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Les guerriers divins ou la Terrible histoire de la meute

Anseis
[note HRP]


Ce topic a pour but d’appliquer le concept du jeu de rôle « classique » (i.e. tel qu’il est pratiqué traditionnellement) aux Royaumes Renaissants. Par là, j’entends souligner que si chaque joueur qui participe a pleine liberté de ses mouvements, la trame de départ ainsi que les personnages non-joueurs sont contrôlés par un maitre de jeu (rôle que j’assume en ce début de campagne). La campagne sera découpée en plusieurs aventures (ou chapitres) chacun indépendant pour permettre aux joueurs de joindre ou quitter l’histoire, et permettant changement de maitre de jeu.

Ce RP est semi-fermé. Cela sous-entend qu’il est préférable de ne pas entrer dans l’histoire et poster intempestivement. Nous voulons au possible garder cohérence dans l’histoire, éviter les faits d’actes qui détruiraient la trame avant le dénouement final, et assurer que chaque participant s’amuse sans se trouver lésé. Maintenant, il ne s’agit non plus de jouer juste en petit groupe. Si l’histoire que vous lisez vous plait et si vous pensez que votre personnage pourrait y participer, je vous remercie de me contacter afin que je vous fournisse plus d’information sur la campagne et vous permette d’entrer dans l’histoire.


Les guerriers divins ou l’histoire de la meute est une campagne qui réunira plusieurs joueurs selon un fil conducteur commun. Les bases de la campagne sont écrites (et basées en partie sur l’Histoire afin de gagner en crédibilité et assurer une certaine logique) et seront révélées au fur et à mesure que l’histoire se développe. Plusieurs groupes se confronteront dans cette Campagne. Il n’y a pas vraiment de bon ou mauvais choix : chaque groupe défend ses intérêt et fais ce qu’il lui semble le mieux (ou le plus juste). Chaque personnage sera libre de rejoindre le groupe qui lui correspond le mieux, sachant que les relations avec les autres personnages peuvent en être altérées.

La première partie Unfinished Business aura pour but de planter le décor et permettre aux personnages de se rencontrer. Un petit background essentiellement en flashback donnera le ton de la campagne sans trop en révéler.

J’espère que vous prendrez autant de plaisir à lire ce sombre chapitre de l’histoire des Royaumes Renaissants que nous essaierons d’en prendre à l’écrire.

--Background
[ Mars de l’an de grace Mil Quatre-Vingt Dix Huit]






Seul dans sa tente Godefroy, poings appuyés sur la modeste table de bois, observait un grand parchemin étalé sur lequel une carte avait été tracées

Mon Seigneur ! Mon Seigneur !

Inutile de crier ainsi, stupide serviteur. Il me connait et sait que je ne le dérangerai pour une broutille…. Godefroy !!

L’homme se retourne, sourcils froncés. Il avait pourtant donné un ordre clair. Personne ne devait le déranger. Il avait cependant reconnu la voix de Gilbert de Tournai un de ses compagnons d’armes. Si l’homme passe outre l’ordre, c’est qu’il y a affaire sérieuse.


Godefroy ! Nous avons eu un petit problème contre l’armée d’Alep

Alep ! Par Christos Gilbert, que me dis-tu là ! Nous les avons vaincus il y a plus d’un mois. Le peu qui a réussi à s’enfuir ne présentait danger que je sache !

C’est ce que je croyais aussi…jusqu’à ce matin …

Godefroy fronça de nouveau les sourcils, continuant de fixer Gilbert sans mot dire.

Letold vient de rentrer. Un groupe avait réussi à atteindre un petit port à l’ouest d’Antioche dans l’espoir de rejoindre Tarse. Letold encercla les lieux avec ses chevaliers pour bruler le village et punir au passage les infidèles. Mais …

Mais ? Parle donc Gilbert !

Le village abritait des Hashashins… juste cinq ou six si j’en crois son récit. Une vingtaine de nos plus braves sont maintenant enterrés sur les ruines du village. Letold fut chanceux : il s’en est tiré avec une estafilade.

Par Aristote, maudits Hashashins…. que ne donnerais-je pour avoir ne serait ce qu’une dizaine comme eux dans nos rangs
--Background
[ Vingt Septième jour de Juillet : an de grace Mil Cent Quarante Huit]






Thierry d’Alsace ferma de nouveau les yeux, espérant se réveiller de ce cauchemar. Mais ses efforts le confirmèrent : il était bien éveillé.


Dieu… pourquoi les ai-je donc cru ?

Voilà qui est fort facheux

Il jeta un regard dédaigneux vers le prêtre qui avait gardé un visage de marbre durant toute la bataille, et qui venait d’ouvrir la bouche.

Facheux ? Facheux ? …. Christos !!!
Tes guerriers divins qui devaient nous donner victoire viennent tout bonnement de massacrer mes hommes ! Nous n’avons même plus besoin des infidèles pour perdre nos batailles !!! A quoi bon ces « guerriers » si vous ne pouvez les contrôler

Seigneur Thierry, ne me reprochez donc la volonté du Très Haut. Auriez-vous été plus pieux, ce plan aurait marché. Tout ne fut pas inutile. Nous savons maintenant que la drogue n’était leur secret. J’ai par ailleurs réussi à mettre la main sur un manuscrit fort intéressant. Il est possible que leur origine soit plus proche de chez nous… le grand nord.

Le visage de Thierry d’Alsace se ferma. Il venait de voir se faire massacrer une bonne partie de ses compagnons d’armes par une horde de drogués et la seule chose qui importait à ce moinillon était sa prochaine « expérience »…

Soit ! Rentrons donc en Europe. Nous n’avons plus rien à faire ici maintenant. Je vais donc devoir annoncer la nouvelle au Roy Louis. Nul doute qu’il appréciera tes conclusions. Quant à toi … je te recommanderai chaudement pour cette mission dans le grand nord !

Thierry d’Alsace fit pivoter son cheval pour se diriger vers le campement où le Roy Louis le Septième résidait, laissant le moine qui avait perdu toute couleur tenter vainement de reprendre son souffle
--Background
[France, prieuré d’Acquigny. Avril Mil quatre cent trois]




La silhouette encapuchonnée toqua à la porte trois brefs coups. Sa carrure ne laissait aucun doute sur le fait qu’il s’agissait d’un homme. Sa prestance soulignait son origine noble ou militaire. La porte s’ouvrit et le moine qui l’accueillit eut juste le temps de faire un pas de côté pour éviter le Seigneur qui entra sans même un salut. La capuche fut rabaissée, révélant les traits de Georges de la Tremoille. Le comte de Guînes suivi le jeune moine dans les méandres du bâtiment principal. Ils s’arrétèrent devant une porte que le moine ouvrit. Le comte passa la porte et vint rejoindre un siège encore libre.

La Trémoille ! Nous n’attendions plus que vous !

Trèves de civilités baron. C’est donc ici ?

Oui, comme vous pouvez le constater

Que donnent les résultats ?

Et bien, nous n’en sommes qu’à la première année. Ils sont encore bien jeunes, mais nous avons bon espoir !

La Trémoille leva les yeux au plafond dans un soupir

C’est maintenant que nous en avons besoin ! Pour chasser une bonne fois pour toute ces maudits Anglois !

Une autre voix s’éleva

Allons Georges ! Vous le savez bien que nous avons l’appui de l’église uniquement si nous les utilisons contre les infidèles. Il n’a jamais été question de se battre entre Aristoté…

Balivernes ! Qu’ont donc donné ces maudits traitres pour cette armée ? Alors que nous y travaillons depuis plus de deux siècles. Au moins, nous montrerons que Dieu est de notre coté si nous les utilisons et vainquons

George, vous êtes encore bien jeune et impulsif. Ne comprenez vous donc pas ? Nous ne le pouvons !

Dans un grognement, le jeune Seigneur de Guînes quitta sa chaise

La patience ne donne des victoires. Mais je saurais me montrer patient. Qui sait ? Peut-être votre ainé me comprendra mieux lorsqu’il sera en âge de vous remplacer ?

Le Seigneur qui avait pris parole pour les autres se leva d’un bond à ces mots.

La Trémoille, je vous le dis en tant qu’ami et ne le répèterai deux fois. Laissez Thibaud-Xavier hors de cela…

George de la Trémoille répondit par un sourire, puis quitta les lieux, bousculant le moine qui attendait près de la porte sans s’excuser.
Anseis
[France, prieuré d’Acquigny. Avril Mil quatre cent cinquante ]




Le prêtre marchait parmi les ruines de ce qui avait été jadis un prieuré… et bien plus. Il se couvrit un instant le visage et détourna la tête lorsqu’il tomba face à un corps à moitié décomposé, à moitié mangé.


Seigneur…

Mon Père Mon père

Je suis là … qu’y a-t-il Gaudric ?

Mon père …hum …


Le jeune Gaudrick blêmit à la vue du corps

Oui, encore un qui fut oublié…n’oublie pas de le signaler. Pourquoi me cherchais-tu ?

Le jeune homme hocha la tête puis reprit d’une voix chevrotante.

Les tailleurs de pierre sont arrivés. Ils ont bon espoir de pouvoir finir la reconstruction avant l’hiver.

Le prêtre fut soulagé. Ses ordres étaient clairs. Ce prieuré devait être remis sur pieds au plus vite pour montrer aux Anglais que leur vile attaque vengeresse avait été vaine. Des anglais ? Lui-même doutait de l’histoire. Comment des anglais auraient-ils pu être présents aussi près de Rouen ? Et pourquoi attaquer un prieuré ? Par ailleurs, les quelques corps qu’il avait pu trouver depuis son arrivée ne ressemblaient à ceux de moines ou encore de soldats anglais… Dans un haussement d’épaules, il se contenta de chasser ces dernières pensées de son esprit. Après tout, il avait des ordres venant de ses supérieures et il savait que la vie ne serait que meilleure s’il ne se montrait trop curieux. L’évèque lui avait laissé entrevoir la possibilité d’être en charge d’une abbaye dans le Maine si tout se passait selon les plans. L’homme sourit en haussant les épaules. Quelques mois difficiles et il pourrait enfin savourer la paix à laquelle il aspirait tant …

--Background
Un travail à finir

Vous pouvez oublier les fantômes de votre passé mais eux, soyez-en sur, ne vous oublient pas.

prologue

On l’appelait « le vieux ». Il n’avait jamais donné son nom depuis qu’il était arrivé il y a de cela près d’une dizaine d’années et nul n’avait jusqu’alors osé lui demander plus d’une fois. L’homme d’abord prodigue avait dépensé généreusement ses écus pour se payer logis, nourriture et parfois galante compagnie. Des regrets le rongeaient-ils ? Toujours est-il qu’il donna aussi son lot de piécettes à l’église.

Cela faisait bien longtemps maintenant que son pécule avait été épuisé, et bien longtemps qu’il ne se contentait plus que de rappeler ses largesses passées et promettre plus. Les gens se contentaient de ses paroles et ses récits en guise de paiement. Il faut dire qu’il se contentait souvent de peu. Soupe de navet et herbes, parfois morceau de viande. Et puis, malgré son âge, il était resté de ces hommes à qui l’on ne dit non. Fort et sec avec une lueur malsaine naissant parfois dans son regard : telle était la description qu’on aurait pu lui donner.

Ce matin là, le vieux se contentait de regarder la pluie couler le long de la vitre de verre grossier. Il en était déjà à sa deuxième bouteille d’hypocras. Signe - les habitants l’avaient appris rapidement – qu’il ne fallait pas l’ennuyer ce jour là. Le tavernier se contenterait de lui apporter bouteille après bouteille à chaque cri de l’homme, qui finirait probablement la journée dans le fossé… et c’était bien mieux pour tout le monde.

Alors que le tavernier que l’on nommait Jean ou Jannot soupirait justement intérieurement d’être tombé sur tel jour – c’était mauvais pour les affaires – il tourna la tête vers la porte lorsque cette dernière claqua. L’étranger n’était généralement de ceux qui s’arrêtaient dans les petites bourgades. Son sombre mantel recouvert de pluie, révéla les riches atours dont l’homme était vêtu lorsqu’il fut enlevé. Le mantel vint rejoindre la chaise la plus proche. Sans même un salut à Jean qui espérait voir enfin son chiffre d’affaire s’améliorer, le nouveau venu s’approcha du vieux.

Jeannot repartit d’un soupir et commença à s’intéresser aux verres qu’il essuyait lorsqu’un cri attira son attention.

Galinn !

Jean eut juste le temps de tourner le regard pour voir le changement qui s’était produit sur la face du vieux à ce nom. Même à contre jour, il pouvait voir combien le vieux avait blanchi, de légères gouttes de sueur naissant sur son front. Jamais n’avait-il mérité aussi bien son surnom alors qu’il semblait avoir pris vingt ans en l’espace de quelques secondes.

Et bien, mon vieux Galinn, on ne salue plus ses vieux amis ?

Vous… vous vous trompez messire…j’suis juste le vieux… Y a pas de Galinn ici …

L’homme se contenta de sourire et d’approcher une chaise près de la fenêtre puis, d’un geste vif qui fit presque lâcher le verre que Jeannot tenait en main, il attrapa le vieux par une manche, tirant sur le tissu pour révéler un bras qui présentait une curieuse cicatrice en forme de crochet. Le vieux pouvait-il blêmir encore plus ? Il semblait que oui alors qu’il regardait l’étranger au sourire élargi.

Le vieux tourna alors son regard vers le tavernier. Un regard si explicite qu’il ne nécessitait de mots. Jean se dirigea rapidement vers la porte qui menait à la cave qu’il referma derrière lui. Bien sur, s’il n’avait la témérité de s’opposer au vieux et encore moins à un étranger qui pouvait effrayer cet homme, la curiosité était telle qu’il ne fut pas long à coller son oreille au niveau de la serrure.



Mmmh, Galinn. Une taverne miteuse, une bouteille d’hypocras bas prix. Je vois, je vois. L’argent que tu as amassé n’a pas suffit à te sortir de la fange dans laquelle tu es né… et tu te complais

Tu peux m’tuer Artius. Moi j’ai tenu ma promesse… la seule probablement que j’ai jamais tenue dans ma chienne de vie.

Allons, allons, tout de suite les grands mots. Ai-je mentionnée cette sordide affaire où tu as vendu ton groupe et orchestré ta propre mort pour garder ton ….

chhhhttttt…. Pas la peine de parler si fort. Si t’es pas la pour me saigner, pourquoi ?

Mon bon Galinn… comme je te retrouve. Toujours droit au but. C’est bien pour cela que j’ai persuadé le baron d’accepter ton plan. Je savais qu’on aurait besoin un jour de tes services.

….lâche le morceau

Que dirais-tu de reprendre du service? O, rassure-toi rien qui ne soit dans tes cordes. Et je pense même que tu y prendras plaisir. Que dirais-tu de rendre visite à quelques uns de tes anciens compagnons… et même achever quelque travail que tu aurais eu l’indélicatesse de laisser non fini ?


Les mots suivants furent chuchotés aussi Jean ne put entendre que quelques brides sans pouvoir leur donner sens malgré tous ses efforts. Alors qu’il collait un peu plus fort son oreille contre la porte, celle-ci s’ouvrit dans un grand éclat, et le pauvre tavernier se retrouva étalé de tout son long sur le plancher. Il leva la tête, penaud, pour observer le vieux qui se tenait debout. L’homme avait retrouvé ses couleurs et semblait même rajeuni. Il se pencha pour soulever Jean par le col aussi facilement que s’il avait été un gamin de huit ans. Le tavernier ne put s’empêcher un regard circulaire, espérant une aide de l’étranger pour constater que ce dernier était parti, sans un bruit.


Écoute-moi bien le Jeannot. Rien de tout ceci n’est arrivé. T’oublie mon nom, t’oublie le nom d’Artius. T’oublie même m’avoir jamais vu partir. Si tu parles, je te retrouverai et… mon gars… tu regretteras de n’pas être mort.


Jean se contenta de secouer vivement la tête alors que le vieux le reposait sur une chaise. Une bourse bien remplie trônait sur la table.


Tu vois, j’t’avais dit que j’paierai mes dettes. Y en a assez pour acheter ton bouge… et ton silence.


un sourire se forma sur le visage du vieux alors qu’il baissait la manche de sa chemise pour recouvrir son bras et la cicatrice. Il n’ajouta que deux mots avant de quitter les lieux.

Gueule d’Ange…

Jean poussa un troisième soupir, se demandant encore comment cela se faisait qu’il était encore vivant. Soupir qui se changea rapidement en cri de joie lorsqu’il ouvrit la bourse remplie non de deniers mais d’écus sonnants et même de quelques doublons….
Anseis
[Des yeux dans Vendôme]


Le timide soleil d’hiver peinait ce matin là à dispenser sa lumière dans le ciel encombré de sombres nuages.

Ce triste temps cependant ne dérangeait Anseis, bien au contraire. Depuis plusieurs heures il avait pu ainsi suivre dans la plus grande discrétion le petit groupe qui avait parcouru la route qui reliait Le Mans à Vendôme.

Le jeune homme s’étira alors qu’un sourire apparaissait sur ses lèvres. Voilà bien longtemps qu’il n’avait fait cela. Et, tout naturellement, les anciens réflexes étaient revenus. La mince couche de civilisation durement acquise lors des années monastiques suivies des mois passés à Honfleur s’était effacée dès qu’il avait pris la résolution de les suivre.

Le sourire s’effaça cependant rapidement sur le visage du vagabond. Toute cette affaire ne portait à rire, voir l’inquiétait. Alors qu’il avait simplement pensé rester au Mans, dans l’espoir de pouvoir enfin tenir sa promesse, le voilà qui se retrouvait à traquer – seul ! – une bande de brigands. Et surement pas des moindres d’après ce qu’il avait pu observer jusque là. Alors qu’il les regardait s’écarter de la route pour monter leur campement et prendre du repos, Anseis repensait aux derniers événements…

Lorsqu’il avait vu la lueur dans la maisonnette qu’on lui avait indiquée comme étant celle de Téalhis, il avait d’abord pensé à son retour. Une arrivée nocturne qui, il était vrai, aurait pu surprendre venant de quiconque autre. Le jeune homme avait quitté les remparts dans le plus grand silence pour s’approcher mais avait changé ses projets à quelques pas de la maison. Trop de bruit… bien trop. Et ces hommes tout autour dans les ruelles. Il remercia alors le ciel de ses gouts pour les habits sombres qui probablement avaient aidé à rester discret à ce moment là et avait lentement rebroussé chemin. Il ne fallu longtemps pour que les hommes se retrouvent autour d’un qui était ressorti de la chaumière et, après quelques chuchotement de ce dernier, prennent la direction de la grande Porte Sud.

Anseis avait finalement décidé de s’approcher de la chaumière. Un regard en travers de la porte laissée ouverte avait suffit à confirmer ses craintes. Des étoffes jetées à terre autour de multiples parchemins certains enroulés d’autre non. Un grand coffre laissé ouvert. Entrer n’aurait servi à rien, si ce n’est risquer de se trouver attrapé par une quelconque patrouille alertée par le bruit qu’avaient fait les hommes. Avaient-ils trouvé ce qu’ils cherchaient ? Ou bien la cherchaient-ils ?

La décision fut rapidement prise et le muet, s’élançant à leur poursuite, s’était retrouvé à jouer un curieux jeu de chat et souris. Ces hommes n’étaient des novices. Vétérans probablement de batailles, ils avaient adoptés une formation militaire, un veilleur ouvrant la voie, deux autres surveillant les arrières. Plusieurs fois au début, le jeune homme avait eu la crainte de s’être fait repéré. Heureusement, leur vigilance s’était décrue alors qu’ils s’éloignaient de la ville et le reste de la chasse nocturne s’était avéré plus aisé.

Le groupe avait consciencieusement évité toute rencontre durant le trajet. Et voilà maintenant qu’il montait son camp loin de la route principale, semblant vouloir éviter de traverser Vendôme même. Dans un élan de témérité, Anseis s’était rapproché au point de pouvoir entendre les ordres de leur chef. Un homme âgé, sec, qui exsudait cruauté par tous les pores de sa peau. Ainsi apprit-il qu’ils resteraient durant la journée et repartiraient à la tombée de la nuit vers le sud.

N’ayant aucune intention de les observer durant la journée et risquer de se faire prendre durant une sieste, Anseis vint rejoindre la route puis se dirigea vers la cité que ces brigands semblaient vouloir éviter. Vendôme… il l’avait traversé lors de son précédent voyage et savait qu’il pourrait y trouver repos (si, cette fois ci, il arrivait à éviter de se retrouver à accompagner un chien...). Il serait bien temps en soirée de revenir reprendre sa chasse.

Durant le court trajet qui l’approcha de la ville, il ne put s’empêcher de se demander. La cherchaient-ils ? Si oui, pourquoi étaient-ils donc partis si vite et évitaient-ils les villes ? A moins qu’ils n’aient trouvé un parchemin chez elle…

Anseis secoua la tête en fermant légèrement les yeux. Quoi qu’il se fût passé cette nuit, les conjectures ne lui donneraient réponse. Le plus simple restait de suivre le groupe et de découvrir par lui-même. Il étouffa un bâillement en pensant que le plus urgent restait de prendre du repos après cette nuit bien agitée. La nuit prochaine, ainsi que les suivantes, risquaient de l’être autant. Et il valait mieux qu’il soit en pleine possession de ses sens alors qu’il tenterait de continuer à les suivre…

pnj
Vous pouvez oublier les fantômes de votre passé mais eux, soyez-en sur, ne vous oublient pas.

Qui aurait cru qu'elle rentrerait si tôt au Mans ? Ce départ avait été mûrement réfléchi, après tant de questions et de doutes, elle avait fini par prendre la meilleure des décisions qui s'imposaient pour elle et son avenir, pourtant il avait suffi d'une seule missive pour tout changer et la guider derechef vers un passé dont elle se savait maintenant assez esclave pour y replonger tout en sachant pertinemment qu'elle n'en ressortirait pas indemne.
Le temps avait bien fait son œuvre, travaillant insidieusement à faire remonter la frustration, la colère et les souffrances, des entrailles de l'ancienne adolescente. Aujourd'hui, l'entité amère, insensible, au regard sombre terni par des nuits sans sommeil à prier les dieux de l'enfer de lui accorder un peu de répit à ses tourments, remplaçait celle qui avait été jadis complimentée pour sa douceur, sa patience et cet air jovial qui faisait briller ses prunelles …
Ses prunelles ... un rictus ironique vint déformer les fins traits de son visage. Où pouvait bien être l'auteur de ces mots à cette heure tien ? Pauvre bougre, porterait-il les mêmes conclusions si il la rencontrait aujourd'hui ? Un sourire glissa au coin de ses lèvres … Pure Chimère … Ce temps était révolu, elle avait eu beau enfouir au plus profond d'elle même cette autre qui demeurait dans les ténèbres, à présent, elle la sentait évoluer en elle, avilissant lentement le reste de pureté qui demeurait encore. Elle serra violemment le parchemin qui se trouvait dans sa main alors que les remparts s'élevaient au dessus d'elle. Pensées vite chassées et visage de nouveau impassible, elle posa à peine les yeux sur le garde qui se tenait près de la grande porte et dépassa l'enceinte d'un pas pressé en direction de sa maison.

Une petite maisonnette sans prétention aux allures de cabane faite de bois et pierre, rallongée d'une petite dépendance servant d'échoppe, avait pris place non loin des remparts quand elle avait eu assez d'écus. Juste ce dont elle avait besoin, ni plus ni moins, pour lui assurer le confort et la chaleur d'un doux foyer qu'elle avait voulu accueillant et rassurant ... Cela encore il le lui avait pris, constata t' elle en en s'approchant d'un pas léger de la porte qui avait été laissée grande ouverte. Elle s'arrêta à quelques pas de cette dernière, plia les genoux pour se rapprocher du sol et examina attentivement les rares empreintes qui avaient survécu aux intempéries des derniers jours. Les premières traces bien distinctes et peu marquées étaient facilement reconnaissables, une femme d'un poids moyen avait visité les lieux quelques heures auparavant. Certainement celle qui avait découvert l'endroit dans un piteux état et s'était empressée de l'en avertir; Ruthy. A quelques centimètres une autre légèrement plus ancienne et plus profonde, la pluie l'avait grandement effacée, mais on pouvait en définir les contours et supposer que ce fusse celle d'un homme ... de l'Homme.

Le dernier courrier de Ruthy avait fait son effet et cette fois donné quelques réponses à ses interrogations, l'homme qui la cherchait ne pouvait être que celui dont elle appréhendait l'existence. Les questions qu'il avait posées sur elle, portaient à croire qu'il était plus jeune et qu'il la connaissait alors qu'elle était encore de la meute. Un détail qu'elle ne pouvait non plus ignorer, était qu'il portait le nom de son père ... Appuyant son intuition, la scène honnie refit surface le temps d'un souffle.



Six ans plus tôt.

Jetée à corps perdu dans la bataille, les sombres prunelles vides de toutes émotions, elle hume l'odeur du charnier qui s'intensifie au fil des secondes grâce aux cadavres qui tombent sous les coups des plus aguerris. L'arme à la main, elle tranche et empale tout ceux du clan rival, peu importe l'issu, peu importe comment, tuer est le maitre mot ... ses yeux se portent sur lui, un enfant, quelque enjambées, elle peut le sentir, le frôler… d'un geste agile l'épée est à terre, rejointe aussitôt par son propriétaire, il est à sa merci, sous elle, elle s'apprête à planter sa lame quand leur regard se croisent... fatale hésitation … un millième de seconde suffit ... la sensation d'un craquement à peine perceptible puis la douleur. Elle sent le goût du filet de sang qui s'échappe d'entre ses lèvres… Le temps s'est suspendu, à ses oreilles les bruits s'estompent comme si le monde s'était arrêté et retenait sa respiration en attendant le dénouement d'une tragique scène de théâtre, il n'existe plus que cet instant entre elle et lui, puis une reprise furtive de conscience … elle a mal, enlever ce qui la gêne, là, à l'intérieur. Ses mains s'agrippent à la dague et tire, elle sent ses entrailles se déchirer lentement mais reste sereine, sourit même, tout cela n'est que rêve … Ses yeux se baissent sur l'objet ensanglanté puis se plongent à nouveau dans les iris azur de son bourreau avant de laisser échapper de sa bouche le seul nom qu'elle chérit …celui de son père...


Elle était seule, plantée au milieu de la principale pièce de la maison, tenant à s'en blanchir les phalanges le manche de sa dague accrochée à sa hanche. Un coup d'oeil circulaire lui permis de voir qu'il n'y était pas allé de main morte. Ruthy avait trouvé les mots justes dans sa missive, ce qui quelque part l'avait préparé à cette découverte. La maison avait été saccagée, à voir l'état, on pouvait croire que ce n'était que pur vandalisme, mais à la vue des objets qui jonchaient le sol, l'homme cherchait sans nul doute quelque chose … mais quoi ?
Elle se baissa pour ramasser deux trois affaires et les glissa dans son sac. Le reste pouvait bien attendre d'être rangé … plus vite elle partirait, plus vite elle le rattraperait. Quittant les lieux, elle bloqua la porte avec une grosse pierre et s'éloigna sur le chemin des tavernes espérant y trouver son amie pour de plus amples informations.

Sur le chemin quelques badauds conversant devant des affiches attirèrent son attention, piquée par la curiosité, elle ne put s'empêcher de les rejoindre et de parcourir rapidement l'objet de tant d'intérêt … Des poèmes … Avant, elle aurait pu en apprécier la lecture et participer au concours, plusieurs d'entre eux, écrites de sa main, ne tapissaient-ils pas le sol de sa maison à cet instant ? Mais, elle avait changé, tout ça était à enfouir avec celle qu'elle avait fait disparaître. Brusquement sa mâchoire se crispa, son œil attiré par un nom bien précis trônant au dessus d'un des parchemins … Lui même y avait participé, quel homme pouvait bien s'arrêter sur ce genre de futilités et dévaster ensuite une maison ?
Elle prit soin tout de même de lire le poème et surprise de la douceur des émotions qui s'éveillaient à nouveau en elle, les chassa promptement pour laisser libre court à l'animosité ... ainsi, l'homme semblait aimer et était aimé en retour par une femme malgré une union impossible, c'était donc un être humain comme un autre … Soit, il lui avait pris sa vie et privé du seul être cher qu'elle avait aimé, elle lui prendrait également la sienne et lui planterait sa propre dague ... dans le coeur.
Réajustant sa capuche sur la tête, elle reprit sa route vers les remparts, mais pour une destination bien précise ...
Anseis
[Un passage]



Le soleil venait tout juste de commencer sa lente ascension d’un ciel d’hiver délivré de tous nuages. Anseis, les yeux légèrement rougis par la fatigue, resta un instant à admirer l’astre du jour qui habillait les branches nues des arbres de volutes orangées.
Un bruissement – probablement celui d’un lapin ou un quelconque animal le ramena à la réalité. Il observa de nouveau les traces de chausses et bottes qui s’enfonçaient vers un bosquet d’où commençait à s’échapper un mince filet de fumée.

Leur troisième marche nocturne se terminait donc comme les deux précédentes : le petit groupe s’était éloigné des chemins fréquentés pour monter un camp et se reposer en journée. Pourquoi donc tant de discrétion après leur comportement au Mans ?

Comme lors de la nuit précédente, Anseis décida de ne pas s’approcher plus du campement. Ses sombres habits tranchaient trop avec la blancheur de la neige. Par ailleurs, il aurait bien eu du mal à masquer ses empreintes en marchant dans celles de ceux qu’il suivait, eut-il besoin de rebrousser rapidement chemin. Il s’appliqua donc à lentement rejoindre la route principale pour rejoindre la ville qui serait son logis pour la journée. Un léger sourire souleva ses lèvres à la pensée qu’au moins il gagnait en confort et devait être moins fatigué que les membres du groupe qu’il traquait…

Le soleil avait quitté l’horizon et réchauffait de ses rayons la blanche nature lorsqu’enfin il franchit les grandes portes de la ville. A peine avait-il fait trois pas qu’une voix, l’interpelant, le fit stopper sa marche et se retourner.



Le sombre vagabond écouta en silence la jeune femme qui le fixait du regard et commençait sa diatribe

Bien le bonjour, Voyageur et bienvenu à Châteauroux. Je me présente, dame Ealeana, douanière. Veuillez m’excuser mais il m’est nécessaire de vous poser quelques questions concernant …

La jeune femme s’interrompit lorsqu’elle vit que le jeune homme avait ouvert sa besace puis sorti un parchemin pour le lui tendre. Elle s’en saisit, le déroula et commença à le lire.



Anseis observa la grimace se former sur le visage d’Ealeana, puisque c’est ainsi qu’elle se nommait. Souriant d’un air penaud, il continua de l’observer. Allait-elle lui demander de communiquer par geste ou de coucher les informations par écrit ? Ou bien les choses se compliqueraient-elles comme cela arrivait parfois ? Il failli mimer la grimace de la jeune femme, espérant qu’au moins il ne finirait dans une sombre geôle.
Anseis
[Révélation]

A peine avait-il passé les portes de la ville que le jeune homme s’était dirigé vers les remparts. Il savait que la nuit de marche ne l’avait cette fois-ci fatigué assez pour lui permettre de prendre repos…du moins pas de suite.

Les remparts de Guéret. Il les avait parcourus - patrouillé même – lors de sa dernière visite de la ville, alors qu’il effectuait le voyage en sens inverse. Un frisson naquit à la base de son dos et remonta rapidement jusque dans sa nuque alors qu’il prenait place sur un créneau, son regard se tournant vers l’horizon. Un frisson qui n’était malheureusement du à la fraicheur matinale de ce jour de février.

Cette idée qui avait juste effleuré son esprit lors du début de la traque semblait se concrétiser un peu plus chaque jour. Il avait espéré qu’ils continueraient leur route vers le sud, que tout ceci n’était que coïncidences. Mais non, au petit matin, la petite troupe avait bifurqué vers l’est juste avant d’atteindre Guéret. Tout portait donc à croire que leur destination était bien la ville de Montluçon.

Qui était donc cet homme ? Et que cherchait-il ?

Sans même y prêter attention, le jeune vagabond repoussa la mèche de cheveux qui était retombée au niveau de son front. Portant à sa bouche une longue tige d’herbe qu’il avait ramassée avant d’entrer dans la ville, il appuya son dos contre la pierre froide du merlon.

Pour la première fois depuis le début de cette étrange poursuite, l’homme prenait le temps de réfléchir aux changements apparus ces derniers jours. Changements qui à la fois émerveillaient la part d’enfant qui n’avait jamais pu grandir et qui sommeillait en lui, et effrayaient le jeune adulte qu’il était devenu. Chaque soir, alors qu’il s’approchait de leur campement, Anseis laissait tout naturellement place à « l’Œil » alors que la traque commençait. De la nuit qui s’écoulait, il ne gardait que souvenirs confus : odeurs, bruits, sensations. Et ce n’est que lorsque l’aube éclaircissait enfin l’est, annonçant le déclin des cieux nocturnes, qu’il redevenait enfin maitre de son corps. Il avait pu s’en rendre compte lors de cette malheureuse expérience à Honfleur ou encore durant son passage en Touraine il y a maintenant plusieurs mois de cela. Il ne pouvait contrôler ni vraiment choisir ce changement. Seule la nécessité semblait le provoquer. Mais… quelle nécessité ?

Anseis continuait de fixer d’un regard vide l’horizon que le soleil avait maintenant quitté depuis plusieurs heures. Toutes ces questions resteraient sans réponses et au fond importaient bien peu. Alors qu’il serrait sa médaille de baptême, il ne pouvait s’empêcher de penser au proche futur. Ce forgeron … Nehwin. Il était probablement la prochaine cible de ce groupe. L’homme était habile, adroit et son travail à la forge lui avait permit d’entretenir sa force. Mais que pourrait-il contre cette bande de coupe-jarrets qui, quoique encore plus âgés, avaient montré leur expérience tout le long de la traque ?

Le muet posa ses mains contre les bords du créneau pour se relever et rejoindre le chemin de ronde. Il ne pouvait de toute façon prévenir Nehwin et, malgré ses doutes et son instinct, il n’avait aucune assurance. Il restait condamné à les suivre et … agir … s’il n’y avait d’autre choix. Son regard se posa sur sa besace. Un maigre couteau… face à une bande de guerriers aguerris. Pourtant, il n’avait le courage d’acheter une épée. Quelles seraient les conséquences si la bête reprenait le contrôle alors qu’il était armé ?

Un nouveau frisson le parcouru alors qu’il rejoignait prestement les marches de pierre. Qu’il le ressente ou non, il savait que son corps avait besoin de repos et qu’aucune des questions qui traversaient son esprit ne trouverait réponse. Il devait dormir pour reprendre la traque le soir même. Au moins l’accueil qu’il avait trouvé chaque jour dans un monastère ou une auberge lui avait-il permis de conserver ses forces. Il ne devait en être de même pour les vétérans qu’il pourchassait, aussi endurants soient-ils, et qui devaient se contenter d’un inconfortable campement.
pnj
[Quelque part sur les remparts]




La nuit était tombée sur la ville d'Argentan. La lune, mystérieuse et solitaire, trônait au milieu d'un ciel sans étoiles, ses fragiles rayons glissaient sur les ruelles, caressaient les toits et venaient s'accrocher nonchalamment sur les murs des chaumières dont l'ombre s'étendait sur les pavés, plongeant ainsi les rares coins illuminés dans la pénombre. Le murmure de la brise avait remplacé les cris, les rires et le vacarme incessant qui s'élevait des forges et échoppes, durant le jour. La nature avait lentement repris ses droits veillant et laissant libre cours aux hommes de s'enfoncer paisiblement dans la douce ivresse des rêves.

Fuyant le sommeil, elle était là, adossée aux pierres, sur le chemin de ronde, le regard posé sur l'oiseau nocturne qui ne cessait d'aller et venir, devant elle, dans un vol rapide et léger à la fois. Sur ses lèvres naissait un sourire d'une douceur enfantine -tendre élan vers celui dont elle enviait la liberté-.

Deux jours qu'elle était sur les routes, ne s'arrêtant que par nécessité, deux jours de profonde mélancolie où les lointains souvenirs avaient nourri sa colère et cultivé sa haine envers celui qui l'attirait inéluctablement vers lui. Pourtant, ce soir, elle se sentait apaisée, comme si chacune des deux parties de son âme, après des heures de lutte acharnée, avait conclu un pacte afin de cohabiter et lénifier son esprit. Ô, elle ne doutait en aucun cas que celle qui se délectait de ses angoisses reprendrait le dessus le jour où elle le retrouverait, mais pour l'instant, elle se satisfaisait pleinement du sursis octroyé.

Soudain, comme s'il eut voulu par cet action dissiper ses mornes pensées et la ramener à la réalité, l'oiseau vint se poser près d'elle pour s'envoler aussitôt vers l'horizon. Elle le suivit des yeux jusqu'à ce qu'il disparaisse englouti par les ténèbres, puis se hissa sur le créneau et s'assit face au disque astral, jambes repliées sous elle.

Les missives se cumulaient dans sa besace, ce n'était pas des missives comme elle aimait en recevoir, non, celles-ci la sommaient de quitter le duché séance tenante. A son dernier voyage, elle s'était également confrontée à cet accueil charmant ; Les frontières étaient fermées et leur accès n'était autorisé que sur présentation d'un laissez passer. Il lui fallait donc, à nouveau, s'atteler à remédier au fait qu'elle n'était pas la bienvenue dans les environs. Attrapant sa besace, elle l'ouvrit et plongea sa main à l'intérieur pour y attraper plume, encre, parchemins vierges et la carte du royaume -En effet, son voyage la guidait vers d'autres duchés, probablement qu'elle aurait à y justifier sa présence. Elle coucha plusieurs lignes d'une fine écriture sur le vélin, s'appliquant à réitérer l'acte sur plusieurs feuillets.

Lorsqu'elle eut fini, la nuit était déjà bien avancée, elle rangea soigneusement son matériel d'écriture dans son sac de toile et baissa la tête pour constater que les portes de la grande muraille étaient encore ouvertes, une chance pour elle qui souhaitait atteindre sa destination au plus vite. Quittant son fauteuil improvisé, elle posa la lanière de sa besace sur son épaule, resserra le fil de lin qui retenait la masse sombre et bouclée de sa chevelure qu'elle cacha ensuite sous sa capuche et quitta les remparts en direction de la sortie nord de la ville.
Anseis
Etrange Retour


Alors qu’il franchissait la grande porte Saint Pierre, le vagabond ne put retenir le soupir qui s’échappa de ses lèvres. Jamais n’avait-il pensé revenir aussi vite dans cette ville. Ville qu’en tout honnêteté il aurait préféré éviter.

Mais les doutes des premiers jours de traque s’étaient transformés en craintes puis, le matin même, en assurances. Le petit groupe qu’il suivait maintenant depuis plusieurs jours avait établi son campement à quelques lieues de la ville fortifiée au lieu de continuer son chemin. Un changement qui ne trompait guère sur leurs intentions.

Le jeune homme le savait maintenant. Quelles que soient ses réticences il se devait de prévenir le forgeron – et le questionner plus sur son rôle. Aussi ne ralentit-il le pas que lorsqu’il se trouva à proximité de la forge. Les lieux étaient vides de tout occupant, ce qui n’était guère étonnant si l’on prenait en compte l’heure tardive. Pourtant, quelque chose surprit Anseis, au point qu’il n’hésita à enjamber le portillon. Quelques pas suffirent à l’homme pour s’approcher de l’âtre. Il plongea la main pour attraper un résidu noirci.

Comme c’était souvent le cas, une grande partie de la forge était ouverte permettant une meilleure aération lors du travail des métaux. Cette ouverture avait pour effet de créer un courant d’air dans les lieux, ce qui ne gênait aucunement lorsque l’âtre chauffait activement. La nuit, les courants d’air faisaient s’envoler les plus légères cendres, offrant un rudimentaire nettoyage. Il fallait cependant plusieurs jours avant que la moindre cendre ne disparaisse.

Anseis écrasa le morceau de charbon entre ses doigts. S’il ne se trompait pas, cette forge n’avait été utilisée depuis au moins une semaine. Il s’approcha de la porte de bois qui menait vers la remise et le reste de la maisonnette. Fermant les yeux, il resta un instant à écouter. Aucun son…

Quelques minutes plus tard, le vagabond se retrouvait à raisonnable distance de l’échoppe appuyé contre le mur d’une maison quelconque, yeux levés au ciel. Il avait pu reconnaitre, parmi les rares personnes encore dehors, quelques un des hommes qu’il avait pistés. Une bonne chose était qu’ils ne semblaient lui avoir porté la moindre attention. Une moins bonne était que, peu à peu, leur marches nonchalantes semblaient se concentrer au niveau de la forge de Nehwin.

Il était temps pour Anseis de trouver un lieu un peu plus discret pour observer la scène tout à loisir. Il savait, après l’expérience du Mans, qu’ils n’agiraient probablement que tard dans la nuit voir au petit matin. Mais, aussi insensible au froid qu’à l’impatience, il ne voyait inconvénient à se préparer dès maintenant, évitant ainsi d’attirer trop l’attention. Il se repoussa donc du mur pour commencer une marche assez rapide, tête baissée. Marche qui le conduirait de l’autre coté de la rue marchande… là où il pourrait escalader le mur d’une maison limitrophe à la forge pour en rejoindre le toit.

Une heure, puis deux passèrent. Les rues avaient continué de se vider au point que seule l’étrange troupe se trouvait autour de la forge. Du haut de son perchoir, une ombre noire observait ces hommes qui s’apprêtaient à réitérer le saccage d’il y a quelques nuits. Une ombre qui se demandait bien ce qu’elle ferait si les choses tournaient mal.
Anseis
[Déchirements]



Debout, un pied sur un créneau, l’autre flottant dans le vide. Ni cette position instable, ni même le vent qui agitait son mantel ne semblaient inquiéter l’homme qui gardait ses mains dans le dos.

Sa capuche, cachant une partie de son visage, se soulevait parfois pour laisser apparaitre deux yeux durs qui ne cillaient. Ils se contentaient de fixer un point à l’horizon. Un point qui, pour quiconque un tant soit peu observateur et ayant quelconque intérêt à s’y intéresser, aurait révélé un très mince filet de fumée à peine visible à la lumière déclinante du jour.

Anseis savait qu’il pourrait rester une nuit de plus dans Montluçon. Malgré le saccage qu’ils avaient renouvelé dans la forge de Nehwin ainsi qu’ils l’avaient fait dans la petite maison du Mans, ils avaient décidé de ne se déplacer. Nul doute que les marches nocturnes ainsi que l’inconfort du campement commençaient à se faire ressentir.

Pourtant fort de cette assurance depuis maintenant plusieurs heures, le vagabond se contentait de fixer ce mince filet de fumée sans un mot ni un geste. Avec la même froideur dont il avait fait preuve la nuit précédente.




Quelques heures plus tôt – dans la nuit du 19 au 20 février

Allongé à même la toiture, il continuait d’observer. Il avait regardé sans broncher ces vétérans continuer de patrouiller autour de la forge et dont la seule présence suffisait à éloigner éventuel curieux ou encore soulard qui se serait dirigé dans les environs. A peine avait-il remué la tête lorsqu’il avait reconnu le « chef » dans son grand mantel qui, sans une once d’hésitation, avait brutalement poussé le portillon qu’Anseis avait enjambée durant la soirée. Le craquement sec du bois alors que le portillon s’affalait n’était que les prémices de la brutalité qui ensuivit.

Bruit de métal qui s’écrasait contre la porte de la remise. Une fois, deux fois… jusqu’au grand craquement annonçant la capitulation de la porte dans cette vaine lutte.

L’œil ne cligna, ni l’oreille ne se boucha. Le vagabond continua sa silencieuse sentinelle alors que revenaient en lui les souvenirs d’il y a quelques nuits. La petite fenêtre de l’étage, faiblement éclairée par la chandelle que le vieux brigand avait allumée lui offrait aperçu de la scène qui se jouait. Cette brute ne se contentait seulement de vider coffres et tiroir à même le sol. Il semblait prendre plaisir à écraser et disloquer la moindre babiole, alors qu’un sourire carnassier se formait sur son visage enfin dévoilé.


Les poings d’Anseis se serrèrent alors que chaque pore de sa peau le lui rappelait maintenant : il ne bougerait pas. Il était un œil, il était leur chef. Ne pas gaspiller sa vie inutilement, juste observer et rapporter…. Que tout ceci soit fini, bien loin de lui ne changeait rien : Il ne bougerait pas. Il était un œil, il était leur chef …

Dans le silence il avait regardé l’homme remonter sa capuche avant de quitter les lieux et, levant les yeux au ciel s’écrier en guise de menace.

Où donc te caches-tu Gueule d’Ange ? Chez quelle catin que tu as engouaillée avec ton langage fleuri ? T’inquiète p’tit gars. Ton tour viendra… ce n’est qu’un avertissement. La prochaine fois, je te trouverai et tu gouteras de ma lame.

Baissant son regard, le vieux chef avait ajouté à mi-mot pour les hommes

On dégage pour l’instant. Direction Thiers pour retrouver celle qui se nomme Bête …



Anseis avait attendu qu’ils repartent dans la nuit avant de les suivre. Ce n’est que lorsqu’il avait vu qu’il prenaient la direction de la porte Saint Pierre qu’il comprit qu’ils prendraient probablement un jour de repos – si ce n’est plus – dans leur campement. Lui-même avait rejoint les remparts pour confirmer ses suspicions. Il avait passé une bonne partie de la journée sur les remparts pour continuer son guet. Il prenait grand risque à rester ainsi visible. Plusieurs l’avaient vu la dernière fois en compagnie de Nehwin et, saurait-on qu’il était présent ici l’accuserait-on assurément du pillage de la nuit. Pourtant peu importait au jeune homme. Cette honte d’avoir observé sans agir. Quand bien même toute action aurait été inutile, quand bien même il n’aurait eu aucune chance contre cette bande de coupe jarrets – à 7 contre 1 ! – il ne pouvait empêcher le remord de le ronger, au point de mordre de nouveau sa lèvre inférieure, jusqu’à ce que quelques perles pourpres coulent le long de son menton pour s’écraser sur le créneau ou encore se perdre dans le bas des remparts.

Il semblait cependant que sa bonne étoile veillait sur lui, et c’est à peine si les miliciens avaient reconnus sa présence d’un hochement de tête auquel il ne répondit pas.

Père…pardonnez-moi…

Il ne devait agir, il devait d’abord donner cette lettre. Pour son père, pour elle. Il était un œil, il était leur chef…

Et l’œil qui s’était fait statue ne cessa d’observer alors que la nuit étendait son manteau sur la ville.
pnj


[Dans la soirée du 20 Février 1457 - Forge de Nehwin]


Après son travail à la mairie bien chargé encore une fois, il se faisait tard elle se décida enfin de quitter son bureau, une seule idée l'avait préoccupée toute la journée la forge se rendre à la forge de Nehwin...

Elle enfila sa cape, bien couverte pour traverser les ruelles, elle avait remonté sa capuche, la froideur des soirées piquaient encore la peau...Elle arriva dans la rue des lombards bien qu'il était tard, des échoppes étaient encore ouverte elle salua les artisans croisés sur son chemin d'un sourire ou d'un signe de main pour certain..

Une boule au ventre, la gorge serrée, se demandant ce qu'elle allait y trouver, si le p'tit Thibaud était encore là bas depuis le temps que Nehwin n'y était plus, le mouflet avait du partir voir ailleurs...

Elle arriva devant la porte celle ci semblait ouverte étrange le gosse serait il encore là...Elle la poussa doucement grincement des gonds...Elle était peu rassurée il faisait froid, un moment que le four ne tournait plus...Il faisait noir on y voyait pas grand chose du pas de la porte elle appela Thibaud...

Thibaud tu es là...C'est Seve...Thibaud...

Aucune réponse pas un bruit sauf quelque petit bruit des rats certainement...Elle pénétra avec la peur au ventre trouva une forge sans desssus dessous...Qu'avait il bien pu se passer ici ??
Elle regarda autour d'elle un chaos...Qui avait fait ça ?? Des brigands ?? Des gosses du villages ?? Impossible les gosses avaient bien trop peur du forgeron pour lui faire une blague comme ça...Vu l'ampleur des dégâts c'est comme si on avait cherché quelque chose...

Que se passait il ici ?? Qui en voulait à son tendre pour lui faire ça ?? Elle ressortit aussitôt à la recherche de renseignement, les Montluçonnais étaient curieux, ils avaient bien dut voir ou entendu quelque chose...

Elle resta près de la porte observa et vu une jeune femme habitant à coté de la forge elle avait certainement m'en vu les gens qui avaient fait ça...Elle s'approcha d'elle...

Bonsoir Demoiselle, excusez moi je suis Seve la fiancée du forgeron et je viens de voir que ça forge a été pillée...Avez vous vu quelque chose cette nuit ou même avant ??

La jeune fille peut rassurée...Certainement se demandant ce que elle lui voulait, elle était si furieuse Seve que sa voix était peu aimable...

'Jour Dame, euh...J'ai entendu oui mais il faisait nuit c'était cette nuit, j'ai vu un groupe d'homme...Mais j'en sais pas plus dame promis..

Elle remercia la demoiselle en lui tendant une piécette...La salua puis partie en courant vers les remparts demander aux gardes si ils avaient vu un groupe...Et si c'était ce Anseis lors de son passage il était étrange...Il connaissait Neh mais ils avaient pas l'air amis...Si c'était lui revenu pour le tuer..Avec un groupe...Prise d'un coup de folie elle fila aux remparts fallait les retrouver...
pnj


[A la recherche d'un groupe - Les remparts]


Elle avait parcourue la rues des lombards direction porte Saint Pierre..Essoufflée elle avait montée les marches...Longeant les tours à la recherche de Célestin, croisant des soldats mais prise dans sa course elle s'arrêta pas ni pour les saluer, ni pour les questionner...Ils la regardaient bizarrement bien que certain la connaissait, ils étaient pas si étonnés de la voir ainsi...

Elle regarda à droite à gauche...Mais ou il était encore celui la pas le moment de cuver ou de dormir dans un coin...Au loin pratiquement à l'autre bout elle l'aperçu le Célestin...Elle courut vers lui...Manque de souffle qu'elle reprit...

Célestin j'ai besoin de toi mon vieux...Pendant tes gardes tu aurais pas vu un groupe d'homme rentrer et ressortir...Dis moi...Aide moi...Nehwin est en danger j'en suis sur...

Panique, peur, angoisse, colère tout ses sentiments se mélangeaient...Les larmes au bord des yeux...Mais qu'elle ravala bien vite elle montrait jamais ses sentiments et encore moins devant ses collègues de rempart...

Célestin compris qu'il devait aider au plus vite, il commençait à bien connaitre la maréchale il se mit à réfléchir et annonça ceux que Seve redoutait, le demoiselle avait pas mentie...

Si M'dame Seve un groupe d'homme âgés est entré dans le village mais je ne les a pas vu repartir...M'dame Seve...

Si ils étaient pas repartis ils devaient camper quelque part dans le village...Elle remercia bien vite Célestin et repartie aussitôt il lui fallait de l'aide maintenant, elle pouvait pas continuer toute seule. A plusieurs ils auraient plus de chance d'en savoir plus sur ce groupe...De pourquoi ils avaient mis sans dessus dessous la forge...

Pourquoi ils recherchaient Nehwin...Pourquoi ?? Toujours autant de question sans réponse...Qu'avait il bien pu faire par son passé...Certainement des choses pas bonne elle en avait plus le doute...

Seul Héri et Sakura pouvaient l'aider...Une course folle s'annonçait elle devait pas les laisser repartir de Montluçon...Le passé de Nehwin devenait son affaire...Elle laissera rien passée...Elle pensait à lui espérant que là ou il pouvait de retrouver il soit en sécurité...Elle le connaissait rien ne lui faisait peur...Mais seul façe à ce groupe...

Elle reprit la direction de son quartier, du quartier de Sakura et Héri...
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