bee. Et vas-y que je croise des ivrognes qui t'insultes, j'y peux rien, pardon, c'est pressé!
Arrivées sur le rempart, Bee tire son épée et Lanceline son couteau. Sait-on jamais... Et là, trois silhouettes. Une couchée et deux accroupies. Qui...? Se rapprochant elle distingue Cloé, Georgia et... un garde, sûrement. Bee se penche, parle à Cloé avant de se retourner vers Lanceline:


Citation:
Tes noeuds....


Et la jeune femme de regarde sa marraine avec un regard vide. Ses quoi? Ah, oui, ses noeuds. Alors elle défait tout, quitte à attraper froid, un enfant, c'est sacré, nom de nom! Alors tant pis si la maladie pointe le bout du nez chez elle.
Et Cloé d'avoir son visage ravagé par la douleur. La filleule de sa filleule recule, parce qu'elle sent bien que la future maman souhaite frapper quelqu'un.


Citation:
-« Croyez quand même pô que l’petit bout allait nous faire la grâce d’être sain d’esprit avec les parents qu’y s’payent le pauvret ! Dites ma mignonne.. Lanceline, c’est ça ? Pourriez pas rapprocher le brasero là-bas ? Elle doit s’cailler les miches. »


Hein? Ah ben oui, c'est -encore- à elle qu'on s'adresse. Bouge-toi ma fille, t'as pas fini de te rendre utile! Et la Blonde de s'approcher prudemment du brasero, c'est que ça brûle, ces trucs-là! Alors elle finit tant bien que mal par réussir à le rapprocher du groupe, après avoir retenu une bonne dizaine de jurons tous plus colorés les uns que les autres à cause de la chaleur.

Citation:
-« On arrête tout, vous ne poussez plus ! Et vous aurez de la brioche ! »


Hein? De la brioche? Mais qu'est-ce que ça vient faire dans l'histoire, ça? Et la jeune femme de chercher si ces mots obscurs pour elle auraient une autre signification dans le domaine de l'enfantement et plus précisément dans la situation actuelle. Elle aurait pas loupé un épisode, là?

Citation:
-« Bee, ma mignonne, z’auriez pas un couteau, une dague, un coupe-papier, une aiguille à tricoter, une cuillère, j’sais pas moi ? »

Bon, c'est pas à elle qu'on s'adresse, mais la question est "z'auriez pas". Alors, si, peut-être qu'elle a. Quoi? Voyons la suite de la phrase, une énumération: "un couteau, une dague, un coupe-papier, une aiguille à tricoter, une cuillère, j’sais pas moi ?" Dans le désordre: un j'sais-pas-moi, la Blonde ignore ce que c'est. A exclure, donc. Une cuillère? Quoi, elle veut manger un truc qui nécessite une cuillière? Hum, sûrement pas. Une aiguille à tricoter? Alors là, elle est stupéfaite. Elle imaginait pas que quelqu'un puisse vouloir tricoter par ce froid terrible. Un coupe-papier? Heuuu, nan. Une dague? Ben, oui, justement. Donc.

Nan oui nan nan j'en vois pas l'utilité ici et je sais pas ce que c'est.

Et la jeune femme de tirer la dague de sa ceinture et de la poser délicatement auprès de la dévouée servante. Et de se reculer à nouveau, angoissée.
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Bee.zee
On s’y attachait vite à l’Alençonnaise. Sûrement parce que toutes ses paroles étaient imprégnées de cette sérénité propres aux gens qui ont vécu, qui connaissent, qui ont de l’expérience derrière eux, et de l’assurance dans la voix et dans leurs actes. Ce calme ferme qui rassurait quand bien même ses airs sadiques venaient se pointer à un accouchement. Elle avait surtout une façon de les materner de loin, sans jamais s’étendre dans tous ses sentiments, mais en veillant sur elles.
Et s’il y avait bien une chose pour laquelle Bee bénissait Dieu d’avoir Georgia dans les parages en ce moment même –au delà du fait secondaire qu’elle était sage femme- c’était ses touches d’humour. Achetez le manuel de l’accouchement dans le sourire !....hum et de la soupe à la grimace, dans le cas présent, mais ça, ça ne sera mentionné qu’à la dernière page dudit manuel, après une astérisque bien planquée et écrit tellement petit que le seul courageux qui voudra se donner la peine de le lire devra sortir la loupe. La soupe à la grimace, en effet. Il suffisait de regarder Cloé pour ne pas pouvoir s’empêcher de serrer les dents pour elle. Mais ce n’était pas de la compassion protocolaire, ou encore moins feinte, mais la compassion de celle qui avait été dans la même situation quelques mois auparavant. C’était une maladie ? Certes, mais contagieuse. Parce que dans la tristement célèbre catégorie je-te-fais-en-enfant-je-t’aime-bien-fort-mais-je-suis-pas-là-quand-tu-te-crèves-à-le-mettre-au-monde, les compagnons de la marraine et de la filleule excellaient.

Concentrée tantôt sur le chignon de Georgia qui dépassait des jupes de Cloé, et la futur maman qui se retenait de crier encore plus, Bee ne savait plus ce qu’elle avait à faire. En même temps, elle ne pouvait être que passive, à prodiguer des conseils ou des mots apaisants dont elle savait particulièrement bien que ça faisait bien joli, mais que ça ne calmait rien, que ça ne servait à rien, mais que ça avait la fâcheuse tendance à agacer celles qui accouchaient.
Elle ne put cependant pas réprimer un rire à la remarque de Georgia.


Ah ? Dans une cahute ? Vrai ? Une blonde encore, je suppose. Remarque, faudra que tu me la présentes, on pourra échanger nos points de vue.

Un petit sourire complice à Georgia, qui replongea derechef sous les robes et en ressortit la mine déconfite.
Elle ne savait plus ce qu’elle avait à faire, et comprenait tout juste ce qui se passait. Lanceline, plus prompte qu’elle à la réflexion tendit une dague à la sage femme. C’est pas bon, c’est pas bon du tout.


Cloé, si ça peut t’aider, je t’autorise à me broyer la main.

Et Bee de formuler une prière silencieuse durant ses longues, interminables secondes...
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Paquerette
Des cris sur le rempart, des cris de femme ! Là haut, au dessus de sa tête, de l'agitation. Que se passe t il ?

Paquerette monte les escaliers 4 à 4 et arrive... en plein accouchement ! Ah ben, justement, elle se demandait où était passée Cl0é. Tout s'explique
Faire un enfant sur un rempart... Paq se rappelle du récit de Phil, la naissance de son fils sur les remparts d'Angers, en pleine guerre.


Mais enfin Cloé, n'as tu pas de lit douillet et chaud ? Quelle idée de faire cet enfant ici, dans le froid ! Veux tu qu'on te transporte ailleurs ?

Mais la vieille alençonnaise passe en courant, bouscule... Paq se pousse contre le mur. C'est peut être un peu tard pour faire une proposition de ce type ! Que pourrait elle faire pour aider ? Et puis... mais oui ! A Lavardens, ce n'est pas si loin.

Sans dire un mot, Paquerette redescend sur la terre gelée encore plus vite qu'elle n'était montée et part en courant. A peine une dizaine de minutes, elle revient, toujours en courant, rouge et échevelée. Elle bondit à côté de Cloé.


Tiens ma chère, ce sera pour ton Bébé, c'est tout neuf, tricoté dans du .... lama je crois... enfin on m'a dit que c'était des poils de bête très très chauds. Tu pourras envelopper ton bébé avec ceci.

Cl0e
C'est pas un bilboquet, c'est pas un bilboquet, elle en a de bonnes l'alençonnaise ! Et en plus, il fallait qu'elle en rajoute une couche sur les parents, blablabla, le pauvre gosse il part avec un handicap dès le départ, et bla et bla, pouvait pas sortir sur un lit, l'est pas bien celui-là et bla et ... Oui bon ça va, on a comprit, il arrive trop tard, et pas au bon endroit. Sans rire ?
En plus de la douleur, s'ajoutait l'agacement, les deux en allant crescendo. Pas très amène, la blonde, mais fallait pas lui en vouloir, elle avait des circonstances atténuantes quand même. Et elle avait la palme, des chieuses en tout genre, garces et autres.
Serrant dents et poings, finalement décidée à ce qu'il sorte - oui parce qu'à y réfléchir, voir de nouveaux ses pieds, ce serait pas si mal en fait -, elle se mit à pousser, aussi fort qu'elle le pouvait, et malgré la douleur qui lui vrillait les entrailles. Tudieu, cet enfant devait être énorme ! Pour faire aussi mal, et lui donner l'impression de tout ravager sur son passage, il ne pouvait pas en être autrement.
La mention de ces instruments de torture inquiétèrent la presque-mère, qui se demanda si elle devait continuer de pousser ou non, parce que vraiment .. un coupe-papier ? Une cuillère ? Non franchement, ce n'était pas rassurant. Et le verdict de tomber, on arrête tout.


- Ah, quand je veux qu'il sorte, il sort plus ? Quelle arn... ouuuuuch !!!! Georgia !!! Vite, dépêche-toi, sors-le ! Je t'en conjure, qu'il naisse une bonne fois pour toutes ! Et arrête de discuter avec, c'est pas l'heure du goûter ni rien de tout ça à ce que j'sach ... Ouuuuuuch !!

Heureusement, elle ne voyais pas les visages inquiets qui l'entourait, le pauvre garde devait regretter de s'être enrôlé dans la milice, Bee ne devait déjà plus avoir d'os intact. Une blonde manchote ... Voilà qui allait être joyeux ... Depuis sa place, elle ne voyait pas Lanceline, mais au moins elle l'entendait. Une dague, voilà qui était un peu moins barbare. Quoiqu'entre les mains de l'alençonnaise, à voir.
Elle n'avait en revanche pas du tout remarqué Paquerette, trop occupée à crier contre Georgia sans doute, ou à souffrir. Ou peut-être même les deux, ce n'était pas impossible après tout. Elle ne se rendit compte de sa présence que lorsqu'elle posa la couverture près d'elle.


- Merci beauc ... Ouuuuch !!! Mais bon sang, Georgia ! Tu tricotes ? Remues-toi non d'un chien !
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--Georgia
[L'Acte II, vous en rêviez ? Je l'ai fait !]


    Acte II - Scène 1, Il est né le Divin Enfant ou les Joies de la Maternité, toutes mes condoléances.



Ces jeunes filles sont décidément parfaites, oui parfaites en tout point, de l'humour léger de Bee à la discrète intervention de Lanceline, en passant par la délicatesse innée de Cl0é. La main toujours calée sous la nuque du bébé, l'Alençonnaise de tendre la main à l'extérieur pour récupérer la lame.

-« Merci ma jolie ! » Et à l'adresse de la nouvelle arrivante. « En voilà une idée charmante, j'vous connais pô mais j'vous aime déjà, vous ! A nous deux l'drôle ! »

Et de se reglisser sous les jupes de sa jeune maitresse, réprimant un frisson quand les genoux se frottent au dallage glacé des remparts, un coup d'œil à la situation, et les lanières retenant son corsage sont extraites des œillères, une idée germant. A malin, malin et demi, fille ou garçon, c'marmot-là a décidé de causer des soucis à sa mère dès le début, c'est sans compter sur la matrone qui voue à la lectouroise un amour doublé d'une admiration sans borne. L'aura pas et y restera bien vivant assez pour qu'elle puisse lui coller une fessée quand il serait en âge de concevoir la frayeur qu'il leur aura causées à sa naissance. J'nesse pourrie ! Alors, la main qui contenait la progression du bébé se fait plus souple et l'enfant de descendre, entraînant à sa suite et à son cou, le cordon ombilical, la garde de la dague est glissée entre le cou frêle du nourrisson et le cordon, essayant de donner du mou pour que l'enfançon ne finisse pas étranglé.

-« Au lieu de brailler comme une vieille teutonne brune, essayez d'faire honneur à vot' blond et pondez nous c'chiard, mon Ange. »

Classe, raffinement, élégance, tout y est, bienvenue dans le Georgia's Land darling ! Et les choses de se dérouler plus vite que prévu, sourde aux gémissements et autres cris, l'attention de l'Alençonnaise se concentre sur l'enfant ingrat par excellence qui s'extirpe allégrement des cuisses de sa mère. Alors la descente infernale commence, le froid, la peur de la perdre, de le perdre même si elle se morigène de l'aimer déjà alors qu'il la fait souffrir, le cordon qui se resserre inextricablement sur la garde qu'elle retient d'une poigne de fer pour éviter l'issue fatale. Les perles délavées fixent avec angoisse les épaules qui s'immiscent, viennent à la vie, le buste et enfin, la sortie salvatrice qui apaise la vieille qui sait que le plus dur a été fait. Et le cordon est tiré délicatement à elle pour avoir de la longueur, et enfin, ôté du cou délicat.

Les jupes sont relevées avec un sourire triomphant, la dague déposée à la va-vite au sol à côté des lanières de cuir fin, et tout aussi triomphalement, le chérubin tant attendu est attrapé par les chevilles d'une main, et une bonne claque est administrée sur le petit fessier fripé. Un hurlement qui vient claquer dans l'hiver, un rire qui y répond.


-« Gueule braillarde, ça t'f'ra pô d'mal ! C't'une pisseuse d'plus mes mignonnes ! 'Core une ! »

La famille s'agrandit et le bébé furibard est déposé sur le ventre de sa mère, tandis qu'elle retourne à son office. Comme un rituel, le cordon ombilical du bébé est attrapé, les lanières aussi, quatre doigts, les quatre saisons, un nœud et plus loin, un deuxième. Un regard au cordon qui bleuit, s'assèche, et la lame qui vient trancher entre les deux nœuds, sectionnant le fil de vie liant la mère et l'enfant.

-« 'ccupez vous d'elle. »

Et de retourner à quatre pattes sous les jupes, la main senestre de masser le ventre pour activer la sortie de la secondine, laquelle arrive à vive allure, au grand bonheur de la vieille qui emmaillote le tout dans son tablier avant de jeter un coup d'œil expert à l'entrejambe. Pas de saignements, le bonheur par excellence. Et de se relever tenant contre elle, le tablier sali.

-« Mes félicitations mon Ange ! »
Bee.zee
Après l’accouchement dans l’humour, l’accouchement dans la grimace, j’ai l’honneur de présenter l’accouchement dans la torture. Oui, vous pouvez la plaindre. Elle souffre en silence – ou presque- des crampes la parcourraient, arrachant une grimace à la blonde qui inspirait, angoissait, soufflait, inspirait, serrait les dents. Faites qu’il arrive cet enfant, que tout cela s’arrête, qu’elle retrouve une couleur et une forme raisonnable, que la douleur et les crispations cessent, enfin. C’est cela même que l’on pouvait lire sur les traits de la lectouroise, qui jetait ses dernières forces, sa dernière résistance dans la bataille. Vous l’aurez compris, Bee souffrait. Le broyage efficace de Cloé laissait ses doigts d’une couleur bleuâtre, difficilement reconnaissable. Encore un peu et elle n’aurait plus de phalanges, elle le sentait, elle le voyait, elle avait mal. Un mal de chien.

Au delà de l’agonie pure et simple de sa main droite, Bee suivait avec attention les faits et gestes de Georgia. Avec une détermination sans faille, la sage femme plongea sous les jupes avec la dague. Comme si l’on avait eut besoin de complications. Cet enfant n’aurait décidemment pas pris le chemin le plus simple, dès le départ. Mais tout cela était la porte grande ouverte aux risques. Elle sut bien vite que le cordon enserrait le cou du nourrisson, et si elle avait toute confiance en l’Alençonnaise, en ses capacités et en son expérience, des pensées négatives vinrent briser le positivisme à tout épreuve de la jeune femme. Les risques étaient indéniables, et dans la situation actuelle, son optimisme pouvait aisément passer pour de la naïveté. Qui a dit que les accouchements se déroulaient toujours sans faille ? Personne. Il était là le problème. Elle aurait pu entendre ses paroles de la bouche du plus sot des sots, elle l’aurait voulu le croire. Une brève image s’imposa dans on esprit, une silhouette adorée qui n’aura pas mis son enfant au monde. Ou comment perdre une sœur.

Une grande inspiration lui piqua le nez, et le froid attaquait ses lèvres, mais cela eu au moins l’avantage de chasser de sa pensée tout ce qui pourrait porter la poisse à la future mère.
Georgia s’activait, et bientôt, des cris, des pleurs ! Et l’enfant chétif de continuer à hurler, pour le bonheur de tous. Parce que c’était bien la première et la dernière fois de la vie d’une bébé qu’on aimait l’entendre crier, des sourires naquirent sur toutes les lèvres, mais le plus beau illumina sans doute le visage de Cloé. La tout juste maman reçut contre elle sa fille, encore une, comme le disait si bien Georgia.

Un moment suspendu, l'éphémère est immobilisé...
Qu’avait-il à rajouter ? Rien, absolument rien, excepté peut-être la couverture apportée par Paquerette qui fut déposée sur le nouveau né.


Vous l’avez fait, mes belles… Félicitations...
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Cl0e
[ Enfin le voilà, le dénouement final, dans tous les sens du terme ]


Elle ne voyait pas exactement ce qu'il se passait, et franchement, c'était angoissant. Ceci dit, le spectacle ne devait pas forcément être beau à voir, mais ne pas savoir, c'était pire.
Elle vit la dague passer, très rassurant ça aussi ... Certes il fallait couper le cordon, mais en principe, le bébé braille avant et ensuite seulement, on pense à couper. Pas avant. Là, cela n'augurait rien de bon. Elle sent que ça tire, que ça pousse, que ça tourne, mais jamais ça ne sort. Pourquoi ? Mais pourquoi bon sang ? Bien sûr, mettre cet enfant au monde de façon normale, c'était trop demandé au bon Dieu. Enfin pour le coup, elle le trouvait moins bon, le Très-Haut. Qu'il lui rende son époux et on en reparlerait. Déjà. Pour commencer.
Seule la Georgia et sa filleule semblaient disposées à faire de l'humour. Faire honneur au blonde. Tu parles. Il était sur son petit nuage, tranquille. Elle espérait au moins qu'il observait la scène depuis son perchoir, et qu'il ressentait tous les reproches de sa veuve, et combien elle aurait pris un malin plaisir à lui ratatiner la main, non mieux, les deux, plutôt que celles de son innocente et adorable petite couturière aux doigts en or.


- Et tu crois que je fais quoi, que je tricote peut-être ?

Un bling retentit, et la blonde voit la dague au sol, entachée, et lorsqu'elle lève les yeux, elle voit ce petit être tout rouge, tout fripé, qui ne crie pas. Normalement ça braille quand ça sort ... La douceur légendaire de Georgia fit le reste, et la blonde entendit le braillement avec soulagement. Pour sûr, elle changerait d'avis plus tard, mais pour l'heure, mieux valait qu'il en profite. Souffrir autant pour découvrir qu'elle avait mit au monde un mort-né l'aurait anéantie. Très vite, la sentence tomba.
Elle voulait un garçon, un petit blondinet, qu'elle voyait déjà chevalier, et qui aurait ses yeux. Mais non, c'était une fille. Peu lui importait, c'était son enfant, leur enfant. Et même si elle se tâtait encore à le trouver beau ou laird en raison de sa couleur, de la fine peau encore froissée, elle échappa un rire cristallin. Elle sourit à sa servante, et regarda la main de Bee, gênée. elle y était peut-être allé un peu fort ...
Tout juste si elle fit attention à l'alençonnaise qui s'éclipsait. Elle aurait du mal à trouver un endroit où enterrer la secondine, ou elle ne savait plus trop quoi, en haut de son rempart. Au lieu de quoi, elle resserra la douce couverture sur sa petite merveille, et lissa les trois pauvres cheveux blonds sur le petit crâne. Tous les enfants ou presque naissaient blonds, et changeaient par la suite. Avec deux parents blonds, ce ne serait pas le cas de la petite fille, ou alors, ce serait vraiment étonnant.
Elle serra un peu plus le poupon contre elle, en attendant le retour de sa sage-femme.

_________________
--Georgia
Les mains souillées par le tablier, frigorifiées par le froid mordant, les mains d’une vieille avant l’âge qui se ressert sur le tissu rugueux et tiède pour ce qu’il contient, ces mains là sont considérées un instant par l’alençonnaise, un instant où elle se demande si une autre aurait pu la sauver quand elle-même s’escrimait à la sauver. Une autre, y aurait-il pu en avoir une autre dans la vie de la Blanche ? Des larmes brûlent les yeux fatigués de tant veiller sur les nuits de Roxane pour que sa mère dorme en paix, des nuits à veiller sur le sommeil des jeunes femmes qui vivent dans la maisonnette lectouroise en attendant que le manoir de Jegun ne soit emménagé. Des larmes de joie et de soulagement alors que les mains s’abattent au pied des remparts pour creuser vaillamment le petit trou qui dissimulera à tous la souillure de l’accouchement. Elle fredonne la vieille, une berceuse que sa mère chantait pour les enfants des communs, elle fredonne et ne s’en étonne même pas. Sera-t-elle capable d’être fâchée contre ce petit bout de vie qui a failli voler celle de sa mère ? Jamais. Elle aime tout simplement, et tandis qu’elle tasse la terre gelée du talon, le regard se pose sur une brouette destinée sans doute à ramener du bois. Tout est caché, tout est fini, il faut repartir, et pourquoi pas mettre l’enfant dedans pour que la mère n’ait que son propre poids à porter, alors la brouette est amenée au bas des marches, et les marches sont gravies pour rejoindre l’attroupement qui s’est formé autour du couple mère, enfant.

Un coup d’œil à la scène, et la voix se fait réprobatrice quand elle aurait voulu être simplement énoncée comme un fait constaté.


- « Il aurait fallu la faire téter.. »

Le garde est avisé et un signe de tête lancé dans sa direction.

-« On va y aller, il vous remplacera, j’pense bin.. »

Un soulagement, il y a un soulagement dans les yeux du bonhomme qui s’éclipse sans demander son reste, les yeux sont levés au ciel. Foutus bonhommes.. Le nourrisson est récupéré, emmailloté plus encore, et d’un bras passé dans le dos, la mère est redressée. Un instant, encore un peu, elle l’observe la Blanche, sa Blanche, puis ôte sa propre cape pour en revêtir Cloé.

-« Faudrait pas qu’on sauve la fille pour perdre la mère, hein. »

Et de se tourner vers les jeunes femmes présentes avec un sourire convivial.

-« V’nez toutes à la maison, j’vous f’rais une bonne soupe ou un que’que chose. En route, mauvaise troupe. »

Oui, en route, vers une nouvelle aventure, une nouvelle vie qu’elle régit d’une main de maître, fille d’intendante qui se respecte et enfin, elle ose un regard vers l’enfante, dégage un bout de couverture, sourit à la vue des mèches blondes si pâles qu’elles en paraissent blanches comme toutes les femmes de cette famille. La mine rougeaude se plisse, et les paupières fripées s’ouvrent enfin, sur deux yeux bleus clairs comme une source. Pure, elle est pure cette enfant qui s’éveille à la vie et dans ses bras. Et la vieille rougit à l’avance de ce qu’elle s’apprête à proposer, à demander.

-« Vot’.. Feu vot’ époux.. L’était italien, non ? Un prénom italien, ça pourrait êt’ beau non ? Il avait des feuillets qui tr’naient partout, et dedans, y avait des noms.. J’dis pas que j’ai fouillé.. J’ai rangé, c’pas pareil.. Mais d’dans, y avait des noms qu’j’ai lu, voyez qu’est-ce que j’veux dire… » Elle en perd son français qu’elle a châtié pourtant quand elle veut. « D’dans, y avait un prénom que j’aime bien .. Que je.. ‘Fin, ça lui irait bien de qu’est-ce qu’il m’en a dit vot’ bonhomme .. Enfin, avant que.. Bah.. Voilà, c’tait Chiara que j’crois que c’était, et même qui m’avait dit que c’était un prénom qu’les gens aimaient bien chez lui.. Là-bas, savez.. en Italien quô.. Et que ça veut dire claire.. Pour sûr, qu’elle est claire vot’ ch’tiote.. Des cheveux jusqu’aux mirettes.. Alors bon, j’ai pensé que .. V’savez, j’m’dit que ça pourrait p’tête êt’ pas vilain, hein ? »

De l’appréhension dans la voix ? Des tonnes, tant est si bien qu’elle en rougit de plus belle et serre d’autant plus le bébé contre son corps, des fois qu’en refusant de l’appeler comme ça, la Blanche refuserait aussi de la lui laisser. Car elle l’aime tout simplement, et pire encore, s’en sent responsable, elle lui sourit, d’un sourire niais, aimant.

-« Tu aimerais ça, mon ange ? »

La brouette ? Elle passe devant et ne s’en soucie plus, plus accaparée par la mère qu’elle tient contre elle, et l’enfant qui est logée à même enseigne.

-« Moi, j’aimerais bien, ‘tout cas, si vous v’lez bien.. »
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