Clothilde venait d'arriver à Thouars après pas mal de jours de marche, village qu'elle connaissait lors de précédents voyages, enfin elle connaissait surtout la forêt pour y avoir appris l'art du bûcheronnage et souffrir de ses premières ampoules avec le maniement de la hache, mais maintenant six stères de bois ne l'effrayaient plus.
Donc aujourd'hui elle se retrouvait devant les portes de la ville accompagnée de sa soeur Olianna qu'elle avait été cherchée à Castillon, pour la ramener à La Trémouille.
Mais en cours de chemin, lors d'une discussion sur l'avenir qu'elle envisageait cette dernière lui fit part de son attirance pour le combat et son désir grandissant d'intégrer une armée ou légion afin d'accomplir son rêve !
L'armée la tentait plus et il ne fallait pas négliger la solde mais quand Clothilde lui apprit qu'elle n'était que de 10 écus vu la grimace de cette dernière même si elle ne croulait pas sous les écus, étant simple vagabonde, ce serait juste pour vivre convenablement, alors son choix se porta sur la Légion cette réponse.... Clo l'avait senti venir, elle soupira.
Cette nouvelle plutôt inattendue déboussola Clothilde essayant de masquer sa déception, elle qui croyait vivre auprès de sa soeur après tant d'années de séparation, chercha avec elle un lieu pas très loin de La Trémouille afin que la distance ne soit pas un nouvel obstacle. Cette dernière qui s'était renseignée bien évidement avait entendu parler de la 4ème Légion de Thouars.... pourquoi Thouars ?.... simple hasard, coïncidence nul ne pourrait le dire... mais Clo ne croyait plus depuis bien longtemps au hasard et aux coïncidences, elle n'essaya même pas de soumettre à sa soeur une Légion se trouvant ailleurs, c'était peine perdue sa décision était prise irrévocablement.
Elles traversèrent le village sans croiser beaucoup de monde, se dirigèrent vers la première taverne en vue peut-être trouveraient-elles quelques personnes susceptibles de les renseigner sur l'enrôlement dans l'armée. Effectivement quelqu'un se proposa d'expliquer à sa soeur le déroulement des opérations, Clothilde décida de les laisser tranquille et en profita pour aller faire un tour du côté de la forêt, ses pas la menèrent sans qu'elle réfléchisse d'ailleurs comment aurait-elle pu réfléchir, quelque chose en elle la poussait à prendre cette direction... pourquoi celle-ci, le hasard encore.... non ... quelque chose de plus fort ancré au plus profond d'elle, elle entendait les battement de son coeur s'accélérer. Le paysage autour d'elle se modifiait, les habitations s'espaçaient c'était la fin du village, la forêt se rapprochait... au détour du chemin juste avant de s'enfoncer dans les sous bois, elle l'aperçut... cette bâtisse isolée, coupée du monde ! Son coeur manqua un battement c'était là.... qu'il vivait maintenant.... un pressentiment, une intuition oui voilà une intuition lui disait qu'elle ne pouvait se tromper, cet endroit si beau et si triste aussi, il ne pouvait que se terrer dans ce lieu.
Elle hésita, attendit, scruta mais aucun bruit, aucun mouvement ne semblait troubler le calme règnant en maître alors elle se dirigea lentement vers la barrière, la poussa, s'arrêta... observa... lui seul était capable pour chasser tous ses souvenirs des jours heureux et essayer de se reconstruire un semblant d'existence loin d'elle .... lui seul était capable de vivre en ermite.... et oui elle avait tout de suite compris en taverne de qui parlait certains en écoutant discrètement leur conversation et la description du personnage qu'il trouvait bizarre, pas comme les autres, n'ayant plus tout à fait sa raison..... le pauvre "brûler son échoppe à cause d'une paysanne... une drôlesse.. qui était allée voir ailleurs, franchement....." ça tournait pas rond là-dedans. Clo n'avait pu en entendre davantage et pour cette raison était sortie, il lui fallait voir par elle même si c'était lui .... Gengis !
Elle continua son investigation tout était entretenu, dans un enclos des vaches paissaient tranquillou, l'une d'elle le regarda d'un oeil.... heu pas très sympathique, arfff ! même ses animaux lui étaient hostile... encore un coup des maudites sonnailles... mais non qu'allait-elle imaginer là... mais il y avait comme une sorte d'ambiance pas habituelle... pas de désordre, il y avait même un abreuvoir... encore des souvenirs..... elle lança un imperceptible :
- Oyez ! Y a-t-il quelqu'un ? aucune voix ne répondit à son appel, elle aperçut un appentis y entra, découvrit une forge, des copeaux au sol, en ramassa un le fourra dans sa poche, des outils bien rangés sur l'établi, elle passa sa main les caressant. En continuant elle trouva bien rangés des bâtons ornés de petites fioritures elle en prit un l'admira et la tentation fût la plus forte, elle échangea le sien en prenant soin de le dissimuler au milieu des autres.... elle ne volait .... elle échangeait nuance. Elle sourit l'imaginant recommencer tant de fois son travail afin d'arriver à ce résultat, s'énervant et jurant, mais ses yeux bleus s'émerveillant devant le résultat, il avait un don certain pour la sculpture pour la maîtrise de ce bois si noble à travailler, elle savait qu'il n'avait jamais été fait pour devenir boucher mais charpentier Oh ! oui le plus beau métier à ses yeux... mais jamais elle ne lui avait dit.. à quoi bon ressasser tout ça, c'était trop tard maintenant, plus jamais elle ne serait SA Merveille, il lui avait dit. Elle avait fait son malheur et jamais au grand jamais il ne lui pardonnerait d'être partie avec un autre. Elle allait repartir quand elle découvrit par hasard une cloche assez grosse mais magnifique fixée à un socle, elle s'en approcha émerveillée était-ce lui qui avait fabriqué cet objet mais pourquoi, en avait-il pas assez de celles qui gouvernaient sa vie maintenant, il lui fallait le maître bourdon pour dominer son impuissance pour essayer de chasser en lui toutes ses tendances dévastatrices qui lui rongeaient l'existence, Clo mesura l'étendue de la détresse de Gengis et en resta comme hébétée, comment avait-elle pu être aussi aveugle aussi égocentrique....
Les larmes aux yeux elle s'enfuyait quand elle percuta un espèce d'épouvantail planté au beau milieu de la cour que faisait-il là ? Elle ne l'avait pas vu auparavant pourtant on ne pouvait pas le manquer, elle s'essuya d'un revers de manche les larmes qui coulaient et se figea en regardant de plus près ce mannequin vêtu de braies et d'un chapeau couleur marron et d'une chemise blanche.... c'était la copie conforme de l'habillement de son nouveau compagnon Mordom.... un frisson l'a parcouru... alors ainsi l'idée ne l'avait pas quitté... le duel hantait toujours son esprit et apparemment vu l'état de délabrement du mannequin, il devait y mettre toute son ardeur, sa rancoeur, sa rage, sa douleur et.... ses mauvaises conseillères... ces choses que lui seul entendait, le rendant à moitié fou aux yeux du monde, devaient le pousser à s'entraîner jusqu'à l'épuisement, lui qui n'avait jamais touché une arme, elle se souvint qu'elle devait même lui apprendre à manier l'épée pfffttt, mais trop accaparé par son métier de Boucher il n'avait jamais pu apprendre... une nouvelle vague de moments vécus à ses côtés revinrent à la surface.... son médaillon, une rose blanche, un collier, des poèmes.... alors n'y tenant plus elle se mit à courir, le plus vite et le plus loin possible, il fallait qu'elle séloigne à jamais de lui, ne plus revenir, l'oublier, sinon ..... sinon .....