Erwelyn
Le pas est léger, enfin, elle essaie. Ses mirettes se posent sur la silhouette de Karyl, concentré sur sa course en direction de la taverne. Sur les lèvres de la mainoise, un sourire vide de tout tracas, le garçon a le don de lui faire s'envoler ses soucis. Il la distance, évidemment. Elle pourrait le rattraper, si elle s'en donnait la peine, mais comme tout adulte, elle sait qu'il sera bien trop heureux de gagner. Et il gagne.
La porte se referme juste devant elle. Lynette l'ouvre d'un grand geste, légèrement essoufflée, avant de la faire claquer et de saluer la compagnie.
Une conversation démarre, sans réel sujet important, l'humeur est plutôt légère. On discute du cadeau qu'elle va faire au garçon pour avoir gagné la course, et Karyl leur montre ses talents de maniement d'épée en bois, vite contestés par l'homme assis non loin d'eux. La mainoise essaie tout de même de le convaincre que le garçon est super efficace devant un dragon, preuve en est du jour où il a terrassé celui qui avait enlevé Alycianne en taverne bourguignonne, et qui l'avait enfermée dans un placard à balai. D'ailleurs, Lynette se demande si Karyl a vraiment cru que c'était un dragon, hmm
Seulement, le véritable problème est soulevé : comment veut-il continuer à protéger sa promise avec une simple épée en bois hein ? Le cadeau est donc tout trouvé !
Et là paf le chien, sans vraiment s'y attendre, la conversation dérive vers un sujet nettement plus lourd, qui plonge Lynette dans un petit silence. Karyl leur balance innocemment qu'il a oublié son épée en Bourgogne mais que quand même, il en a déjà une de dague, offerte par Eikorc lui même. A deux doigts de s'étrangler, la Lynette. Si y avait bien un nom qu'elle n'aimait pas entendre, c'était celui là. Bon, vous me direz, elle est loin d'être la seule. La mainoise n'avait pas la rancune tenace, mais vu dans quelles circonstances elle avait rencontré le colosse la première fois, l'oublier était difficilement envisageable.
Sûr que la mainoise ne fut qu'une petite chose insignifiante pour lui, qu'il aurait pu écraser d'un coup de botte, faire tomber d'une pichenette. D'ailleurs, Lynette mettait sa main à couper qu'il ne se souvenait en aucun cas d'elle. Mais elle, oui. L'homme en question fut le premier à la confronter à la cruauté, au sang, à la mort. Elle se rappelle son regard fier, sa carrure, son assurance la première fois que ses prunelles se sont posées sur lui. Petite paysanne, petite herboriste, petite mainoise qu'elle était. Comment à dix-sept printemps, sortant tout juste d'une vie recluse dans sa forêt avec une Corleone qui la cachait du reste du monde depuis qu'elle était née, comment aurait-elle pu rivaliser. L'envie avait été grande de lui cracher sa haine au visage. Haine de voir son bourg ainsi pillé. Haine de voir les efforts faits par les paysans depuis des mois réduis à néant.
Sauf que bon, fallait l'avouer, Lynette était loin d'être une pro du maniement de l'épée, ni de toute autre arme d'ailleurs. Et ça n'avait pas vraiment changé avec le temps. La diplomatie, ça avait plus été son rayon d'ailleurs. Saouler les diplomates, elle savait faire. Empaler un méchant pas beau avec une arbalète, beaucoup moins.
Après ce petit interlude personnel se déroulant dans sa petite tête, quelques mots sont échangés sur le colosse, donc. Karyl est fan, ça se voit. Et surtout, il est pas du tout convaincu par ce que Theotrucmuch et elle-même essayent de lui expliquer. Tout en douceur, évidemment.
Comment expliquer au gamin la rancur qui l'anime depuis que ce géant avait débarqué à Mayenne ?
Comment lui dire qu'il est plutôt du genre à zigouiller des gens plutôt qu'à leur faire des "caaaaaaaaliiiiiiins" comme les ponettes ?
Et d'ailleurs, en a-t-elle le droit ?
Peut-elle écraser d'un coup de talon l'admiration qu'elle voit briller dans les yeux de Karyl ?
Définitivement, la réponse est non. On a tous droit à ses héros, même si ces derniers sont des fous furieux sans aucune pitié. Enfin, c'est en tous cas ce qu'elle pense du colosse, n'ayant pas vraiment pris la peine d'essayer de le connaître plus avant.
Heureusement la discussion repart vers un sujet plus badin, ou plutôt celle-ci est délibérément détournée par ses soins. La mine de Karyl n'est que trop renfrognée, et elle se mord la langue depuis quelques minutes pour ne pas lui crier la colère et le dégoût qu'elle ressent pour celui qui est venu s'en prendre à Mayenne, voilà bien longtemps maintenant. Mais il y a certaines choses que le temps ne fait pas oublier.
Retour à la case "et si on t'achetait une vraie arme" donc. Theobidule leur conseille un baudrier, Karyl tire la tronche. Et comme il est trop choupitou et que Lynette veut lui faire plaisir, elle ne peut que craquer en lui proposant de lui offrir l'arme qui va avec, forcément.
Et comme leur nouveau compagnon de taverne est celui par qui la bouderie est arrivée, c'est grand sourire aux lèvres que Lynette lui demande de les accompagner. En plus, ça lui permettra de paraître moins cruche pendant l'achat. Le vendeur pourrait très bien lui faire prendre une hache pour un arc. Enfin non, quand même, faut pas pousser mémé avec l'eau du bain, elle savait tout de même différencier les deux.
Mais il fallait que le cadeau soit de bonne facture, et pour ça, nul doute qu'elle aurait besoin de conseil.
C'est ainsi que, main tenant la menotte de Karyl et Theo à ses côtés, Lynette finit par atterrir dans les ruelles de Bergerac à la recherche de THE cadeau pour le garçon.
Euh mais dites-moi Trehorgenisse, où pensez-vous qu'on va trouver ça dans le bourg ?
Quelle idée d'avoir un prénom aussi dur à prononcer aussi ? Par chance, Lynette ne lui avait pas donné le sien, ce qui éviterait des surenchères de sa part à lui niveau déformation de nom.
Taquine, elle l'était aussi assurément, sûrement encore un trait Corléonnien qu'elle avait dû hériter du côté de sa mère.
Vous connaissez Bergerac ?
Et qu'est-ce qu'on va bien pouvoir lui acheter ?
Vous lui montrerez comment ça marche ?
Faudra pas qu'il se coupe hein, le pauvre...
Ah, et accessoirement, elle était quelque peu bavarde, la ponette.
Oui, quelque peu...
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La porte se referme juste devant elle. Lynette l'ouvre d'un grand geste, légèrement essoufflée, avant de la faire claquer et de saluer la compagnie.
Une conversation démarre, sans réel sujet important, l'humeur est plutôt légère. On discute du cadeau qu'elle va faire au garçon pour avoir gagné la course, et Karyl leur montre ses talents de maniement d'épée en bois, vite contestés par l'homme assis non loin d'eux. La mainoise essaie tout de même de le convaincre que le garçon est super efficace devant un dragon, preuve en est du jour où il a terrassé celui qui avait enlevé Alycianne en taverne bourguignonne, et qui l'avait enfermée dans un placard à balai. D'ailleurs, Lynette se demande si Karyl a vraiment cru que c'était un dragon, hmm
Seulement, le véritable problème est soulevé : comment veut-il continuer à protéger sa promise avec une simple épée en bois hein ? Le cadeau est donc tout trouvé !
Et là paf le chien, sans vraiment s'y attendre, la conversation dérive vers un sujet nettement plus lourd, qui plonge Lynette dans un petit silence. Karyl leur balance innocemment qu'il a oublié son épée en Bourgogne mais que quand même, il en a déjà une de dague, offerte par Eikorc lui même. A deux doigts de s'étrangler, la Lynette. Si y avait bien un nom qu'elle n'aimait pas entendre, c'était celui là. Bon, vous me direz, elle est loin d'être la seule. La mainoise n'avait pas la rancune tenace, mais vu dans quelles circonstances elle avait rencontré le colosse la première fois, l'oublier était difficilement envisageable.
Sûr que la mainoise ne fut qu'une petite chose insignifiante pour lui, qu'il aurait pu écraser d'un coup de botte, faire tomber d'une pichenette. D'ailleurs, Lynette mettait sa main à couper qu'il ne se souvenait en aucun cas d'elle. Mais elle, oui. L'homme en question fut le premier à la confronter à la cruauté, au sang, à la mort. Elle se rappelle son regard fier, sa carrure, son assurance la première fois que ses prunelles se sont posées sur lui. Petite paysanne, petite herboriste, petite mainoise qu'elle était. Comment à dix-sept printemps, sortant tout juste d'une vie recluse dans sa forêt avec une Corleone qui la cachait du reste du monde depuis qu'elle était née, comment aurait-elle pu rivaliser. L'envie avait été grande de lui cracher sa haine au visage. Haine de voir son bourg ainsi pillé. Haine de voir les efforts faits par les paysans depuis des mois réduis à néant.
Sauf que bon, fallait l'avouer, Lynette était loin d'être une pro du maniement de l'épée, ni de toute autre arme d'ailleurs. Et ça n'avait pas vraiment changé avec le temps. La diplomatie, ça avait plus été son rayon d'ailleurs. Saouler les diplomates, elle savait faire. Empaler un méchant pas beau avec une arbalète, beaucoup moins.
Après ce petit interlude personnel se déroulant dans sa petite tête, quelques mots sont échangés sur le colosse, donc. Karyl est fan, ça se voit. Et surtout, il est pas du tout convaincu par ce que Theotrucmuch et elle-même essayent de lui expliquer. Tout en douceur, évidemment.
Comment expliquer au gamin la rancur qui l'anime depuis que ce géant avait débarqué à Mayenne ?
Comment lui dire qu'il est plutôt du genre à zigouiller des gens plutôt qu'à leur faire des "caaaaaaaaliiiiiiins" comme les ponettes ?
Et d'ailleurs, en a-t-elle le droit ?
Peut-elle écraser d'un coup de talon l'admiration qu'elle voit briller dans les yeux de Karyl ?
Définitivement, la réponse est non. On a tous droit à ses héros, même si ces derniers sont des fous furieux sans aucune pitié. Enfin, c'est en tous cas ce qu'elle pense du colosse, n'ayant pas vraiment pris la peine d'essayer de le connaître plus avant.
Heureusement la discussion repart vers un sujet plus badin, ou plutôt celle-ci est délibérément détournée par ses soins. La mine de Karyl n'est que trop renfrognée, et elle se mord la langue depuis quelques minutes pour ne pas lui crier la colère et le dégoût qu'elle ressent pour celui qui est venu s'en prendre à Mayenne, voilà bien longtemps maintenant. Mais il y a certaines choses que le temps ne fait pas oublier.
Retour à la case "et si on t'achetait une vraie arme" donc. Theobidule leur conseille un baudrier, Karyl tire la tronche. Et comme il est trop choupitou et que Lynette veut lui faire plaisir, elle ne peut que craquer en lui proposant de lui offrir l'arme qui va avec, forcément.
Et comme leur nouveau compagnon de taverne est celui par qui la bouderie est arrivée, c'est grand sourire aux lèvres que Lynette lui demande de les accompagner. En plus, ça lui permettra de paraître moins cruche pendant l'achat. Le vendeur pourrait très bien lui faire prendre une hache pour un arc. Enfin non, quand même, faut pas pousser mémé avec l'eau du bain, elle savait tout de même différencier les deux.
Mais il fallait que le cadeau soit de bonne facture, et pour ça, nul doute qu'elle aurait besoin de conseil.
C'est ainsi que, main tenant la menotte de Karyl et Theo à ses côtés, Lynette finit par atterrir dans les ruelles de Bergerac à la recherche de THE cadeau pour le garçon.
Euh mais dites-moi Trehorgenisse, où pensez-vous qu'on va trouver ça dans le bourg ?
Quelle idée d'avoir un prénom aussi dur à prononcer aussi ? Par chance, Lynette ne lui avait pas donné le sien, ce qui éviterait des surenchères de sa part à lui niveau déformation de nom.
Taquine, elle l'était aussi assurément, sûrement encore un trait Corléonnien qu'elle avait dû hériter du côté de sa mère.
Vous connaissez Bergerac ?
Et qu'est-ce qu'on va bien pouvoir lui acheter ?
Vous lui montrerez comment ça marche ?
Faudra pas qu'il se coupe hein, le pauvre...
Ah, et accessoirement, elle était quelque peu bavarde, la ponette.
Oui, quelque peu...
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