Cyrinea
Quand on sent la rage poindre vaut mieux parfois pas demander pourquoi. Longtemps quelle ne lavait pas entendu rugir de la sorte et instinctivement, sentendant dire rechercher quelquun assorti dun « Je le veux vivant », elle présuma quil était arrivé malheur à Sophie. Non point dans un dortoir de pensionnat pour jeune donzelles, mais certainement sur le route pour Cahors quelle avait eu limprudence demprunter seule. Au moins la missive quIohannes froissait rageusement laissait-elle supposer que la Vicomtesse était vivante.
Elle se leva dun bond, un peu daction la réchaufferait, si tant est quelle en ait besoin car la colère qui lanimait soudain navait fait faire quun tour au sang qui commençait de geler dans ses veines. Elle épousseta la neige colée à ses frusques.
Elle avait corne, pain, gourde et épée, Damon prendrait la lanterne, faut jamais priver les hommes de vous éclairer de leurs lumières. Pour la corde, elle lui faisait confiance, rares étant ceux quelle avait croisés qui nen possédaient pas au moins une petite longueur. Elle lui jeta un regard, puis, se tournant vers Sancte :
On file vers louest. Faites-nous confiance, si blond on croise, frisé qui plus est, on lui fait mordre la poussière et quand on vous lemmènera il criera déjà pitié.
Dun bond, elle se retrouva avec cinq cent kilos de chauffage entre les cuisses. Flatta lencolure, resserra les reines.
Damon, prends la lanterne, jte suis.
Graindefolie
[La chasse au blond, mais pas comme elle l'avait prévu...]
Adossée contre la souche d'un arbre mort, Blondie ouvrait les esgourdes. Le froid lui gelé les doigts d'pieds et le bout des lèvres, ses yeux azurés rivés vers le fauve rugissant. Les froissements qui oscillaient sur le morceau de papier étaient semblables à la douleur aiguë qui jonchait son esprit, lui laissant l'envie de vengeance crépiter sous son épiderme.
Sa brunette en tenue d'hermine s'était fait rouler dans la neige, le moins qu'on puisse dire. Certain son prêt à tout pour planifier leur mort ... celui là en faisait partis, à coups sur. Il avait signé sa propre fin, dans les sillons enneigés.
Si le froid ne s'était pas totalement emparé des quelques corps en attente, le regard perçant de l'Amiral venait d'achever cette tâche. Heureusement, le son qui venait compléter ce face à face terrible, heurta les pauvres oreilles glacés, leur dictant la procédure à suivre.
A l'idée d'embrocher l'un des siens, Folie retroussa le museau.
Mais bien vite il lui vint à l'esprit une nouvelle théorie, qui affirmait que tout blond qui viendrait à porter la main sur ce qu'elle avait de plus cher, serait bannis à tout jamais de cette tribu qu'elle chérissait tant, ne méritant même pas de lui appartenir, et donc, tombant dans la catégorie de résidus de poulpe rancie totalement inutile à la vie. Elle pouvait donc, sans remords ni morales, aller botter ce p'tit cul d'blond qui se prenait pour le roi de la banquise!
Fouiner, farfouiller, dégoter! Elle savait faire, et elle allait déployer toute sa meilleure blondeur pour se faire, arrosé de tout le dégoût qu'elle pouvait avoir à ce moment là. Ruse et persuasion...et la force et la diplomatie pour son partenaire de chasse!
Elle se leva à son tour et vérifia son équipement... La mangeaille, la corde et la lanterne...de quoi sonner l'alerte et sa mignonnette, toute tranchante à souhait. Fallait l'ramener envie.. mais pour l'reste.. rien n'avait été précisé!
Krif et moi on prend de l'autre coté. Vous en faites pas, on va la coincé cette p'tite vermine, il ne s'en sortira pas comme ça...
Cyrinea
[Quand les rats quittent le navire]
Bon, vla-ty pas quau moment de se lancer dans une chevauchée discrète et inquisitrice, Damon sétait aperçu quil devait durgence rentrer à Montauban, victime détourdissements anémiques. Et, poursuivre celui qui avait détroussé la Vicomtesse seule, ça ne la branchait pas trop à Cycy. Ces hommes quand même, que du muscle et encore, fragile, et rien dans le crâne ! Quant à faire équipe avec Sancte, outre que cétait un loup solitaire, affronter sa mauvaise humeur pour cause de nouvelle catastrophique, cétait pas non plus un de ses fantasmes les plus inavoués et quelle brûlait de concrétiser. Outre que les fantasmes, moins on les concrétise, plus il nous reste encore de rêves plein la tête.
Descendre ou pas de cheval ? Elle avait laissé partir son coéquipier avec un soupir dépité, tourné bride et sétait repointé au campement. Elle sétait étirée de toute sa longueur sur sa monture et avait regardé Sancte, qui nétait pas encore parti battre la campagne.
Bon, Damon me fait faux bond. Je fais quoi moi ? Je vais pas non plus aller servir dappât à lautre enfoiré quand même !
Gnia
[Le jour d'après - Montauban - L'Alabrena]
La Comtesse reposa la parchemin qu'on venait de lui porter avec un profond soupir. Le front ridé d'un pli soucieux, elle laissait ses doigts nerveux triturer la cicatrice sur le bas de sa joue tandis qu'elle songeait à ce qu'elle venait de lire.
Fallait-il y lire une demande d'aide que la vicomtesse de Terrides n'aurait pas formulé ? Etait-ce là simplement matière à entamer l'écriture des aventures de Soara, haquenée sauveuse de dames en détresse ? Ou bien tout bonnement émettre le premier constat qui était venu à l'esprit de la Saint Just : Sancte Iohannes portait la guigne et la culture était un exercice périlleux dès lors qu'il s'agissait de se déplacer avec lui. Ou non loin, dans ce cas précis.
La Saint Just écarta d'un geste las les sombres pensées que remuait le sinistre souvenir d'une virée estudantine en Poitou et tâcha de revenir à l'écriture ronde sur le feuillet qui déjà s'enroulait à nouveau sur lui-même.
Un nouveau soupir accompagna le crissement de la plume qui entamait un frénétique ballet en échappant de grandes larmes d'encre rouge sang.
Citation:
Rédigé à l'Alabrena, en la bonne ville de Montauban, le vingt neuvième jour de décembre de l'an de grasce mil quatre cent cinquante huit
A Sophie de Terrides,
Ma chère,
Vous me voyez fort marrie des tristes nouvelles portées par votre missive. Vous saviez comme j'étais inquiète de ce voyage et j'ai pourtant bien prié le Très Hauct pour qu'il veille sur vous tous. Bien qu'il ne m'ait qu'à demi-entendue, je suis fort aise de vous savoir sauve et que vous l'ayez été par ce que vous redoutiez.
Si vous aviez besoin de quoi que ce soit, n'hésitez pas à me le faire mander. Les situations guyennoise et montalbanaise ne me permettent guère d'espérer venir vous chercher et vous faire escorte depuis Cahors à Montauban, mais le temps que vous vous remettiez de votre mésaventures, tout cela aura peut être encor évolué.
Aussi, prenez bien soin de vous et de vous reposer et faites moi savoir lorsque vous voudrez quitter Cahors, nous arrangerons le voyage.
Saluez le Sieur Barry de ma part et remerciez-le également de l'attention et du soin qu'il vous porte.
Le Très Hauct vous garde.
Bien à vous,
Le pli scellé partit par là où était venu son frère et la Saint Just se rencogna sur son siège, la main retournant pincer fébrilement la fine balafre. La période n'était guère propice à voir ajouter de l'inquiétude à celle qui la gagnait déjà pernicieusement. Et le pis était encore que lorsque pointait l'inquiétude, le mal qui lui serrait le coeur dans la poitrine comme un étau n'était guère loin.
Et cela ne présageait rien de bon._________________