Paquita
Paquita pelait des panais tout en réfléchissant au menu qu'elle allait proposer les jours prochains quand un messager toqua au carreau.
Elle reposa légumes, couteau et torchon sur les épluchures et voulut se hâter vers la fenêtre.
C'est souvent ainsi que les choses arrivent.
Paquita vit , incrédule, des gouttes rouges maculer la table et le torchon avant que de sentir la douleur. Dans sa hâte à repousser les légumes, elle avait enfoncé la lame dans sa main.
Le temps de porter le doigt blessé à ses lèvres, de se ressaisir, le messager était parti quand elle ouvrit la fenêtre, ne découvrant sur le rebord qu'une missive roulée serrée.
La posant sur le coin de la table, elle s'occupa à panser sa main, cuire les panais, nourrir et apprêter les enfants qui venaient de se lever. La journée s'écoula à servir les clients, laver, récurer, cuire et pétrir quand, le soir venu, elle retrouva la missive qui attendait là.
S'asseyant près de l'âtre, elle s'apprêta à en prendre connaissance.
Elle l'ouvrit se demandant de qui elle émanait, le messager enfui ne pouvant la renseigner. Elle le déplia en hâte, le tourna, le retourna entre ses doigts, étonnée. Rien pas un mot, pas de signature.
Elle pensa à une erreur, une farce quand une tache rouge sur sa jupe attira son regard.
Ho ! la blessure s'est rouverte ! j'aurais dû la panser mieux ... Ce sont des choses qui arrivent...
Mais son coeur soudain manqua un battement. Elle venait de reconnaître l'objet. Un bout de ruban rouge. De la même facture que celui que Messire Totoriflette lui avait fait parvenir pour lui signifier timidement qu'il pensait à elle. Ce client délicat et respectueux avait fait forte impression à Paquita qui avait senti la chatouille d'un sentiment naissant en son coeur.... Quand la fiancée du Messire était apparue, réduisant à néant l'émoi à peine éclos.
Ce sont des choses qui arrivent...
Messire Totoriflette parti, Amael, le fol Amael qui clamait haut et fort son attirance pour la belle par les cours de la caserne avait profité de la vacuité de son coeur pour s'y installer, tel un chat qui s'insinue par la porte entrouverte et qui, par son assurance de n'en être point chassé, vous désarme de sa naturelle audace.
Ce sont des choses qui arrivent...
Paquita prit le ruban entre ses doigts, émue de ce témoignage de tendresse. Elle le porta à sa joue avec un doux sourire quand elle s'aperçut que l'étoffe en était usée, râpée par endroits, flétrie.
Elle comprit en un éclair.
Oh ! Il en avait gardé un morceau sur lui, comme un lien d'amour entre nous... S'il me l'envoie, c'est que....
Et paquita resta un long moment à méditer, le regard perdu dans les flammes. Il lui fallait se résoudre à affronter la perte d'un amour, ô, pas par détachement dû à l'éloignement, nenni, mais par la volonté de le faire disparaître de celui qui l'avait provoqué.
Ce sont des choses qui arrivent...
Glissant le bout de ruban dans sa manche, elle avait commencé à ranger la grande salle quand Amael était arrivé.
A son habitude, il avait exigé un baiser, une chope. Un grand vent de forêt le suivait. Amael le fol, Amael la bourrasque, Amael la tempête !
Paquita lui tendait sa chope quand le ruban glissa sur la table.
Paquita vit Amael blêmir, reposer la chope, se lever le ruban aux doigts pour le jeter au feu.
Se tournant vers elle, il eut des mots durs, amers, blessés, blessants.
Ce sont des choses qui arrivent.
Le ton était monté rapidement. Comment ils en arrivèrent là ? Aucun des deux ne le savait vraiment. Toujours est-il qu'en lice, le bâton à la main, ils s'observèrent.
Paquita écumait de rage. Elle n'était pas habituée à se faire ainsi malmener ! Et par qui ? je vous le demande ? Un bûcheron ! un garçon ! un bidasse ! un boucher !
La haine lui montait aux lèvres. Elle en tremblait de fureur. Et c'est ainsi qu'elle reçut le premier coup. Elle se détourna légèrement pour porter la main à son épaule, y frotter de la paume et ainsi atténuer la douleur.
La colère la submergea et elle se détendit d'un bond, le touchant au visage.
De la lèvre fendue, un filet de sang. Paquita, le regard agrandi, en lâcha son arme, prête à s'élancer pour demander pardon, toute irritation dissipée. Oh ! comme elle s'en voulait soudain !
Quand le coup l'atteignit à la tête.
Elle resta debout à regarder Amael, indécise, chancelante.
Sa vue se brouilla progressivement.
Elle eut le temps de le voir, avec des gestes d'une infinie lenteur la prendre dans ses bras.
Ne t'en fais pas Amael... ce sont des choses qui arrivent....
Le néant.
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Elle reposa légumes, couteau et torchon sur les épluchures et voulut se hâter vers la fenêtre.
C'est souvent ainsi que les choses arrivent.
Paquita vit , incrédule, des gouttes rouges maculer la table et le torchon avant que de sentir la douleur. Dans sa hâte à repousser les légumes, elle avait enfoncé la lame dans sa main.
Le temps de porter le doigt blessé à ses lèvres, de se ressaisir, le messager était parti quand elle ouvrit la fenêtre, ne découvrant sur le rebord qu'une missive roulée serrée.
La posant sur le coin de la table, elle s'occupa à panser sa main, cuire les panais, nourrir et apprêter les enfants qui venaient de se lever. La journée s'écoula à servir les clients, laver, récurer, cuire et pétrir quand, le soir venu, elle retrouva la missive qui attendait là.
S'asseyant près de l'âtre, elle s'apprêta à en prendre connaissance.
Elle l'ouvrit se demandant de qui elle émanait, le messager enfui ne pouvant la renseigner. Elle le déplia en hâte, le tourna, le retourna entre ses doigts, étonnée. Rien pas un mot, pas de signature.
Elle pensa à une erreur, une farce quand une tache rouge sur sa jupe attira son regard.
Ho ! la blessure s'est rouverte ! j'aurais dû la panser mieux ... Ce sont des choses qui arrivent...
Mais son coeur soudain manqua un battement. Elle venait de reconnaître l'objet. Un bout de ruban rouge. De la même facture que celui que Messire Totoriflette lui avait fait parvenir pour lui signifier timidement qu'il pensait à elle. Ce client délicat et respectueux avait fait forte impression à Paquita qui avait senti la chatouille d'un sentiment naissant en son coeur.... Quand la fiancée du Messire était apparue, réduisant à néant l'émoi à peine éclos.
Ce sont des choses qui arrivent...
Messire Totoriflette parti, Amael, le fol Amael qui clamait haut et fort son attirance pour la belle par les cours de la caserne avait profité de la vacuité de son coeur pour s'y installer, tel un chat qui s'insinue par la porte entrouverte et qui, par son assurance de n'en être point chassé, vous désarme de sa naturelle audace.
Ce sont des choses qui arrivent...
Paquita prit le ruban entre ses doigts, émue de ce témoignage de tendresse. Elle le porta à sa joue avec un doux sourire quand elle s'aperçut que l'étoffe en était usée, râpée par endroits, flétrie.
Elle comprit en un éclair.
Oh ! Il en avait gardé un morceau sur lui, comme un lien d'amour entre nous... S'il me l'envoie, c'est que....
Et paquita resta un long moment à méditer, le regard perdu dans les flammes. Il lui fallait se résoudre à affronter la perte d'un amour, ô, pas par détachement dû à l'éloignement, nenni, mais par la volonté de le faire disparaître de celui qui l'avait provoqué.
Ce sont des choses qui arrivent...
Glissant le bout de ruban dans sa manche, elle avait commencé à ranger la grande salle quand Amael était arrivé.
A son habitude, il avait exigé un baiser, une chope. Un grand vent de forêt le suivait. Amael le fol, Amael la bourrasque, Amael la tempête !
Paquita lui tendait sa chope quand le ruban glissa sur la table.
Paquita vit Amael blêmir, reposer la chope, se lever le ruban aux doigts pour le jeter au feu.
Se tournant vers elle, il eut des mots durs, amers, blessés, blessants.
Ce sont des choses qui arrivent.
Le ton était monté rapidement. Comment ils en arrivèrent là ? Aucun des deux ne le savait vraiment. Toujours est-il qu'en lice, le bâton à la main, ils s'observèrent.
Paquita écumait de rage. Elle n'était pas habituée à se faire ainsi malmener ! Et par qui ? je vous le demande ? Un bûcheron ! un garçon ! un bidasse ! un boucher !
La haine lui montait aux lèvres. Elle en tremblait de fureur. Et c'est ainsi qu'elle reçut le premier coup. Elle se détourna légèrement pour porter la main à son épaule, y frotter de la paume et ainsi atténuer la douleur.
La colère la submergea et elle se détendit d'un bond, le touchant au visage.
De la lèvre fendue, un filet de sang. Paquita, le regard agrandi, en lâcha son arme, prête à s'élancer pour demander pardon, toute irritation dissipée. Oh ! comme elle s'en voulait soudain !
Quand le coup l'atteignit à la tête.
Elle resta debout à regarder Amael, indécise, chancelante.
Sa vue se brouilla progressivement.
Elle eut le temps de le voir, avec des gestes d'une infinie lenteur la prendre dans ses bras.
Ne t'en fais pas Amael... ce sont des choses qui arrivent....
Le néant.
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