bout d\' chandelle, incarné par H1h1
Je me dresse fièrement : j'ai attendu longtemps mon heure. Ce soir c'est le grand soir...
Je me sens saisie par une main aux doigts rougis et placée dans un socle en laiton. Je redresse ma tête, tend fièrement ma mèche : me voici prête. Commence l'attente...
Deux hommes entrent bientôt dans la taverne ; parlant fort, se donnant quelques tapes dans le dos ; lançant des plaisanteries grasses à la tavernière qui ne s'en laisse pas compter ; faisant de grands gestes avec leur chope comme s'ils souhaitaient baptiser les lieux ou tout au moins les marquer de leur présence. Le vin coule à flots, abrutissant peu à peu les grandes carcasses de ces travailleurs qui se retrouvent en ce lieu pour oublier la difficulté de leur travail, pour espérer passer quelques moments hors des contraintes avant de reprendre le chemin de leur logis...
La porte se referme enfin sur leurs vociférations et leurs chants paillards.
J'observe les doigts rougis qui nettoient vivement sous mon socle ; essayant de redonner un air de salubrité et d'honnêteté à l'établissement.
La nuit est tombée. Je le sais car mes consoeurs et moi même sommes maintenant les seules lueurs vacillantes qui éclairons la vaste pièce.
Un sire et une dame s'assoient près de moi. J'ai du mal à entendre leurs murmures. Quelques mots parviennent jusqu'à moi. Ils sont dits doucement, par une voix grave qui se veut agréable, enjôleuse : « aimée », « rondeur », « beauté »... Intriguée, j'accentue ma lueur et tente de percer le secret des brillantes pupilles encadrées de longs cils noirs en y imposant mon reflet. Je reçois alors les compliments du jeune homme étourdi.
Mon éclat s'intensifie : l'amoureux semble envoûté par le regard de sa belle. Ma flamme se fait dorée, douce avec juste assez d'intensité pour susciter l'émotion. Le jeune homme se penche vers moi, plus près, attiré comme un papillon. Il susurre les plus beaux mots d'amour de son répertoire et je sais qu'ils sont pour moi : pour mon éclat et ma prestance. Je me sens fondre de plaisir et de contentement. Je ne me lasse pas d'écouter les sonnets du poète, les ballades du trouvère et à travers l'ingénue illuminée, je soupire d'aise et de contentement.
Mais voilà la tavernière qui, d'une voix agacée, annonce la fermeture de l'établissement. En un instant, le couple s'enfuit main dans la main. Me laissant à mon socle de fer : misérable bout de chandelle ridicule.
Un souffle lourd sur ma mèche l'éteint sans effort. Je lance quelques signaux en guise de désapprobation. Peine perdue : qui s'en soucie ?
La taverne est fermée, la magie est tombée. Que me réserve demain ?
Je me sens saisie par une main aux doigts rougis et placée dans un socle en laiton. Je redresse ma tête, tend fièrement ma mèche : me voici prête. Commence l'attente...
Deux hommes entrent bientôt dans la taverne ; parlant fort, se donnant quelques tapes dans le dos ; lançant des plaisanteries grasses à la tavernière qui ne s'en laisse pas compter ; faisant de grands gestes avec leur chope comme s'ils souhaitaient baptiser les lieux ou tout au moins les marquer de leur présence. Le vin coule à flots, abrutissant peu à peu les grandes carcasses de ces travailleurs qui se retrouvent en ce lieu pour oublier la difficulté de leur travail, pour espérer passer quelques moments hors des contraintes avant de reprendre le chemin de leur logis...
La porte se referme enfin sur leurs vociférations et leurs chants paillards.
J'observe les doigts rougis qui nettoient vivement sous mon socle ; essayant de redonner un air de salubrité et d'honnêteté à l'établissement.
La nuit est tombée. Je le sais car mes consoeurs et moi même sommes maintenant les seules lueurs vacillantes qui éclairons la vaste pièce.
Un sire et une dame s'assoient près de moi. J'ai du mal à entendre leurs murmures. Quelques mots parviennent jusqu'à moi. Ils sont dits doucement, par une voix grave qui se veut agréable, enjôleuse : « aimée », « rondeur », « beauté »... Intriguée, j'accentue ma lueur et tente de percer le secret des brillantes pupilles encadrées de longs cils noirs en y imposant mon reflet. Je reçois alors les compliments du jeune homme étourdi.
Mon éclat s'intensifie : l'amoureux semble envoûté par le regard de sa belle. Ma flamme se fait dorée, douce avec juste assez d'intensité pour susciter l'émotion. Le jeune homme se penche vers moi, plus près, attiré comme un papillon. Il susurre les plus beaux mots d'amour de son répertoire et je sais qu'ils sont pour moi : pour mon éclat et ma prestance. Je me sens fondre de plaisir et de contentement. Je ne me lasse pas d'écouter les sonnets du poète, les ballades du trouvère et à travers l'ingénue illuminée, je soupire d'aise et de contentement.
Mais voilà la tavernière qui, d'une voix agacée, annonce la fermeture de l'établissement. En un instant, le couple s'enfuit main dans la main. Me laissant à mon socle de fer : misérable bout de chandelle ridicule.
Un souffle lourd sur ma mèche l'éteint sans effort. Je lance quelques signaux en guise de désapprobation. Peine perdue : qui s'en soucie ?
La taverne est fermée, la magie est tombée. Que me réserve demain ?