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Une prune au pays des mirabelles

Prune
[Rp ouvert à tous dans le respect de la cohérence. Sur les routes de Lorraine, en direction du domaine des Belrupt]


Le coche bringuebalait. Les ambres perdues dans le vide, le front posé sur la vitre froide, Prune observait sans réelle attention le paysage qui s’étirait à l’extérieur. Le temps était incertain mais le début du printemps n’était plus très loin. Chaque jour les rayons du soleil se faisaient plus audacieux et leur chaleur de plus en plus persistante. La neige, elle-même battait en retraite se répandant en flaques boueuses. Un doux sourire passa sur les lèvres rondes de la fillette. Elle n’avait qu’une hâte : qu’il s’installât ce printemps que l’on puisse enfin organiser ces fêtes champêtres qu’elle aimait tant. On dressait de longues tables ou on mangeait assis sur de grands draps blancs, posés au sol. On jouait, on écoutait les troubadours et les trouvères, on s’émerveillait devant les oiseaux de toutes les couleurs amenés par les marchands de passage. Un petit sursaut de plaisir secoua les fragiles épaules dissimulées sous un châle de velours blanc brodé d’or. Non pas qu’elle n’aimait pas l’hiver mais cette saison l’épuisait. Les soirées étaient trop longues et la tranquillité des veillées au coin du feu l’ennuyait. Heureusement que cet hiver, elle l’avait passé à voyager avec sa famille et que son infinie curiosité et son insatiable envie de mouvement avait été comblés. Sinon, elle serait certainement morte d’ennui.

La prune finit par se détourner de la fenêtre, laissant un rond de buée là où son minois s’était posé. Le coche dans lequel elle voyageait avait été aménagé selon ses goûts, tentant par la même lui faire oublier le mécontentement qui l’habitait lorsqu’elle pensait à ce voyage. Entièrement capitonné de blanc, l’intérieur était parsemé de touche d’or. Que ce soit sur les coussins brodés aux armoiries de sa famille ou la vaisselle finement ciselée dans laquelle elle mangeait, partout le précieux métal apposait sa marque. Doré, ambré, le monde serait mirabelle pour la prune. La blonde enfant tendit la main vers une coupe où se dressait un monticule de dragées scintillantes. La friandise rondement enfournée dans sa bouche, elle se tourna vers la gouvernante qui l’accompagnait durant le trajet. Laisser une enfant seule sur les routes par les temps qui courraient n’était pas des plus raisonnables.


« Arrivons-nous bientôt ? Ce voyage est terriblement long et ennuyeux ! »

La dame d’un âge certain s’agita quittant la somnolence qui l’avait envahi. D’un geste maternel, elle réajusta la couverture qui avait glissé des genoux de l’adorable fillette.

« Allons damoiselle, nous sommes parties depuis moins d’une heure. Vous qui ne rêvez que de voyages, vous vous ennuyez déjà ? »

Prune accusa la remarque avec une grimace mécontente et rétorqua que ce voyage était loin d’être celui de ses rêves et qui plus est, elle devait le faire seule et pour rejoindre un oncle qu’elle ne connaissait qu’à peine. Le Duc de Lorraine lui avait dit sa mère. Le Duc de Lorraine était son oncle. La nouvelle l’avait tout d’abord enorgueilli mais très vite, elle avait déchanté. Sa mère et son père avait pris la décision qu’elle devrait vivre près de lui afin de parfaire son éducation, chose impossible sur les routes. Elle avait eu beau pleurer, crier, supplier, promettre milles et unes concessions, rien n’y avait fait et elle s’était retrouvé dans ce coche en direction du domaine familial. Une mimique contrariée passa sur la bouille enfantine avant de se fondre dans un soupire. Il fallait bien s’y faire. Sa mère lui avait fait la promesse de lui rendre visite le plus souvent possible et son père lui avait dit qu’ils resteraient à jamais dans son cœur. Un nouveau soupire franchit les lèvres de la très jeune demoiselle alors que sa friandise finissait de disparaitre dans sa bouche. Ses ambres se ternirent très légèrement.

« Le connais-tu mon oncle ?
- Hé bien, il s’agit de sa Grâce, nouvellement élu, notre bon Duc de Lorraine. Il dirige également l’Université de Belrupt et bien que je ne le connaisse pas personnellement il parait que c’est un homme bon et juste. »


Prune marmonna, peu convaincue.

« Damoiselle, quoi qu’il advienne, personne ne saurait vous être désagréable.
- Je l’espère…Mais dis, Maman avait-elle prévenu de notre arrivée en ce jour ? Que je ne dorme pas dans une chambre glacée ce soir ! »


La gouvernante eut un petit haussement d’épaules et la prune lui demanda de prendre un parchemin parfumé, à la prune bien sur, qu’elle aimait tant et lui dicta quelques mots.

Citation:
De nous, Adorable et Adorée Damoiselle Prune de Beauregard-Belrupt
A notre très cher oncle, sa Grâce Duc de Lorraine, Sébastien de Belrupt

Je ne saurais me décider sur le début de cette missive. Devrais-je vous parler de ce long voyage où je ne fais que m’ennuyer ? Heureusement que j’ai ma gouvernante et des dragées bien entendu. J’espère également que vous, vous en avez dans votre domaine. Ou serait-il nécessaire de vous exprimer ma hâte de vous connaitre ? Bref, il n’empêche que je suis en chemin vers le domaine familial, si chaudement recommandé par ma mère. Je vous serais donc des plus reconnaissantes de bien vouloir me préparer une chambre, blanche et or si possible.

Avec toute mon affection,

Votre nièce.



La vieille dame gratta un moment le parchemin. Car il faut avouer que le texte dicté par la jeune enfant s’approchait plus de : « dis lui que je m’ennuie mais que je veux le voir, hein ! mais qu’heureusement que j’ai des dragées parce que je m’ennuie…dis lui que j’arrive et que je veux une chambre pour moi toute seule et dis lui aussi que je veux qu’elle soit blanche et or, bien sur ! surtout tu écris bien blanche et or hein ! » La lettre fut néanmoins rédigée et la fillette y apposa sa signature de son écriture encore hésitante aux rondeurs bien enfantines. Le messager fut appelé et après son départ au grand galop, la prune s’enferma dans le silence et se replongea dans la contemplation morne du paysage, au gré des cahots de la chaussée.
Sebastien_de_belrupt
La journée avait été rude et c'est seulement tard dans la soirée que l'homme regagna enfin son château. Les brigands, affamés par un hiver particulièrement rude, se faisaient nombreux dans la région, et dans l'Empire tout entier. Nombre de paysans, chassés de leur maison par des seigneurs peu scrupuleux, s'étaient retrouvés à parcourir les campagnes, se regroupant bientôt par groupes organisés. Après Saint-Claude, en Franche Comté, on parlait de Chambéry. Nul ne pouvait dire jusque quand ces perturbations dureraient, mais le Duc espérait de tout coeur que le calme reviendrait avec le printemps. D'ici là il faudrait être particulièrement attentif à la sécurité du Duché.

Epouisé par la journée, Sébastien fut heureux de voir se dessiner la façace du château dans l'obscurité, alors que le carosse passait les imposantes grilles de la propriété. Il descendit de la voiture alors qu'un valet ouvrait déjà la porte d'entrée. Qu'il était bon d'être chez soi pensa-t-il en retrouvant enfin un peu de sérénité. Il avait passé la journée à parcourir le Château en tous sens, réglant un à un les problèmes qui s'étaient accumulé par douzaines ce jour-là.

Bonsoir votre Grâce L'accueillit le valet.
Bonsoir ! Répondit dit-il, souriant.

Avant de dîner comme à l'accoutumée quand il rentrait, il monta rapidement les marches de l'escalier principal pour se rendre à son bureau où se trouvait son secrétaire, Montplaisir.

Bonsoir ! Pouvez-vous m'apporter le courrier je vous prie ? Il s'installa à sa table de travail. Dès qu'il aurait fini de lire son courrier, il pourrait enfin profiter de quelques instants de repos duement mérités.

Sire Montplaisir revint quelques instants plus tard avec plusieurs missives en main. Il le remercia et décacheta la première. La parcourant rapidement, il la rangea comme les suivantes avec les lettres de Lorrains soucieux de soumettre une requête au Duc. Il commençait toujours sa journée par y répondre, il lui était en effet plus facile de s'y plonger à l'aube qu'après une longue journée au Conseil.

La dernière missivie attira toutefois son attention, elle portait la signature de sa nièce, la fille de Cyann et Sabifax. Sa chère soeur l'avait prévenu de l'arrivée prochaine de sa fille en Château, et il était heureux d'avoir des nouvelles de sa petite nièce, qu'il n'avait plus vu depuis fort longtemps. Parcourant les lignes avec des yeux rieurs, il sourit en reconnaissant des phrases dictées par une jeune enfant qui cherchait à imiter la noblesse de sa mère. Bien qu'elle lui laissa une étrange impression d'enfant gâtée, Sébastien fut satisfait de voir le ton poli qu'elle employait et les formules d'usage, surement soufflées par celle qui avait retrascrit ses paroles.

Il prit sa plume et un morceau de parchemin afin de répondre à la missive




De nous, Sébastien de Belrupt, ton oncle,

Ma chère nièce,

Il m'est fort agréable de recevoir de tes nouvelles, et je me réjouis de te savoir bientôt au Château.
Tu es bien dévidemment la bienvenue parmi nous, nous t'attendons avec la plus grande impatience.

Des consignes ont déjà été donnée pour qu'une chambre soit préparée à ta convenance. J'ai demandé à ma chère fille, ta cousine, Blanche, de s'assuré que tout serait parfait pour ton arrivée.

Je te transmets toute mon affection,
Ton oncle,





Scellant la missve de son sceau, il la confia à un valet afin qu'elle soit transmise le plus rapidement possible.
Il quitta ensuite son bureau pour descendre à la salle à manger, où le diner ne tarderait pas à être servi.

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Université de Belrupt
Prune
Comment diantre pouvait-on manger une oie en plein voyage ? Prune observait d’un œil inquiet le morceau de viande qui baignait dans sa sauce irisée. Certes, cela avait l’air des plus appétissants. La peau de l’animal avait été dorée à point et une délicieuse odeur de sucre s’en échappait malgré le fait qu’il soit froid. Et la prune était ce qu’on pouvait appeler une gourmande invétérée. Mais là, secouée par les cahots de la route, épuisée par les longues heures déjà écoulées, l’estomac de la jeune demoiselle criait grâce et se fermait à toute sorte de nourritures. Elle réprima donc une nausée acide et repoussa son plat dans une grimace. La gouvernant ne dit mot et replaça le plat dans le panier dont elle l’avait sorti. Cela faisait plusieurs heures que la petite n’avait plus dit un mot et ses traits s’étaient lentement tiré sous le coup de l’épuisement et des sentiments qui semblaient régner maitre en elle. La vieille dame esquissa un geste réconfortante que la gamine sentit à peine. D’un mouvement las, celle-ci se roula en boule sur la banquette blanche.

Un messager leur était parvenu quelques temps auparavant, porteur d’une missive scellée. Prune l’avait saisie et décachetée. Le sceau ne lui était pas étranger mais elle ne pouvait dire à qui il appartenait. Sa curiosité fut cependant rapidement apaisée lorsqu’elle parcourut avec la lenteur de l’âge les lignes soigneusement tracés par son oncle. C’est alors qu’elle s’était rendu compte de l’imminence des choses. Elle allait vivre chez son oncle. Elle avait quitté ses parents et son frère à jamais. Oh oui, elle les reverrait, sa mère le lui avait promis mais c’en était fini des longues parties de rigolades, des poèmes récités par sa mère tard le soir, des longs moments où l’on discutait des choses des grands et où sans cesse, Prune interrompait son père pour lui poser des questions. Fini le temps passé à entortiller ses doigts dans l’or des cheveux de sa mère, fini le temps de rire aux remarques de son père sur la cuisine absente de sa mère. Une part de son enfance, en quelque sorte, s’achevait par ce voyage sinistre. Des larmes brillèrent au coin des yeux de la petite. Elle avait beau faire la grande et tenter de surmonter tout cela, elle devait s’avouer que pleurer dans les bras de sa mère lui aurait été d’un grand secours. Mais dans un reniflement sonore, elle se retint. Une damoiselle ne devait pas ainsi se laisser aller à des sentiments si faibles. Elle devait rester digne de la noblesse de celle qui l’avait enfanté. Terrassée par un chagrin qu’elle ne pouvait laisser s’exprimer, la blonde enfant ferma les yeux et s’enfonça dans un sommeil troublé.

Ce fut un rayon de soleil timide qui en se posant sur sa joue la réveilla. Ses rêves n’avaient été que cris et pleurs et la bouille enfantine de la prune était marquée de fatigue. Dans un marmonnement sourd, elle se redressa et bailla à s’en décrocher la mâchoire. Tendant ses petits bras, elle s’étira et mit un peu d’ordre dans sa tenue. Sa robe avait été froissée mais quelques lissages de la main et elle fut presque présentable. Sa gouvernante éveillée elle aussi, posa sur elle un regard plein de tendresse.


« Bonjour damoiselle. Votre sommeil a été agité n’est ce pas ? Venez par ici. »

Dans un geste maternelle, elle l’attira à elle et la prit sur ses genoux. S’emparant d’une brosse souple, elle se mit à la coiffer lui susurrant des mots doux. Elle lui promit que tout irait pour le mieux, que le domaine lui plairait certainement, qu’elle allait découvrir une nouvelle branche de sa famille et que celle-ci l’aimerait plus que tout. La prune hocha lentement la tête et bien que sa tristesse fût encore bien présente en elle, un nouvel espoir naquit en elle. Après tout, son oncle ne lui avait-il pas écrit qu’elle serait la bienvenue chez lui et elle avait une cousine qui portait le nom de Blanche, elle ne pouvait pas être foncièrement mauvaise avec un tel nom.

Soudain, le cocher lui cria que les grilles du domaine étaient en vue. Surprise, curieuse et anxieuse, Prune s’échappa des mains de sa gouvernante et alla coller son minois contre la vitre froide. Le domaine était en effet quelques minutes à peine. Une excitation terrible s’empara d’elle et la petiote ne put tenir en place. D’une main, elle lissait sa robe blanche, de l’autre elle entortillait une mèche d’or, tout en mâchonnant une dragée qu’elle avait enfournée comme par habitude. Les grilles furent passées et déjà le coche s’arrêtait. Prune laissa échapper un long soupir d’excitation et à peine, les portes furent elles ouvertes que déjà, elle sautait à terre.

Minuscule dans sa robe scintillante, frissonnante sous la bise froide de l’aube naissante, elle se tint devant les portes de la demeure familiale, le menton relevé et un parfait émerveillement dans les yeux. Sa nouvelle vie s’ouvrait devant elle.
Prune
Sa nouvelle vie l’attendait…mouais pour l’instant c’était surtout elle qui l’attendait sa nouvelle vie. La bouille de la gamine se fondit en une grimace de mécontentement qui lui étira les traits. Depuis combien de temps était-elle plantée là dehors, offerte à la brise froide ? Voulait-on donc qu’elle attrapât mal ou qu’elle fît demi-tour ? Agacée, elle tapa du pied et se retourna vers le coche où patientait humblement sa gouvernante. Celle-ci observait d’un air inquiet les portes de la demeure qui restaient closes. L’aube était désormais pleine et déjà le soleil déchirait son voile pastel. Les arbres bruissaient tranquillement dans des chuintements doux. Tout était si calme. Là où aurait dû être le frémissement fébrile de l’arrivée de la jeune Beauregard d’Youville de Belrupt, il n’y avait que le silence.

Prune prit soudain peur. Et si on l’avait oublié ? Et si ce n’était pas le bon domaine ? D’un pas pressant, elle rejoignit sa gouvernante, le minois anxieux.


« Nous serions nous trompées de lieux ? Ce sont pourtant là les armes de la famille Belrupt, non ? »

La blonde enfant tendit la main vers le blason qui ornait la lourde porte ferrée. La vieille dame hocha la tête dans un mouvement d’incompréhension.

« Je ne comprends pas ma damoiselle. Votre oncle nous avait pourtant dit qu’il nous attendait. Peut être est-il trop tôt et que le personnel n’est point encore levé…Je ne saurais le dire… »

Prune chercha alors du regard le cocher qui haussa les épaules et garda le silence. Le faible espoir de vivre une nouvelle vie ici fondit comme neige au soleil dans le cœur de la fillette. Elle sentit des larmes amères envahir ses ambres brillantes et elle se pinça fort les lèvres pour ne pas se laisser aller à ces sentiments. La fatigue et le désespoir qui menaçaient de l’engloutir se firent plus présents et le minois de la petite blêmit. Qu’allait-elle faire maintenant ? Faire demi-tour ? Mais pour aller où ? Peut être pourrait-elle rejoindre le village et trouver une auberge digne de sa condition. Non ! Elle ne leur ferait pas cet honneur ! Sa mère lui avait dit tant de bien sur ce domaine familial et son oncle s’était engagé auprès d’elle. Il lui devait protection et ce n’étaient pas ces fichus portes qui le tiendraient éloigner de son devoir envers elle.

Décidée, la prune se redressa et fit un pas aérien et gracieux vers la demeure toujours silencieuse. Elle ajusta sa tenue, lissant sa robe et replaçant son manteau, remit en place une mèche rebelle qui s’échappait de sa coiffure, releva son petit menton, gagnant par la même les traits altiers de sa mère. En quelques pas, elle fut face à la lourde porte. Et maintenant ? Regroupant toutes ses forces, ses mains se tendirent vers l’énorme poignée et avec toute sa détermination, Prune de Beauregard d’Youville de Belrupt tira. Ses articulations blanchirent alors que sur son visage se peignaient les marques de l’effort. Se campant bien sur ses petons, elle s’arqua contre la porte. Mais la porte, dédaigneuse et sure d’elle, résista. La petite accentua encore son effort mais rien n’y fit. Elle dut donc abandonner. La porte l’avait vaincue.

Blessée dans sa jeune fierté, la prune ne se retourna pas vers sa gouvernante mais continua de fixer l’odieuse porte qui refusait de s’ouvrir. Les différentes possibilités qui s’offraient désormais à elle étaient minces et elle répugnait à s’y abaisser après cet échec cuisant. Soit elle frappait, cognant ses fragiles et blanches menottes contre le bois ferré, assez fort et assez longtemps pour qu’on l’entendit. Soit elle se mettait à hurler jusqu’à ce qu’elle réveillât quelqu’un à l’intérieur de l’immense demeure. Incapable de se décider pour l’une ou l’autre de ces sordides extrémités, Prune se laissa aller à une réaction digne de son jeune âge. Dans un profond et long soupire, elle s’assit sur les marches de la demeure et croisa les bras, une attitude entêtée et sombre mais magnifiquement enfantine. Sa gouvernante n’osa pas s’interposer ou même bouger face à la colère sourde de la gamine, sachant que tout geste de sa part, enfoncerait en peu plus Prune dans son entêtement. Un long silence s’installa donc à nouveau aux portes des Belrupt.
Suisse38
La paille, ça elle connaissait bien, les auberges fermaient souvent tôt le soir dans les villages, il n’y avait que les lieux malfamés qui restaient ouverts. Pour économiser parfois quelques pièces, ou éviter les bouges elle trouvait toujours une grange pour y passer la nuit. Les voyages n’étant pas toujours enrichissants aussi bien du coté financier que celui des rencontres.

La nuit avait été réparatrice dans l’écurie du château. Dans son profond sommeil, celui qui laisse couler un filet de bave aux coins des lèvres parce que le corps ne supporte plus la fatigue et que la nuit se passe sans rêve, elle n’avait pas entendu, à l’aube l’attelage arriver. C’est un rayon matinal qui la réveilla.
Beau-sire, debout lança un braiment joyeux lorsqu’elle se leva. L’animal intelligent avait assimilé que la première chose que Suisse faisait au matin c’était s’occuper de lui. Ils avaient partagé ensemble plusieurs nuits et journées depuis qu’ils étaient partis du Limousin.
Assise sur son ballot de paille, elle savait aussi ce que Beau-Sire demandait. Rejetant la couverture elle se leva, s’étira et répondit à son compagnon à quatre pattes,

-Patiente, patiente, je ne sais où se trouve le picotin, le foin, laisse moi un peu de temps.
A travers l’écurie elle chercha sa pitance, dans un coffre elle trouvât l’avoine.
Soigner une bête en robe de soirée n’était pas très aisé mais l’animal eu tout ce qu’il fallait, avoine, foin, paille fraiche et eau. Il n’avait pas l’élégance de la cavalerie du château mais il était à elle et puis elle l’aimait.

-Cette après midi nous irons faire le tour du domaine.

La fraicheur matinale la saisît lorsqu’elle se retrouva dans la cour, le soleil naissant promettait une belle journée. Elle remontait de bonne humeur l’allée pour se rendre aux cuisines voir Marthe.
Un merle sifflait le printemps, appelant sa belle à le rejoindre dans les haies. Le château était silencieux. Le vicomte et sa famille devaient encore dormir. Elle aurait assez de temps, pensait elle pour manger et changer cette robe encombrante.

Au bout de l’allée de l’écurie, séparés par une rangée de buis deux chemins se formaient. A la croisée, l’intendante, s’arrêta pour admirer le château dans la clarté du matin.
Quelle ne fut pas sa surprise de voir sur les marches une enfant assise en robe blanche, les bras croisés, une adulte près d’elle immobile et un homme perché sur une voiture de voyage au milieu de la
cour.
-Le vicomte n’a rien dit à ce propos, murmurait la jeune femme. Elle se dirigea vers ces visiteurs inconnus.
Au pied des marches, regardant l’enfant à la mine renfrognée elle lui demanda.

-N’as-tu pas froid ainsi, le séant posé sur la pierre ?
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Prune
Soupirs exaspérés et marmonnements incompréhensibles. Voilà les seuls bruits qui se faisaient entendre devant la porte de la demeure des Belrupt. Engoncée dans son entêtement enfantin, Prune voulait que le monde entier sût que la situation dans laquelle elle se trouvait l’incommodait au plus haut point. Dans ses ambres plissées passaient des éclairs brûlants. Il allait en falloir des dragées pour lui faire oublier cet incident ! Et puis diantre, ce qu’il pouvait faire froid ! Rageuse, elle se frotta les mains contre la douceur de sa sublime tenue, tenant d’y trouver une parcelle de chaleur puis retrouva rapidement sa position de siège. Car oui, c’était bien un siège qu’elle tenait et ce jusqu’à ce que quelqu’un daignât venir lui ouvrir.

« N’as-tu pas froid ainsi, le séant posé sur la pierre ? »

Sans même détourner la tête, la voix fluette s’éleva de la gorge d’albâtre de la petiote.

« Bien sur que oui que j’ai froid ! Comment se pourrait-il qu’il en soit autrement ? Cela fait des heures que j’attends icelieux, sur ces marches glacées, sous la bise et ce soleil qui a décidé de ne rien réchauffer du tout ! »

Puis comme par enchantement, l’information que cette voie nouvelle ne parvenait ni de sa gouvernante qui s’était levée à l’approche de l’inconnu, ni de son cocher qui ne pouvait avoir ce timbre, arriva à la cervelle de la prune. Elle se leva d’un bond surpris et se recula de quelques pas vers son coche, cherchant la protection de ces gens. Un malgripe ! Le regard de la petite coula sur la dame qui l’observait avec autant de curiosité que de surprise. Un malgripe en robe…Bah cela se pouvait. Il paraissait que certains des coupe-jarrets les plus connus étaient des femmes alors surtout rester sur ses gardes. Un nouveau et discret pas vers l’arrière la rapprocha un peu plus de sa gouvernante. Son minois se para d’un masque distant et suspicieux.

« Qui donc êtes vous ? Seriez-vous un gens du château ? »

Rassemblant tout son courage, Prune releva le menton plongeant ses ambres dans le regard de l’inconnue. Tout en restant sur ses gardes, elle la dévisagea. De la paille s’accrochait encore à ses vêtements et elle ne semblait pas de la première fraicheur. La petite se retint de plisser le nez, ne voulant pas paraitre malpolie face à cette personne dont elle ignorait tout. Si ca se trouvait, elle était peut être de haute naissance. Il y en avait de tout genre, après tout.

Malgripe : gredin, voleur
Suisse38
Le ton sur lequel la petite répondit sur la fraicheur de son derrière, la façon dont elle se réfugiait près de sa nourrice amusait Suisse. A voir sa tenue et son équipage, la gamine devait avoir un lien avec la noblesse ou descendre d’une famille de riches bourgeois. Peut être un peu capricieuse à force d’être trop gâtée, sure de son rang à l’évidence. A travers la pointe de prétention sous son minois elle avait le regard franc.
-Qui suis-je ? répondit Suisse.
-Je suis… je suis…l’oreille du château, les yeux des couloirs et des corridors. J’ai le pouvoir de remplir les écuelles et les aiguières, d’ouvrir les portes ou de les laisser fermées. Je peux, si tu le désires, t’inviter aux cuisines pour te réchauffer ou dire au vicomte si l’invité à le mérite d’être reçu ou pas... Mais vois-tu jeune damoiselle, Monseigneur doit dormir et je ne sais qui annoncer.

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Sebastien_de_belrupt
L'aube illuminait le château d'une douce lumière, à peine moins pâle que lune, lorsque que le Duc ouvrait les yeux. Il s'étira quelques secondes avant de se lever et d'ouvrir les rideaux. Son regard parcourut le parc à l'arrière du château tandis qu'il rêvassait. La journée serait moins chargée qu'à l'accoutumée, il s'était en effet accordé un dimanche chez lui, le premier depuis le début de son mandat.

Abandonnant la fenêtre, il alla se changer et se préparer. Une tenue sans ornement lui fit le plus grand bien. Les tenues cérémonieuses et chargées de dorures et pierres étaient pénibles à porter et c'était une joie de pouvoir revêtir des vêtements confortables et épais.

Il descendit dans le salon, où la cuisnière lui avait déjà préparé une collation pour le petit-déjeuner, souriant, il s'installa au petit secrétaire pour manger un peu. Son repas frugal achevé, il gagna son bureau où, comme tous les matins, il s'attaqua à la lecture de son courrier.

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Université de Belrupt
Prune
Les oreilles tendues vers la tirade de l’inconnue, la prune ne cessait de jeter des regards inquiets à sa gouvernante. Celle-ci était sur ses gardes mais ne semblait pas si tourmentée qu’elle aurait dû. La blonde enfant comprit donc qu’elle ne devait pas courir un si grand danger. Son cocher n’était même pas descendu de voiture. Rassérénée, elle releva le menton et posa ses ambres désormais limpides sur la dame. Son visage s’était peu à peu détendu et à l’entente des mots « écuelles », « aiguières », « cuisine » et « réchauffer », elle eut un petit sursaut. Ses mains passèrent rapidement, presque imperceptiblement sur son estomac. Il faut dire qu’il se faisait faim en plus du froid qui lui broyait les os. Prune baissa très légèrement la tête, réfléchissant à toute vitesse.

*Bien, elle parle un peu trop pour être un malgripe. Cependant, elle ne m’a pas donné son nom, ce qui pourrait cacher un mauvais fond. Et puis, elle ne semble pas très propre…Oui mais, elle dit pouvoir ouvrir les portes…Mais est-ce la vérité ? Et si elle me mentait pour obtenir mon nom et m’enlever ? Non, mes gens ne la laisseraient pas faire. Mon cocher sait se défendre et donnerait sa vie pour moi alors, je ne crains rien…Bien…*

Les lèvres purpurines de la gamine frémirent puis plongeant à nouveau l’or de son regard sur l’inconnue, elle reprit la parole. Par habitude, elle lissa le devant de sa robe blanche et or. Se justifier devant une parfaite inconnue ne lui plaisait que peu. De plus que cette inconnue la tutoyait avec familiarité. Sa grimace se fit pourtant discrète et son ton polie et empreint de la noblesse de son rang.

« Je suis Prune de Beauregard d’Youville de Belrupt, fille de monseigneur Sabifax et de dame Cyann. Je suis ici pour rencontrer Sa Grâce, Sébastien de Belrupt qui est mon oncle. Je dois être placée sous sa tutelle en ce jour. »

La suite de sa remarque, à savoir « mais il semble avoir trop de choses en tête pour se souvenir de moi », mourut sur sa langue qu’elle mordit pour ne pas laisser voir ce que lui inspirait cette attitude. Retenant un soupir fatigué, elle poursuivit.

« Maintenant, si vous avez réellement tous les pouvoirs que vous disiez avoir, je vous serais gréée de prévenir le Duc afin que je puisse me réchauffer et me sustenter quelque peu. »

Prune se tint droite, la tête haute malgré la demande qu’elle venait de formuler. Elle détestait quémander mais la situation l’exigeait. Aux grands maux, les grands moyens.
G_de_b
Voila qu'en lisant et relisant ses anciens courriers afin de les classers Guillaume remarqua une note dans l'un de ceux-ci qu'il n'avait pas remarqué.
Heureusement que l'évêque avait relu ses courriers
La jeune prune qui souhaitait le sacrement du baptême pour elle même avait écrit à l'évêque et l'avait invité à venir en discuter avec elle et ses tuteurs

Il ne savait pas trop ou chercher à vrai dire. On l'avait invité en gargote, il ne trouva pas vite puis remarqua alors enfin le lieu de l'invitation et s'y présentait
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LIEN TEMPORAIRE: LE MARIAGE IG
Prune
Réponse faite avec l’accord de la joueuse de Suisse38


Suisse eut un nouveau regard amusé. Il était évident que la petite savait qui elle était et son caractère ne paraissait pas des plus humbles. Mais n’était-ce pas le lot de toutes les jeunes demoiselles un peu trop bien née ? Et puis, elle pouvait comprendre le mécontentement de ce petit bout de chou qui attendait dans le froid depuis quelque temps déjà. Son ton se fit donc presque tendre, bien qu’un brin d’amusement y perçait aisément.

« Oh, hé bien Damoisellle Prune, Monseigneur le Vicomte ne m’avait pas prévenu de votre arrivée mais nous allons arranger cela. Si vous voulez bien me suivre. »

D’un pas leste, elle se retourna vers la lourde porte ferrée qui comme par magie s’ouvrit devant elle. La prune réprima une grimace mécontente. Elle s’échinait depuis des heures et voilà que cette saleté de porte s’ouvrait toute grande sans qu’on en l’ait même touché. Néanmoins, son agacement fondit comme neige au soleil lorsque le hall d’entrée s’offrit à ses yeux. Avec un geste rapide pour ses gens, elle s’avança à la suite de la dame dont elle ignorait toujours le nom. Elle était pourtant remontée brutalement dans son esprit avec cette ouverture de porte.

La prune entra dans le hall richement paré d’un lourd tapis et de tentures finement travaillées. Une douce chaleur se répandait des torches et de la large cheminée où ronronnait un feu ravivée au matin. La blonde enfant inspira profondément et laissa échapper un léger soupir de bien être. Voilà qui correspondait plus à ce qu’elle se faisait d’une arrivée au Château. Pourtant déjà l’inconnue s’était engagée dans un couloir où brulaient des chandelles de cires odorantes. Prune se précipita à sa suite, retirant son manteau qu’elle passa à son bras et réajustant d’un geste précis sa robe immaculée. Ses gens restèrent eux humblement dans le hall, l’encourageant de leurs regards.

Enfin, elle était parvenue à entrer et elle allait rencontrer son oncle. Son anxiété qui s’était tue face à sa colère passagère lui revient brutalement au visage, avalant ses couleurs pour lui laisser un reflet blanchâtre. Le voyage ne l’avait-il pas trop fatiguée ? Etait-elle présentable ? La petite se mordilla les lèvres déjà vermillon avant de se reprendre. Bon tout d’abord, souffler un grand coup. Puis reprendre contenance. Allons il ne faudrait pas montrer un minois angoissé à sa Grâce le Duc tout de même. Ses ambres se perdirent dans la décoration sobre du couloir. Les pierres avaient été taillées avec soin et dans les murs se détachaient de larges ouvertures couvertes afin de limiter l'entrée du vent froid de l'hiver. Les pas de la prune résonnait, faisant écho à la dame qui la précédait de quelques pas. Elle entendait des pas et des chuchotements mais personne ne se montrait. Pourtant des portes s’ouvraient et se fermaient, leurs gonds grinçant très légèrement. Les gens se cachaient-ils ou étaient-ils discret au possible ?

Soudain, l’inconnue se figea devant une porte. Elle devait parfaitement connaitre les habitudes du Duc car à aucun instant, elle n’avait demandé où il se trouvait, ni même chercher à joindre un serviteur ou qui que ce soit. De trois coups secs, elle frappa à une lourde porte et annonça.


« Une visite pour sa Grâce. Damoiselle Prune de Beauregard d’Youville de Belrupt. »

Puis sans un mot de plus, elle s’effaça, laissant seule la petiote. Nerveusement, celle-ci tritura le bord de sa robe puis redressa le menton et ferma un infime instant les yeux. Courage, prune, courage ! Lorsqu’elle les rouvrit une détermination certaine y brillait et elle avait cessé de torturer le satin de sa robe.
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